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» attribuait d'une manière absolue à l'autorité admi>>nistrative la connaissance de toutes les contraven» tions de grande voirie, et notamment de dépôts, de quelque nature qu'ils soient et abstraction faite de » toute espèce de détériorations; qu'en jugeant ainsi, » le tribunal correctionnel de Nevers a faussement appliqué l'article 1er de la loi du 29 flor. an X, et » a formellement violé l'article 3, titre XI de la loi du » 24 août 1790, et l'article 471 du Code pénal. »

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La chambre criminelle de la Cour de cassation décidait d'abord que la loi du 29 floréal an X ne s'appliquait pas à la partie des grandes routes qui traverse les villes, lesquelles, pour ce qui est relatif à leur commodité, sûreté ou salubrité, pouvaient devenir l'objet de règlements municipaux dont l'exécution était sanctionnée par l'article 475 du Code pénal. (C. C. crim., 25 avril 1839, Double.) Mais, par un arrêt du 3 octobre 1851 (Lepage), elle a adopté la jurisprudence de l'arrêt solennel que nous venons de citer.

Conformément aux principes que nous avons exposés ci-dessus, nous pensons que la juridiction des conseils de préfecture, établie par la loi du 29 floréal an X coexiste avec les attributions municipales telles qu'elles sont fixées par les lois de 1790 et de 1837, ainsi qu'avec les différentes dispositions du Code pénal, et nous croyons devoir décider que, toutes les fois qu'il y aura anticipation, dépôt de fumier ou d'autres objets, détériorations ou autres contraventions prévues par la loi du 29 floréal an X, commises dans les rues ou places faisant partie de la grande voirie, ces différentes contraventions seront réprimées par le conseil de préfecture, quand même elles seraient aussi prévues par le Code pénal ou par des règlements de police municipale, car la surveillance de l'administration en matière de grande

voirie ne peut être interrompue dans la traversée des villes, bourgs et villages; mais que les contraventions aux arrêtés municipaux statuant sur des points non prévus par la loi du 29 flor. an X seront de la compétence de l'autorité judiciaire.

Quant à la concurrence entre les tribunaux administratifs et les tribunaux judiciaires, avec préférence pour le premier saisi, elle offre cet inconvénient que, la pénalité étant différente suivant la juridiction, le même fait, un dépôt de fumier ou d'immondices par exemple, pourrait être puni d'une amende s'élevant jusqu'à 500 fr., s'il était poursuivi devant le conseil de préfecture (arrêt du Cons. du 4 août 1733), tandis que, s'il était poursuivi devant le tribunal de simple police, il ne pourrait être puni, aux termes de l'art. 471, no 4, que d'une amende de 1 à 5 fr. On ne peut admettre cette différence dans la pénalité pour le même fait, surtout lorsque l'on considère que, si les amendes en matière de grande voirie sont plus considérables qu'en matière de petite voirie, c'est à cause de l'importance des grandes routes, et que des contraventions commises dans une rue peuvent avoir des conséquences beaucoup plus graves que celles qui sont commises en pleine campagne. Enfin nous repoussons la distinction faite par l'arrêt entre les dépôts qui sont de nature à entraîner la détérioration de la route et ceux qui ne produisent pas ce résultat, parce que l'art. 4 de la loi du 29 floréal an X défend d'une manière générale les dépôts de fumier et d'autres objets, et en cela nous préférons la jurisprudence du Conseil d'Etat à celle de la Cour de cassation (C. d'Et., 22 août 1839, Blanpain) (1).

(1) La Cour de cassation n'étend pas sa jurisprudence aux réparations faites sans autorisation aux maisons qui bordent une rue faisant le prolongement d'une grande route, car elle a décidé, le 3 février 1854

1303. Lorsqu'il s'agit des contraventions à la police des routes et des contraventions à la police des chemins de fer, assimilées par l'article 11 de la loi du 15 juillet 1845 aux contraventions ordinaires de grande voirie, aucune loi n'exige que les procès-verbaux qui les constatent soient notifiés au contrevenant, et le conseil de préfecture est valablement saisi soit par la remise du procès-verbal, soit par l'opposition du réclamant. (Cons. d'Et., 18 nov. 1842, Fillon.)

Lorsqu'il s'agit de contraventions commises par les cessionnaires cu fermiers aux clauses du cahier des charges des chemins de fer ou aux décisions rendues en exécution de ces clauses, en ce qui concerne le service de la navigation, la viabilité des routes impériales, départementales et vicinales, ou le libre écoulement des eaux, les procès-verbaux doivent être notifiés administrativement, dans les 15 jours de leur date, au domicile que les concessionnaires ou fermiers doivent élire à cet effet, puis transmis au conseil de préfecture du lieu où la contravention a été commise. (L. 15 juill. 1845, art. 12 et 13.)

En matière de roulage, le procès-verbal doit être notifié avec citation par la voie administrative au domicile du propriétaire de la voiture trouvée en contravention, tel qu'il est indiqué sur la plaque, ou tel qu'il est indiqué par le contrevenant, si la plaque manque ; dans les cas où le conducteur est seul poursuivi, c'est à son domicile qu'est faite la notification. Si le domicile du conducteur est demeuré inconnu, la notification est valablement faite à celui du propriétaire. Elle doit être faite dans le mois de l'enregistrement du procès-verbal, à peine de déchéance; ce délai est étendu à deux mois crim., Ve Letulle), que cette contravention était de la compétence du conseil de préfecture.

quand le contrevenant n'est pas domicilié dans le département où la contravention a été constatée, et à un an quand le domicile du contrevenant n'a pu être constaté au moment du procès-verbal. Le prévenu, dans ce cas, doit produire ses moyens de défense devant le conseil de préfecture dans les trente jours de la notification du procès-verbal ; à l'expiration de ce délai, le conseil prononce, que les moyens aient été produits ou non. (L. du 30 mai 1851, art. 23, 24.)

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1304. La loi du 29 floréal an X et le décret du 16 décembre 1811 renvoient les contraventions en matière de grande voirie devant le conseil de préfecture, mais sans indiquer les peines applicables; ces peines sont ordinairement des amendes, résultant principalement des anciens règlements, édits ou arrêts du Conseil encore en vigueur aujourd'hui, qui sont quelquefois disproportionnées avec le délit. Ainsi l'arrêt du Conseil du 27 février 1765 punit d'une amende de 300 francs les propriétaires qui ont entrepris des constructions ou des reconstructions le long des grandes routes, sans avoir demandé et obtenu l'alignement; ceux qui, sans autorisation préalable, ont exécuté des réparations aux bâtiments longeant la voie publique, ou établi des saillies aux façades de leurs maisons, etc. L'arrêt du Conseil du 4 août 1731 punit d'une amende de 500 francs ceux qui ont déchargé des graviers, fumiers et autres immondices sur les grandes routes (1). La même contravention

(1) Il n'entre point dans notre plan de présenter un tableau de la pénalité. On pourra consuller sur ce sujet les ouvrages spéciaux, et notamment le Recueil des lois sur la voirie, de M. Davenne; le Code de la voiric, de Fleurignon ; le Traité des grands chemins, de M. Garnier ; la seconde livraison du Code municipal, de MM. Gillon et Stourm; le Traité des travaux publics et de la voirie, de M. Husson, etc. V. aussi no 1171, en note.

est punie d'une amende de 1 à 5 francs par l'article 471, n° 4, du Code pénal.

Les amendes établies par les anciens règlements consistaient dans une somme fixe, et n'avaient ni maximum ni minimum, comme celles que prononce le Code pénal; le conseil de préfecture était obligé de les appliquer sans réduction, quelle que fùt d'ailleurs la légèreté de la contravention, par la raison que, s'il avait diminué la peine déterminée par la loi, il aurait empiété sur le droit de faire gràce qui n'appartient qu'à l'Empereur; c'est ainsi que le Conseil d'Etat l'a décidé par un grand nombre d'arrêts. Mais, comme les décisions du Conseil sont revêtues de la forme des décrets impériaux, et deviennent par la signature de l'Empereur un acte de sa puissance, elles prononçaient elles-mêmes cette réduction.

Pour éviter les inconvénients de cet état de choses, la loi du 23 mars 1842 décide que les amendes fixes, établies par les règlements de grande voirie antérieurs à la loi des 19 et 22 juillet 1791, pourront être modérées, eu égard au degré d'importance ou aux circonstances atténuantes des délits, jusqu'au vingtième desdites amendes, sans toutefois que ce minimum puisse descendre au-dessous de 16 francs. (Art. 1, § 4.) Le Conseil d'Etat cependant, dont les décisions n'ont de valeur qu'autant qu'elles sont confirmées par l'Empereur, conserve le droit, même après la loi du 23 mars 1842, d'abaisser l'amende au-dessous du minimum. (C. d'Et., 14 mars 1845, Grésilion.) Quelques-uns des anciens règlements prononcent des amendes arbitraires. Le Conseil d'Etat décidait qu'il n'y avait lieu, dans ces différents cas, à appliquer aucune peine. (Arrêt du Cons., 20 avril 1840, Kerriot.) La loi du 23 mars 1842 statue que les amendes, dont le taux était laissé à l'arbitraire

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