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esprits différentes sensations; mais la plus générale a été la crainte & l'inquiétude de voir la chose publique compromise & en danger. On s'est beaucoup récrié contre les auteurs d'un tel plan. Les soupçons sont tombés sur différentes personnes, & entr'autres sur un homme en place qui s'est tonjours montré défenseur zelé de la liberté. Il s'en faut beaucoup que ces soupçons soient confirmés chez moi ; mais ils existent, & les peuples ont été allarmés en pensant qu'avec une armée de six mille hommes, l'explosion se feroit dans la capitale & se communiqueroit de proche en proche dans tout l'empire. Cette position des choses m'a fait naître l'idée de proposer à l'assemblée de s'occuper trèsincessamment de la question de savoir par qui & comment sera formée la maison militaire du roi. On dira sans doute que ce droit est dévolu à sa majesté. Je n'entre point dans cette question maintenant. Je dis seulement qu'à l'assemblée appartient de régler le nombre d'individus dont elle sera composée. Je fais la motion de charger vos comités militaire & de constitution de vous faire un rapport sur la question de savoir par qui & comment la maison militaire du roi doit être organisée ?

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M. Beauharnois : Dans tout gouvernement libre la force publique doit être proportionnée aux besoins que l'état en a pour maintenir le bon ordre. Je ne vois pas que le maintien de l'ordre exige que l'on destine aux volontés d'un seul une armée de six mille hommes uniquement dévoués à sa bienséance. Un tel établissement peut rompre tout l'équilibre du gouvernement. Je crois bien que, lorsque vos comités auront muri cette question, le résultat sera qu'il ne doit point y avoir de maison militaire. A la motion faite par M. Biauzat * j'en ajoute une autre tendante à renvoyer aussi au comité, à examiner si ou non le roi peut commander en personne l'armée ?

M. Malouet: S'il y a des combinaisons pour former la maison militaire du roi, il est de principe que c'est au corps législatif à en régler la forme & le nombre. . .; mais grand Dieu ! à quoi tendent toutes ces dénonciations successives, ces motions qui se croisent & se heurtent! Quel terme aura donc la

révolution Quand finira cette agitation qui règne dans l'assemblée, & qui tient dans une fluctuation perpétuelle les peuples inquiets? On nous parle sans cesse de contre révolution, de parti, que sais-je; mais des choses vérifiées, il ne reste que des fantomes & des chimères ; je vais vous, en annoncer une contre-révolution; c'est que, si l'on continue, on finira par fatiguer le peuple; alors faisant un mouvement rétrograde oil tombera furieux sur ses favoris, qu'il accâblera du poids de sa haine. On l'interrompt. Je me réduits & je demande qu'on renvoie au comité pour qu'il nous présente ses vues nombre dont doit être composée la maison du roi.

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sur le

M. Alexandre de Lameth; Je ne vous entretiendrai point, MM., de la seconde proposition, qui vient de vous être faite, tendante à décider que le roi ne pour roit pas commander l'armée en personne; malgré les murmures improbatifs de quelques individus, il ne seroit pas difficile d'établir, si où vouloit aborder cette question, que loin d'avilir la royauté, cette proposition tend à lui conserver son véritable caractère. On se convaincroit facilement de cette vérité si l'on vouloit réfléchir que le roi, chef suprême de toutes les parties du pouvoir exécutif, ne doit pas cesser de les surveiller toutes pour devenir général d'armée; d'est à-dire, acteur dans une des parties de l'ensemble du pouvoir exécutif. Les fonctions de général sont incom patibles avec l'inviolabilité de sa personne, que vous avez consacrée, & rendroient nulles les précautions que vous avez prises pour que jamais, l'imprudence ou les mauvaises intentions d'un général n'engageassent la nation dans une guerre, puisque le roi, par son caractère d'inviolabilité pourroit faire impunément ce qu'un général ordinaire paieroit de sa tête. Mais je passe sous silence, pour le moment, cette question, pour provoquer l'attention de l'assemblée sur le systême de quelques individus qui affectent de représenser les amis de la constitution comme les ennemis de la royauté, (Oui, s'écrient tumultueusement les acharnés de la droite). Les amis du roi ne sont pas ceux qui se pavannent d'en porter le nom; les amis du roi sont ceux

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qui ont détruit les parlemens, ceux qui ont détruit l'ordre du clergé; un mouvement d'enthousiasme s'empare du public, les tribunes applaudissent avec ce. délire d'allégresse que la force de la vérité & la haine des abus enfantent chez un peuple régénéré), les amis du roi sont ceux qni ont détruit les monumens de la. féodalité, qui ont mis fin à cette éternelle rivalité du trône & de l'aristocratie; les amis du roi sont ceux qui ont brisé les barrières que la barbarie des temps & le despotisme avoient placés entre le peuple & le roi. (Les applaudissemens recommencent avec la même vivacité ; tout à l'assemblée si ce n'est la droite, applaudit; l'opinant est mème assez long-tems sans pou-. voir continuer ).

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Oui, je le répéterai, d'après un de nos collègues qui l'a dit avec autant de vérité que d'éloquence, l'alliance sainte & durable est celle du prince & du peuple; & cette alliance, vous l'avez fondée, vous l'avez cimentée à jamais en détruisant toutes les tyrannies intermédiaires que l'ignorance & l'usurpation avoient

enfantées.

Personne n'est dupe de la sollicitude patriotique du préopinant, M. Malouet qui paroit craindre que le peuple ne se se lasse de la liberté, & que revenant sur ses pas il n'abandonne ceux qui se sont constamment dévoués à la défense de ses intérêts. I craint de fatiguer les peuples par des inquiétudes ! selon lui, il ne faut plus penser aux troubles, à la contre-révolution! Eh! quel moment prend-il pour nous motiver cette dangereuse sécurité ! c'est celui où les ennemis de la patrie ne rougissent point de marcher sous les étendards d'un ministre coupable, qui a bien par une fuite ignominieuse, soustraire sa tête au glaive de la loi, mais qui ne pourra jamais sauver son nom de la honte, de l'opprobre & de l'exécration de ses contemporains & de la postérité. (Les noirs restent interdits au milieu d'un déluge d'applaudissemens). C'est celui où ce ministre prévaricateur, Calonne, court les pays voisins pour réunir contre nous tous les élémens de la contre-révolution; mais que M. Malouet se rassure car nous ne cesserons de

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veiller, de combattre ; nous périrons, s'il le faut, pour les intérêts du peuple & l'achevement de la constitution. Le peuple, par de vifs applaudissemens, manifeste qu'il connoît ses amis ).

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Je reviens messieurs 3 à la proposition de M. Biauzat, & je dirai que le comité militaire instruit de la fermentation qu'a excité dans Paris le bruit répandu d'un prochain changement dans la garde nationale, se rappellant les services constans qu'elle n'a cessé de rendre & pour la défense de la liberté & le maintien de l'ordre public dans les circonstances les plus orageuses. (Ici tout applaudit dans l'assemblée, même les noirs), se rappellant les témoignages de satisfaction que vous avez domé à son zèle infatigable, me charge de vous proposer de renvoyer à vos comités mi litaire & de constitution, tout ce qui est relatif à l'or-. ganisation de la maison militaire du roi.

Quant à la partie de la garde nationale connue sous le nom de gardes soldées, qu'on a cherché à inquiéter sur son sort à venir, l'assemblée n'oubliera jamais les services qu'ils ont rendu dans la revolution, & quels que soient les dispositions qu'on adopte pour la maison militaire du roi, ils doivent être sûrs que leurs intérêts ne seront point oubliés.

M. de Lameth demande le renvoi aux deux comités de constitution & militaire, la discussion se ferme, & la proposition est adoptée.

M. de Foucault demande acte à l'assemblée que le côté droit n'a point pris part à cette délibération. La séance se lève à trois heures & demie.

Séance du soir.

Adresse du canton de Fribourg qui demande l'exécution de ses traités avec la France. Renvoyée au comité diplomatique.

Lettre du résident de France près f'évêque ds Liége, qui prête son serment civique.

Adresse de la ville de Montpellier qui demande le renvoi des ministres, M. de Montmorin excepté.

Un agriculteur s'est présenté à la barre & a annoncé un métier d'agriculture par le moyen duquel un homme

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seul

gers.

peut labourer sans employer aucun secours étran

L'académie des sciences a annoncé que l'éloge de Francklin sera fait dans sa prochaine séance, & elle a invité les membres de l'assemblée nationale à y assister. Elle a envoyée également une instruction qu'elle se propose d'adresser aux quatre-vingt-trois départemens, sur les poids & mesures. L'assemblée en a ordonné l'impression.

M. Enjubault a repris la suite de son projet de décret sur la législation domaniale, dont les premiers articles ont été décrétés dans la séance du8 novembre. Le reste l'a été dans cette séance, à l'exception des apanages qui ont été ajournés.

XIX. L'échangiste, dont le contrat sera révoqué sera, au même instant, remis en possession réelle & actuelle de l'objet par lui cédé en contr'échange sauf les indemnités respectives qui pourroient être dues, & s'il a été payé des retours ou soultes, de part ou d'autre, ils seront rendus à la même époque, ou compensés, s'il y a lieu, & si les soultes n'ont pas été payées, il sera fait raison des intérêts pour le tems de la jouissance.

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XX. Les échangistes qui auront rempli toutes les conditions prescrites, & qui par le résultat des opérations se sont trouvés débiteurs d'une soulte dont ils ont dû payer les intérêts jusqu'à ce qu'ils eussent fournis des biens & domaines fonciers de la même nature 2 qualité & valeur, seront admis à payer lesdites soultes ou retours, ensemble les intérêts d'icelles en deniers ou assignats, sans aucune retenue, & l'administrateur-général des domainns sera autorisé à donner toute quittance bonne & valable, & sera tenu de verser dans la caisse de l'extraordinaire le montant desdites soultes ou retours, avec l'intérêt, du jour qu'ils sont dus; & à cet effet les chambres des comptes seront tenues de fournir tous les renseignemens nécessaires.

ó SULLIVAN, prêtre; COSTARD, secrétaires.

A Rennes, chez R. Vara, fils, Imprimeur, No. 791.

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