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>> peut vouloir que ces prérogatives tournent » au détriment de ses sujets, et que le caractère >> devienne pour eux, un piége et un sujet de >> ruine;

3o. » On pourrait saisir les biens mobiliers » du prince même que le ministre représente, >> s'il en possédait sous notre juridiction: de quel >> droit les biens du ministre seraient-ils donc >> exceptés de cette règle?

4°. » L'immunité du ministre public consiste » essentiellement à le faire considérer comme >> s'il continuait à résider dans les états de son » maître.

>> Rien n'empêche donc d'employer vis-à-vis » de lui les moyens de droit dont on userait s'il » se trouvait dans le lieu de son domicile ordi» naire.

5o. » Il en résulte qu'on peut le sommer d'une » manière légale, de satisfaire à ses engagemens, >> et de payer ses dettes.

6°. » Le privilége des ambassadeurs ne re» garde que les biens qu'ils possèdent comme >> ambassadeurs, et sans lesquels ils ne pour>> raient exercer les fonctions de leur emploi... » La cour de Hollande a adopté cette base dans » l'ajournement qu'elle fit signifier en 1721, à » l'envoyé de Holstein (1), après avoir accordé

(1) Arrêt de la cour de Hollande, du 21 de février

1721.

» saisie de tous ses biens et effets, autres que meu»bles et équipages, et autres choses apparte»> nantes à son caractère de ministre.

» Ces considérations justifient suffisamment » la règle qui est reçue dans toutes les cours, » qu'un ministre public ne doit point partir d'un » pays, sans avoir satisfait ses créanciers.

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Lorsqu'un ministre manque à ce devoir, quelle est la conduite à tenir? c'est la seule question essentielle que la matière puisse faire >> naître. Elle doit se décider par un usage con» forme aux différentes maximes qu'on a éta>> blies ci-dessus.

>> On ne parlera point de l'Angleterre, où l'es>> prit de la législation borné à la lettre de la » loi, n'admet point de convention tacite, ni » de présomption, et où le danger d'une loi po» sitive dans une matière aussi délicate, a jusqu'ici empêché de fixer légalement les prérogatives des ministres publics.

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» Dans toutes les autres cours, la jurispru» dence paraît à peu près égale; les procédés >> seuls peuvent différer.

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» A Vienne, le maréchal de l'empire s'arroge >> sur tout ce qui ne tient pas à la personne de » l'ambassadeur et à ses fonctions, une juridic

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tion proprement dite, dans une étendue qu'on >> a quelquefois envisagée difficile à concilier >> avec les maximes généralement reçues. Cette

>> autorité veille d'une manière particulière sur >> le paiement des dettes contractées par les am>>bassadeurs, surtout au moment de leur dé» part. On en a vu l'exemple, en 1764, dans la » personne de l'ambassadeur de Russie, dont > les effets furent arrêtés jusqu'à ce que le prince » de Lichstenstein se fût rendu sa caution.

» En Russie, un ministre public est assujéti à >> annoncer son départ par trois publications. >> On y arrêta les enfans, les papiers et les effets » de M. de Bausset, ambassadeur de France, jusqu'à ce que le roi eût fait son affaire des >> dettes que ce ministre avait contractées.

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» A la Haye, le conseil de Hollande s'arroge » une juridiction proprement dite dans les états » où les intérêts des sujets se trouvent compro» mis. En 1668, un exploit fut signifié à un am>>bassadeur d'Espagne en personne, qui en porta >>> des plaintes : les états jugèrent qu'elles étaient » fondées, en ce qu'il n'aurait fallu remettre l'ex» ploit qu'aux gens de l'ambassadeur (1).

» A Berlin, en 1723, le baron de Posse, minis>>tre de Suède, fut arrêté et gardé, parce qu'il >> refusait de payer un sellier, malgré les aver>>> tissemens réitérés du magistrat. . . . .. Ces exemples constatent même l'extension qu'on » a quelquefois donnée au droit de coaction.

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(1) Bynkershoeck, p. 188.

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>> On a soutenu qu'il suffisait d'avertir le mi»nistre de payer ses dettes pour justifier, en >> cas de refus, les voies judiciaires, et même la » saisie des effets.

» Grotius (1) dit que, « si un ambassadeur a » contracté des dettes, et qu'il n'ait point d'im>> meubles dans le pays, il faut lui dire honnê» tement de payer : s'il le refusait, on s'adres>> serait à son maître, après quoi, on en vien>> drait aux voies que l'on prend contre les dé» biteurs qui sont d'une autre juridiction. »

» Or, ces voies sont les procédures légales qui >> tombent sur les biens de l'ambassadeur, autres » que ceux qui sont immédiatement nécessaires » à l'exercice de ses fonctions, ainsi qu'on l'a déjà observé.

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L'opinion la plus modérée est qu'il con» vient, dans tous les cas, de s'abstenir, autant qu'il est possible, de donner atteinte à la dé>> cence qui doit environner le caractère public; >> mais le souverain est autorisé à employer l'espèce de coaction qui n'emporte aucun trou» ble dans ses fonctions et qui consiste à inter>> dire à l'ambassadeur la sórtie du pays, avant qu'il ait satisfait à ses engagemens, etc. etc. » Telle fut la jurisprudence adoptée dans cette occasion. Néanmoins, cette jurisprudence n'a

(1) Grotius, de Jure pacis et belli, lib. II, c. 18, §. 9.

pas été suivie constamment, et la complaisance du ministre des affaires étrangères, comme la dignité du ministre endétté, peuvent la faire

varier.

1775.

Restitution

Le pape Clément XIII, s'étant ouvertement brouillé avec la maison de Bourbon, à l'occa- d'Avignon au sion des jésuites, dont il se faisait le défenseur; pape, abolition des jéla cour de Versailles avait envoyé le marquis de suites. Rochechouart avec un corps de troupes, pour s'emparer d'Avignon et du Comtat Venaissin; ce qui fut exécuté le 11 de juin 1768.

La même cour, pour colorer cette invasion, fit publier un écrit anonime (1), dans lequel on attaquait les droits du pape sur Avignon, d'après les motifs suivans:

1o. La vente faite au saint-siége, en 1348, de la ville d'Avignon, par Jeanne rre, reine de Naples et comtesse de Provence, était frappée de nullité, soit d'après l'état de minorité de cette princesse, soit d'après la défense dé rien aliéner, exprimée dans le testament du roi Robert qui l'instituait héritière de la Provence, dont Avignon faisait alors partie; la loi romaine dé clarant qu'il ne pouvait y avoir de prescription. à l'égard des choses dont l'aliénation est prohibée;

(1) Recherches historiques concernant les droits du pape sur la ville d'Avignon, 1768. Cet ouvrage était de M. Pfeffel, jurisconsulte des affaires étrangères.

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