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1353. Les habitants peuvent-ils demander ut singuli la répression des contraventions?

1354. Police du roulage sur les chemins vicinaux de grande communication.

1355. Police réglementaire des chemins ruraux.

Droits de l'administration.

Alignements.

1355 bis. Répression des contraventions.- Compétence. 1356. Droits des passants quand un chemin est impraticable.

1313. La France est traversée dans tous les sens par des grandes routes qui établissent entre les principales villes des moyens faciles de communication: les communes rurales ont aussi besoin de communiquer entre elles et avec les grandes routes; il leur faut des chemins qui facilitent l'exploitation des terres et le transport des denrées. Quand ces chemins n'existent pas, ou quand ils sont mal entretenus, l'agriculture languit, le commerce est entravé, les habitants vivent misérablement sur une terre qui leur procurerait l'aisance si elle était fertilisée par le travail, et si ses produits pouvaient être facilement transportés sur les marchés.

Depuis un demi-siècle, le système des communications générales a beaucoup gagné; nos grandes routes, créées et entretenues par le Trésor public ou par les départements, présentent aujourd'hui un ensemble satisfaisant. Il n'en a pas toujours été de même des chemins qui existent dans l'intérieur du pays et qui sont à la charge des communes; longtemps ils ont été établis avec peu de discernement et sans l'observation des règles de l'art, et abandonnés par l'incurie des administrations locales et l'égoïsme des habitants à l'action destructive du temps et aux envahissements des riverains. La loi du 28 juillet 1824 s'est efforcée la première de les tirer de ce mauvais état; mais, reconnue

TOME III.

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insuffisante, elle a été remplacée par la loi du 24 mai 1836, aujourd'hui en vigueur.

1344. Il faut distinguer les chemins vicinaux proprement dits et les chemins vicinaux de grande communication.

On appelle chemins vicinaux (de vicus, bourg) les chemins publics établis dans l'intérêt de la généralité des habitants d'une commune. On entend par là nonseulement les chemins qui établissent des communications entre les communes, mais encore ceux à l'aide desquels les habitants d'une commune jouissent des choses d'un intérêt général pour eux tels sont ceux qui conduisent à une rivière, à une fontaine, à l'église, à la maison commune, à la grande route, etc. (V. instr. du min. de l'int. du 24 juin 1836.) On a longtemps employé indistinctement les mots chemins vicinaux et chemins communaux; la loi de 1836 a évité cette confusion, et le ministre de l'intérieur, dans son instruction de 1836, déclare que désormais les mots chemins vicinaux désigneront seuls les chemins que les communes seront forcées d'entretenir, et auxquels s'applique la législation spéciale qui nous occupe.

1315. Parmi les chemins vicinaux, il en est qui servent à un grand nombre de communes, et forment ainsi des communications dont l'intérêt a quelque chose de départemental. Ces chemins, auxquels on donne le nom de chemins vicinaux de grande communication, sont désignés par le conseil général, sur la proposition du préfet, après l'avis des conseils municipaux et des conseils d'arrondissement; ils sont placés sous l'autorité du préfet (1), et, sans cesser d'être à la charge des

(1) D'où il résulte que c'est le préfet qui accorde l'autorisation nécessaire pour bâtir le long de ces chemins, quand le règlement qu'il a fait le porte ainsi. (C. cass. crim., 29 août 1840, Jouffret.)

communes, ils peuvent recevoir des subventions sur les fonds départementaux (1. du 21 mai 1836, 7, 8, 9) et sont régis par la police du roulage (1. du 34 mai 1851, 1; décr. du 10 août 1852). Les délibérations des conseils généraux sur cette matière ne peuvent pas être attaquées, quant au fond, devant le Conseil d'Etat par la voie contentieuse, parce que ce sont des actes d'administration pure (Conseil d'Etat, 34 mai 1839, Ce de Montgaroult ; ; mais ils peuvent l'être pour violation des formes prescrites par la loi du 21 mai 1836, par exemple, si l'on n'avait pas pris l'avis des conseils municipaux. (Cons. d'Etat, 19 février 1840, ville de St-Etienne.) Nous verrons plus loin quelles sont les autres règles particulières applicables aux chemins de grande communication (nos 1323, 1341, 1354).

1316. Lorsqu'on s'est occupé de substituer l'ordre à la confusion qui régnait depuis si longtemps dans cette branche importante de l'administration, une première opération était nécessaire : c'était la reconnaissance et la déclaration des chemins qui, par le degré d'utilité qu'ils présentaient, devaient être déclarés chemins vicinaux, entretenus comme tels par les communes et soumis à une police spéciale; ce qui emportait l'indication de leur direction, de leur largeur, et souvent la répression des usurpations que la négligence de l'administration avait laissé opérer. Cette opération, qui a reçu le nom de classement, a dû être faite dans toutes les communes de France; mais elle n'a pas épuisé le droit de l'administration. Il peut se faire que des omissions aient eu lieu, ou que de nouveaux besoins motivent le classement de nouveaux chemins; il est donc toujours utile de connaître la marche que doit suivre ⚫ l'administration et les effets de ses décisions.

Le préfet charge le maire de dresser un état des che

mins qu'il regarde comme nécessaires aux communications; cet état indique : 1o la direction de chaque chemin, c'est-à-dire le lieu où il commence, celui où il aboutit, et les hameaux ou autres localités principales qu'il traverse; 2° la longueur des chemins sur le territoire de la commune ; 3° leur largeur actuelle et les portions qu'il pourrait être nécessaire d'élargir (1). L'état des chemins ainsi préparé est déposé à la mairie pendant un mois; les habitants de la commune sont prévenus de ce dépôt par une publication faite dans la forme ordinaire; ils sont invités à prendre connaissance de l'état des chemins dont le classement est projeté, et avertis que, pendant le délai du dépôt, ils pourront adresser au maire toutes les observations et réclamations dont le projet de classement leur paraitra devoir être l'objet, soit dans leur intérêt privé, soit dans l'intérêt de la commune. Après l'expiration du délai d'un mois, l'état dressé par le maire, ainsi que les oppositions ou réclamations auxquelles il a donné lieu, sont soumis au conseil municipal, qui donne son avis sur le tout; sa délibération, ainsi que les pièces à l'appui, sont transmises au sous-préfet, lequel y joint son avis et les envoie au préfet; après l'examen de ces divers documents, le préfet rend un arrêté portant que tels chemins de telle largeur font partie des chemins vicinaux de la commune de..... (Instr. du 24 juin 1836.) La marche à suivre est la même quand il s'agit d'une déclaration isolée.

1317. Il est important de bien déterminer la nature et les effets de l'arrêté du préfet qui classe des chemins vicinaux. Cet arrêté est une émanation de l'autorité

(1) Le ministre, dans son instruction, engage les préfets à prendre pour maximum de la largeur des chemins ordinaires six mètres, et pour les chemins de grande communication, huit mètres.

discrétionnaire de l'administration qui, après avoir pris tous les renseignements de nature à l'éclairer, prononce sur le quid utiliùs. Par conséquent, les réclamations auxquelles il donne lieu ne peuvent être formées que par la voie administrative, et non portées devant le Conseil d'Etat par la voie contentieuse (C. d'Et., 4 janvier 4851, Aulet), à moins qu'il ne soit attaqué pour incompétence et excès de pouvoir (C. d'Et., 11 avril 1848, Delpont), et, selon nous, pour inobservation des formalités requises dans l'intérêt des particuliers (n° 170) (1). Les effets de l'arrêté sont déterminés par l'article 15 de la loi du 24 mai 1836, ainsi conçu :

« Les arrêtés du préfet portant reconnaissance et >> fixation de largeur d'un chemin vicinal attribuent » définitivement au chemin le sol compris dans les li» mites qu'ils déterminent.

» Le droit des propriétaires riverains se résout en une » indemnité qui sera réglée à l'amiable, ou par le juge de paix du canton, sur le rapport d'experts

>> nommés conformément à l'art. 17. »

Cet article n'est qu'une application du principe général qui revêt l'autorité administrative du droit de déterminer ce qui fait partie du domaine public, et qui, subordonnant l'intérêt particulier à l'intérêt général,

(1). arrêt du Conseil d'Etat, 14 août 1837 (Guttin). Cependant un arrêt du Conseil du 17 août 1836 (Coudère) décide que l'absence de publications et d'affiches n'entraîne pas la nullité de l'arrêté du préfet. Le motif donné par le Conseil d'Etat est que la publicité n'est pas prescrite par les lois et règlements, et que les publications et affiches, utiles et pratiquées dans certains cas, ne sont pas prescrites d'une manière générale et absolue. L'instruction du 7 prairial an XIII, qui était applicable aux faits de la cause, se sert en effet de ces mots : il parait convenable que, etc L'instruction du 24 juin 1836 est au contraire conçue d'une manière impérative. Enfin, dans l'espèce, il était prouvé que le propriétaire avait connu le projet du préfet. (V. plus bas la théorie des recours.)

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