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gnent l'établissement des usines. (Instr. du 49 therm. an VI; v. no 1444.) Nous croyons qu'on doit appliquer à ces différentes constructions, en cas de modification ou de suppression, les règles que nous avons exposées ci-dessus relativement aux usines elles-mêmes. (V. nos 1449 et suiv.)

4453. Il faut mentionner ici, quoique étrangère au droit administratif, la loi du 29 avril 1845, qui, dans le but de faciliter l'irrigation des propriétés éloignées des cours d'eau, permet aux propriétaires qui veulent se servir, pour l'irrigation de leurs propriétés, des eaux naturelles ou artificielles dont ils peuvent disposer, d'exiger le passage de ces eaux sur les fonds qui ne leur appartiennent pas, soit pour les y conduire, soit pour les en faire sortir, à charge d'une juste et préalable indemnité; il n'y a d'excepté de cette servitude que les maisons, cours, jardins, parcs et enclos attenant aux habitations. La loi du 11 juillet 1847 autorise les propriétaires qui veulent user de ce droit à obtenir la faculté d'appuyer sur la propriété des riverains opposés, sous les mêmes conditions et exceptions, les ouvrages d'art nécessaires à la prise d'eau ; il ne s'agit, dans ces différents cas, que du règlement d'intérêts privés, règlement de la compétence des tribunaux ordinaires. (L. du 29 avril 1845, 4, et du 11 juillet 1847, 3.) Il n'est aucunement dérogé aux lois qui règlent la police des caux. (Id., 5; id., 4.)

1454. Les avantages que les cours d'eau procurent aux riverains ont naturellement pour corrélatifs des charges qui doivent être supportées par ceux qui en profitent. Lorsqu'il est nécessaire, pour empêcher les débordements ou les changements de cours de la rivière, de faire des constructions, telles que digues, barages, etc., la dépense est supportée par toutes les pro

priétés qui en profitent. La nécessité de ces travaux est constatée par le gouvernement. On procède dans les formes établies pour le desséchement des marais; il est créé un syndicat et une commission spéciale (n° 1394), ét la dépense est supportée par les propriétés protégées dans la proportion de leur valeur, de leur position, du degré de danger ou de préjudice auquel elles sont exposées. (L. du 16 sept. 1807, 33, 34. C. d'Et., 8 janv. 1836, Oziol.)

1455. La loi du 14 floréal an XI veut qu'il soit pourvu à l'entretien des digues et ouvrages d'art qui y correspondent de la manière prescrite par les anciens règlements et d'après les usages locaux (art. 1). Les rôles de répartition des sommes nécessaires au payement des travaux d'entretien, réparation ou reconstruction, sont dressés sous la surveillance du préfet, rendus exécutoires par lui, et le recouvrement s'en opère de la même manière que celui des contributions directes. Les contestations relatives au recouvrement de ces rôles, aux réclamations des individus imposés et à la confection des travaux, sont portées devant le conseil de préfecture, sauf recours au Conseil d'Etat. (L. 14 floréal an XI, 3 et 4.)

1456. Les mêmes règles s'appliquent au curage des rivières, qui est mis à la charge des riverains des cours d'eau non navigables ni flottables, comme une conséquence des avantages dont ils jouissent. (L. du 14 floréal an XI, 1.) Il faut observer qu'en l'absence d'un règlement ou d'un usage local qui l'y autorise le préfet ne peut mettre à la charge des riverains les frais de curage d'un cours d'eau non navigable, sans les avoir préalablement mis en demeure de procéder eux-mêmes à ce curage au droit de leur propriété (C. d'Et., 18 janv. 1851, Durand.) L'art. 2

de la loi du 14 floréal an XI décide que, lorsque l'application des règlements ou l'exécution du mode consacré par l'usage dans les deux cas ci-dessus éprouve des difficultés, ou lorsque des changements survenus exigent des dispositions nouvelles, il y est pourvu par le gouvernement dans un règlement d'administration publique rendu sur la proposition du préfet, de manière que la quotité de la contribution de chaque imposé soit toujours relative au degré d'intérêt qu'il aura aux travaux qui devront s'effectuer. Le ministre de l'intérieur, dans son instruction du 5 mai 1852, explicative du décret du 25 mars 1852 sur la décentralisation, dit, à propos de l'art. 51 du tableau A, qui met les cours d'eau non navigables dans les attributions du préfet en ce qui concerne leur curage, qu'il leur appartient désormais de faire les nouveaux règlements dans le cas prévu par l'art. 2 de la loi du 14 floréal an XI. Un préfet ayant usé de ce droit, et un usinier ayant réclamé contre la nouvelle répartition, le Conseil d'Etat a condamné implicitement l'opinion émise par le ministre, et décidé que la répartition, dans l'espèce, devait avoir lieu d'après les anciens règlements et les usages locaux. (C. d'Etat, 12 juillet 1855, Garnier.) Quelle que soit la solution donnée à cette question, le nouveau règlement doit être précédé d'une enquête el de la délibération des conseils municipaux traversés par les cours d'eau. (Instr. du 5 mai 1852, art. 54.) Le curage ne doit avoir pour résultat que de rendre à la rivière ses anciens bords. S'il était nécessaire de l'élargir, et que les riverains ne voulussent pas céder gratuitement le terrain nécessaire, on devrait procéder par la voie de l'expropriation. (Instr. du 5 mai 1852, S 51.) Le décret du 25 mars 1852 mettant dans les attributions des préfets « les cours d'eau non navigables

ni flottables, en ce qui concerne leur élargissement et leur curage, » un préfet en avait conclu qu'il pouvait par un arrêté élargir le lit de la rivière aux dépens des propriétés riveraines; mais cette prétention a été réprimée par le Conseil d'Etat, qui a décidé que le décret du 25 mars ne donne aux préfets le droit d'ordonner l'élargissement des cours d'eau que dans le cas où cette mesure n'entraîne pas l'expropriation des propriétés riveraines, et a par conséquent annulé l'arrêté préfectoral pour excés de pouvoir. (C. d'Et., 15 mars 1855, Amiot-Robillard.)

Il appartient à l'administration de déterminer les limites des cours d'eau. (C. d'Et., 14 avril 1853, Amiot; 16 février 1854, Burgade.) Il nous paraît résulter de ces arrêts que l'on doit suivre dans ce cas une régle analogue à celle que nous avons développée pour la reconnaissance des choses du domaine public (nos 794-1380). C'est à l'autorité administrative à fixer les limites normales du cours d'eau, et cette fixation laisse entière la question de propriété, dit l'arrêt Amiot. Il est difficile de déterminer un cas où la question de propriété pourra être élevée utilement à l'égard d'un terrain déclaré faire partie du lit, puisque cette détermination aura un effet rétroactif et que la possession des riverains n'aura jamais été que précaire (no 794 et 1400). Si le terrain occupé par les agents de l'administration est déclaré ne pas faire partie du lit, le riverain a droit à une indemnité qui est réglée par le jury (arrêt Burgade); mais il nous semble incontestable qu'il pourrait aussi se faire remettre en possession, et même, si son terrain avait été détérioré, demander des dommages-intérêts qui, en cas de contestation, seraient réglés par le conseil de préfecture.

1457. D'après les différents développements auxquels nous nous sommes livrés, nous croyons pouvoir généraliser ainsi les règles de la compétence en matière de cours d'eau:

L'administration statue sur toutes les questions qui se rattachent à l'intérêt général ou collectif; l'autorité judiciaire prononce sur celles qui n'ont qu'un intérêt privé.

Il faut donc s'adresser à l'administration quand on veut obtenir un règlement d'eau général ou toute mesure devant exercer de l'influence sur le régime général des eaux, quand on veut faire prescrire des travaux de défense, un curage général, la suppression de choses qui entraînent des inconvénients généraux, tels que l'inondation des prairies, la destruction des rives, la corrup tion des eaux, etc. Il faut encore s'adresser à elle lorsqu'on veut obtenir des modifications à un règlement ou à un acte émané d'elle, parce que l'autorité judiciaire ne peut modifier les actes administratifs.

Les particuliers peuvent saisir les tribunaux des réclamations qu'ils exercent les uns contre les autres à l'occasion de leurs droits privés (1) (C. C. req., 27 nov. 1844, Gilbert; -id. req., 26 juillet 1854, Currie), même de ceux qui, précaires vis-à-vis l'administration, ont entre eux toute leur force. (C. C. civ., 6 mars 1855, Bonnel.) Quand il existe un acte administratif qui réglemente l'usage de ces droits soit d'une manière générale, soit d'une manière spéciale, comme

(1) Les juges de paix connaissent, à charge d'appel..., des entreprises commises, dans l'année, sur les cours d'eau servant à l'irrigation des propriétés et au mouvement des usines et des moulins, sans préjudice des attributions de l'autorité administrative, dans les cas déterminés par les lois et par les règlements. (L. du 25 mai 1838, 6; v. aussi C. C. civ., 2 août 1853, Giraud.)

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