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On prétend que la population de la ville de Nantes s'éleve beaucoup plus haut, pour autoriser la nomination de go électeurs, cela peut être ; mais ce n'est pas aujourd'hui qu'il falloit faire cette preuve : c'étoit avant de fixer le nombre des électeurs. L'état de la population active doit précéder la fixation du nombre des électeurs, puisque c'est d'après ces états que la quotité en doit être déterminée.

sans

Hé quel seroit, messieurs, le résultat du jugement qui annullercit la nomination des députés du département de la Loire inférieure? Ce décret anéantiroit en même-tems toutes les autres élections. Il faudroit que le corps électoral se rassemblât de nouveau et recommençât toutes ses opérations. Pendant trois semaines, trois à quatre cents cultivateurs se trouveroient obligés d'abandonner leurs travaux précieux ; et dans quel tems? dans le moment le plus intéressant, doute, à une époque où les différentes récoltes appellent et fixent dans les campagnes les propriétaires et les fermiers. Ainsi, parce que la ville de Nantes a négligé de se mettre en regle et a commis une faute grave, il faudroit ou qu'un département fut tout en mouvement, ou qu'il courut risque d'être imparfaitement représenté. Messieurs, plus les fonctions des électeurs sont importantes, et plus il faut craindre de fatiguer ceux qui sont chargés de les remplir. La chose vraiment intéressante, c'est que le vœu du département ait été régulièrement émis, et il l'a été; c'est que le département soit dignement représenté, et tous ceux qui sont élus méritent la confiance dont ils ont été honorés. On porte des plaintes au nom de la ville de Nantes; et des huit députés, trois ont été pris dans son sein, l'un, commandant les gardes nationales de cette ville, l'autre, officier municipal, et le troisieme, le négociant que le commerce avoit député vers l'assemblée nationale constituante, trois citoyens qui, conséquemment, avant d'être appellés à la législature, ont reçu des marques signalées d'estime. La ville de Nantes n'a donc évidemment, sous aucun rapport, aucun motif de réclamer contre les nominations qui ont été faites. Je conclus à ce que vous les adoptiez.

M. le rapporteur: Je n'ai que deux faits à rétablir. Je vous ai dit que, le 12 mai, le département avoit fixé la journée de travail à 1 liv. M. Castel a prétendu que ces arrêtés n'avoient été connus, ou du moins n'avoient été notifiés que la veille de la tenue des séances du corps électoral. Voici la chronologie des dates.

Le 12 mai le département délibere sur la proposition du

directoire de district: il fixe à 20 sous, pour la municipa lité de Nantes, la journée de travail, et il arrête qu'un double sera envoyé à la commune de Nantes. Le 12 juin suivant la municipalité rédige un arrêté qu'on prétend n'avoir été affiché que le 18, et elle insere dans cette affiche ceci pour quatrieme condition de l'activité des citoyens, c'est de payer une contribution directe de la valeur locale de trois journées de travail fixées à Nantes à 39 sous les trois. Cela a lieu un mois après l'arrêté du département. Celui-ci instruit de cette délibération, prend, le 18 juin suivant, le délibéré suivant: Vu un imprimé intitulé, réglement concernant, etc. Le directoire, ouï le procureur-généralsyndic, et va son arrêté du 12 mai, qui fixe à zo sous le prix de la journée de travail dans toute l'étendue de la municipalité de Nantes, arrête que ladite municipalité sera tenue d'avertir le public de l'erreur qui s'est glissée dans sa délibération du 12 de ce mois, concernant la fixation du prix de la journée, et d'annoncer que ce prix a été fixé à 20 sous, et que par conséquent le paiement de 3 liv. d'imposition directe est une des dispositions nécessaires pour être citoyen actif dans les assemblées primaires, et le paiement de 10 liv. pour être éligible. Une expédition de l'arrêté du 12 juin sera jointe au présent, dont il sera, attendu la célérité du cas, donné sur-le-champ connoissance officielle et directe a la municipalité de Nantes dans la personne de son secrétaire-greffier qui sera tenu d'en don

ner son reçu.

M. : il est évident pour moi que si la commune de Nantes a été privée d'un seul électeur, le travail du corps électoral est infecté d'un vice radical et d'une nullité abso· lue. Or, tant qu'il ne me sera pas démontré que par la réunion du territoire, la ville de Nantes ne doit avoir que 4 électeurs à ajouter aux 52 que lui donne son tableau d'activité, il ne me sera pas prouvé que le corps électoral a travaillé réguliérement et légalement.

M. le rapporteur : J'ai la preuve demandée. La division de la ville de Nantes, en 18 sections, quoiqu'elle n'eût dans son tableau que 5 mille 200 citoyens actifs, lui a donné légitimement et légalement la quantité de cinq électeurs. En voici les extraits, où on peut le justifier.

L'assemblée ferme la discussion et accorde la priorité à l'avis du sixieme bureau.

M..

: Je demande qu'on rédige ainsi : l'assone

1

blée nationale ayant entendu les réclamations de la commune de Nantes, décrete la validité des opérations faites par électoral.

le

corps

M. le rapporteur: Voici une autre rédaction :

L'assemblée nationale, après avoir entendu la réclamation de la commune de Nantes, décrete qu'elle reconnoît valides et légales les nominations faites par le corps électoral du departement de la Loire inférieure.

M..

: Comme le décret est un décret de circonstance, je demanderois qu'on en exprimât les motifs (murmures).

La derniere rédaction du rapporteur est adoptée, et la séance levée à 3 heures.

Note du Rédacteur.

A la fin de la séance du jeudi 6, et à mon insçu, il a été présenté par les jeunes gens qui travaillent à la Logographie, dont ils ne sont pas inventenrs, une pétition qui, d'après certaines expressions plus que hasardées, pourroit induire en erreur les membres de l'assemblée et le public. Ces messieurs me donnent modestement le simple titre d'imprimeur. Certe qualification m'honoreroit, s'ils avoient eu la justice d'y joindre celle de Rédacteur et de propriétaire du Logographe et de l'Assemblée nationale permanente, ou Journal Logographique.

Ces deux journaux sont ma propriété, puisqu'ils sont le fruit de mes veilles, et que pour les établir j'ai dépensé des sommes considérables, sans lesquelles je démontrerai, s'il est besoin, que cette société n'auroit pas pu subsister.

On souscrit chez LE HONEY, rédacteur de cette feuille, rue des Bons-Enfans, n°. 42. Le prix de l'abonnement est, pour Paris, de 6 liv. 12 sols pour un mois, ou de 18 liv. 12 sols par trimestre, et 72 liv. par an; pour la province de 7 liv. 19 sols par mois, 21 livres 12 sols par trimestre, et de 84 livres pour l'année.

De l'Imprituerie de Er Ho DEY, rue des Bons-Enfans, no. 4aã

Séance du jeudi 6 octobre 1791.

Présidence de M. Pastoret.

M. Condorcet, secrétaire, fait lecture du procès-verbal 'd'hier.

Plusieurs membres prêtent le serment.

M. Vaugien: Je viens m'élever, non pas contre un décret rendu en apparence à l'unanimité, mais contre une étrange erreur qui l'a fait regarder comme un objet de police, et qui a empêché d'en concevoir les conséquences. Je viens exiger en même tems l'exécution de l'article 4 de la section 2 du chapitre 3 de la constitution, dans le premier exercice de nos fonctions.

Une loi romaine condamnoit à l'exil celui qui avoit diminué la majesté du peuple; et parmi nous l'opinion pu blique, plus puissante encore dans sa vengeance, couvriroit celui qui se rendroit coupable de pareilles atteintes, de l'empreinte ineffaçable du mépris universel. Je ne crains point sa sévérité sur mes principes; mais plus le sujet que je traite peut prêter à de dangereuses interprétations, plus j'ai de droit d'obtenir de de l'assemblée quelques instans de silence et même d'ettention.

La vérité est enveloppée de voiles. Il faut les déchirer avec courage, et la montrer toute entiere, elle n'en paroîtra que plus auguste. Les applaudissemens donnés à toutes les motions d'hier me présagent une grande défaveur; mais le sentiment que j'ai de mon devoir me fait considérer comme une lâcheté de me taire. D'autres peuvent braver la foudre. J'expose, je le sais, ma tête nue à l'orage, mais j'ai tout vu, tout considéré, et je ne m'en suis pas senti moins fort.

Parcourons rapidement les motifs du décret d'hier, sa nature et les effets qui en résulteront. Le roi des françois peut venir proposer au corps législatif les objets qu'il juge utiles à la chose publique, et c'est de la constitution même qu'il en a reçu le droit. Sa démarche est donc tout à la fois un acte de zele et un nouvel acquiescement à la constitution. Ne perdons pas de vue, sur-tout dans les circontance on nous nous trouvons, ces traits sont précieux à recueillir, que le roi avoit également fait la clôture de la session de l'assemblée nationale constituante. Cette assemblée pour éviter les variations, avoit déterminé un cérémonial; et ce que les immortels auteurs de la constitution avoient jugé convenable, lorsqu'ils auroient pu porter jusqu'à l'excès le sentiment dune représentation qu'ils avoient remplie si glorieusement Tome I. N°. 8. P. L.

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jusqu'à la fin de leur carriere, vous le regardez comme indécent, pour premiere opération de la vôtre: sans doute il est très-possible, et je le crois même, qu'elle s'est méprise dans les rap orts publics qu'elle a établis, mais pensez-vous avoir mieux rencontré, avoir observé ce juste milieu' que réelamoit un des orateurs d'hier!

Ne trouvez-vous pas au contraire cette matiere infiniment délicate, et digne d'être méditée dans le silence, au lieu de l'abandonner aux saillies de l'amour propre, ou au vague de l'orgueil! Soupçonnez-vous que la même séance, qui a donné le jour à ce décret, soit bien propre à pacifier les esprits encore trop exaltés? Le fanatisme de la liberté peut n'être qu'une erreur qu'on peut excuser dans le 'simple citoyen; mais il devient dans le législateur une dégradation de son carractere ( applaudi). Heureux celui qne le sentiment du bonheur public éveille, qui se défend des illusions de l'amour-propre, plus actives dans la splendeur fugitive dont nous jouissons, mais qui préfere à tous les trophées de la gloire le plaisir d'être utile obscurément.

D'après ces observations, j'oserai présenter la discussion d'hier comme prématurée, l'opinion comme très-incertaine, et je ne crois pas me tromper sur les conséquences. La constitution accorde au corps législatif la police de l'intérieur de l'assemblée, dans le lieu de ses séances et dans l'enceinte qu'elle aura déterminée; mais cette police ne peut avoir pour objet que le service en quelque sorte mécanique de la salle, et il seroit inconcevable que les relations qui existent entre le pouvoir législatif et le pouvoir exécutif, eussent pu paroître, à une seule personne, pouvoir en faire partie. Mais que dira-t-on de cet aveuglement général qui nous a empêchés de rejetter une pareille interprétation, et pouvonsnous étendre et resserrer ainsi à notre gré les opinions quelconques? Et cependant cette interprétation n'est pas moins étrange que celle qui, expliquant tout l'article constitutionnel dont nous argumentons, comprendroit la France entiere dans l'enceinte que nous ponrróns déterminer; ce qui seroit cependant très-commode, puisque, par ce moyen, nous nous passerions de toute espece de sanction et d'approbation.

Cette question a paru dans le moment même à plusieurs membres être peu de saison. Ce décret a pénétré de douleur et d'effroi les membres de l'assemblée nationale constituanté, qui, riches de vertus et de l'estimo publique quittoient leur place sans regret, croyoient que des voeux qui n'étoient qu'isolés parmi eux, alloient devenir unanimes

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