Page images
PDF
EPUB

et vertu. Comment serait-il donc possible de tenter la réformation d'un ordre dont l'industrieuse prévoyance a paré d'avance à tout?

TROISIÈME CARACTÈRE.

Suite continuelle d'abus intolérables.

Enfin qu'une suite non interrompue d'abus de toute espèce s'oppose encore à cette réformation. Abus dans l'enseignement de la doctrine et de la morale, abus dans chacun des priviléges que cet ordre s'est fait accorder, abus dans cette doctrine anarchique, meurtrière et parricide dont on nous a présenté une chronologie si effrayante; abus dans la nature même. de ces vœux solennels qui ne le sont pas, dans ces engagemens qui ne sont pas réciproques, dans cet usage de lier des séculiers et des laïcs à la société par un vœu d'obéissance à un général étranger; abus enfin par la part qu'a eue en tout temps cet ordre aux maux de l'Église et à ceux de l'État.

Qu'il paraît donc impossible de réformer un institut de cette espèce, qui d'ailleurs n'est pas recevable en lui-même; qu'ainsi il serait facile de prendre sur-le-champ son parti, si les

choses étaient encore entières, mais qu'il s'agit d'examiner, dans la deuxième partie des réflexions qu'il se propose de développer, quels changemens ont pu apporter aux premières les faits qui se sont passés en France.

Dans cette seconde partie,

M. de Laverdy établit : 1° que l'institut a été rejeté en 1561; 2° il examine si cet institut a été reçu en 1603, et il soutient la négative; mais il convient que depuis cette époque les Jésuites ont une possession d'état suffisante pour ne pas statuer, quant à présent, sans entendre les parties intéressées, sans les mettre à portée de se défendre et de faire valoir leurs moyens.

Enfin il passe à l'examen de la déclaration du 2 août 1761; il dit que, si cette déclaration ne renfermait que le sursis d'un an, on devrait toujours la regarder comme obreptice ou subreptice, et comme évocation déguisée; mais qu'elle contient de plus une injonction aux supérieurs de toutes les maisons des Jésuites de rapporter, dans le délai de six mois, au greffe du conseil, ses titres d'établissement de chacune des maisons; que cette disposition prouve, de plus en plus, combien cette déclaration a été surprise à la religion du Roi, puis

qu'elle ne tend à rien moins qu'à enlever, à la cour, la connaissance de cette affaire.

Au surplus, qu'il respectera tout ce qui porte le nom sacré du Roi, et qu'il proposera un enregistrement avec les restrictions et les réserves que son devoir lui impose.

Qu'il ne s'agit donc plus que d'expliquer tout ce qu'il croit que la compagnie doit faire dans les circonstances présentes, qu'il va proposer trois arrêts et deux arrêtés, et que pour mettre de l'ordre dans le développement qu'il en doit faire, il divise le tout en quatre parties : 1o L'appel comme d'abus des bulles et constitutions;

2o Ce qui concerne la doctrine de cette société ;

3o Les précautions à prendre pour l'exécution des arrêts, et ce que nos devoirs exigent que nous faisions vis-à-vis du souverain;

4° Enfin l'enregistrement de la déclaration du 2 août.

PREMIÈRE PARTIE.

Appel comme d'abus.

Que si les choses étaient entières, si les Jésuites n'avaient pas une possession d'état quel

conque à alléguer, il ne croirait pas nécessaire de suivre les formes régulières de l'ordre judiciaire, mais que les nuages qui se sont élevés à cet égard pendant deux siècles, lui font penser qu'il est indispensable d'en suivre ici les règles les plus strictes; que c'est donc le cas de recevoir le procureur-général du Roi, appelant comme d'abus, en tant que besoin est ou serait, des premières bulles obtenues en faveur de l'institut des Jésuites, et par une suite nécessaire, de toutes les autres survenues depuis, ainsi que des constitutions, déclarations sur les constitutions, formules de vœux, décrets généraux, ou des congrégations générales et de tous autres règlemens et actes semblables; que c'est en même temps le cas d'ordonner que le général et la société seront intimés sur cet appel comme d'abus, afin de les entendre, et qu'en aucun cas ils ne puissent se plaindre d'avoir été jugés sans être entendus, et de faire signifier sans délai cet arrêt aux maisons des Jésuites de Paris et du ressort.

DEUXIÈME PARTIE.

Ce qui concerne la doctrine.

Que Messieurs ont vérifié aux commissaires

et lu un grand nombre d'auteurs jésuites qui ren versent, par leurs décisions, tous les principes du dogme et de la morale chrétienne; qu'ils y ont lu avec effroi ces décisions meurtrières et parricides qui compromettent la vie des rois, qu'ils ont vu dans ces mêmes constitutions l'uniformité de doctrine recommandée, et la nécessité imposée aux Jésuites de rien imprimer sans le consentement des supérieurs et du général; et cependant l'édition de Buzembaum renouvelle cette doctrine; qu'il paraît indispensable de condamner ces ouvrages au feu avec la lification qu'ils méritent.

qua

Que cependant il ne faut point statuer définitivement sur l'enseignement constant et uniforme de cette doctrine par la société, parce qu'elle se plaindrait d'être condamnée sans être entendue; qu'ainsi c'est le cas d'observer les formes judiciaires et de joindre la délibération définitive à cet égard à l'appel comme d'abus, sauf à disjoindre suivant l'exigeance des cas.

Mais par provision, laisserons-nous, dit-il, les sujets du Roi, sur lesquels la grande police que nous exerçons nous oblige de veiller, exposés à être séduits? ne prendrons-nous pas à cet égard les précautions les plus exactes? c'est ce qui lui paraît indispensable.

« PreviousContinue »