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COURS

ALPHABÉTIQUE ET MÉTHODIQUE

DE DROIT CANON,

MIS EN RAPPORT

AVEC LE DROIT CIVIL ECCLÉSIASTIQUE,

ANCIEN ET MODERNE.

Nulli sacerdotum liceat canones ignorare, nec quidquam facere
quod Patrum possit regulis obviare. Quæ enim a nobis res
digne servabitur, si Decretalium norma constitutorum, pro
aliquorum libitu, licentia populis permissa, frangatur ?
(Cœlestinus, papa, Distinctio XXXVIII, can. IV :)

ABANDON.

I n'est pas rare qu'un père de famille. abandonne sans formalité ses biens à ses enfants, qui se les partagent comme si la succession était vacante, et s'engagent à tenir à ce partage après la mort du père. Ce partage est-il valable au for extérieur ? Non, évidemment : cet abandon ou cette démission de biens est implicitement abolie par le code civil. Mais il n'en est pas de même pour le for intérieur : le partage dont il s'agit est fondé sur une convention qui, sans être reconnue par le code, n'a rien qui soit contraire aux lois et produit par conséquent une obligation naturelle : Quid tam congruum fidei humanæ, quam ea quæ inter eos placuerunt servare? L. I, ff. de Pactis. Voici les articles du code civil relatifs à cet abandon de biens :

ART. 893. « On ne pourra disposer de ses biens, à litre gratuit, que par donation entre vifs ou par testament.

ART. 1075. Les père et mère et autres ascendants pourront faire, entre leurs enfants et descendants, la distribution et le partage de leurs biens.

ART. 1076. Ces partages pourront être faits par actes entre vifs ou testamentaires, avec les formalités, conditions et règles preDROIT CANON. I.

scrites pour les donations entre vifs et testaments.

« Les partages faits par actes entre vifs ne pourront avoir pour objet que les biens pré

sents. >>

ABANDONNEMENT au bras séculier.

L'Eglise avait reçu des princes chrétiens des priviléges tout spéciaux, par lesquels les clercs ne pouvaient être jugés que par les tribunaux ecclésiastiques. Toutes les causes relatives à la religion étaient du ressort de ces tribunaux, connus sous le nom d'Offcialités (Voyez ce mot). Ces priviléges ont été repris en divers temps par le pouvoir civil, et la loi du 7-12 septembre 1790, art. 13, les a entièrement supprimés. Les clercs sont soumis maintenant, comme tous les autres citoyens, au droit commun, et justiciables des tribunaux laïques.

Autrefois, en vertu du ch. Cum non ab homine de Judic., un clerc qui était tombe dans une faute grave, par exemple, qui avait commis un vol, un homicide ou tout autre crime, devait être déposé par le juge d'Eglise; si la déposition ne le corrigeait pas, on devait l'anathématiser; si après une si sévère punition, il ne se corrigeait pas encore, alors on le dégradait, on le dépouillait de tous les habits ecclésiastiques, et on l'abandonnait (Une).

et afin que les religieux aient pour eux le respect et la soumission que des enfants ont pour leur père.

Saint Antoine, comme le premier auteur de la vie commune des moines, fut donc aussi le premier à qui l'on donna le nom d'abbé dans le sens de notre définition; mais les supérieurs des communautés de moines ne furent pas autrefois les seules personnes à qui l'on donnât ce même nom. On appelait aussi abbés, comme nous l'apprend Cassien dans ses Conférences, tous les anachorètes et les cénobites d'une sainteté de vie reconnue, quoique solitaires et simples laïques : ce qui prouve que le nom d'abbé était ancienueinent bien respectable, puisqu'il n'était donné qu'à ceux qui étaient choisis, ou qui, par leurs vertus, méritaient de l'être, pour exercer l'art sublime et difficile de conduire les âmes.

C'est dans ce même sens que les supérieurs des chanoines, vivant anciennement en communautés, furent aussi appelés abbés, sans qu'ils fussent pour cela moines comme les cénobites.

Bien que le nom d'abbé fût celui dont on se servait plus ordinairement autrefois pour appeler les supérieurs des communautés religieuses, on ne laissait pas de leur donner quelquefois d'autres noms. Dans les Règles, par exemple, de saint Pacôme, du Maître et de saint Benoit, ils étaient quelquefois appelés majeurs, prélats, présidents, prieurs, archimandrites. (Voyez chacun de ces mots.) Toutes ces différentes dénominations étaient communément en usage avant le onzième siècle; jusqu'alors on avait appelé indifféremment les supérieurs des communautés religieuses de l'un ou l'autre de ces noms, sans conséquence et sans distinction. Ce ne fut que longtemps après l'abus qui s'en fit, soit par les religieux titulaires eux-mêmes, soit par les laïques qui, en s'emparant des biens des abbayes, s'arrogèrent le titre d'abbés (voyez COMMENDE), que certains ordres réformés ou nouvellement établis imaginèrent par humilité de ne pas donner ce nom à leurs supérieurs, et de les appeler des noms plus simples de recteur, prieur, maître, ministre, gardien, comme l'on voit dans les communautés des Chartreux, des Célestins, des Mendiants et dans toutes les nouvelles congrégations de religieux.

Parmi ceux qui ont conservé le titre d'abbés, le droit canon distingue les abbés séculiers et les abbés réguliers. C. Transmissa. J. G. verb, abbatis de renunc. C. Cum ad monasterium, de statu monach.

Les abbés séculiers sont ceux qui possèdent des bénéfices ecclésiastiques sous le titre d'abbayes anciennement régulières, et depuis sécularisées. C. cum de Beneficio. (Voyez SÉCULARISATIon, offices clAUSTRAUX, PRIEUBES.) On met au rang des abbés séculiers les abbés commendataires, dont nous parlerons bientôt. De ces abbés séculiers non commendataires, les uus jouissent de certains droits episcopaux, les autres sont seulement honorés du titre d'abbés, ou n'ont avec ce titre que le droit de présider aux assemblées d'un

chapitre de cathédrale, par un faible reste de l'ancienne autorité que l'abbaye donnait en régularité.

Les abbés réguliers sont ceux qui ont actuellement des religieux sous leur gouverne ment, et à qui conviennent proprement le nom et les droits d'abbés. C. cum ad monasterium, de stat. monach., C. in singulis, eod.

Parmi les abbés réguliers, on distingue les abbés chefs d'ordre ou de congrégation, et les abbés particuliers.

Les abbes chefs d'ordre ou de congrégation sont ceux qui, étant supérieurs généraux de leur ordre ou congrégation, ont d'autres abbayes sous leur dépendance, ce qui les fait appeler quelquefois pères-abbés. Les abbés particuliers sont des abbés titulaires ou commendataires qui n'ont aucune abbaye inférieure et subordonnée à la leur. De ces derniers, il y en a qu'on appelle portatifs ou in partibus, parce que le monastère de leur abbaye est détruit ou occupé par des ennemis. On appelle encore abbés de régime, dans quelques congrégations, certains prieurs claustraux, pour les distinguer des véritables abbés en tilre. Enfin dans certains pays, comme en Portugal et en Espagne, on donne à titre d'honneur le nom d'abbé à certains curés, comme on le donne en France, par politesse, à tous ceux qui portent l'habit ecclésiastique, qu'ils soient ou non dans les ordres sacrés.

Ménage dit qu'autrefois les abbés étaient nobles ou réputés tels en France. De là vient sans doute qu'on a étendu et perpétué cette qualification dans l'usage du monde.

§ 2. ABBÉ. Election, confirmation, béné–

diction.

Dans l'origine de la vie monastique, lorsque les solitaires étaient dans le goût de se réduire en conventualité, ou ils prenaient ce parti à l'instigation de quelqu'un d'entre eux qui leur donnait ce conseil dans des vues de charité et de plus grande perfection, et alors on ne cherchait pas d'autre supérieur, à moins que celui-ci, par humilité, ne s'en excusât; ou bien, s'étant réunis d'euxmêmes pour vivre en communauté, ils faisaient également d'eux-mêmes leur choix, comme ils étaient obligés de le faire à la mort du premier fondateur ou de quelque autre abbé qui venait à mourir sans nominer ou désigner son successeur.

Comme dans ces premiers temps de ferveur les solitaires ne faisaient rien qui ne fût à leur plus grande édification et à celle de tous les fidèles, les évêques des diocèses dans l'étendue desquels ils vivaient, loin de s'opposer à leur façon de vivre, admiraient eux-mêmes leurs vertus et ne se mêlaient point de l'élection de leurs supérieurs. Cela paraît expressément confirmé par le concile d'Arles tenu l'an 451, à l'occasion d'un différend mû entre Fauste, abbé de Lérins, et Théodore, évêque de Fréjus, touchant les droits de l'un et de l'antre sur ce monastère. Néanmoins le père Thomassin, en son Traité de la Discipline de l'Eglise (part. 11, liv. s.

ch. 32, n. 19), dit que primitivement les évéques nommaient et les abbés et les prévôts, et que l'élection des abbés fut ensuite accordée aux monastères par un privilége, qui, devenant fréquent, passa enfin en droit commun. (Idem, part. III, liv. 11, ch. 33, n. 13.)

Ce premier temps dont parle le père Thomassin, ne peut être celui de saint Antoine, de saint Pacôme et d'autres anciens fondateurs de monastères, parce qu'il est certain, par les histoires, que ces saints désignaient eux-mêmes leurs successeurs, sans que les évêques prissent la moindre connaissance de leur choix, quoiqu'ils en eussent le droit. Il est certain encore que du temps de saint Benoit les évêques ne prenaient aucune part à ces élections, ou du moins fort peu, puisque par la règle de ce saint, qui fut faite en 526, il est établi, au ch. 64, que l'abbé serait choisi par toute la communauté ou la plus saine partie, et que si les moines s'accordaient à choisir un mauvais sujet, les évêques diocésains, les autres abbés, et même les simples fidèles du voisinage devaient empêcher ce désordre, et procurer un digne supérieur au monastère. L'abbé, une fois choisi, devait être bénit suivant la même règle, par l'évêque ou par d'autres abbés; et c'était là une cérémonie introduite à l'imitation de la consécration d'un évêque. La Règle de saint Benoît ayant été dans la suite la règle qui fut suivie dans tous les monastères de l'Occident, les moines élurent partout leurs abbés; il n'y eut que les monastères mis en commende, et ceux dont l'élection était autrement empêchée par les princes séculiers, comme cela était très-ordinaire dans ces anciens temps, qui n'usassent pas de ce droit (Discipl. de Thomassin, part. 2, liv. 2, chap. 39, n. 2: part. 1, liv. 2, chap. 93, n. 19; liv. 3, chap. 32, n. 6).

Les canons ne sauraient être plus exprès sur le droit d'élection appartenant aux moines, il faut les voir dans la cause 18, q. 2, du décret; nous ne rapporterons que celui du pape Grégoire 1, exprimé en peu de mots : Abbas in monasterio non per episcopum aut per aliquem extraneum ordinetur, id est, eligatur. Can. abbas. Il est donc constant que les moines dont les abbayes ne sont pas considérables, c'est-à-dire, dans le cas des réserves ou des commendes, suivant la taxe de la chambre apostolique, élisent librement leurs abbés.

Quant à la forme de cette élection, outre les règles établies pour les élections en général, et que nous rapportons ailleurs (Voy. ELECTION), il y a encore des règles particulières que les canons prescrivent pour l'éJection des abbés: elles regardent la personne des électeurs et celle des éligibles, et on peut les appliquer à l'élection de toute sorte de supérieurs de religieux.

1 Les électeurs doivent être, au temps de l'élection, de l'ordre ou du monastère où l'abbé doit être élu, par une profession de vœu expresse ou tacite. Cap. ex eo, § in ecclesiis de elect. lib. 6.

2. Pour être capable d'élire, il faut qu'un

religieux soit constitué dans les ordres sacrés, à moins que les statuts de l'ordre ou la coutume ne dispensassent de cette obligation. Dict. cap. J. G. Clem. ut qui, de ætats et qualitate.

3° Il faut qu'un électeur ne soit noté ni d'excommunication, ni d'aucune autre es-pèce de censure et d'irrégularité qui lui interdise les fonctions de son étal; qu'il no soit pas même dans aucun de ces cas qui ôtent à un religieux le pouvoir d'élire sans permission de son supérieur. Dict. cap. ex eo de elect. in 6°; cap. ult. de cler. excom. c. cum delectus de consuet.; c. cum inter, de elect. cap. fin. eod. cap. is cui, de sent. excom, in 6o.

4° Un électeur ne doit pas être convaincu d'avoir élu ou postulé un sujet tout à fait indigne pour la science, les mœurs ou l'âge. C. cum in cunctis in fin. ; c. innotuit in fin. ; c. scriptum de Elect.

5° Enfin les impubères, les laïques et les frères convers sont incapables du droit d'élire par le ch. Ex eo de Elect. in 6°. Dans certains ordres, comme dans celui des Capucins, les frères convers sont capables d'élire et d'être élus.

Quant aux éligibles, pour être tels, il faut 1° que les religieux aient atteint l'âge requis par les canons. (Voyez AGE.)

2 Il faut qu'ils aient fait profession expresse el non tacite dans l'ordre dans lequel l'abbé doit être élu, à moins que la coutume ne fût contraire, ou qu'il ne s'en trouvât point de digne ou de capable; dans lequel cas on peut avoir recours aux religieux d'un autre monastère, mais de la même règle (Voyez COMMENDE). Concil. Trident., sess. 25, decret. de Reform., cap. 21, de Regul.; c. Nullus de Elect. in 6.; Clem. I, de Elect. debet eligi ex gremio Ecclesiæ cui præficitur; c. Cum delectus de Elect.; c. 8, caus. 18, q. 2.

3° Il faut aussi qu'ils soient prêtres co qui n'est expressément établi par aucun canon. Le ch. Ier De ætate et qualitate dit seulement que les abbés qui ne sont pas prêtres, doivent se faire promouvoir à la prêtrise: Ut abbates, decani et præpositi qui presbyteri non sunt, presbyteri fiant; par où quelques canonistes ont conclu qu'il suffi- : sait d'être constitué dans les premiers ordres sacrés. Panorme, sur le chapitre cité, tient que la prêtrise est absolument nécessaire aux religieux qu'on veut faire abbés, et Barbosa prétend que cette opinion est la plus universellement reçue. Il est aujourd'hui peu de monastères où les statuts ne terminent à cet égard le différend par leurs dispositions. Les premiers abbés étaient laïques, de même que les moines qu'ils gouvernaient. Ils devinrent ecclésiastiques lorsque le pape saint Sirice appela les moines à la clérica

ture.

Pour être éligible, il fallait être né d'un légitime mariage, à moins qu'étant båtard on n'eût obtenu dispense du pape. Cap. 1. de filiis presbyt. cap. ult. eod. tit. Les papes avaient accordé aux supérieurs de différents ordres, le pouvoir de dispenser leurs reli

gieux du défaut de naissance, à l'effet d'être elevés aux dignités régulières; mais Sixte V, révoqua ces priviléges, et Grégoire XIV les a rétablis sous quelques modifications, c'està-dire, qu'au lieu d'en donner l'exercice à chaque supérieur indistinctement, il ne l'a accordé qu'aux chapitres généraux et provinciaux. (Voyez BATARD.)

5° Il ne faut être dans aucun de ces cas qui rendent irrégulier, infâme ou indigne : Ita simoniacus, apostata, homicida, perjurus, prodigus, neophytus, excommunicatus, suspensus, interdictus, notorie malus et denique patiens defectum aliquem animi seu corporis, eligendus esse nequit. Cap. constitutus de appel. c. fin. de cler. (Voyez ELECTEUR.)

Le concile de Rouen, de l'an 1074, can. 2, défend de nommer pour abbé un moine qui n'aurait pas pratiqué longtemps la vie monastique ou qui serait tombé publiquement dans un crime d'impureté.

Par une décision du pape Urbain VIII, de l'an 1626, les religieux qui ont été mis en pénitence par le Saint-Office, sont incapables des charges, même après avoir satisfait à la pénitence qui leur a été imposée. Mais il faut observer que si un religieux avait quitté son habit de religion par légèreté, et qu'il rentrât après dans son état, il recourerait tous ses droits après son absolution, et on pourrait l'élire abbé. Oldrad, cons. 202. (Voyez RELIGIEUX.)

6 De ce que les irréguliers et les indignes sont exclus des charges, il s'ensuit qu'on ne doit élever que ceux qui, comme l'exige le concile de Tibur, sont prudents dans le gouvernement, humbles, chastes, charitables, etc. Ne sit turbulentus abbas, dit saint Benoît, nec anrius, ne sit nimius et obstinatus, ne sit zelo typus et nimis suspiciosus. Doit-on nommer le plus digne? (Voy. ACCEPTION). Saint Thomas dit lui-même que les religieux les plus pieux ne sont pas toujours les sujets les plus dignes du gouvernement: Bonus civis, malus princeps.

7° Celui qui est déjà abbé d'un monastère ne peut être élu abbé d'un autre, à moins que ce nouveau monastère ne fût tout à fait indépendant de l'autre que s'il se fait une translation d'abbés d'un monastère à un autre, l'abbé transféré n'a plus aucun droit sur le monastère qu'il a quitté. (Can. unum abbatem, 21, q. 1; c. ult. de relig. domib. Concile de Trente, sess. 25, de regul. cap. 6 et 7, où il est ordonné que les voix ou suffrages seront donnés secrètement.)(Voy. SUFFRAGES.)

8° Enfin l'élection d'un abbé doit être faite suivant les statuts, règlements et usages de chaque ordre, et même de chaque monastère: Abbatem cuilibet monasterio, non alium, sed quem dignum moribus atque actibus monastica disciplinæ communi consensu congregatio præposuerit. Can. 3, et seq. caus. 18. q. 2. De là, bien que par le droit commun l'élection de l'abbé général appartienne à toute la congrégation, et celle des abbés particuliers aux religieux des monastères, qui sont sur les lieux de leur destination, s'il en est autrement prescrit par la règle, ou que l'usage et la coutume soient contraires, on doit

suivre ce qui est réglé ou ce qui est d'usage. Si les abbayes sont consistoriales, on observe à Rome les mêmes formalités que pour l'élection des évêques, suivant la constitution de Grégoire XIV, du 15 mai 1590.

Par le chapitre ne pro defunct. de elect. les religieux doivent procéder à l'élection dans les trois mois de la vacance du siége abbatial. (Voy. ELECTION, où se trouve la forme générale des élections; et Lancelot, au titre de electione.)

L'abbé qui a été élu après avoir consenti à son élection, doit la faire confirmer dans les trois mois. (Voy. ELECTION.)

Régulièrement c'est à l'évêque qu'appartient cette confirmation (Cap. 16, ex tit. de confirm. elect. lib. I, cap Monasteria, 18, q. 2). Mais si le monastère est exempt, c'est au pape. C. Si abbatem de elect. in 6°. Pie IV, par une constitution qui commence, Verb. sanctissimis in suum bull. quarant., ordonna qu'aucune sorte d'abbés, prélats et autres dignités monastiques ne pourraient s'immiscer dans l'administration spirituelle ou temporelle de leurs charges, qu'ils n'eussent été confirmés par le saint-siége, et reçu en conséquence des lettres apostoliques, c'est-àdire des bulles, sur leur confirmation: ce qui est conforme à l'Extrav. injunctæ de elect. Mais postérieurement différents ordres ont obtenu des papes des priviléges qui, en les exemptant de la juridiction des ordinaires, donnent aux religieux pouvoir d'en élever parmi eux à des charges éminentes, de faire ce que les canonistes appellent des prélats locaux, c'est-à-dire des généraux, des provinciaux qui aient sur eux une autorité absolue et indépendante d'où vient que la plupart des abbés reçoivent de ceux-ci leur confirmation, et ces généraux la reçoivent eux-mêmes du pape, quand ils n'en sont pas dispensés par un privilége tout particulier, qui donne à leur élection une confirmation implicite et suffisante; comme cela fut accordé à l'ordre de Citeaux par Eugène IV, aux frères mineurs, aux minimes, etc. Quando autem ad eligentem spectat electio et confirmatio, tum eo ipso quod eligat confir mare videtur. C. ut circa de elect. in 6°. J. G. (Voy. ELECTION.)

Les abbés élus et confirmés doivent recevoir la bénédiction de leur propre évêque ; c'est un usage attesté par Innocent III, dans le ch. Cum contingat de ætat. et qualitat. Il y a des abbés qui ont le privilége de recevoir celte bénédiction d'un autre prélat que de leur évêque. Régulièrement les abbés sont bénits par ceux-là mêmes qui les confirment.

Il n'y a point de temps fixé par les canons pour demander ou recevoir cette bénédiction, dont on voit dans le Pontifical la forme, ainsi que celle du serment qui l'accompagne quand elle se fait d'autorité apostolique; mais Tamburin dit qu'on doit là demander dans l'année. Félinus est du même sentiment. Panorme veut qu'on ne la donne qu'un jou. de fête, et c'est la disposition du Pontifical.

La bénédiction n'ajoute rien au caractère de l'abbé: Cum dicitur abbas ante benedictio

nem, cap. Meminimus de accus. Le ch. 1 de Sup. negl. prælat. ne la regarde pas même comme nécessaire, pour que les abbés puissent eux-mêmes bénir leurs moines: cependant dans l'usage un abbé ne pourrait conférer des ordres, ni faire d'autres semblables fonctions spirituelles sans être bénit. Per confirmationem electionis non transfertur potestas, quæ sunt ordinis; illa enim transferuntur per consecrationem. Cap. Transmissam, de Elect. Cette bénédiction d'ailleurs, quoiqu'elle n'imprime aucun caractère, ne se réitère point; si un abbé déjà bénit est transféré ou promu à une autre abbaye, on suit à son égard la règle établie touchant les secondes noces, qu'on ne bénit pas. C. 1 et 3 de secund. nupt.

Lorsque l'abbé, canoniquement élu, avait obtenu sa bulle, il se présentait à l'Official du diocèse dans lequel l'abbaye était située : l'official le faisait mettre à genoux devant lui, il lui faisait prêter le serment accoutumé; ensuite il rendait une sentence adressée au prieur et aux religieux, et il donnait pouvoir, en vertu de sa commission, au premier notaire apostolique, de mettre le nouvel abbé ou son procureur en possession de l'abbaye, en observant les formalités ordinaires. En France, l'élection des abbés a souffert bien des variations. Dès le huitième siècle on voit des abbayes distinguées en abbayes royales et en abbayes épiscopales. Dans les premières, le roi nommait les abbés, s'il n'en avait permis par privilége l'élection aux moines. L'évêque nommait aux autres abbayes, et son consentement était requis même pour ces élections privilégiées des religieux, ainsi qu'on le voit par ces termes du concile de Francfort, tenu en 794: Ut abbas in congregatione non eligatur, ubi jussio regis fuerit, nisi per consensum Episcopi loci illius. Depuis le dixième siècle jusqu'au seizième, les moines ont élu leurs abbés assez librement, quoique toujours obligés de requérir le consentement, ou du moins l'agrément du roi pour l'élection des abbés dans les principales abbayes du royaume. Par le concordat passé entre Léon X et François I", l'élection des abbés et prieurs conventuels était défendue; mais arrivant la vacance de ces abbayes et prieurés, le roi y nommait au pape un religieux du même ordre, âgé d'au moins vingt-trois ans commencés dans le temps des six mois du jour de la vacance, et le pape lui donnait des provisions. Il était ajouté que si le roi nominait un clerc séculier ou un religieux d'un autre ordre, ou qui fût au-dessous de l'âge de vingt-trois ans, ou autrement incapable, le roi serait tenu d'en nommer un autre dans les trois mois du jour du refus, fait en plein consistoire, et déclaré au solliciteur de la nomination, faute de quoi le pape y pouvait pourvoir librement. (Voyez CONCORDAT de Leon X.)

Ainsi autrefois les concordats avaient concédé au roi la faculté d'élire ou nommer les abbés dans la plupart des monastères. Le concordat de 1801, passé entre Pie VII et

Napoléon, n'a pas renouvelé ce privilége. parce que la loi civile ne reconnait plus d'abbayes en France. L'article premier du décret du 13 février 1790 porte même que « La loi constitutionnelle du royaume no reconnaîtra plus de voeux monastiques solennels de personnes de l'un ni de l'autre sexe en conséquence les ordres et congrégations réguliers dans lesquels on fait de pareils vœux sont et demeurent supprimés en France, sans qu'il puisse en être établi de semblables à l'avenir.» Cependant comme nous le dirons ailleurs, les vœux monastiques solennels, pour avoir cessé d'être reconnus par la loi civile, n'en sont pas moins obligatoires aux yeux de l'Eglise; de sorte que les abbayes, par le fait même de leur suppression, sont rentrées dans le droit commun pour leur élection, confirmation et bénédiction. (Voyez VOEU.)

Les souverains pontifes se sont réservé la confirmation de l'élection de l'abbé. Cependant ils ont quelquefois accordé aux supérieurs-généraux de certaines congrégations la faculté de confirmer les abbés inférieurs: par exemple, d'après un décret de la congrégation des réguliers, du 1" octobre 1834, le supérieur général de l'ordre de Citeaux confirme les abbés de la Trappe. L'abbé confirmé reçoit la bénédiction de l'évêque diocésain. Ce décret étant un précieux document pour le temps actuel, nous croyons devoir le consigner ici. Voici à quelle occasion il fut publié :

L'abbaye de la Trappe n'avait pas d'abbé depuis la mort de dom Augustin de Lestrange. En 1834, dom Perselin fut élu abbé. Son élection fut confirmée à Rome, et le cardinal Weld, assisté de deux abbés, lui conféra la bénédiction abbatiale. Le saint-siége pourvut en même temps au gouvernement des maisons de trappistes. Le 1er octobre 1834, les cardinaux Odescalchi, préfet de la congrégation des évêques et des réguliers, Pedicini et Weld, choisis dans la même congrégation pour régler ce qui concerne les monastères de la Trappe en France, ont été d'avis de statuer ce qui suit:

<< 1° Tous les monastères de trappistes en France formeront une seule congrégation qui portera le nom de Congrégation de religieux intérieurs de Notre-Dame de la Trappe.

« 2° Le général de l'ordre de Citeaux en sera le chef et confirmera chaque abbé.

« 3° Il y aura en France un vicaire-général muni de tout pouvoir pour bien administrer la congrégation.

« 4° Cette charge sera unie à perpétuité avec l'abbaye de l'ancien monastère de NotreDame de la Trappe, d'où les trappistes seront sortis; de sorte que chaque abbé de ce monastère, canoniquement élu, exerce en même temps le pouvoir et les fonctions de vicairegénéral.

«< 5° Chaque année, le vicaire-généra, célébrera un chapitre, où seront convoqués les autres abbés ou prieurs conventuels, et visitera chaque monastère par lui-même ou par

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