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bonne foi reconnaîtront dans nos pages le désir de développer la révolution accomplie, et non pas d'entasser brusquement sur elle une autre révolution.

Politiquement nos vues sont restées les mêmes: nous voyons toujours la société partagée entre les traditions monarchiques et les idées démocratiques, entre les traditions chrétiennes et catholiques et les idées philosophiques. Nous pensons toujours que le devoir du pouvoir était non pas de fonder sur les ruines fumantes du passé une société inconnue, mais de développer la société vivante, et de tirer d'elle-même tous les progrès dont elle recèle l'énergique possibilité. Qui a changé? ce n'est pas nous.

Scientifiquement nous avons marché; sur plusieurs points nos théories ont pris plus de décision et de fermeté. Mais nous n'avons point jugé opportun et utile d'altérer le contenu primitif du livre. Cette philosophie du droit est partagée entre le passé et l'avenir, non-seulement dans les applications immé

diates, mais même dans les vues et les théories philosophiques. Laissons-lui ce caractère. Plus tard nous présenterons, non plus l'image du passé, mais les reflets de la vérité philosophique, tels que nous aurons pu, selon la mesure de nos forces, les percevoir et les réfléchir.

Poser les questions, définir le point où en sont venues les théories sociales, raconter les philosophes et les juger, établir les problèmes et commencer à débrouiller les difficultés principales, voilà quelle est cette philosophie du droit. Le mérite de ce livre est d'en demander un autre et de ne pas l'empêcher.

Paris, le 31 octobre 1835.

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Qu'est-ce que la pensée, si ce n'est la liberté même ? Qu'est-ce que la spéculation, si ce n'est la raison de nos actes? Quand même les actions de l'homme paraissent les plus soudaines et les plus promptes, la pensée ne les précède-t-elle pas comme l'éclair avant la foudre?

Ce n'est donc pas une stérile manie que de s'attacher à la poursuite de quelque chose qui n'est ni du pain, ni de l'or. Ceux qui seraient enclins à dédaigner les théories et les idées

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pourront être ramenés au respect, si on leur montre le signe irrécusable de la puissance de ces idées et de ces théories, je veux dire les révolutions.

La philosophie n'est donc pas destinée à mourir sous les petits traits d'un petit scepticisme; elle ne sera pas non plus étouffée sous les soucis du bien-être matériel: elle me paraît, au contraire, devoir bientôt accroître ses forces et son influence.

Je ne veux parler ici de notre dernière révolution que pour considérer le champ nouveau qu'elle a ouvert à la philosophie. Et d'abord, comment une catastrophe décrétée par Dieu, opérée par le peuple et la jeunesse, c'est-à-dire où se réunissent comme causes efficientes la raison des choses, la force et l'avenir des sociétés, ne serait-elle pas à la fois un effet d'idées antérieures et une cause d'idées nouvelles? Là réside un esprit invincible. Les révolutions, vraiment dignes de ce nom, sont les inspirations des peuples, tandis que les conspirations ne sont que les fantaisies audacieuses de quelques hom

mes.

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