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vait aucun ressentiment de ce qui avait été fait. Il n'y eut plus alors le moindre obstacle aux vues des puissances protectrices du stathouder. Les états-généraux furent déterminés facilement à abandonner une alliance qui leur avait été aussi fatale, pour adopter celle que leur imposait la nécessité. Des traités conclus avec la Grande-Bretagne et la Prusse en 1788, placèrent donc l'existence de la république ( si ce terme est encore permis) sous la garantie des deux puissances. Au surplus, la Prusse avait simplement rempli dans cette affaire le rôle que la politique anglaise lui avait destiné, et elle l'avait aidée à en venir à ce résultat dès longtemps médité.

Telle fut cette révolution. Les armes françaises en opérèrent une nouvelle quelques années après. La Hollande fut envahie et conquise en 1795. Le stathouder fut obligé de fuir. Sa dignité fut abolie, et une république batave prit

naissance.

Guillaume renonça en 1802, par un traité avec la France, à son titre de stathouder héréditaire moyennant une indemnité en Allemagne, qui fut enlevée à son fils GuillaumeFrédéric lors de la formation de la confédération du Rhin. Il mourut en 1806. C'est l'époque où Napoléon ceignant son front de la couronne de Charlemagne, voulut aussi préposer un monarque aux Bataves. Le prince de sa famille qu'il fit roi de Hollande essaya de faire le bien, et descendit de son trône quand il eut reconnu qu'il ne pouvait être que l'aveugle instrument d'un bras de fer (1). La Hollande fit alors partie du grand empire.

Ce grand empire succomba sous son propre poids. Les princes confédérés avaient à peine traversé le Rhin en 1813, qu'une sourde agitation se manifesta dans les provinces qui avaient composé l'ancienne république, de même de même que dans

(1) Mémoires et documens, etc., par Louis Bonaparte, 3 vol., 1820.

celles du midi où avait régné l'aigle autrichienne. Le parti stathoudérien se réveilla de nouveau, et Guillaume-Frédéric, soutenu par les monarques étrangers dans les rangs desquels il avait combattu, parut à Amsterdam, et y fut proclamé, le 3 décembre, prince souverain des Pays-BasUnis. L'année suivante, ce même prince signa une conveution, par laquelle les puissances alliées lui faisaient cession des anciens Pays-Bas-Autrichiens, pour être réunis à sa première souveraineté; et former avec elle un état portant le titre de Royaume des Pays-Bas.

Ainsi furent réunies les dix-sept provinces, dont le fanatisme de Philippe II avait causé la dissolution; ainsi fut définitivement détruite une ancienne république; ainsi fut introduite une nouvelle monarchie parmi les états européens.

On a beaucoup écrit dans ces dernières années sur cette création. On a traité d'ineptie politique cette combinaison bizarre qui unissait deux portions, anciennement associées, à la vérité, mais depuis long-temps divisées par la religion, la langue, les mœurs et les intérêts; qui plaçait un stathouder protestant à Bruxelles, et couronnait à Amsterdam le premier officier des hautes puissances. Il nous semble que ce qui précède jette de vives clartés sur cette combinaison toute britannique. Il fallait à-la-fois dépouiller la France de ses conquêtes belgiques, comprimer le développement industriel de ces provinces elles-mêmes, enfin maintenir la Hollande dans une situation maritime et commerciale qui ne pût pas exciter d'ombrages; et l'on verra, pour peu qu'on y réfléchisse, , que tout cela était obtenu en couronnant lo stathouder.

LOIS CONSTITUTIVES

DES PAYS-BAS AUTRICHIENS.

(Extrait des actes publiés et des principaux ouvrages y relatifs.)

TITRE PREMIER.

Gouvernement en général.

SI. De la souveraineté.

Les provinces des Pays-Bas forment un état non-divisible et héréditaire de mâle en måle dans la maison d'Autriche (1); toutefois chaque province conserve ses anciennes formes de gouvernement, et ne peut être obligée par des lois portées dans une autre.

La souveraineté réside dans chaque province dans la volonté du prince ratifiée par les états.

Il y a pour les Pays-Bas un gouverneur général, qui exerce l'autorité du Souverain en son nom et en la même forme et manière, que le Souverain pourrait le faire lui-même. ·

SII. Du gouvernement.

Il y a pour les Pays-Bas, trois conseils, le conseil d'État, le conseil privé et le conseil des finances; tous sont subordonnés au gouverneur général, et destinés à l'aider de leurs lumières (2).

S III. Du Conseil d'État.

Ce conseil est composé de conseillers d'épée et de robe; le grand Maître de la cour et le commandant d'armes, y assisteront quand il sera jugé nécessaire.

(1) Pragmatique de Charles V dans Wiquefort, in-folio.

(2) Voyez Constitution établie par Charles V, le 1er, octobre 1531, et réta blie en 1725 par Charles VI.

Le conseil d'Etat s'occupe des affaires les plus importantes concernant l'état, conduite du gouvernement du pays (1).

Le nombre des conseillers est illimité; ils sont à la nomination du souverain.

SIV. Du Conseil privé.

Au conseil privé appartient la surintendance, la direction, conduite et surveillance de toute la justice et police des Pays-Bas (2); il délibère sur l'émission des nouvelles lois et l'interprétation des anciennes ; il doit veiller à la conservation de l'autorité, des prérogatives et prééminences de l'état sur les droits de la puissance temporelle, et en assurer l'exécution entre les entreprises, soit du dedans, soit du dehors.

Le conseil privé ne peut connaître d'aucune cause, ni admettre aucune instruction, contestation ou décision par voie et ordre judiciaire; il doit observer la même chose à l'égard des évocations qui pourraient être faites des causes déjà intentées devant les cours ou tribunaux de justice, à moins de délégation spéciale du Souverain ou du gouverneur général, et dans les cas de conflit de juridiction entre les tribunaux qui n'ont pas un même juge supérieur.

Le président doit faire rapport au gouverneur général de toutes choses d'importance qui se traitent au conseil, pour y être statué par lui.

Ce conseil est chargé sous les ordres du Souverain ou de son gouverneur général, de la principale direction des

finances.

Les ordonnances concernant la levée et la perception des droits d'entrée appartiennent au conseil des finances, quelquefois elles sont portées au nom seul de ce conseil, quelquefois au nom et sous la signature du gouverneur général.

(1) Ce n'était guère plus dans les derniers temps qu'un conseil honoraire, et sans activité, les affaires de son ressort étaient traitées en conseil privé ou dans des juntes spéciales. Mémoire historique, tom. 11, chap. XVI, art. 4. (2) Voyez les lettres-patentes de Charles V, de 1531 et 1540; Déclaration de Philippe IV, de 1651, Édit de Charles VI, de 1725, etc.

TITRE II.

Droits et priviléges généraux des provinces.

§ I. Droits communs à toutes les provinces.

Les peuples ne peuvent être chargés d'impôts sans le consentement des états des provinces.

Chacun doit être jugé par son juge compétent; personne ne peut être évoqué en justice hors du pays, nommément en cour de Rome.

SII. Brabant et Limbourg.

Lors de son avénement le Souverain promet, sous serment aux états des provinces, l'observation de la joyeuse entrée (1) jurée par l'impératrice Marie-Thérèse, en 1744). Les dispositions de la joyeuse entrée sont communes aux habitans des deux provinces. Cet acte porte :

S. M. leur sera bonne équitable et loyale dame (2); elle ne les gouvernera ni par la force, ni par volonté, ni autrement que par droit et sentence, et devant les juges ordi

naires.

Elle n'entreprendra la guerre pour cause concernant les pays de Brabant et de Limbourg, que du consentement des villes et pays de Brabant; elle ne prendra pas d'engagemens tendant à rétrécir les limites ou à diminuer les droits, libertés ou privilèges des mêmes pays.

» Il y a un sceau particulier, lequel devra toujours demeurer dans le Brabant, et dont on scellera toutes choses concernant les pays de Brabant et d'Outre-Meuse, sans en sceller d'autres.

S. M. composera son conseil de Brabant de dix-sept personnes, dont quinze seront Brabançons, et devront posséder une baronnie d'Estoc par eux-mêmes ou du chef de leurs femmes; les deux autres pourront être étrangers, pourvu qu'ils sachent le flamand. Ĉe conseil expédiera toutes les affaires du pays de Brabant et d'Outre-Meuse, concernant la justice et ce qui en dépend.

(1) La joyeuse entrée consistait dans un recueil d'articles consacrant d'anciens priviléges de la province.

(2) Nous rapportons ici la teneur de cet acte tel qu'il fut donné par l'impéFatrice.

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