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stacles qui pourraient lui nuire, et prescrit les mesures qui la facilitent. Il en est autrement lorsqu'il s'agit de créer un chemin nouveau, ou, ce qui revient au même, de rendre public un chemin privé, ou bien encore de redresser un ancien chemin. Dans ces différents cas, il faut agir par la voie de l'expropriation pour cause d'utilité publique, lorsque les propriétaires ne consentent pas à une cession amiable.

1322. C'est le préfet qui, par un arrêté, déclare T'utilité publique, quelle que soit d'ailleurs la somme à laquelle les travaux s'élèveront. (L. du 21 mai 1836, 16.) L'arrêté du préfet remplace ici le décret impérial exigé par l'art. 4 du S.-C. du 25 décembre 1852. D'autres modifications encore sont apportées aux règles générales par l'art. 16 de la loi du 21 mai 1836. Les jurés qui prononcent sur l'indemnité sont choisis, par le tribunal de première instance qui prononce l'expropriation, sur la liste générale prescrite par l'article 29 de la loi du 3 mai 1841; il n'y a que quatre jurés titulaires et trois supplémentaires; l'administration et la partie intéressée ont respectivement le droit d'exercer une récusation péremptoire; le jury est préside par un des membres du tribunal, ou par le juge de paix du canton; ce magistrat assiste aux délibérations, et a voix délibérative en cas de partage. (L. 21 mai 1836, 16; C. de cass., 23 juin 1840, Marceau.)

La loi de 1841 sur l'expropriation pour cause d'utilité publique est-elle ici le droit commun, ou bien la loi de 1836 a-t-elle organisé pour la matière qu'elle régit un système particulier et distinct? Une instruction ministérielle du 24 juin 1836, après avoir fait ressortir le but de l'art. 16 de la loi de 1836, ajoutait : "Le législateur a donc extrait de la loi du 7 juillet » 1833 (qui réglait alors l'expropriation) les seules dispositions qu'il lui a paru nécessaire de conserver

» pour régulariser les opérations relatives aux chemins » vicinaux, et l'art. 16 de la loi du 21 mai 1836 pré» sente l'ensemble complet de ces formalités. »

Dès notre seconde édition, nous avions combattu ce passage de l'instruction; depuis lors la jurisprudence et les discussions de la loi de 1841 sont venues confirmer notre opinion. - Dans la discussion de la loi de 1841, M. Gillon disait avec l'assentiment de la Chambre: «Notre loi dominera celle du 21 mai 1836 sur les che>> mins vicinaux, en ce sens qu'elle remplacera toutes » les dispositions que cette même loi empruntait à celle » du 7 juillet 1833; par exemple, les causes du pourvoi » en cassation, réglées par notre loi nouvelle, passent » dans la loi du 21 mai; de même cette dernière s'amé>> liore virtuellement, nécessairement de toutes les dispositions qui ne sont pas inconciliables avec le >> caractère spécial et exceptionnel de cette loi. » Enfin l'art. 12 de la loi du 3 mai 1841, en dispensant, par une disposition nouvelle, de l'application des art. 8, 9 et 40 les travaux d'ouverture et de redressement des chemins vicinaux (1), prouve que son intention est d'étendre à ces travaux celles de ses autres dispositions qui ne sont pas inconciliables avec la loi de 1836 (24 juin 1844, Laroche).

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C'est d'après ces motifs que nous nous rangeons à l'opinion de ceux qui pensent que l'enquête préalable prescrite par l'art. 3 de la loi du 3 mai 1841 doit précéder l'arrêté du préfet, quoique l'art. 16 de la loi du 31 mai 1836 n'en parle pas. Cette enquête est faite conformément à l'ordonnance du 23 août 1835, quand il s'agit de chemins vicinaux qui ne sortent pas de la commune, et conformément à l'ordonnance du 18 février 1834, quand il s'agit de chemins vicinaux

(1) Ces mots, qui n'étaient pas dans l'art. 12 de la loi du 7 juillet 1833, ont été ajoutés dans l'art. 12 de la loi de 1841. (V. note 1 de la p. 110.)

qui traversent le territoire de plusieurs communes. La publication des plans parcellaires et l'enquête qui la suit doivent avoir lieu conformément aux art. 5, 6, 7 de la loi du 3 mai 1841 (V. no 662); le procèsverbal dressé par le maire, contenant les déclarations et les réclamations des parties, est transmis au conseil municipal, qui tient la place de la commission d'enquête; ses observations et l'avis du sous-préfet sont transmis au préfet, qui, par un second arrêté, pris en conseil de préfecture (L. du 3 mai 1841, art. 12; - C. C. civ., 22 mai 1843, Randhuit), détermine les propriétés qui doivent être cédées (C. C. civ., 30 avril 1845, Desplats); sauf le cas où le conseil municipal a proposé des modifications, parce que la décision alors appartient à l'administration supérieure. (L. du 3 mai 1841, 12; — C. C. civ., 21 août 1843, Reulos.)

A défaut de cessions amiables, l'expropriation est prononcée par le tribunal de première instance, dont nous avons fait connaître la mission nos 664 et suivants; le tribunal nomme un des juges ou le juge de paix du canton pour présider le jury organisé conformément à l'article 16 de la loi du 21 mai 1836. Cet article ajoute « Le juge recevra les acquiescements des parties; son procès-verbal emportera translation » de propriété. » Ces derniers mots sont impropres, car la mission du juge président du jury ne commence qu'après le jugement du tribunal; or c'est le jugement du tribunal qui, en prononçant l'expropriation, opére la translation de propriété. (Loi du 3 mai 1841, art. 14.) Le procès-verbal du juge, soit qu'il constate l'acceptation faite par la partie de la somme qui lui est offerte, soit qu'il contienne la déclaration du jury qui fixe l'indemnité, n'a donc plus à opérer que l'envoi en possession. (Id., art. 41.)

En résumé, les modifications suivantes à la loi de 1841 nous paraissent résulter de l'art. 16 de la loi de 1836 4° substitution de l'arrêté du préfet au décret impérial; 2° possibilité de choisir le juge de paix pour présider le jury; 3° choix des jurés par le tribunal de première instance dans tous les cas; 4° diminution dans le nombre des jurés, et par conséquent dans le nombre des récusations; 5° droit donné au juge de délibé rer avec le jury, en cas de partage. (Pour le cas où l'administration s'empare d'un terrain sans observer les formalités voulues, v. no 706.)

4323. Toutes les règles que nous venons d'exposer s'appliquent aux chemins vicinaux de grande communication (1). Il faut seulement observer que le classement en est fait et que la direction en est fixée par le conseil général, sur l'avis des conseils municipaux, des conseils d'arrondissement, et sur la proposition du préfet (no 1315); mais que le préfet fixe seul leur largeur et leurs limites (2). Ainsi le corps électif, composant

(1) Un arrêt de la Cour de cassation du 20 août 1838 (ch. civ., Gouhier) décide qu'en matière d'ouverture de chemins vicinaux de grande communication, on n'est pas dispensé de l'observation des art. 8, 9, 10 de la loi du 7 juillet 1833, parce que l'art. 12 de cette loi ne dispense de l'application de ces articles que lorsque l'expropriation est demandée par une commune et dans un intérêt purement communal, et que l'expropriation en matière de chemins vicinaux de grande communication est prescrite par le préfet et dans un intérêt cantonal. Cette doctrine ne pourrait plus être soutenue aujourd'hui, en présence de la dispɔsition qui dit que les art. 8, 9 et 10 ne s'appliquent pas aux travaux d'ouverture ou de redressement des chemins vicinaux, disposition ajoutée dans l'art. 12 de la loi du 3 mai 1841 à l'ancien article 12 de la loi du 7 juillet 1833, sur la proposition de M. Renouard, afin de décider législativement la question dans un sens différent de celui de la Cour de cassation.

(2) F. instruction ministérielle du 18 février 1839 sur les limites des attributions respectives des préfets et des conseils généraux en ce qui concerne les chemins vicinaux de grande communication. (Bulletin officiel, 1839, p. 59.) Il appartient au préfet de régler seul les travaux

l'administration délibérante, vote le principe, et c'est l'agent du pouvoir exécutif qui pourvoit aux détails d'exécution. L'art. 6 de la loi du 9 ventôse an XIII, qui fixait le maximum de largeur des chemins vicinaux à six mètres, est abrogé ; le ministre de l'intérieur conseille de ne pas excéder huit mètres, non compris les fossés. (L. 21 mai 1836, 7; instr. 24 juin 1836.)

Les travaux de construction s'exécutent sous la surveillance du maire, de l'adjoint, ou d'un conseiller municipal délégué, d'après les projets approuvés par le préfet, et conformément aux indications fournies par l'agent voyer, et au besoin par les conducteurs et piqueurs qui peuvent lui être adjoints. Les entrepreneurs chargés de ces travaux sont considérés comme entrepreneurs de travaux publics, et les difficultés qui surgissent entre eux et l'administration sont de la compétence des tribunaux administratifs. (Cons. d'Et., v. travaux communaux.)

1324. La construction des chemins vicinaux, comme celle des grandes routes, impose sur les propriétés du voisinage des servitudes dont nous avons parlé en traitant des grandes routes. L'art. 17 de la loi, dans le but de régulariser l'exercice de ce droit, résume en ces termes les dispositions qui étaient éparses dans plusieurs actes législatifs : « Les extractions de matériaux, » les dépôts ou enlèvements de terre, les occupations >> temporaires de terrain, seront autorisés par arrêté du préfet, lequel désignera les lieux; cet arrêté sera notifié » aux parties intéressées au moins dix jours avant que son >> exécution puisse être commencée. Si l'indemnité ne » peut être fixée à l'amiable, elle sera réglée par le conseil

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de rectification et de redressement, en se conformant à la décision arrêtée par le conseil général. (C. C. civ., 16 août 1852, Richalet-Remy; C. d'Etat, 5 fév. 1849, de la Barthe.)

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