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M. Chapelier, Voilà comment je propose de rédiger les décrets proposés par MM. Dandré et Folleville.

L'assemblée nationale déclare aux citoyens de Paris, et à tous les habitans de l'empire, que la même fermeté qu'elle a portée au milieu de toutes les difficultés qui ont accompagné ses travaux, va diriger ses délibérations, à l'occasion de l'enlèvement du roi et de la famille royale;

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› Avertit tous les citoyens que le maintien de la constitution, le salut de l'empire n'ont jamais exigé plus impérieusemént le bon ordre et la tranquillité publique ; que l'assemblée nationale a pris les mesures les plus actives pour suivre la trace de ceux qui se sont rendus coupables de l'enlèvement du roi et de la famille royale; qu'elle va sans aucune interruption, dans ses séances, employer tous les moyens pour que la chose publique ne souffre. pas de cet événement; que tous les citoyens doivent se reposer entièrement sur elle, des soins qu'exige le salut de l'empire, et que tout ce qui exciterait le trouble, effraierait les personnes, menacerait les propriétés, serait d'autant plus coupable, que par-là, seraient compromises et la liberté et la constitution;

› Ordonne que les citoyens de Paris se tiendront prêts à agir, pour le maintien de l'ordre public et la défense de la patrie, suivant les ordres qui leur seront donnés d'après les décrets de l'assemblée nationale.

>Ordonne aux administrateurs du département et aux officiers municipaux, de faire promulguer aussitôt le présent décret, et de veiller avec soin à la tranquillité publique.›

Cette rédaction est décrétée à l'unanimité.

M. Crillon le jeune. Dans les circonstances où nous sommes, il est certain que nous ne devons pas borner nos mesures au seul département de Paris, mais qu'elles doivent comprendre l'universalité des départemens. Il est certain qu'il y a maintenant des précautions à prendre; par exemple, de faire partir des courriers. (Plusieurs voix : Cela est fait.) J'apprends avec plaisir que l'assemblée a déjà pris ce matin cette mesure; mais il en est une multitude d'autres que la prudence vous commande. Il est impossi

ble qu'une assemblée de huit cents ou de mille personnes agisse avec la promptitude qui convient aux circonstances. Je demande que vous nommiez cinq personnes, ou même un plus petit nombre, auxquelles vous confierez le pouvoir nécessaire. (Plusieurs voix: Cela est rejeté.) Je ne sais pas sous quelle forme une mesure aussi sage a été proposée pour qu'elle ait pu être rejetée. Si l'op yeut, je consens à ce que cette commission ne puisse faire à elle seule aucun acte d'administration; mais je demande qu'elle s'adjoigne à cet effet aux ministres, et qu'elle vous rende compte tous les jours des mesures qu'elle aura prises dans la journée.

M. le président. Ce que propose M. Crillon ayant été rejeté par l'assemblée, je ne puis plus le soumettre à la délibération.

M. Fréteau. Nous avons vu dans le courant de cette révolution les malheureux effets des faux décrets répandus dans les départemens; je demande que pour prévenir les troubles qu'y exciteraient les faux décrets, les faux ordres qu'on pourrait y répandre, je demande que tous les décrets de l'assemblée nationale soient scellés du grand sceau de ses archives, qu'on ne se serve plus des cachets particuliers des comités, et qu'il soit enjoint aux directoires de département de vérifier avec la plus grande attention, sur les expéditions qui leur seront envoyées, la fidélité des signatures.

La proposition de M. Fréteau est décrétée.

M. Camus. Conformément aux ordres de l'assemblée nationale, la députation nommée par le président s'est rendue dans les Tuileries pour protéger M. Cazalès. Nous avons rendu compte au peuple des mesures que l'assemblée avait prises; notre récit a été fréquemment interrompu par des applaudissemens; nous avons recommandé à tous le calme et la tranquillité; ils ont tous juré d'empêcher qu'il ne se commît aucun désordre. Nous leur' avons dit d'aller, chacun dans sa section, y porter les mêmes impressions, et instruire tous leurs concitoyens des mesures prises par l'assemblée nationale; ils se sont aussitôt rendus à notre invitation.

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M. l'évêque de Blois. Je dois ajouter au compte-rendu par le

préopinant, que nous avons rencontré partout le peuple dans les mêmes dispositions; soutenons sa cause avec courage; et nos, si fractus illabatur orbis, impavidos ferient ruinæ ; nous mourrons, s'il le faut, pour sauver la chose publique.

M. Charles de Lameth. La proposition de M. Crillon a été repoussée. Je crois cependant que l'assemblée ayant dans son sein des comités diplomatique, militaire, des finances, et, en un mot, de toutes les parties de l'administration, elle devrait leur ordonner de travailler avec les ministres, chacun en la partie qui le concerne, de rendre compte à l'assemblée de toutes les mesures qu'ils croiront devoir prendre, et de les lui soumettre toutes les fois qu'un décret de l'assemblée nationale sera nécessaire. Je crois ensuite que nous devons autoriser les ministres à venir d'eux-mêmes, et quand la chose publique l'exigera, dans le sein de l'assemblée. Vous jugerez aussi utile d'adjoindre six membres au comité des recherches. Il a été commis un grand forfait, un crime de lèse-nation au premier chef, s'il y en a. Il y aura mille et mille recherches à faire pour savoir quels moyens on a employés, quelles personnes sont les auteurs ou les complices de ce crime.

M. Dandré. Il est une mesure générale, une mesure préalable à toute autre, que je crois devoir vous proposer avant même que vous entendiez les ministres. Votre constitution porte que nul décret ne sera exécuté comme loi du royaume, que lorsqu'il aura été accepté ou sanctionné. La sanction est impossible en ce moment. Cependant il est important de prendre un mode provisoire pour l'exécution de nos décrets. Je propose, en conséquence, le projet de décret suivant :

«L'assemblée nationale décrète que provisoirement et jusqu'à ce qu'il en ait été autrement ordonné, tous les décrets rendus par elle seront mis en exécution par les ministres, sans qu'il soit besoin de sanction ni d'acceptation.>

M. Pétion. La proposition du préopinant me paraît extrêmement simple, et conforme aux principes. En effet, le droit de donner aux lois une sanction quelconque, vous l'avez délégué au

roi, comme tous les autres. Dans l'absence du roi, ce droit retourne naturellement à sa source; l'assemblée constituante peut le déléguer à tout autre pouvoir, ou en suspendre la délégation. Il me paraît que les ministres ont quelques observations à faire. Je demande qu'ils soient entendus.

M. Dandré. Ma proposition passe avant tout; elle consiste à ce que provisoirement les décrets rendus par l'assemblée nationale soient scellés du sceau de l'État par le ministre de la justice, et mis à exécution par les autres ministres, sans qu'il soit besoin de sanction.ni d'acceptation.

Plusieurs membres demandent à proposer des amendemens. M. le président. Les motions se renouvellent; une foule de questions incidentes se succèdent avec rapidité; j'engage les opinans d'attendre qu'une question soit vidée avant d'en proposer

une autre.

M. Guillaume. Je disais, en appuyant la motion de M. Dandré, qu'une addition nécessaire à son projet de décret, c'était de changer la forme des lois; ainsi, au lieu de mettre à la tête: Louis, par la grâce de Dieu, etc., il faut mettre: L'assemblée nationale décrète, mande et ordonne ce qui suit.

M. le président accorde la parole à M. Delessart, ministre de l'intérieur.

M. Delessart. Je crois qu'il y aurait une mesure importante à prendre dans les circonstances; je demanderais que l'assemblée m'adjoignît deux de ses membres, avec lesquels je me concerterais sur les moyens d'exécution de vos décrets.

M. Baumetz. La proposition faite par le ministre de l'intérieur est la même que celle que l'assemblée a déjà rejetée aujourd'hui au commencement de sa séance. Un membre l'ayant renouvelée, l'assemblée n'a pas même voulu l'écouter, et elle a passé à l'ordre du jour. Il est impossible que la demande du ministre qui atteste sa modestie, mais qui n'atteste pas sa capacité, soit adoptée par l'assemblée. Plus les circonstances sont importantes, et plus elles doivent se rallier aux principes. Ils sont le roc, auquel en adhérant sans cesse, elle bravera tous les dangers et

tous les orages. Elle doit laisser les fonctions du pouvoir exécutif confiées à ceux qui en sont les dépositaires ordinaires. Ils doivent être admis à lui faire le rapport de toutes les mesures qu'ils prendront, et à lui demander tous les ordres nécessaires à l'accomplissement de ces mesures. L'assemblée, de son côté, doit tenir ses séances sans désemparer; mais je demande qu'elle rejette la proposition du ministre, sauf à prendre, si les dangers deviennent plus grands, des mesures d'un ordre supérieur.

M. le président. On a fait la motion que les ministres soient autorisés à venir à vos séances quand ils le jugeront convenable, pour vous rendre compte de leurs travaux, et à ce qu'ils soient pareillement autorisés à se retirer dans un des bureaux de l'assemblée nationale, d'où ils donneront les ordres.

M. Cazalès. La question est de savoir si des individus dé l'assemblée seront adjoints au ministre. Or, je demande que la question soit mise aux voix, afin qu'elle soit formellement rejetée.

M. Dandré. On ne peut pas mettre aux voix la proposition faile par le ministre; elle n'existe pas pour l'assemblée, si elle n'est pas relevée par un de ses membres:

M. le président donne la parole à M. Duport-Dutertre, ministre de la justice.

M. Duport-Dutertre. Je crois qu'il est utile que l'assemblée ajoute à son décret une disposition qui m'autorise complétement à apposer le sceau de l'État à ses décrets ; car c'est le roi qui m'a nommé et qui m'a confié ce sceau entre les mains. Une délibération de l'assemblée nationale peut seule m'autoriser en ce moment à en faire usage, et cette autorisation est d'autant plus nécessaire, que le roi m'a enjoint ce matin, par une apostille mise au bas du mémoire qui n'a été remis, de ne signer ni sceller aucun ordre jusqu'à ce qu'il m'en ait été autrement ordonné.

M. le président. Sur l'avis qui est donné par le ministre de la justice, un assez grand nombre de membres me demandent la parole. Je crois devoir interrompre la discussion pour communi

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