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on la nomme maintenant la Prisca ou l'ancienne Version Italique. Elle contient la traduction en mauvais latin, d'après un manuscrit grec, des canons d'Ancyre, Néocésarée, Nicée, Gangres, Antioche, Chalcédoine et Constantinople. A la suite de ceux de Nicée sont intercalés d'après le latin original ceux de Sardique. Enfin on rencontre encore dans une collection italique des fragments d'une troisième version ancienne rédigée sur une collection grecque provenant de l'Eglise d'Alexandrie (t). Les collections de l'Orient et de l'Occident étaient donc à cette époque encore concordantes au fond; elles ne se distinguaient que par leur classification et le plus ou moins d'étendue.

$64.-C) Lois séculières.

Après la conversion des empereurs au christianisme les lois civiles acquirent aussi de l'importance en matière ecclésiastique. Ces lois, qui pénétraient également dans la vie ecclésiastique et dans la vie civile, furent plus tard recueillies en grande partie dans la collection d'édits impériaux que Théodose II (438) fit dresser à Constantinople et que Valentinien III confirma pour l'Occident. Indépendamment de cette collection il est parvenu jusqu'à nous plusieurs rescrits, édits et lettres des empereurs traitant de sujets ecclésiastiques (u). Le droit ecclésiastique tant en Orient qu'en Occident se trouvait donc alors renfermé principalement dans les recueils des canons des conciles, le code de Théodose II, et les diverses lois postérieures à ce code.

$65.-D) Travaux scientifiques.

Le droit canonique était alors si étroitement enlacé dans la vie ecclésiastique qu'au lieu de faire le sujet de recherches scientifiques particulières, il n'était traité que conjointement avec le tout. Ainsi dans la seconde moitié du troisième siècle un ouvrage parut en Orient, qui, sous forme d'une épître émanée des apôtres, présentait en six livres une esquisse de l'ensemble de la vie ecclésiastique et des devoirs qui s'y rattachaient. Il vint s'y joindre comme sep

collection qui pourrait être cette Prisca translatio, tandis qu'au contraire le document qui la désigne s'applique parfaitement à notre collection. Il n'y aurait, ce semble, de difficulté qu'à s'expliquer comment cette collection, nécessairement postérieure au concile de Chalcédoine puisqu'elle en contient les canons, a pu être nommée Prisca translatio par Denys, qui écrivait moins de cinquante ans après. Mais cette expression est très relative, et ici particulièrement fait opposition à la traduction émanée de Denys lui-même. Ballerini Part. II. cap. II. §. III. (Galland. T. I. p. 330-34).

(t) Ballerini Part. II. cap. IX. (Gallan 1. T. I. p. 408-409).

(u) Les plus importants de ces documents sont indiqués par Haubold Instit.juris Romani litterariæ (T. I. Lips. 1809. 8) §. 95.

tième livre une collection de préceptes de morale et de liturgie pour la plupart, composée vraisemblablement au commencement du quatrième siècle, puis un huitième livre renfermant, sous forme de constitutions délibérées par les douze apôtres, des dispositions sur l'ordination et les saintes fonctions des évêques et quelques préceptes de discipline. Cette dernière pièce date, dans sa forme actuelle, du milieu du quatrième siècle, bien que quelques-unes de ses parties soient plus anciennes. C'est vers la même époque et vraisemblablement par la plume du même auteur qu'elle fut réunie aux livres précédents, et dès lors la forme de ce dernier fragment fit donner au tout le nom de constitutions des apôtres (διάταξεις οι διάταγαι τῶν αποστολων) (v). Enfin vers le commencement du sixième siècle il y fut encore ajouté comme dernier chapitre du huitième livre un recueil de statuts disciplinaires circulant alors sous le nom de canons des apôtres (w). Ce recueil, composé en Orient dans la seconde moitié du cinquième siècle, était formé d'extraits des constitutions apostoliques, des canons alors existants des conciles, particulièrement de ceux d'Antioche, et de quelques autres sources. Il ne contenait primitivement que cinquante canons; mais un peu plus tard un autre compilateur en porta le nombre à quatre-vingtcinq (x). Ces canons passèrent en Orient pour authentiques (y); en Occident au contraire on ne s'abusa point sur leur origine (z). Néanmoins, comme ils pouvaient par leur contenu servir au maintien de la discipline existante, Denys admit dans sa traduction le petit recueil de cinquante canons, et ainsi leur fit trouver place parmi les lois de l'Eglise (a).

$ 66. -II. Histoire particulière du droit ecclésiastique d'Orient. A) Depuis Jean le scolastique, jusqu'au concile in Trullo. 1) Nouvelles collections de canons (b).

Les collections grecques reçurent successivement, on ne sait au juste à quelle époque, trois nouveaux suppléments dans les canons des apôtres et les décrets des conciles de Sardique et d'Ephèse. Elles renfermaient donc au sixième siècle les quatre-vingt-cinq canons des apôtres et les décrets des conciles de Nicée, Ancyre, Néocésarée, Sardique, Gangres, Antioche, Laodicée, Constantinople,

(v) Nons suivons ici le savant et judicieux ouvrage de Drey, Neue Untersuchungen über die Constitutionen und Canonen der Apostel, Tübingen 1832. 8.

(w) La meilleure édition des Constitutions se trouve dans Jo. Cotelerii Patres Apostolıci. Paris. 1672. (ed. Jo. Clerici. Amstel. 1724. ed. Rich. Russelii. Lond. 1746). vol. 1. (x) La meilleure édition de ces Canons est dans Cotelerii Patres Apostol. vol. I. (y) C. 4. D. XVI. (Conc. Trull. a. 692).

(z) C. 3. § 64. D. XV. (Conc. Rom. a. 494), c. 1. D. XVI. (a. 700).

(a) C. 1. D. XX. (Leo IV. a. 850), c. 3. D. XVI. (Leo IX. a. 1054).

(6) Un excellent travail sur ce point est celui de F. A. Biener de collectionibus canonum ecclesiæ græcæ. Berolini 1827. 8.

Ephèse et Chalcédoine. Avec ces éléments il fut alors composé des collections nouvelles qui se distinguaient des précédentes en ce que sans égard à l'ordre chronologique les matières y étaient pour plus de commodité systématiquement classées. Une de ces collections en soixante titres n'est point parvenue jusqu'à nous (c). Une autre a pour auteur Jean, prêtre à Antioche, qui, d'abord scolastique, devint sous Justinien (564) patriarche de Constantinople. II réunit aux sources du droit renfermées dans les collections antérieures soixante-huit canons extraits par lui de trois épîtres canoniques de saint Basile, et divisa le tout en cinquante matières ou titres (d). Une branche alors très importante de la discipline ecclésiastique, la pénitence, offrit en outre au patriarche Jean Jejunator (595) le sujet d'un extrait particulier (e).

$67.-2) Sources séculières. a) Collections ordinaires de ces sources.

Les dispositions de l'autorité temporelle en matière ecclésiastique devinrent toujours plus importantes, surtout depuis Justinien, qui travaillait avec zèle à soutenir par la législation civile la discipline canonique (f). Les lois rendues à cette fin furent réunies avec les autres dans le nouveau code de constitutions que Justinien promulgua en 534. Quant aux constitutions postérieures à cette année, dont beaucoup aussi avaient trait au droit ecclésiastique, il n'en existait point de recueil authentique, mais seulement des recueils privés, et entre autres on faisait usage dans l'Eglise grecque de la collection connue de cent soixante-huit Novelles, composée sous ou immédiatement après Tibère II (578-82) sur le modèle d'une plus ancienne datant du règne de Justinien. A ces Novelles se joignirent celles des empereurs suivants (g). Quant aux principes généraux, ce qui en était nécessaire ou utile au droit canonique était emprunté aux Pandectes et Institutes promulguées par Justinien en 533.

$ 68. - b) Collections spécialement destinées à l'Église (h).

Au milieu de ce grand nombre de constitutions impériales, il

(c) Elle n'est mentionnée que dans la Préface de Jean le Scholastique. (d) Cette collection n'est imprimée que dans Justell. T. II. p. 499. Assemanni T. III, p. 354-421 présente un rapprochement de cette édition avec des manuscrits très divergens.

(e) Ce Pénitentiel est imprimé à la suite de J. Morini comment. histor. de disciplina in administratione sacramenti pœnitentiæ. Paris. 1651. Bruxell. 1685. Venet. 1702. fol. Les documents y relatifs se trouvent dans Fabric. biblioth. græc. ed. Harless. T. XI. p. 110. (f) C. 45. C. de episc. (1. 3). nov. 6. c. I. §. 8., nov. 83. c. 1., nov. 131. c. I. (g) On les trouve, du moins pour ce qui concerne le droit ecclésiastique, dans les collections suivantes: Juris orientalis libri III. ab Em. Bonefidio digesti Lutet. 1573. 8., Juris græco-romani Tom. II. Joh, Leunclavii studio ex bibl. eruti editi cura Marq. Freheri. Francof. 1596, fol.

devint nécessaire d'en extraire et rassembler ce qui importait à l'Eglise. Il nous est parvenu des extraits de cette sorte en trois collections. La première contient, après la préface, des extraits d'environ dix Novelles, divisés en quatre-vingt-sept chapitres, et a été composée par Jean le Scolastique, pendant son patriarcat, dans les dix premières années de la mort de Justinien. Elle n'est pas encore impriméé dans son entier (i). La seconde collection consiste en vingt-cinq chapitres sans préface; elle contient des textes du Code et des Novelles, non par extraits, mais complets. Elle date de la fin du sixième siècle; l'auteuren est inconnu. Elle n'est pas encore imprimée non plus (k). La troisième collection est la plus riche, et se divise en trois parties(1). La première renferme un abrégé complet des treize premiers titres du Code; la plupart des titres y sont terminés par des παρατιτλα contenant une série d'extraits du Code et des Novelles. La seconde partie présente en six titres une suite de textes des Pandectes et des Institutes concernant le droit sacré. La troisième partie contient, sous trois titres assez étendus, des extraits plus ou moins complets de trente-quatre Novelles. Chacun de ces titres est également suivi de paratitles. Dans les manuscrits on trouve, comme supplément de tout louvrage, quatre Novelles d'Héraclius (610-41) sur des sujets ecclésiastiques; incontestablement elles ont été ultérieurement ajoutées par une autre main. Ce n'est donc pas sous cet empereur qu'a paru la collection, mais, selon toute vraisemblance, peu après Justin II (565-68) (m). L'opinion qui l'attribuait à Balsamon, écrivain du douzième siècle, est tout à fait erronée (n).

$ 69.-3) Collections mixtes.

Pour faciliter encore l'usage des droits ecclésiastique et civil, on en vint à les réunir dans une même collection, sous une classification systématique. Le premier travail de ce genre est le Nomocanon (o). Il consiste dans les cinquante titres ci-dessus mentionnés de Jean le Scolastique, avec addition sous chaque titre de certains frag

(h) Fr. Aug. Biener a jeté du jour sur cette matière dans les écrits suivants: Geschichte der Novellen Justinians. Berlin 1824. 8., Beiträge zur Revision der Justinianischen Codex. Berlin 1833. 8. La dernière dissertation se trouve aussi dans la Zeitschrift für geschichtl Rechtswissenschaft. B. VII. §. 115-206.243-369.

(i) Biener Novellen S. 165-173.584-597.

(k) Biener Novellen S. 173-79. 597-601., Beiträge S. 25.

(1) Biener Novellen S. 179-94. 601-3., Beiträge S.26-29. 222.

(m) Ce point est démontré contre Biener par Heimbach Ανέκδοτα Tom. I. (Lips. 1838. 4.) p. XLIV-XLVII,

(n) Il n'a d'abord paru de cette collection qu'une traduction latine: Paratitla ed. Joh. Leunclau. Francof. 1593.8; ensuite par les soins de Fabrot le texte grec d'après deux manuscrits avec cette traduction en regard. Justell. T. II. p. 1217-1376.

(0) Biener Novellen S. 194-202., Beiträge S. 30. On trouve aussi quelques documents sur ce point dans Fabric. Biblioth. græc. ed. Harless. T. XII. p. 193.

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ments du droit civil qui s'y rapportent. La plupart de ces fragments sont empruntés à la collection de quatre-vingt-sept chapitres, et fort peu autode et aux Pandectes. A la fin est un supplément de vingt-un chapitres, tous extraits de ces quatre-vingt-sept chapitres. L'origine de ce Nomocanon est de peu postérieure à la mort de Justinien; l'o pinion qui l'attribue à Jean le Scolastique est certainement erronée. Les manuscrits qui en existent présentent, indépendamment d'autres différences majeures, cette diversité que les uns se bornent à citer les canons, et ne contiennent le texte que des lois concordantes (συνάδοντα νόμιμα) (p), tandis que dans d'autres canons et lois sont transcrits. Une autre collection de même nature ne nous est connue que par l'usage qu'en a fait Photius dans son recueil (q). De la préface conservée par Photius (r) il résulte qu'elle se composait de deux parties. La première contenait les canons de dix conciles, incontestablement ceux-là mêmes qu'a aussi recueillis Jean le Scolastique, puis les canons des apôtres et d'un concile de Carthage (s), enfin des décisions canoniques des saints Pères. La seconde partie était un Nomocanon en quatorze titres, présentant chacun les citations par numéros des canons relatifs au sujet, avec des extraits des compilations de Justinien. Ces extraits étaient généralement empruntés à la collection en trois parties, faussement attribuée à Balsamon; peut-être cette collection est-elle du même auteur.

670. B) Depuis le concile in Trullo jusqu'à Photius.
1) Accroissement du nombre des canons.

Les cinquième (553) et sixième (680) conciles œcuméniques, nommés à raison du lieu de réunion les deuxième et troisième de Constantinople, ne se sont occupés que de questions de dogme et n'ont point rendu de dispositions sur la discipline. Par ce motif Justinien II convoqua (692) dans le Trullus, salle voûtée du palais impérial à Constantinople, un nouveau concile qui s'occupa en détail de la discipline de l'Eglise d'Orient, et décréta sur ce sujet cent deux canons (t). Le second canon renfermait l'énumération des maté

(p) C'est sur un manuscrit de cette sorte qu'est faîte l'édition de Justell. T. II. p. 603-72. (q) Biener Beiträge S. 34-38. 222. 223., Heimbach Ανέκδοτα p. XLVI-LIV.

(r) Elle se trouve dans Justell. T. II. p. 789-92, et finit par ces mots μισθὸν ἀπένέγκασθαι

(s) Ces canons sont ceux du synode de Carthage (419), où les canons de tous les synodes africains à partir de l'année 394 ont été reproduits. Le compilateur les a incontestablement trouvés dans un recueil de Denys (§. 81) et traduits lui-même en grec. On les trouve encore sous cent trente-cinq numéros dans la collection grecque ultérieure, Bevereg. T. I. p. 509-680.

(1) C. 6. D. XVI. (Petrus in Conc. Nicaen. II. a. 787) Ce synode est aussi nommé quinisexta, πενθ έκτη parceque les canons en sont considérés par les grecs comme un appendice des cinquième et sixième conciles œcuméniques. Les Grecs le désignent aussi sous le nom de sixième synode.

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