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décernerait une couronne civique pour le consoler d'une injuste proscription: mais ceux qui ont suivi la marche de la révolution seront convaincus de l'impossibilité de réussir dans un tel plan, et le considéreront comme un digne pendant à sa course romanesque en Hollande.

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d'applaudir aux intentions du général; et on lui | n'était pas une circonstance moins blâmable de sa transaction. Quel titre l'armée impériale pouvaitelle avoir à réclamer des sûretés au moment où son adversaire s'en allait à Paris; et qu'avait-elle dans ce cas à redouter de lui? Il semblait bien plus naturel que l'armée française, abandonnant ses frontières à la merci de ses adversaires en armes, pour aller frapper des coups d'État d'un intérêt commun, obtint des garanties pour son territoire, plutôt que d'être appelée à en donner.

Au surplus, ce plan ne fut point exécuté, comme chacun le sait. Dumouriez avait pris, le 28 mars, avec son corps de bataille, un camp à Antoing sous Tournay; Leveneur occupait celui de Maulde avec l'armée des Ardennes; on avait assigné à Neuilly la position de Nimy sous Mons, mais la nouvelle que cette division, après avoir pillé les magasins, venait de s'enfuir jusqu'à Valenciennes, nécessita d'autres dispositions. Le général ayant d'ailleurs appris vers le même temps que le corps de Hollande, au lieu de tenir le camp de Harlebeck, rentrait par bandes désordonnées à Dunkerque, Cassel et Lilie, dut renoncer à tenir les camps projetés sur le territoire ennemi; il se replia, le 30, à Bruille, se liant à la position de Leveneur à Maulde par trois points de communication.

Ce fut à Ath, le 27 mars, que Dumouriez, dans une seconde conférence avec le colonel Mack, s'ouvrit à lui pour l'exécution de ses projets; ils convinrent verbalement « que l'armée française >> resterait encore quelque temps sur la frontière » à Mons, Tournay et Courtray, sans être inquié »tée; que le général Dumouriez, jugeant quand il » serait temps de marcher sur Paris, réglerait les >> mouvements des Impériaux qui n'agiraient que » comme auxiliaires; que s'il n'avait pas besoin de >> secours, ils resteraient sur leurs frontières, et » que l'évacuation totale de la Belgique serait le prix de cette condescendance. S'il ne pouvait pas opérer seul le rétablissement d'une monarchie >> constitutionnelle, il indiquerait lui-même le » nombre et l'espèce de troupes dont il aurait be» soin. Enfin, il fut décidé que pour lier les opéra>>tions de l'armée de Cobourg avec celle de Hohen>> lohe, entre Meuse et Moselle, la place de Condé » serait remise aux Autrichiens pour leur servir de » garantie; qu'ils y tiendraient garnison, mais >> sans droit de souveraineté, et sous condition qu'elle serait rendue à la France après la guerre » et après le règlement des indemnités. Enfin, tou»tes les autres places, si le parti constitutionnel » était dans le cas d'avoir besoin de secours, rece>> vraient garnison moitié française moitié allemande, et sous les ordres des Français. Le duc de >> Chartres, les généraux Valence, Thouvenot, et le » colonel Montjoie assistèrent à cette conférence. » Nous l'avons déjà dit, de telles stipulations avec un simple colonel d'état-major autrichien, dénué de pouvoirs, non-seulement de toutes les grandes puissances intéressées, mais même de son propre cabinet, font peu d'honneur à l'habileté diplomatique de l'ex-ministre des affaires étrangères; elles eussent été à peine pardonnables à un soldat par-les commissaires de la convention, proclamer les venu. Il est curieux, en effet, de voir Dumouriez poser en principe avec Mack que la France serait tenue à des indemnités; et la remise de Condé

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Le premier soin de Dumouriez fut de s'assurer des commissaires de la convention qui se trouvaient sur différents points des frontières, et qui s'étaient mis en état hostile contre lui; Lequinio, Bellegarde et Cochon exerçaient une grande influence à Valenciennes; Ferrand y commandait, et les esprits y étaient prononcés pour la république : toutes les mesures pour s'en emparer furent déjouées, et les troupes envoyées à cet effet furent aisément converties par des hommes sûrs de leurs succès en parlant aux soldats d'attachement à la patrie. Ce mot exerçait un pouvoir magique sur les Français, et ce fut en l'invoquant que des ambitieux qui en connaissaient l'influence, leur firent opérer des miracles pendant plusieurs campagnes.

Miaczinsky, détaché sur Lille avec une division pour occuper cette forteresse importante, arrêter

principes constitutionnels et s'avancer ensuite sur Douai et Cambrai, se laissa grossièrement tromper par Sainte-Georges, colonel d'une légion

franche, qui l'attira avec une faible escorte dans la place, où il fut aussitôt arrêté. Devaux, chargé de ramener les troupes de Miaczinsky errantes sans chef, ne fut pas plus heureux que lui; tous deux expièrent leur imprudence en portant leur tête sur l'échafaud.

la suite inévitable des événements. Dumouriez mérita aussi peu les hommages qu'on lui rendit comme au plus grand capitaine de son temps, que les poursuites dont il devint bientôt l'objet. A peine a-t-il quitté les plaines de Neerwinden que de toutes parts les clameurs s'élèvent contre lui; Miranda écrit à Pétion qu'il commence à soupçonner la trahison, à laquelle le ci-devant maire de Paris avait déjà attribué les revers d'Aix-la-Chapelle; bientôt les jacobins accusent leurs adversaires d'avoir nourri dans leur sein l'homme ambitieux qui allait livrer la république à ses plus cruels ennemis. Il importe, disent-ils, de former une enquête sur les graves délits qu'on lui reproche, afin de pouvoir lui rendre la confiance de l'armée, ou le punir, s'il l'a mérité. Les députés Carnot, Lamarque, Camus, Quinette et Bancal, tous pris au sein de la société jacobine, sont chargés de se rendre au quartier général pour suspendre le prévenu de ses fonctions: ils sont accompagnés du ministre de la guerre, Beurnonville, à qui probablement on destine l'honneur périlleux de le remplacer. Le mal est immense, la frontière dégarnie est ouverte, les places, qu'après les succès du mois de novembre, on avait presque jugées superflues, se trouvent négligées et dépourvues; l'armée, en proie à l'indiscipline, à l'esprit de parti, au découragement, semble incapable d'op

Après ces tentatives si mal conduites, Dumouriez tourna ses regards vers Condé; une place lui semblait indispensable pour assurer les subsistances à ses troupes et les maintenir dans l'ordre. On a pensé, avec quelque raison, que dès qu'il cut terminé ses arrangements avec Mack, son parti étant bien arrêté, il aurait dû se mettre en marche sur-le-champ vers Paris, sans s'amuser à de futiles accessoires, la rapidité, l'étonnement et la surprise étant les seules chances de succès qu'il eût en sa faveur. Au reste, ce reproche repose entièrement sur des hypothèses, et peut-être que Dumouriez n'eût pas trouvé beaucoup de régiments disposés à le seconder, ou à lui obéir dans cette entreprise. Il ne tarda pas, en effet, à se convaincre qu'il n'est pas si facile qu'on le croit de tourner les armes des soldats français contre leur patrie; les divisions de Dampierre, au Quesnoy, de Chancel, sous Condé, de Rosière et Kermoven, à Bruille, s'empressaient de traiter avec les députés de la convention, et de protester de leur attachement à la république et à ses autorités constituées. Stet-poser aucune résistance à l'ennemi, et la tâche de tenhofen et Leveneur en faisaient autant de leur ces commissaires investis du pouvoir absolu, comme côté, et tout présageait que le chef de parti, bien- de la responsabilité du salut public, n'était pas une tôt abandonné, se verrait réduit à fuir avec quel- faible besogne. ques affidés. Cependant, le général espérant être plus heu-bitres du sort de Dumouriez, était le pronostic le

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Le choix seul des hommes appelés à être les ar

plus évident de celui qu'on lui réservait; en vain leur adjoignit-on Beurnonville, partisan assez connu du général, c'était une amorce tendue pour ne pas éveiller ses soupçons. Mais on jugea mal de sa pénétration, il ne fut pas dupe un moment de cette supercherie; convaincu qu'on en voulait à sa liberté ou à sa vie, il ne balança pas longtemps sur le parti qu'il avait à prendre.

Ces députés, arrivés inopinément, le 2 avril, à son quartier général de Saint-Amand, avaient une mission trop positive pour ne pas produire une explosion; ils devaient faire partir Dumouriez pour aller à la barre se justifier, et en cas de refus, le suspendre de ses fonctions. Après de longues et

inutiles récriminations, Camus interpellant le gé- | gent répandu par les jacobins, et plus que tout néral au milieu de son état-major, et n'en recevant cela l'amour de la patrie, achevèrent bientôt de que des refus, ordonna son arrestation et la saisie lui aliéner les esprits. de ses papiers le coup était prévu, les hussards de Berchiny, en bataille devant la maison, firent entrer un piquet, et saisirent les députés et le ministre de la guerre, qu'ils conduisirent au quartier général autrichien. Dumouriez n'ayant aucune place à sa disposition, et les considérant comme des otages aussi utiles pour lui que pour les prisonniers du Temple, n'aurait pas su dans le fait quel autre parti adopter.

Carnot, retenu à Douai, et n'ayant pu suivre ses collègues, échappa comme par miracle à leur sort commun. Cette circonstance eut des suites importantes pour la république, qui eût été privée sans cela des services signalés que ce député lui rendit quelques mois après.

Les événements se pressaient avec une telle rapidité que, sans vouloir entrer dans les détails de cette catastrophe, on a de la peine à les suivre. Dumouriez, sentant la nécessité de s'assurer des dispositions des troupes après ce coup d'éclat, se rend, le 3 avril, au camp, où il trouve partout le même accueil; rien ne décèle que la foudre est suspendue sur sa tête; on applaudit même à ses résolutions.

L'armée française était violemment agitée, et sa position vraiment embarrassante; balottés par leur attachement au vainqueur de Sainte-Menehould et de Jemmapes, et par le bruit sinistre qu'il était d'intelligence avec l'ennemi, les soldats ne savaient qu'en croire. Leur amour-propre se voyait en quelque sorte intéressé à trouver dans sa défection un palliatif à leur défaite; d'un autre côté, si la trahison était l'ouvrage de ses ennemis, combien ne serait-il pas injuste d'abandonner le seul homme qui eût su jusque-là les conduire à la victoire? Aussi, une bonne partie des troupes de ligne lui resta fidèle jusqu'au dernier moment, malgré ses entrevues avec les généraux autrichiens. La déclaration de son plan n'eût rien même qui les effrayât, parce qu'on y entrevoyait des ménagements du moins apparents pour les intérêts de la France. Cependant, les adroites insinuations des commissaires, le grand nombre de prosélytes que l'égalité et la république avaient faits parmi les subalternes, l'ar

Le 4, Dumouriez devait avoir une entrevue avec l'archiduc Charles, le prince de Cobourg et Mack, entre Raisme et Condé, afin d'aviser aux derniers arrangements; il était parti de Saint-Amand pour s'y rendre, quand il rencontra à Doumet 3 bataillons marchant sur Condé, sans qu'il en eût donné l'ordre. Il voulut leur prescrire de rebrousser chemin, mais des cris tumultueux partis des extrémités de la colonne lui annoncent qu'on veut l'arrêter; adossé à un canal, il ne lui reste d'autre ressource que de le franchir, et les volontaires qui ne peuvent l'atteindre, font sur lui une décharge de mousqueterie à laquelle il n'aurait pas dú échapper. On court, on s'empresse, d'un côté pour lui couper la route du camp de Bruille qu'il voulait regagner, de l'autre, pour le cerner. Forcé de longer l'Escaut sous une grêle de balles, il passa enfin le rivière au bac de Wihers pour regagner Bury, d'où il informa le colonel Mack des motifs qui lui avaient fait manquer le rendez-vous.

Le général avance, dans ses Mémoires, que les troupes du camp, indignées de cet attentat, le demandaient à grands cris, mais qu'il était trop tard pour s'y rendre, et il prétend que cette circonstance seule fit échouer son plan; la tournure des événements autorise à penser le contraire.

Le général passa la nuit à rédiger avec Mack les projets de proclamations qu'il devait publier, de concert avec le prince de Cobourg, pour fixer les esprits sur les véritables motifs de leurs transactions. Ces pièces sont consignées dans les journaux du temps, et n'offrent aucune circonstance remarquable: celle de Dumouriez était un violent manifeste : celle du prince, imprimée à la suite, déclarait aux Français <«< qu'il venait simplement >> comme auxiliaire, que l'intention de son souve» rain n'était pas de faire la moindre conquête, » mais de ramener la paix et l'ordre, et d'y coo» pérer avec le général français, dont il approu>> vait les principes exprimés par la proclamation. »

Le lendemain matin, Dumouriez se rendit avec 50 dragons autrichiens au camp de Maulde; en vain affirme-t-il qu'il y fut tendrement reçu, on ne saurait se dissimuler l'impression fàcheuse que ce

cortége fit sur l'esprit des soldats. Voulant se rendre de là à Saint-Amand, il apprit que l'artillerie était en pleine insurrection; qu'après avoir envoyé des commissaires à Valenciennes, elle avait chassé ses généraux, et qu'elle attelait pour se réfugier dans cette place. Le capitaine Songis, qui s'acquit dès lors une juste réputation, fut, dit-on, un des principaux instigateurs de ce mouvement patriotique.

Le signal était ainsi donné aux troupes de ligne sur lesquelles l'arme de l'artillerie exerçait une juste influence, tant par le choix des hommes, que par l'instruction nécessaire aux officiers. Son exemple fut bientôt imité; à peine la nouvelle de la défection est-elle parvenue aux deux corps de Bruille et de Maulde, que bataillons, régiments, brigades, partent les uns en entier, les autres par détachements, et se rendent à Valenciennes. Vouillé, qui commandait l'avant-garde, n'eut que le temps de gagner Tournay, son corps suivit l'exemple des autres. Dumouriez, abandonné, retourna au quartier général autrichien, où il ne fut suivi que par les hussards de Berchiny, aux ordres du colonel Nordmann, brave militaire, qui s'était trop avancé pour reculer, et qui suivit son chef avec le régiment qu'il commandait et un escadron

de Saxe.

Ainsi finit la carrière orageuse d'un homme auquel il serait injuste de refuser des talents, des connaissances variées, un grand caractère, et qui rendit des services signalés à la France en 1792. Entraîné par des passions impétueuses, à une époque où un vertige exaltait toutes les têtes, on ne peut le juger d'après des règles ordinaires. Nous en avons déjà trop dit sur son compte pour avoir besoin de nous étendre sur ses qualités et ses défauts. Il jugea mal la situation de la France, sous le rapport politique, en contribuant à la déclaration de cette effroyable guerre, dont le succès fut indépendant de tous les calculs humains; il la jugea plus mal encore en comptant sur la neutralité anglaise. Ses opérations stratégiques furent constamment fausses, excepté dans l'Argonne : mais nous croyons, comme lui, qu'en temps ordinaire il eût été bon ministre et général capable.

CHAPITRE XV.

Défensive des armées françaises sur la frontière du Nord. Dampierre est tué en voulant débloquer Condé. Affaire de Famars. Siége et prise de Valenciennes.

La nouvelle de la défection de Dumouriez causa à Paris une sensation d'autant plus forte qu'on crut d'abord qu'il avait un grand parti, et qu'elle fut accompagnée de l'insurrection de la Vendée, de la défaite de Custine sur la Nahe, et des troubles de la Corse.

Les meneurs de la convention mesurèrent d'un coup d'œil le danger dont ils étaient menacés, et ne se firent pas illusion sur le sort qui leur serait réservé, si l'armée française même se déclarait contre eux. Les jacobins accusèrent bien les girondins des malheurs qui venaient d'accabler la France, naguère victorieuse; mais le péril commun les rapprochant pendant quelques jours, les uns et les autres sentirent la nécessité d'envoyer de nouveaux députés avec de pleins pouvoirs pour réorganiser l'armée, et pourvoir à la défense des frontières. En même temps, et sans attendre le résultat de leur mission, l'assemblée décréta la peine de mort contre quiconque reconnaîtrait Dumouriez pour général.

A peine fut-elle informée de l'arrestation de Beurnonville et des députés, qu'elle décréta par représailles celle de plusieurs princes et officiers autrichiens de distinction qui se trouvaient parmi les prisonniers. Affectant même de craindre que Dumouriez n'eût des complices jusqu'au sein du conseil exécutif, elle institua, le 6 avril, un comité de salut public, pris dans son sein, dont les pouvoirs s'étendirent à mesure que les dangers s'accrurent.

Le prince de Cobourg, dont nous avons rapporté la proclamation du 5 avril, convaincu par les événements du lendemain que ses transactions avec Dumouriez devenaient nulles, ne songea plus qu'à rentrer dans son rôle naturel, et à pousser les opérations militaires avec la vigueur que l'on pouvait attendre de son caractère et de l'insuffisance de ses forces. Il se rendit, dès le 7, à Anvers, dans l'intention de conférer avec les députés des différentes puissances qui s'y étaient assemblés pour déterminer la quotité et l'emploi des contingents desti

nés à agir en Flandre. Le prince d'Orange; lord | l'Espagne n'avaient point été entraînées par des passions contraires à leurs intérêts, elles n'eussent pas manqué de témoigner de l'étonnement qu'on demandât des sûretés à la seule puissance maritime capable de les soutenir un jour, et à qui il ne resterait ni flotte, ni ports, dès l'instant que les vues

Auckland, ministre d'Angleterre à La Haye, les comtes de Metternich et de Stahremberg, le général prussien Knobelsdorf, composaient ce conseil. Le nombre des troupes fut fixé comme il suit

Corps prussien du général Knobelsdorf. 8,000 homm. secrètes du congrès d'Anvers seraient réalisées. Anglais et Hanovriens

Hollandais.

Hessois.

TOTAL.

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20,000
15,000
8,000

.

L'armée impériale, forte de 45,000 hommes, devait agir de concert. Indépendamment de ces moyens, le prince de Hohenlohe commanderait environ 30,000 Autrichiens, répartis en trois corps; le premier à Namur, sous le général Beaulieu; le second à Luxembourg, sous le général Schroeder; le troisième à Trèves, sous le général Blankenstein; ce dernier devait se lier par sa gauche à l'armée du roi de Prusse. On donna aux Anglais, qui débarquèrent vers le 20 avril, à Ostende, la direction provisoire de Tournay; enfin, les Hollandais, à l'exception des corps destinés à observer Lille et couvrir la West-Flandre, devaient grossir l'armée principale.

La Prusse, de son côté, aurait senti l'inconvenance de verser le sang de ses peuples dans la vue de faire la conquête des places de Flandre pour les Autri51,000 homm. chiens, ou de les aider à reprendre l'Alsace et la Lorraine si l'appât de Thorn et de Dantzig avait pu l'y décider, la possession de ces places une fois assurée, elle se serait rapprochée du système politique auquel elle était redevable de sa prospérité. Quant au cabinet de Vienne, on ne conçoit pas trop sous quel rapport il se croyait en droit d'exiger des indemnités ou des garanties; voulait-il punir la France de lui avoir été attachée depuis 1756 et d'avoir négligé ses plus chers intérêts en combattant pour sa cause jusqu'à la paix d'Hubertsbourg; ou bien lui imputait-il à crime d'avoir pris l'initiative dans une guerre qui, s'il faut en croire les déclarations mêmes des souverains, était préparée par le ministère autrichien. Nous ne trancherons pas dans des questions si délicates, mais notre impartialité nous force à dire que les deux partis avaient des torts, et que stipuler des indemnités ou des garanties dans ces conjonctures, c'était augmenter les griefs de la France et donner à la guerre un caractère tout opposé à celui dont on affectait de la parer.

Les délibérations de ce conseil diplomatique n'ont été connues qu'imparfaitement jusqu'à ce jour. On pense généralement qu'elles réglèrent plus d'affaires politiques que de combinaisons militaires : suivant quelques écrivains, il y fut question des efforts à faire par les alliés, à l'effet d'obtenir des indemnités pour le passé, et des garanties pour l'avenir. Nous ne l'affirmerons pas, mais tout porte à le croire: cependant, à moins d'énoncer ouvertement le projet de démembrer la France, il était, impossible de mettre au jour, d'une manière plus évidente, les vues d'intérêts particuliers cachées sous le voile d'un beau zèle pour la maison de Bourbon. Ce langage parut surprenant de la part de puissances qui ne s'étaient armées que pour le rétablissement de la prérogative royale, et celui du bon ordre en France.

Dès lors la guerre changea de nature comme de but, et tous les cabinets anciennement alliés à ce pays, purent sonder à loisir la profondeur du précipice ouvert sous leurs pas. Si la Hollande et

On est moins embarrassé de répondre pour l'Angleterre, car si elle n'avait pas de droit d'exiger des garanties, il était du moins de son intérêt de les demander.

L'absence du généralissime des coalisés ne fut pas longue; avant son retour au quartier général, il avait eu soin d'expédier des ordres pour rassembler l'armée à Quiévrain; et il publia, le 9, un nouveau manifeste bien différent du premier, et qui redoubla les soupçons conçus sur les transac tions du congrès d'Anvers, en rétractant avec une affectation, du moins imprudente, la promesse de s'abstenir de toute conquête sur le territoire fran çais. Cependant, le prince de Cobourg, persuadé qu'il ne saurait remplir la tâche qui lui était assi

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