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décisif, et prouva par cette circonstance qu'il eût fait la guerre avec distinction, si le sort n'en avait décidé autrement.

Soit que le ministre ne fût pas doué d'un jugement militaire assez profond pour découvrir la supériorité du plan de Lafayette, soit qu'il eût de la répugnance à rendre justice à son émule, ou enfin que ce dernier eût perdu toute la confiance des révolutionnaires, en se rapprochant de la cour, et que l'on craignît de lui donner trop d'influence en lui accordant un si beau commandement, sa proposition fut rejetée, et l'invasion, exécutée de la manière la plus contraire aux principes de l'art, eut l'issue qu'on devait en attendre.

et Tiercelet pour couvrir le centre, qui n'était menacé alors que par une poignée d'émigrés peu en mesure de prendre l'offensive, il se dirigea avec l'élite de son corps par Stenai, Sedan et Mezières sur Givet, où il arriva le 29 après avoir fait plus de cinquante lieues en quatre jours.

Les trois colonnes de l'armée du Nord s'ébranlèrent le 28. Le général Dillon, partant de Lille avec 4,000 hommes, donna le 29 au matin, vers Lamain, sur l'ennemi qui marchait au-devant de lui. Peu préparées à cette apparition subite, comme si à la guerre on marchait à l'ennemi pour ne pas le rencontrer, les troupes françaises voulurent se replier sur Baizieux; mais poursuivies par quelques escadrons et batteries légères qui culbutèrent l'arrière-garde, elles se sauvèrent dans le plus grand désordre à Lille, criant de toutes

Pour concilier toutes les opinions, prendre un peu de chaque projet, on résolut de déboucher sur 4 colonnes : la 1 de 1,500 hommes, de Dunkerque sur Furnes; la 2o de 4,000, de Lille sur Tour-parts à la trahison! Le général Dillon blessé par nay; la 3o de 10,000, de Valenciennes sur Mons; enfin Lafayette, après avoir rassemblé un corps de 12,000 hommes à Givet, se dirigeait sur Namur, afin de déborder la gauche des Impériaux. Ces forces réunies devaient être successivement renforcées, et marcher selon l'occurrence sur Liége ou Bruxelles.

ses propres soldats, entraîné dans leur déroute, fut massacré par la populace. Les Autrichiens, stupéfaits d'avoir remporté une victoire si facile, rentrèrent à Tournay avec 6 pièces de canon et un butin considérable.

D'un autre côté la plus forte attaque, partie de Valenciennes aux ordres de Biron, s'avança sur deux colonnes vers Quareignon. Beaulieu qui commandait sur ce point, avait garni de tirailleurs le ravin qui porte le nom de ce village, et rassemblé 4,000 hommes sur les hauteurs de Jemmapes, qui acquirent depuis tant de célébrité. Le général français fit déployer ses troupes, engagea une canonnade et porta une colonne dans le ravin. Mais 2,000 chevaux autrichiens s'étant montrés à l'improviste, Biron crut prudent d'ordonner la retraite sur Bossu. A peine les troupes sont-elles établies, que deux régiments de dragons se précipitent vers l'infan

Il n'est pas difficile de se convaincre des vices de cette disposition: en débutant par des opérations décisives, il était puéril de laisser des garnisons complètes dans des places couvertes par les mouvements mêmes de l'armée, et qu'on pouvait, sans danger, confier à la garde nationale renforcée de quelques bataillons. Il était surtout ridicule de ne renforcer que successivement l'armée expéditionnaire; car c'était dire, en d'autres termes : « L'ennemi a 35,000 hommes en Belgique, mettez>> vous à la tête de 25,000, chassez-le, et quand vous » l'en aurez expulsé, on vous enverra 60,000 hom-terie, criant: nous sommes trahis! et prennent en >>mes; >> combinaison bizarre, aussi fausse comme manœuvre de guerre que comme opération politique. Le maréchal Rochambeau, encore tout occupé des préparatifs de défense qu'il avait proposés, reçut le 24 avril l'ordre d'exécuter le plan du ministère; bien qu'il différât essentiellement du sien, il crut, néanmoins, de son devoir d'y procéder sans retard.

Lafayette, de son côté, se mit en mouvement à la fin d'avril, et laissant 24,000 hommes à Dun, TOME 1.

désordre la route de Valenciennes, où la majeure partie du corps, sourde à la voix de Dampierre et de Biron, ne tarde pas à les suivre. Le reste rallié à Hornu, et attaqué le 30 au matin par Beaulieu, renouvela la scène de la veille, et s'enfuit dans le plus grand désordre d'abord à Quiévrain, puis à Valenciennes. Le maréchal de Rochambeau eut la plus grande peine à rassembler les fuyards derrière la Ronelle. Beaulieu satisfait de la capture de quelques pièces de canon et d'une centaine de prison

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niers, ramena sa petite troupe chargée de butin | Prusse seraient présentes? Les promesses de Cadans sa première position.

A l'extrême gauche, le général Carle s'était avancé avec sa faible colonne, de Dunkerque sur Furnes, où il répandit des proclamations: la nouvelle des événements de Lille et de Mons le fit bientôt rentrer dans son camp.

A la première nouvelle de l'approche des Français, le duc Albert avait ordonné un mouvement tardif vers sa gauche, en portant 10,000 hommes du camp de Leuze sur Mons, et prescrivant à Starray de se prolonger avec 5 à 6,000 hommes, sur la direction de Charleroy pour couvrir la Sambre. Tandis que ces scènes ridicules se passaient à l'armée du Nord, Lafayette avait poussé son avantgarde vers Bouvines et Flamignolles, se disposant à marcher sur Namur : instruit de ces déroutes et de la marche du corps de Starray, il jugea que le seul parti à prendre était de revenir au camp de Rancennes.

Malgré le peu d'importance militaire de cette entreprise, les résultats en sont trop singuliers pour ne pas faire naître de pénibles réflexions. Sans doute le conseil commit une faute grave, de confier l'exécution d'un plan à un général qui le désapprouvait et pour lequel il devait être, en quelque sorte, un sujet de mortification.

Mais il faut convenir, cependant, que ces cris de trahison élevés à la même heure vers Mons et sous Lille, cet empressement de deux généraux français à ordonner un mouvement rétrograde aussitôt qu'ils aperçurent l'ennemi, sont des circonstances fort extraordinaires; tous les détails, enfin, de ces échauffourées, prouvent que si les généraux avaient perdu la confiance des troupes, ils justifiaient en quelque sorte la méfiance de celles-ci, par l'irrésolution de leur conduite.

Ces échecs, si minces en apparence, menaçaient néanmoins de suites plus graves; le moindre de leurs résultats semblait être de porter à son comble la démoralisation des armées françaises et leur insubordination ; ils devaient répandre la terreur dans les provinces frontières, et même dans les parties les plus reculées du royaume. En effet, si toutes les forces disponibles de la France venaient d'échouer contre quelques brigades impériales, que fallait-il espérer, lorsque les masses de l'Autriche et de la

lonne et des émigrés devenaient de justes prophéties; la marche du roi de Prusse sur Paris, ressemblerait à une promenade. Il n'en fut pourtant pas ainsi : les jacobins, tout en mesurant le danger qui les menaçait, furent assez adroits pour ne rien laiser percer de leurs craintes, assez présomptueux, ou assez énergiques pour n'en point concevoir.

Le maréchal Rochambeau, auquel des calculs prudents jusqu'à la pusillanimité avaient fait improuver le projet de Dumouriez, ne jouit pas longtemps de l'honneur d'avoir mieux jugé que lui. Le ministre usant de l'arme favorite des ambitieux de ce temps, l'accusa d'avoir préparé ses revers par jalousie; et le vainqueur de Cornwallis ayant perdu la confiance de la nation, se vit réduit à se justifier et à demander son remplacement.

Le maréchal Luckner, âgé de soixante-dix ans, que nous avons vu figurer avec quelque distinction, comme officier de troupes légères, dans plusieurs escarmouches de la guerre de Hanovre, fut choisi pour lui succéder : le gouvernement n'avait pas d'idée assez juste des talents nécessaires à un général en chef, pour juger la différence qui existe entre un hussard hanovrien et un maréchal chargé du destin de la France. Luckner, qui fut toujours un homme médiocre, était devenu, en avançant en âge, pusillanime, faible, irrésolu et incapable de tout commandement.

Les premiers soins du nouveau général furent d'assembler un conseil de guerre, pour blâmer tout ce qui avait été fait, sans rien proposer de plus convenable; il procéda, ensuite, à une nouvelle distribution des arrondissements que chaque armée devait défendre. Ce système d'assigner à plusieurs chefs sur une même frontière, le terrain que chacun d'eux doit particulièrement garder est des plus dangereux; c'est le moyen d'empêcher qu'ils ne se prêtent un mutuel secours, chacun ne voulant pas laisser en prise le point qui lui est confié. Une telle répartition serait tout au plus applicable aux divisions d'une armée, subordonnées à un seul général en chef qui pût prescrire sur les lieux, et à l'instant même, tous les mouvements nécessités par les circonstances. On comprend qu'on se distribue des arrondissements pour cantonner; mais

pour

bien opérer à la guerre, il est indispensable | pris et enlevés au point de jour, le corps lui-même de diriger toutes les forces disponibles, où le besoin eut à peine le temps de se former; le général Goul'exige, et sans égard à des répartitions de com- vion, qui le commandait, ayant été tué, la défaite mandement. de ce détachement fut complète. Les renforts, arrivés à six heures du matin, déterminèrent les Autrichiens à se replier sur Mons, satisfaits d'avoir atteint le but de leur course.

Convaincu qu'il avait pourvu à tout, par cette mesure insignifiante, Luckner vaquait paisiblement aux détails de ses fonctions, lorsque Dumouriez, persistant à reprendre ses projets sur la Belgique, fit décider au conseil que l'expédition serait de nouveau tentée, en laissant cette fois au vieux maréchal, le soin de l'exécuter selon son bon plaisir.

Luckner proposa de marcher avec ce qu'il pourrait réunir de l'armée du Nord, sur Courtray, vers la gauche; tandis que Lafayette menacerait Mons et Bruxelles, pour contenir l'ennemi et l'empêcher de renforcer son camp de Tournay. Si les Autrichiens commettait cette faute, l'armée du Centre devait alors marcher réellement sur Mons et s'en

emparer,

D'ailleurs, le duc de Saxe-Teschen, informé du rassemblement des forces ennemies vers Lille, résolut de leur opposer un mouvement parallèle, et renforça le corps de Latour à Tournay, jusqu'à 20,000 hommes, Douze mille environ restèrent à Mons pour faire face à l'armée de Lafayette. Ce dernier, semblait avoir une occasion favorable pour entreprendre quelque attaque importante; mais soit qu'il ignorât la force réelle de l'ennemi, soit qu'il mît toute son attention à prévenir les bouleversements qui menaçaient le trône, en informant l'assemblée nationale des complots qui se tramaient, il n'osa pas commettre son armée encore un peu ébranlée de la surprise de Gliswelle; nous verrons plus tard que la catastrophe du 20 juin excusa assez sa circonspection.

Luckner, qui n'était pas homme de parti et n'avait aucun motif de retenue, n'en agit guère mieux pour cela,

Ce mouvement à gauche était une monstruosité en stratégie ; il prouve évidemment que son auteur n'avait pas les premières notions de la guerre, car c'était le mouvement inverse qu'il fallait faire, pour ramener les troupes de Dunkerque et de Lille sur Valenciennes, et les porter par leur droite sur Binche, tandis que Lafayette s'avancerait de Maubeuge et de Philippeville vers Charleroy, afin de gagner l'extrême gauche de la ligne autrichienne, de l'accabler et de refouler sur la Flandre mari-las d'avoir fait des dispositions passables, il dissétime les corps battus successivement.

Au lieu d'en agir ainsi, Luckner rassembla ses divisions de Famars, de Lille et de Dunkerque, sur la Lys, et s'avança, le 18 juin, à Menin, avec 28,000 hommes, poussant une avant-garde sur Courtray, dont elle s'empara après un léger combat. Un corps de 4,000 hommes resta fort inutilement établi à Maulde durant cette expédition.

A l'instant même où les troupes du camp de Famars partaient pour Lille, le duc de Saxe-Teschen, par une marche opposée, détachait 12,000 hommes du camp de Mons dans l'intention d'attaquer l'avant-garde de Lafayette, postée à Gliswelle à une lieu de Maubeuge, et séparée de l'armée par le défilé de la Sambre.

Cette entreprise, favorisée par le mauvais temps, eut un plein succès; les avant-postes furent sur

Le duc Albert de son côté, tremblant de voir deux petites masses ennemies se former vers ses ailes, prit un singulier moyen pour leur faire face. Déjà

mine entièrement le corps de Latour; persuadé, sans doute, qu'en mettant un poste sur chaque route, il empêcherait Luckner d'avancer. Enfin oubliant que toutes ses communications, et sa base étaient à sa gauche, il s'étendit vers la droite, pour se rapprocher de la mer du Nord; Beaulieu fut porté avec 5,000 hommes à Wicht, pour couvrir Audenarde; Clairfayt conduisit le gros du camp de Tournay à Coeghem; le colonel Mylius revint à Harlebeck, et Latour resta avec 4,000 hommes à Tournay.

Cette dispersion des forces impériales, à l'instant même où il eût été sage de les concentrer, fournit à Luckner une belle occasion pour tomber avec ses 28,000 hommes, sur chacun de ces petits corps. Bien loin de la saisir promptement, il se laissa prévenir; le colonel Mylius lui enleva le

Rhin.

Dumouriez dégoûté par les tracasseries que le ministère éprouvait dans sa marche, et ayant perdu d'ailleurs la confiance du roi par ses intrigues contre Servan, remit le portefeuille, et vint servir à l'armée du Nord, comme lieutenant général.

poste de Harlebeck avec une partie de la garnison, | deux extrémités, Dillon au nord, et Biron sur le et les Autrichiens, enhardis par ce succès, se présentèrent devant Courtray. Le pusillanime maréchal, déjà éperdu, convoqua aussitôt un conseil, à la suite duquel l'armée française se hâta de regagner ses frontières, n'osant pour ainsi dire soutenir l'aspect d'une poignée d'ennemis. A cette époque, les généraux se formaient la plus singulière idée de la guerre; on eût dit que toute entreprise militaire devait reposer sur l'absence de l'adversaire, et que dès qu'il paraissait, il fallait décamper: on ne manqua pas, quelques années plus tard, de laver ce ridicule des chefs de 1792; mais on tomba dans l'excès contraire, en attaquant avec une impétuosité meurtrière les postes les plus difficiles, sans se donner souvent le temps ou la peine de les reconnaître, et sans que leur occupation méritât les sacrifices qu'on faisait pour les obtenir.

Au reste, ces réflexions n'ont d'autre but que de caractériser le genre de guerre que l'on faisait alors, et les différentes combinaisons qu'il fournit à la méditation des hommes de l'art. Nous ne prétendons point rabaisser le courage des généraux qui servirent dans les premières campagnes : leur position fut cruelle; abreuvés de dégoûts par les jacobins de Paris, et par leurs propres troupes; manquant de confiance en ces bandes récalcitrantes; peu expérimentés eux-mêmes; on doit leur savoir gré de n'avoir pas désespéré de la France dans la situation horrible où ils se trouvèrent.

Les affaires de l'intérieur étaient moins rassurantes encore que celles des armées, nous retracerons au chapitre suivant les débats qui eurent lieu au sujet du camp de Soissons: imaginé par le ministre Servan, pour servir de réserve générale aux troupes destinées à s'opposer à l'invasion, mais qui fut rejeté, et devint un prétexte d'insurrection.

Le général autrichien, informé des mouvements auxquels les nouveaux arrangements de ses adver saires donnaient lieu, et ayant reçu de son côté des renforts qui portèrent ses forces disponibles à 40,000 combattants, résolut de menacer les frontières du Nord, pour rendre plus faciles les opérations qu'on méditait sur le centre : il fit attaquer, par le comte de Latour le poste d'Orchies, d'où un bataillon de la Somme fut expulsé après une belle résistance.

Le général Alvinzy vint camper à Oudaing, avec 15,000 hommes, menaçant le camp de Maulde. Dumouriez qui le gardait avec 8,000, fut heureusement renforcé par le général Dillon, venant commander toute la gauche de l'armée: celui-ci rassembla 5,000 hommes vers le Quesnoy; le général Lanoue campa sous Maubeuge, avec 8,000 combattants; 12,000 restèrent sous Dumouriez à Maulde, gardant Orchies et Marchienne par des corps vo

L'approche des troupes prussiennes qui s'avançaient sur le Rhin, le rassemblement d'Autrichiens sous le prince de Hohenlohe-Kirchberg à Spire, et sous le prince d'Esterhazy dans le Brisgau, décidè-lants. rent le gouvernement français à rester sur la défensive, et à songer aux moyens de couvrir sa propre frontière du danger dont elle allait être bientôt menacée.

Une nouvelle répartition des forces fut arrêtée, Lafayette eut à défendre tout l'espace depuis la mer jusqu'à Longwy, en tenant son corps principal sur la Chiers, à Villers-le-Rond près de Sedan et ensuite à Vaux, vers Carignan. Luckner se chargea de la droite, depuis la Moselle jusqu'au Jura; il s'établit à Metz, pour mieux surveiller le point menacé par les préparatifs de l'ennemi. Des lieutenants de ces deux généraux commandaient les

Ces nouvelles dispositions et le départ du général Clairfayt, détaché avec 15,000 hommes pour se réunir au duc de Brunswick qui arrivait au même instant à Coblentz avec l'armée prussienne, décidèrent bientôt les Autrichiens à se replier sur Mons.

Les choses en restèrent là, sur cette frontière, pendant le mois d'août. Les troupes du camp de Maulde, stimulées par Dumouriez, qui avait toute la souplesse et la ruse d'un chef de parti, se disciplinèrent et s'aguerrirent par de fréquentes chicanes de postes, et devinrent le noyau d'une bonne armée.

Nous ne ferons pas l'énumération insignifiante de tous les mouvements exécutés sur le Rhin pendant les trois mois qui venaient de s'écouler; il suffira d'en indiquer les plus importants.

A la déclaration de guerre, le général Custine, chargé de prendre possession de l'évêché de Bâle, marcha avec 8,000 hommes sur Porentruy, où il n'y avait que 400 Autrichiens, appelés imprudemment par le prince-évêque, et qui se sauvèrent à son approche.

Deux camps formés à Hesingen et à Plobsheim, observaient les forces qui se rassemblaient dans le margraviat de Baden.

Kellermann, qui commandait d'abord à Landau, alla camper à Neukirch, près de Sarguemines, puis à Wadgast, sous Sarrelouis, point intermédiaire pour se lier au besoin à l'armée du Centre, ou se rapprocher du Rhin. Il prit ce dernier parti, lorsque le prince de Hohenlohe-Kirchberg, rassemblant environ 20,000 Autrichiens, fit mine de passer le fleuve, pour s'avancer sur Spire, avec le prince de Condé. Kellermann reprit alors la position de la Queich, et Biron vint avec un corps de 12,000 | hommes, tirés du haut Rhin, pour le soutenir et s'établir à Weissembourg. Ces mesures furent prises fort à propos, les Autrichiens et les émigrés s'étant ménagé des intelligences dans Landau, espéraient surprendre cette place et s'étaient avancés à Lingenfeld et Neustadt. Custine poussé en reconnaissance, le 3 août, donna à l'improviste sur leurs postes, et en fut vigoureusement accueilli; mais cette rencontre déconcerta toutefois le projet de surprise. Le maréchal Luckner, à la nouvelle des dangers qui menaçaient sa droite, accourut à la hâte de Metz. S'imaginant qu'une armée de 25,000 hommes, appuyée par Landau et par les lignes de la Queich, devait être hors d'état de se soutenir contre des forces égales, il prit un moyen digne de lui pour la tirer d'affaire, replia 15,000 hommes derrière les lignes de la Lauter, en fit partir 8,000 sous Biron, pour retourner sur le haut Rhin, et jeta Custine et 3 bataillons dans Landau. Le prince de Hohenlohe ignorant ces étranges dispositions, ou pressé de se porter sur la Moselle pour seconder l'invasion des Prussiens, ne profita pas de ces fautes, et continua son chemin sur Hombourg. Le corps de Condé retourna dans le Margraviat.

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Pendant que les armées de l'Empereur défendaient la Belgique avec plus de bonheur qu'on n'était en droit de l'espérer, et que celles de la Prusse s'avançaient à pas comptés sur les frontières de France, pour y essuyer l'affront que nous ne tarderons pas à rapporter, un épisode important attira au Nord, l'attention des cabinets de Vienne et de Berlin, et eut une influence toute particulière sur les opérations ultérieures de la guerre de la révolution. On sait déjà que je veux parler de l'invasion de la Pologne.

Nous avons indiqué dans le chapitre Ier les changements que la diète, excitée par l'Angleterre et la Prusse, venait d'opérer dans ses relations extérieures: l'alliance de 1790, avec Frédéric-Guillaume, et la constitution de 1791, mirent le sceau à cette importante révolution. Ce pacte avait obtenu l'approbation de plusieurs gouvernements, et jouissait de l'assentiment général, à l'exception de quelques magnats qui, voyant leurs intérêts froissés ou leur ambition déçue, protestèrent contre ces transactions: peut-être aussi attachaient-ils de fausses idées de liberté publique au système de monarchie élective, oubliant que la Pologne, grande sous les races héréditaires des Piast et des Jagellons, avait souffert toutes les horreurs de l'anarchie depuis que le système contraire avait prévalu.

La révolution du 3 mai, était à la vérité un grand pas vers la restauration de l'État; cependant elle péchait par un côté essentiel. La diète en choisissant son souverain dans une nation de troisième ordre, avait sans doute en vue d'enlever

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