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point venu dans l'intention de commettre aucune hoftilité, mais comme un Ami, & dans des difpofitions pacifiques, ayant été chaffé fur ces Côtes par les vents contraires, & par la néceffité d'y faire provifion d'eau.

Que le Roi eft furpris auffi, que Votre Majefté puiffe elle-même ignorer les raifons, & n'être pas convaincue de la neceffité qui a obligé Sa Majefté de faire ces préparatifs de Mer, voyant les engagemens dans lefquels quelques-unes des Puiflances les plus confiderables de l'Europe font entrées depuis peu, & dont Sa Majefté s'eft plaint tant de fois, & fi hautement: Les armemens & équipemens de Mer qui fe font faits dans la plupart des Ports d'Espagne; les préparatifs de Guerre, & les mouvemens d'un nombre confiderable de Troupes Espagnoles vers l'endroit de leur Côte qui eft le plus proche, & le plus convenable pour executer quelque entreprise fur les Etats de Sa Majefté; les grandes efperances des Emiffaires & des Adherens du Prétendant, qui fe font vantez publiquement de l'affiftance qu'ils recevroient de ce côté-là; la confiance qu'ils avoient à cet égard, & qui a clairement paru dans la conduite pernicieufe & indifcrete de quelques-uns d'entre eux, qui ont été depuis peu reçus & favorifez à Madrid: cela, joint aux intrigues qui ont été formées avec les Mofcovites, & les raifons que Sa Majefté a de foupçonner les mauvais deffeins que l'on a eus, en envoyant l'année paffée les trois Vaiffeaux de Petersbourg à Cadix, & de là à St. Andero; l'avis qu'eut Sa Majefté l'Hiver dernier, de l'aveu du Minif tre d'Espagne, qu'il y avoit une Alliance of

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fenfive entre les Cours de Madrid & de Vienne, que par un des Articles de cette Alliance, il étoit ftipulé d'employer la force ouver te pour faire reftituer Gibraltar au Roi d'Efjagne, Place que Sa Majefé poilede en vertu d'un Droit fi legitime: les fublides confiderables qui ont été fournis à la Cour Imperiale, & qu'on ne voit point fondez fur aucune Alliance qui jufqu'ici ait été rendue publique: les infractions notoires que les Gardes-Côtes Espagnols ont commites depuis long-tems par raport au Commerce & à la Navigation des Sujets de Sa Majefté aux Indes Occidentales, infractions dont on s'eft fi fouvent plaint, fans aucune aparence de fatisfaction, ou de reparation toutes ces cbofes réunies fuffifent pour faire connoitre clairement les raifons qui ont porté Sa Majefté à prendre les mefures qu'Elle a cru convenables, & à équiper les differentes Flotes qui ont été mifes en Mer; & les Sujets de Sa Majefté auroient eu jufte raifon de fe plaindre, fi on n'avoit pas pris foin de la fureté du Royaume, & de leurs Droits & Proprietez qu'ils voyoient menacez, & en danger. C'eft pourquoi Sa Majesté s'attend qu'on laiffera entrer, & qu'on recevra les Vaiffeaux de Guerre dans les Ports d'Efpagne de la manière, & conformement à ce qui a été reglé par les differens Traitez qui fubfiftent actuellement entre les deux Nations.

Ledit Ambaffadeur a auffi ordre de fe fervir de cette occafion pour informer Sa Majefté Catholique de la furprife où eft le Roi qu'on n'ait encore offert aucune fatisfaction fur la manière extraordinaire & infoutenable dont

on agit, lorsqu'on retira par force de fon Hotel le Duc de Ripperda; procedé dont il fe plaignit, il y a quelque tems, au nom & par ordre de Sa Majesté. Enfin il a ordre de dire que le Roi n'eft pas moins furpris de l'affront fait au Conful de Sa Majefté refidant à Saint Sebaftien, que l'on a obligé de quiter fon pofte, & contraint d'aller à Salamanque, contre le Droit des Gens & la teneur des Traitez qui fubfiftent entre les deux Couronnes. Fait à Madrid le 25. Septembre 1726.

GUIL. STANHOPE.

Lettre du Marquis de la Paz à Mr. Stanhope, à St. Ildefonfe le 30. Septembre 1726.

MONSIEUR,

'N execution de ce que Votre Excellence m'a fait l'honneur de m'infinuer dans fa Lettre du 25. de ce mois, j'ai mis d'abord entre les mains du Roi mon Maitre le Mémoire que Votre Excellence m'avoit envoyé, adreflé à Sa Majefté, comme une réponse que Votre Excellence, en confequence des ordres que vous avez reçus de Sa Malefté Britannique votre Maitre, & que vous aporta le 24. de ce mois un Courier dépêché de Londres, a faite au contenu des deux Lettres que Sa Majesté m'avoit commandé de vous écrire le 17. & le 19. du mois paffé, dont les copies avec celle de la réponse de Votre Excellence du 17. font ci-jointes, comme

étant

étant la bafe & le fondement dudit Mémoire, du contenu duquel Sa Majesté a été diftin&teinent informée. Quoique Sa Majesté eût raifon de fe promettre & d'attendre de la Cour de la Grande Bretagne, une réponse plus claire, plus pofitive & plus fatisfaifante, cependant Elle n'eft nullement furprise de voir que le Ministère Anglois, continuant dans fes mauyaifes difpofitions & intentions, que depuis quelque tems il a fait paroitre par fon procedé, quoiqu'il tâche de le pallier par des proteftations & des expreffions amiables qui n'ont point été épargnées dans cette occafion, au lieu de s'ouvrir & de donner une explication fincère & amiable comme on le fouhaitoit, fur la deftination des Efcadres commandées par les Amiraux Hofier & Jennings, & envoyées dans les Mers des Indes Occidentales, & fur les Côtes de ce Royaume, ait trouvé à propos de le fervir de nouveaux détours, & de prétextes fpecieux, pour multiplier des plaintes qui n'ont aucun fondement, & qui font entierement opofées à la candeur & à la bonne foi que Sa Majesté obferve religieufement envers les Amis & Alliez; mais qui font convenables au génie du prefent Miniftère Anglois, comme il paroit par ces prétextes & ces raifons creufes & exagerées, qu'il a accumulez, pour perfuader le Parlement des dangers imaginaires qui menaçoient la Couronne & la Nation Britannique, afin de le porter & le determiner à confentir à l'équi pement de tant de differentes Efcadres, avec des dépenfes fi grandes & fi peu neceifaires. Cependant Sa Majefté m'a ordonné de declarer à Votre Excellence ce que la pure force

de

dé la verité & fes droites intentions dictent à fon cœur Royal, par raport aux foupçons que Sa Majesté Britannique témoigne fur la conduite de cette Cour.

En premier lieu on allegue que l'on a falt des armemens de Mer & des équipemens dans les Ports d'Espagne, lorfqu'il eft certain & notoire à tout le monde, que l'on n'en a point fait d'extraordinaires, ni d'affez confiderables, pour caufer la moindre aprehenfion à l'Angleterre: Quoique les nombreuses Efeadres, que l'on équipoit avec tant d'ardeur, d'aplication & de diligence, & que l'on faifoit fortir des Ports d'Angleterre, donnallent lieu & fuffent des raifons fuffifantes à Sa Majefté, pour faire les mêmes preparatifs & les mêmes difpofitions, fur tout lorfque, fuivant les bruits qui s'en repandirent en même tems par toute l'Europe, ces preparatifs menaçoient les Etats & les interêts de Sa Majefté, tant en Europe qu'aux Indes; & lorfque ces bruits furent fortifiez & confirmez par la route que prirent lefaites deux Efcadres qui parurent devant les Ports des Indes Occidentales, & devant ceux de ce Royaume.

On doit dire la même chofe à l'égard des mouvemens d'un nombre confiderable de Troupes vers les Côtes les plus voifines de la Grande Bretagne; avec cette difference pourtant, que la plainte du Roi mon Maitre fur će fujet ett anterieure & folidement fondée, puitque c'est l'arrivée de l'Efcadre Angloife à la vue de St. Andero, qui troubla enfin la tranquillité & la bonne foi dans laquelle nous vivions, comme il paroit manifeftement par le peu de préparatifs qu'on avoit faits de ces côtez

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