Page images
PDF
EPUB
[ocr errors]

démie des inscriptions et belles-lettres, dit, dans son éloge de M. Larcher, lu à la séance publique du 25 juillet 1817, «qu'il est permis de dire sans exagération, que l'Hérodote de M. Larcher et l'Anacharsis de Barthelemy sont les deux ouvrages publiés depuis 40 ans, qui ont le plus puissamment contribué à ranimer le goût des études de l'histoire ancienne, et en général de l'archéologie. » Voyez le parallèle d'Hérodote avec Thucydide dans l'article suivant.

DÉMOSTHÈNE, célèbre orateur grec, (n. 381′ m. 322 av. J.-C.), faisoit tant de cas de l'histoire

plus beaux monumens de l'érudition française. M. de Sainte-Croix (Examen des hist. d'Alexandre, pag. 581), a dit que M. Larcher avoit, par sa chronologie d'Hérodote, mérité la reconnoissance de la postérité. M. Wyttenbach (Biblioth. crit. III, 2, pag. 153), ne s'exprime pas avec moins de force sur le mérite de ce grand ouvrage : Quo opere quantum incrementi allatum sit, cum ad intelligentiam Herodoti aliorumque scriptorum, tum ad judicium et cognitionem omnis illius historiæ et antiquitatis, si diserta epitome significare velimus, vix nobis centum paginæ sufficiant. Ailleurs (Selecta, pag. 344), il appelle M. Larcher le plus exact et le plus savant de tous les interprètes d'Hérodote. M. Chardon de la Rochette (Mélanges, tom. III, pag. 115), se rencontrant avec M. de Sainte-Croix, dans l'expression de son admiration, dit que la traduction d'Hérodote mérite toute notre recounoissance et celle de la postérité. Enfin, M. Larcher a obtenu un honneur duquel ont joui fort peu de commentateurs : sa chronologie a été traduite en latin par M. Borheck (trad. d'Hérodote, tom. I,pag. xxxix, tom. VII, pag. 7); en allemand par M. Degen (Voy. la France litt. par Ersch, tom. II, pag. 251), et ses notes ont paru dans les principales langues de l'Europe. (Voyez les Mélanges de M. Chardon de la Rochette, tom, I, pag. 59, et tom. III, pag. 83.)

de THUCYDIDE, qu'il la copia huit fois de sa main pour mieux se pénétrer de son style.

Cette histoire renferme les événemens arrivés pendant les vingt-une premières années de la guerre du Péloponèse qui a embrasé la Grèce, de 431 à 403 av. J.-C. Thucydide, qui florissoit pendant cette guerre, a écrit cette histoire en huit livres. Ils ont été publiés par Xénophon qui y a fait une suite en sept livres finissant à la bataille de Mantinée, l'an 363 av. J.-C.

Une remarque que l'on a souvent faite relativement à la poésie et à l'histoire, c'est que les hommes de génie qui ont ouvert la carrière dans ces deux parties, sont ceux qui y ont le mieux réussi. Homère n'a point encore eu de rival pour la poésie ; HERODOTE Et THUCYDIDE Sont dans le même cas pour l'histoire. Nous parlerons d'Homère dans l'article suivant; mais nous devons rapporter ici l'élégant et judicieux parallèle que Quintilien trace des deux historiens qui nous occupent : « La Grèce, dit-il, a eu plusieurs historiens célèbres; mais on convient qu'il y en a deux qui sont fort au-dessus des autres, et qui, par des qualités différentes, ont acquis une gloire presque égale. L'un, concis, serré, toujours pressé d'arriver à son but, c'est THUCYDIDE : l'autre, doux, clair, étendu, c'est HERODOTE. L'un est plus propre pour les passions véhémentes; l'autre, pour celles qui demandent de l'insinuation. L'un réussit dans les harangues; l'autre, dans les discours ordinaires. Le premier entraîne par la force; le second

attire par le plaisir (1). » Tous les deux ont porté l'histoire à sa perfection par une route différente. C'est une justice que leur ont rendue les anciens et les modernes.

ALEXANDRE (n, 356— m. 3a4 av. J.-C.), roi de Macédoine, étoit tellement passionné pour FoMÈRE, qu'il portoit toujours avec lui l'Iliade. Il appeloit les œuvres de ce poëte, ses provisions de l'art militaire. Aussi, au milieu de ses marches et de ses conquêtes, il le mettoit toujours sous son chevet aveg son épée. Après la défaite de Darius, on trouva, parmi les dépouilles de ce prince, une cassette d'un travail fini et d'un prix excessif; on la porta à Alexandre, qui aussitôt y renferma l'Iliade, en disant: << Il est naturel que l'ouvrage le plus parfait de l'esprit humain soit renfermé dans la cassette la plus précieuse du monde. » Traversant un jour le Sigée et voyant le tombeau d'Achille : «O fortuné héros,

[ocr errors]

(1) Historiam multi scripsere, sed nemo dubitat duos longè cæteris præferendos, quorum diversa virtus laudem penè est parem consecuta. Densus, et brevis, et semper instans sibi THUCYDIDES: dulcis, et candidus et fusus HERODOTUS. Ille concitatis, hic remissis affectibus melior : ille concionibus, hic sermonibus: ille vi, hic voluptate. (QUINTIL. lib. x, cap. 1.) › Rollin, de qui j'ai emprunté la traduction de ce passage, dit que les mots instans sibi sont difficiles à rendre, et qu'ils signifient que Thucydide est toujours pressé, qu'il se hâte d'aller à son but, qu'il y tend continuellement sans le perdre de vne, sans se détourner, sans s'amuser. Gedoyn les a traduits par ne s'arrêtant jamais en chemin, c'est le même sens. La traduction de ce mor ceau par Rollin me paroît plus élégante que celle de Gedoyn,

s'écria-t-il, d'avoir eu un HOMÈRE pour chanter tes victoires! >>

Il est certain qu'il n'existe point dans la république des lettres, de réputation plus grande et plus solidement établie que celle de ce poëte. C'est ce qu'a fort bien exprimé Chenier dans ces vers :

[ocr errors]

Trois mille ans ont passé sur la cendre d'Homère;
Et depuis trois mille aus Homère respecté
Est jeune encor de gloire et d'immortalité (1).

En effet, le naturel ou plutôt la naïveté, la richesse du style poétique, la chaleur et la rapidité sont les traits principaux que l'admiration saisit d'abord dans les immortelles compositions de ce génie extraordinaire qui, pour ainsi dire, a créé ce monde intellectuel qu'on appelle la poésie. Quelle grâce, quelle énergie, quelle harmonie dans les vers de cet homme que la voix de tous les peuples a proclamé le premier, le plus grand poëte de l'antiquité, de cet homme qui joignit à tous les avantages du plus heureux génie, tous ceux de la plus riche, de la plus

e

(1) J. B. Rousseau a dit dans son Ode à Malherbe: (5. LIV. III.

A la source d'Hippocrène,
Homère, ouvrant ses rameaux,

S'élève comme un vieux chêne

Entre deux jeunes ormeaux.

Les savantes immortelles

Tous les jours, de fleurs nouvelles

Ont soin de parer son front;

Et par leur commun suffrage

Avec elles il partage

Le sceptre du double mont.

[ocr errors]

mélodieuse, de la mieux construite, de la plus belle des langues qui jamais enchantèrent l'oreille humaine! Existe-t-il élocution plus pittoresque, détails de style plus pleins d'imagination, de force et de grâce ; plus de rapidité, et, si nous osons le dire, plus de fougue et de véhémence, quand il s'agit d'exprimer les passions, et plus de sensibilité quand il faut peindre la douleur? Oui, disons-le avec tous les gens de goût, l'univers sera toujours émerveillé des sons de cette lyre immortelle, dont l'antique harmonie, victorieuse de la différence des idiomes, et toujours la même pour tous les peuples et pour toutes les géné, rations, se prolonge à travers tous les âges et retentit également dans tous les siècles.

Voyons maintenant comment l'Iliade a vu le jour, et comment ce précieux trésor est parvenu jusqu'à nous. On prétend qu'HOMÈRE (1), lors de la composition de ce célèbre poëme (vers 920 av. J.-C.), ne l'a point divisé par livres. C'étoit un récit en vers des événemens de la guerre de Troie dont il chantoit des passages à la volonté des auditeurs, pour gagner sa vie, en parcourant les bourgades de l'Ionie. De-là est venu le nom de rhapsodies (2) donné à ses

(1) Les marbres d'Arundel mettent Homère sous l'archonte Diognete, c'est-à-dire, 300 ans après la prise de Troie, 916 anş avant J. C.

(2) Rhapsodie vient du grec rhapto, coudre, et odé, pièce de vers chantée, c'est-à-dire, chants cousus ensemble, Dans l'antiquité on appeloit ainsi des espèces de poëmes composés sur des événemens remarquables, et que des Rhapsodes alloient chanter

« PreviousContinue »