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vasion d'Arnold et de Cornwalis, acquit les droits les plus sacrés à la reconnaissance de ses concitoyens. Ce fut lui qui remplit le premier le poste important d'ambassadeur des États-Unis à la cour de France, à la satisfaction des deux nations. Enfin, ce fut lui qui, ayant été nommé secrétaire-d'état en 1792, à l'époque des prétentions ridicules et désorganisatrices de M. Grenet et de l'arrogance hautaine du ministre anglais, qui cherchait à abuser de la faiblesse politique des États-Unis, fit parler à son gouvernement un langage noble et indépendant. » Tel est le portrait que le duc de Liancourt a fait de Jefferson. Jefferson succéda à John Adams dans la présidence des États-Unis, et les destinées de sa patrie restèrent pendant huit ans confiées à ses mains. Il mourut à l'âge de 84 ans, au mois de juillet 1826, et le même jour la république eut aussi à pleurer la mort de Jolin Adams.

ton.

CHAPITRE II.

Opinions faussement attribuées à Washington sur les quakers. Les pendus déguisés en quakers. La paix universelle. Que deviendraient les guerriers et les conquérans. Animosité des Américains contre les quakers. Anecdotes racontées à Brissot par WashingVoyage de Philadelphie à la maison de WasLes papeteries de l'avocat Fisher. Les Classiques français du petit-fils de Francklin. Le rouge, le blanc et le bleu de miss Vining. Description de Montvernon et de l'habitation du général Washington. - Tableau de la vie et portrait du Cincinnatus américain.

hington.

Les moulins de Brandwine.

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Ainsi Chatellux, pour ridiculiser ou calomnier les quakers, s'est armé de quelques mots échappés ou peut-être faussement attribués à Washington, et a voulu le ranger parmi leurs ennemis. Je n'ai ententendu personne, au contraire, me parler des quakers avec plus d'impartialité que cet homme célèbre, dont l'esprit de justice est surtout remarquable. Il m'avoua que, dans le cours de la guerre, il avait eu une mauvaise opinion de cette société; il la connaissait peu, parce qu'à cette époque il y avait peu de mem

bres de cette secte en Virginie. Il attribuait à leurs sentimens politiques ce qui était l'effet de leurs sentimens religieux. Lorsqu'il campait dans le comté de Chester, habité principalement par les quakers, il croyait être dans un pays ennemi, parce qu'il ne put engager aucun quaker à lui servir d'espion; mais aucun ne servit d'espion contre lui à l'armée anglaise.

par

Vous trouverez cependant le fait contraire avancé leurs détracteurs; mais la source de cette erreur est facile à découvrir. Comme les quakers fréquentaient sans passe-port les deux armées, comme à la fin on les vit sans ombrage, les espions, pour faire leur métier plus sûrement, empruntèrent l'habillement particulier aux quakers; plusieurs furent pendus dans ce costume. De là l'accusation d'espionnage fut jointe à toutes celles que l'animosité des Américains portaient contre eux. Cette animosité était telle, que le congrès qui constitua l'indépendance de l'Amérique se joignit au peuple qui les persécutait, et il bannit à plus de deux cents milles de leurs familles les chefs qui donnaient le plus d'ombrage. Mon respectable et éloquent ami Myers Fisher était du nombre. Leur justification ne fut point écoutée; ils obéirent. Mazzei, qui dans son ouvrage * répète la violente adresse

*

Voyez les Recherches sur les États-Unis, t. 3, p. 67. Philippo Mazzei, auteur de cet ouvrage, coopérait à la

que Payne publia contre eux, se garde de citer la réponse qui lui fut faite par Myers Fisher; telle est la logique de ce calomniateur des Amis. C'est ainsi que lui ou son prête-nom a indignement outragé Penn dans son journal, en s'appuyant d'un factum écrit par Francklin, l'avocat des adversaires de la famille de Penn. Serait-on fondé à conclure aujourd'hui que le duc de Rohan, le soutien et l'ornement du calvinisme en France, voulait faire ses affaires aux dépens de son parti et qu'il aimait à jouer le rôle de roi, parce que le ministre Baba, l'écho de ses ennemis, avançait ces assertions dans l'assemblée de 1662? *

Mais d'où provient cette haine des Américains contre la secte des Amis? Le voici : les quakers ont vu que la base première du bonheur universel était la paix universelle, cette paix que l'on appelle un rêve de l'abbé de Saint-Pierre; ils ont vu que le moyen de parvenir à cette paix était de prononcer anathème contre l'art de la

guerre.

Les livres sacrés leur disaient, qu'il viendra un temps où les nations ne lèveront plus le glaive contre les nations. Ils ont vu que le moyen d'accélérer la réalisation de cette prophétie était de donner

rédaction du Journal de Paris ; c'est dans cette feuille qu'il avait précédemment écrit en faveur du marquis de Chetellux contre Brissot.

*

Voyez les Mémoires de Rohan, tome i, page 160.

l'exemple; que les discours ne serviraient à rien, si la pratique n'y était conforme; que les souverains trouveraient le secret de perpétuer les guerres, tant qu'ils pourraient soudoyer des mains pour égorger, et ils ont résolu de ne jamais prendre les armes, de ne jamais contribuer de leurs richesses à aucune guerre. On les a tourmentés, martyrisés, volés, emprisonnés, ils ont tout souffert; et enfin, lassée par leur constance, la tyrannie les a exemptés du service militaire; elle a été même forcée de prendre des détours pour arracher d'eux des contributions.

si

Je le demande à présent, si toutes les sectes eussent adopté cet esprit anti-militaire, toutes prononçaient anathême à la guerre, que deviendraient nos héros, lorsqu'aucun automate ne se laisserait plus dresser à l'art infernal de tuer son semblable? Que deviendrait l'ambition des conquérans, lorsque tous les hommes changés en quakers refuseraient d'un commun accord, et avec une fermeté inébranlable, de seconder avec un fusil leurs prétentions?

Si nous aimons le bien public, faisons donc des voeux pour que cette société pacifique couvre tout le globe, ou faisons des vœux au moins pour que ses principes humains soient universellement adoptés! Alors se réalisera cette paix universelle que les quakers ont déjà réalisée dans les contrées où ils sont les plus nombreux.

Les quakers de la Pensylvanie ont trouvé en

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