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côté, ne peut paver le chemin de halage, y bâtir des murs, des quais, en un mot modifier le terrain de manière à restreindre ou à gêner la jouissance du propriétaire.

de

Le but de la servitude est le tirage des bateaux et des trains; par conséquent les bateliers seuls ont le droit passer et de conduire avec eux des bêtes de somme. Un particulier dont le fonds serait situé dans le voisinage ne pourrait se servir du chemin de halage pour l'exploitation de son fonds, ou pour y faire un dépôt de matériaux; à plus forte raison, le public ne pourrait-il en jouir pour y passer soit à pied, soit en voiture; enfin, les bateliers eux-mêmes ne peuvent l'employer à un autre usage qu'au tirage des bateaux: ainsi ils ne pourraient y établir un lieu fixe de déchargement (1). Ila même été déclaré, dans la discussion de la loi du 15 avril 1829, que les pêcheurs ne peuvent se servir du marchepied que comme les autres navigateurs, pour le tirage de leurs bateaux et de leurs filets, et qu'ils n'ont pas le droit de retirer leurs filets et de les y étendre pour les faire sécher, parce que ce serait là une aggravation de la servitude. L'art. 35 les oblige à traiter de gré à gré avec les propriétaires pour l'usage des terrains dont ils ont besoin pour retirer et assener leurs filets. La nature de la servitude peut être modifiée par des titres ainsi il est possible qu'une commune ou que des particuliers aient stipulé des droits de passage sur les chemins de halage; ce sont là des conventions qui constituent des servitudes particulières, et les contesta

gation, mais prudence à demander l'alignement, à cause des variations que peut subir la limite du chemin.

(1) Arrêt du Conseil du 26 août 1818 (Perrier). Mais on doit tolérer des dépôts momentanés, motivés par des circonstances imprévues, telles, par exemple, que l'imminence d'un naufrage, etc.

tions qui s'élèvent à leur occasion doivent être jugées par les tribunaux ordinaires.

1434. De ce que le chemin de halage n'est qu'une servitude qui laisse la propriété du fonds entre les mains du riverain, il résulte que celui-ci peut encore profiter des atterrissements, des accroissements et des relais qui en augmentent l'étendue, toujours à la charge de conserver la largeur du chemin. (C. N., 556, 557.) Dans le cas inverse, c'est-à-dire lorsque la rivière, au lieu de se retirer du bord, empiète sur le fonds, soit en rongeant les terres, soit en les recouvrant, le propriétaire voit la servitude s'avancer avec elle. (C. d'Et., 24 juillet 1845, Smetz.) Alors naît la question de savoir s'il lui est dû une indemnité pour la démolition des constructions et l'abatage des arbres qui peuvent être la conséquence de ce changement dans l'état des lieux. En droit rigoureux, on peut dire qu'il n'en est pas dû, parce que le riverain est tenu, par la situation même de son héritage, de laisser le chemin de halage, quelles que soient d'ailleurs les modifications qu'éprouve la rivière; le changement du lit est une force majeure dont l'Etat ne lui doit point d'indemnité, pas plus que lui-même n'en doit à l'Etat quand l'eau, s'éloignant de ses rives, lui procure le bénéfice d'une alluvion. Dans la pratique cependant, l'administration accorde des indemnités aux riverains qui justifient que les plantations et bâtiments dont la destruction est ordonnée étaient antérieurement à la distance légale de la berge (1).

Il peut même se faire que le fonds riverain soit tout entier couvert ou emporté par les eaux; alors le chemin de halage porte sur le fonds voisin, devenu ainsi rive

(1) Décisions du directeur général des ponts et chaussées des 29 oct. 1811, 19 mai 1818, 27 juill. 1823.

rain par suite de ce changement dans le cours de la rivière. Mais, comme dans le cas précédent, nous pensons qu'il est conforme à l'équité de donner une indemnité au nouveau propriétaire, bien que, dans la rigueur du droit, on puisse la lui refuser, puisque c'est toujours par suite de la situation de son fonds dans le voisinage d'une rivière et des événements de force majeure qui l'ont rendu contigu, que la servitude lui est imposée. Enfin, si la rivière cesse d'être navigable et flottable, la servitude de halage cessant en même temps, les propriétaires reprennent le libre exercice de leurs droits.

1435. La nature d'une servitude est d'obliger le propriétaire du fonds servant à laisser faire; il n'est pas tenu en général de faire lui-même les dépenses nécessaires à l'exercice de la servitude. (C. N., 697-698.) Aussi le propriétaire du terrain sur lequel porte le chemin de halage n'est-il obligé que de s'abstenir des actes de jouissance qui nuiraient au passage; c'est à l'Etat à faire les dépenses de premier établissement; c'est encore à lui à réparer les dégradations, à moins qu'elles ne proviennent du fait du propriétaire (V. l'avis du Conseil d'Etat du 8 messidor an XIII). Cette distinction sert de base à une décision du Conseil d'Etat rendue contre un propriétaire qui avait fait des plantations et établi des clôtures sur le terrain de contrehalage. Une décision ayant transporté sur sa propriété le chemin de halage qui passait sur l'autre rive, ce propriétaire a été condamné à détruire les obstacles qui genaient la servitude de contre-halage; mais il a été déclaré en même temps qu'il ne pouvait être tenu de réparer et de mettre en état la partie de terrain qu'il était nécessaire d'ajouter pour compléter un chemin de ha

lage qui n'existait pas encore. (C. d'Et., 23 mars 1854, Cornudet.)

1436. Nous avons dit que l'on ne pouvait faire sur les chemins de halage que des dépôts momentanés et accidentels. Il existe des lieux destinés à l'embarquement, au débarquement et au dépôt des marchandises: ce sont les ports, qui font partie du domaine public, et sont régis par les lois de la grande voirie et par des règlements spéciaux faits par les autorités locales. (Décret du 10 avril 1812.) De simples débarcadères peuvent être établis sur le bord des fleuves et rivières pour le service de la navigation avec l'autorisation du préfet, qui fixe les tarifs et les conditions d'exploitation. (Décr. du 25 mars 1852, t. D, no 7.)

§ IV. - Poursuite et répression des contraventions.

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1437. Les cours d'eau du domaine public et leurs accessoires font partie de la grande voirie (1); par conséquent les contraventions commises dans leur courant, sur les chemins de halage, sur les ports, sont constatées, poursuivies et réprimées conformément à ce que nous avons dit dans les nos 1292 et suiv. Il faut cependant ajouter aux agents ayant capacité pour dresser les procès-verbaux les inspecteurs de la navigation. (L. du 29 flor. an X, art. 2.)

1438. Nous avons déjà vu, n° 1300, que la détermination des contraventions de grande voirie proprement dite, placées par la loi du 28 pluv. an VIII dans la compétence des conseils de préfecture, présentait quel

(1) L. 29 floréal an X; -décr. 16 déc. 1814, t. 9;-décr. 10 avril 1812. Cette règle s'applique aux canaux de navigation concédés à perpétuité à des compagnies. (C. d'Et., 22 fevrier 1850, Sabot.)

ques difficultés; des difficultés analogues existent en ce qui concerne les contraventions dont nous nous occupons ici. Le décret du 10 avril 1812 est ainsi conçu : « Vu la loi du 29 floréal an X, relative aux contra»ventions en matière de grande voirie; vu le titre IX » de notre décret du 16 décembre 1811, prescrivant » des mesures répressives des délits de grande voirie, » et complétant la loi du 29 floréal, notre Conseil » d'Etat entendu, nous avons décrété et décrétons ce qui suit: Art. 4er. Le titre IX de notre décret pré» cité est applicable aux canaux, rivières navigables, >> ports maritimes de commerce et travaux à la mer, » sans préjudice de tous les autres moyens de surveil» lance ordonnés par les lois et décrets, et des fonctions » des agents qu'ils instituent. » Le titre IX du décret du 16 décembre 1811 se réfère lui-même à la loi du 29 floréal an X, dont l'art. 10 porte: « Les contraven» tions en matière de grande voirie, telles qu'antici»pations, dépôts de fumiers et autres objets, et toutes » espèces de détériorations commises sur les grandes » routes, sur les arbres qui les bordent, sur leurs » fossés, ouvrages d'art et matériaux destinés à leur » entretien, sur les canaux, fleuves et rivières navigables, leurs chemins de halage, francs-bords, fossés » et ouvrages d'art, seront constatées, réprimées et pour» suivies par voies administratives. » La Cour de cassation et le Conseil d'Etat décident l'un et l'autre que cet article n'est pas restrictif, et qu'il place dans la compétence exclusive et absolue du conseil de préfecture toutes les contraventions qui peuvent être commises dans le domaine de la grande voirie, et spécialement tout ce qui tient à la libre et sûre navigation sur les fleuves et rivières navigables ou flottables. C'est par suite de ces principes que le Conseil et la Cour ont dé

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TOME II.

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