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le garder si je ne consultois que mon coeur. Je dis que pour prévenir les vengeances personnelles, il faut que la loi se charge de punir les injures. C'est à vous messieurs, à vous expliquer. Il est de fait, il est constant qu'il existe un systême de provocation contre les patriotes de cette assemblée, soit pour Ies accabler, soit pour les entraîner à des excès dont ils gémissent ensuite. Celui qui maintenant est gissant n'est pas le seul qui ait été attaqué. Plusieurs d'entre nous l'ont été dans les lieux publics, dans les tuilleries. (*) Il est tems que la loi, en reprenan sa vigueur, punisse une telle audace. Ce n'est pas le moment de sévir contre le peuple quand on l'a provoqué; c'est en marchant tout d'un pas vers le bien public qu'on calmera son agitation sans doute exaltée; c'est en donnant l'exemple de l'ordre & du calme dans cette assemblée,

Je demande donc que saisissant en ce moment l'occasion d'une injure à laquelle est réunie la plus grande lâcheté, (Et le sang froid que vous avez promis, a dit M. de Foucault !) puisqu'elle est dirigée contre un homme qui a été provoqué pendant trois jours, & qui s'est laissé aller à une démarche dont nous gémissons tous, dont il est lui-même momentanément la victime nous rentrions enfin dans la place qui nous est assignée, nous fassions justice des perturbateurs de notre repos; alors seulement nous pourrons empêcher le peuple de se porter à des excès. Commençons donc par punir l'homme qui s'est permis d'appeller scélérat celui que nous esti, que nons chérissons tous. Je demande que l'assemblée ordonne l'arrestation du membre qui, dans le moment où nous avons besoin de modération nous entraîne par-delà toutes les bornes & qui fait de l'assemblée des législateurs de France, le modèle du plus affreux désordre. Je demande qu'il soit arrêté à l'instant, & conduit en prison pour trois jours.

mons

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(*) MM. de Menou, de Noailles, Mirabeau, &c. &c.
6 SULLIVAN, prêtre; CoSTARD, secrétaires.
Il y aura un supplément extraordinaire à midi.

A Rennes, chez R. Varar, fils, Imprimeur, N。. 791

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SUPPLÉMENT au No 108.

Suite de la séance du soir 13 novembre 1790.

C'est moi, s'est écrié un membre placé auprès du bureau des secrétaires qui ai provoqué la délibéra tion actuelle. Je prodiguois des applandissemens à la pétition louable du bataillon de Bonne-Nouvelle, lors. que M. le Roy s'est mis à dire il n'y a qu'un acélérat qui puisse applaudir,'

3 M. le Roy: J'invoque la conduite que j'ai tenús constamment dans cette assemblée.

Je vous prie de vous rappeller l'adresse que vous reçûtes de la municipalité de Paris, lorsque vous résolûtes de transférer ici vos séances. On vous promit alors que vous seriez tous dans une pleine sécurité; & je vois le peuple dans la sédition!

M. Barnave: Je rappelle ma motion; elle tend au rétablissement de l'ordre. Nous touchons au terme de la révolution; elle a besoin de calme pour s'ache ver. Je demande que dans ce moment où le peuple a besoin que la raison législative guide la sienne, je demande que nous prenions les moyens nécessaires pour prévenir les excès dont nous sommes les témoins. Il est temps de ne plus tergiverser devant la loi. Je demande, monsieur le président, que le membre qui a proféré le mot de scélérat soit arrêté par vos ordres & conduit en prison.

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M. de Foucault: Je connois tout le prix de la liberté : j'ai embrassé avec transport cet article de la déclaration des droits, que nul ne peut être arrêté en vertu d'un ordre arbitraire. J'y tiens avec opiniâtreté. Je demande que l'assemblée se punisse de l'assentiment qu'elle a 'paru donner à la proposition faite de le violer en passant à l'ordre du jour.

M. de Mirabeau: Si dans la question pénible qui nous occupe, si dans l'occasion déplorable où nous

B. tom. VIII. J. tom. III. abonnement de nov. 15,

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nous trouvons, on pouvoit employer l'ironie, je rendrois grâce au préopinant...

M. le président, s'est écrié M. de Foucault, M. de Mirabeau ne cesse d'attaquer ce que je dis : се n'est pas mon style, c'est ma personne qu'on a envoyée ici.

Je montrerai à l'assemblée, a poursuivi M. de Mirabeau, qu'au moment où on a voulu faire croire que les opinions n'étoient pas libres dans son sein,

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y a levé l'étendard de la rebellion en déclarant hautement qu'on n'obéiroit pas à la loi. Eh bien! puisque l'homme qui vient de m'interrompre ne veut pas de l'ironie, je lui lance, avec tout le mépris que je lui dois, l'anathème..

Ces paroles ont soulevé le côté droit: A l'ordre ; en prison, s'est-il écrié tout hors de lui, J'ai rappellé l'opinant à l'ordre, a dit M. le président. Cela ne suffit pas, lui a-t-on répondu.

M, de Foucault: Je prie l'assemblée de ne point s'arrêter à ce qu'elle vient d'entendre. Cela ne m'affecte en rien..

M. de Mirabeau: Oui, sans doute, j'ai dû être rappellé à l'ordre, si un membre de cette assemblée n'a pas le droit de faire éclater tout son mépris contre un autre membre qui proclame son refus d'obéir à la loi.

On ne cesse de nous tourmenter, tantôt par des provocations individuelles, tantôt par des rugissemens tumultuaires , pour nous entraîner au-delà de toute mesure, nous qui voulons prouver combien la loi nous est chère, combien notre honneur nous est précieux. (Murmures du côté droit, applaudissement à gauche.) Et on croit que le respect pour la loi peut s'établir dans le royaume, lorsque nous ne poùvons pas même la faire respecter ici... On veut qu'il ne tienne qu'à nous d'ordonner le royaume, quand nous ne pouvons pas même ordonner dans notre sein une poignée de conspirateurs insolens....

Je déclare positivement, puisqu'il le faut, que le salut suprême, l'achevement de la constitution, le complétement de la loi exigent impérieusement que, si l'as

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semblée persévère à démontrer, comme je l'ai dit plusieurs fois, que sa force fait sa foiblesse, il est absolument indispensable, dis-je, que le peuple ressente les injures faites à ses défenseurs. Ceux que la voix paisible de notre président ne peut contenir, ceux que notre indignation ne peut effrayer, ceux qui s'honorent de l'improbation de la majorité de cette assemblée, & par conséquent de l'improbation générale, ceux-là ne peu, vent échapper à des catastrophes affreuses.

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Dans ce mouvement, qu'on traite si aisément de sédition, celui qui est le chef de la force armée quand il a rappellé au peuple le respect dû à la loi a reçu cette réponse : Pourquoi les députés ne la res pectent-ils pas? Voilà ce qu'on a répondu à M. de la Fayette.... Si vous ajoutez qu'au milieu de cette destruction d'effets, car on ne peut dire dilapidade cette maison dévastée en ce moment ona respecté le tableau du roi; si vous ajoutez que ce peuple qui, dans son indignation généreuse, vouloit effacer de la liste des maisons des citoyens, la maison de l'homme qu'il regardoit comme son ennemi, ou comme l'ennemi de celui qui est son ami; si vous ajoutez, dis-je, que ce peuple a voulu être fouillé en sortant, yous, connoîtrez le motif qui le dirige 2 vous avouerez que les amis de M. de Lameth, qui le connoissent & qui le chérissent, ont raison de s'indigner contre ceux qui l'insultent. Je demande que la punition de M. le Roy soit assez sévère pour qu'on ne dise pas que nous avons perdu cette soirée dans le délire de l'emportement, & que nous n'avons fait que des jeux d'enfans.

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Des applaudissemens réitérés ont convert & souvent interrompu M. de Mirabeau. La discussion alors a été fermée.

M. le Roy: Je suis sincèrement affligé de la lon gueur des débats occasionnés par le propos indiscret qui m'est échappé. Je déclare que plein de respect pour les ordres de l'assemblée, je suis prêt à me rendre dans la prison de Saint-Germain-des-Prés, si elle me l'ordonne, pour y rester le temps qu'elle fixera.

La question préalable a été invoquée & adoptée sur ! tous les amendemens; & il a décrété que M. le Roi se rendroit à l'Abbaye pour trois jours.

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La municipalité de Paris a paru à la barre, en échar pes. M. Bailly a dit : La municipalité de Paris, qui est votre ouvrage, qui est née de la constitution que vous avez donnée à la France; la municipalité, qui n'a pu encore venir vous offrir les hommages de sa reconnoissance, a cru que sa sollicitude lui feroit trouver accès auprès des pères de la patrie. Voici l'arrêté qu'elle nous a chargé de vous présenter:

Le corps municipal alarmé de la fréquence des com bats singuliers qui se succédent dans la capitale, considérant qu'il est instant d'arrêter les désordres dont les suites seroient si funestes en ce moment, a arrêté de se transporter sur le champ vers l'assemblée nationale pour la supplier de proscrire les duets, qui contras tent manifestement avec le caractère d'un peuple bon & juste.

Dans sa réponse, M. le président a invité les of ficiers municipaux à assister à la séance.

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c'est

Nous demandons a répondu M. Bailly · ́qu'il· nous soit permis de retourner à l'hôtel-de-ville à-dire, à notre poste & à notre devoir.

L'assemblée a applaudi généralement, & a renvoyé cette pétition au comité de constitution.

M. Salles a fait le rapport suivant, au nom du comité des rapports: La société des amis de la consti tution établie à Dax, a été dissoute par la municipalité de cette ville à l'instigation de quelques citoyens. La municipalité a allégué pour prétexte qu'il n'y avoit plus de corporations, & qu'une pareille société étoit un outrage indirect à ceux qui n'y sont pas aggrégés. Elle a été jusqu'à saisir les papiers de la société. Celle-ci s'est plainte au comité des rapports, qui a cru d'abord pouvoir terminer ce différend par voie de conciliation. Il a écrit à la municipalité qu'elle n'avoit pas le droit d'interdire les assemblées lorsqu'elles se conforment aux loix; que les sociétés des amis de la constitution ne désignent pas plus comme ennemis de la constitution ceux qui sont hors de leur sein; que

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