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I.CEUX qui désirent sincèrement servir Jesus-Christ en esprit et en vérité, doivent se fortifier aujourd'hui plus que jamais dans la foi. Ils ne sauroient trop se précautionner contre les assauts qu'on livre de toute part à notre sainte religion, et contre cet esprit philosophique qui paroît vouloir s'établir sur les ruines de la morale chrétienne. C'est dans ce dessein que j'avois fait un recueil de différens principes sur la religion, que je ne destinois d'abord qu'à mon usage particulier, et que plusieurs personnes m'ont engagé à rendre public. Que je serois heureux, si quelques ames timorées y trouvoient du secours contre la perversité du siècle où nous vivons!

En effet, ne croiroit-on pas voir l'accomplissement de cette prophétie de l'apôtre, qui disoit, écrivant à son disciple Timothée : « Il viendra un temps que les hommes ne pourront plus souffrir la saine doctrine; qu'ayant une extrême démangeaison d'entendre ce qui les flatte, ils auront recours à une foule de docteurs pro

pres à satisfaire leurs désirs; et, fermant l'oreille à la vérité, ils l'ouvriront à des contes et à des fables (a)». Çe temps est venu l'oracle s'accomplit. L'impiété a quitté le masque pour marcher tête levée; enfin, elle a franchi toutes les barrières, et n'a que trop confirmé la justesse de cette pensée d'un ancien: Rien n'est difficile aux mortels (b).

(a) Erit enim tempus, cùm sanam doctrinam non sustinebunt; sed ad sua desideria coacervabunt sibi magistros, prurientes auribus; et à veritate quidem auditum avertent, ad fabulas autem convertentur. II Tim. cap. 4, v. 3, 4. (b) Nil mortalibus arduum. HOR.

II. Satan, l'ancien père du mensonge, qui, comme l'observe saint Augustin, tantôt en lion furieux attaque à force ouvérte, tantôt en serpent tortueux dresse des piéges (a) à la simplicité et à l'innocence, a formé dans presque tous les états des disciples, qui, à son exemple, emploient tour-à-tour l'audace et l'artifice contre ce que nous avons de plus sacré. On voit d'insidieux écrivains témoigner le plus grand respect pour l'évangile, pendant que, d'un autre côté, ils cherchent à en ébranler les fondemens. On en voit

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d'autres, et quelquefois les mêmes, avan cer sans rougir, et au grand scandale des peuples, les plus horribles blasphèmes. En vain l'autorité livre à des flammes ignominieuses les écrits qui les renfer ment: ils renaissent de leurs cendres.

(a) Diabolus biformis est : leo in impetu, draco in insidiis. S. Aug. in ps. 69.

III. Le libertinage de l'esprit est venu à l'appui de celui des mœurs. Les vérités les mieux démontrées sont mises en problème on décide avec une témérité qui n'a point d'exemple dans les siècles passés. Tout est matière, disent les uns avec Spinosa: l'opinion des esprits n'est qu'un préjugé d'éducation. Tout est esprit, disent les autres avec Berkley: la sensation

des

corps n'est qu'une illusion. On attaque le culte religieux avec un horrible acharnement. L'Etre Suprême,qui en est l'objet, reçoit de jour en jour, de la part des coupables mortels, les plus grands outrages (a). L'un le confond avec la matière: l'autre, en avouant qu'il est esprit, le représente comme un être insensible aux injures qu'il peut recevoir de sa créa

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ture; comme un être indolent, qui abardonne l'homme à sa propre conduite, sans lui prescrire de lois, et sans exiger de sa dépendance aucun hommage, voyant avec la même indifférence l'encens que la superstition offre aux idoles, et celui que la religion fait brûler aux pieds de ses autels.

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(a) Cælum ipsum petimus stultitiâ. HOR.

IV. On sappe les fondemens de la socié té, en traitant la subordination de droit barbare, l'obéissance de foiblesse, l'autorité de tyrannie. Le droit barbare de l'inégalité, a osé avancer, entre plusieurs autres excès, un téméraire dans sa thèse rendue publique, est appelé le plus juste, parce qu'il est le plus fort (a). L'illustre Corps qui avoit ce menibre gangrené, sans le savoir, se hâta de le retrancher, et ne put voir qu'avec horreur cet ouvrage de ténèbres: Horruit (1) sacra facultas ad opus tenebrarum...... On se dit, avec un faste stoïque, citoyen du monde, pour anéantir les devoirs particuliers de pa

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( 1 ) Voyez la censure de la faculté de théologie de Paris contre cette thèse,

triote, de père, de mari et d'enfant. La distinction du bien et du mal, de la vertu et du vice, du vrai et du faux, est rejetée comme un préjugé de nos aïeux.

(a) Jus illud inæqualitatis barbarum, quod vocant equius, quia validius, Thesis Martini de Prade, I prop.

V. Le démona dit à nos premiers pères, par la bouche du serpent: Vous serez comme des dieux: il dit de nos jours, par la bouche de l'impie: Vous serez comme des bêtés; vous finirez comme elles; votre ame périra avec votre corps: c'est sans doute pour en permettre aux hommes la manière de vivre, en leur promettant la même mort, puisque l'un est une suite de' l'autre. Jamais on n'a enseigné dans au-* cune école païenne, que les plaisirs des sens' étoient l'unique 'objet des désirs de l'homme, comme l'avance l'auteur du livre de l'Esprit. Le plus décrié de tous les philosophes profanes, avoit des idées supérieures à celles de nos impies. « Épicure, dit Ciceron, soutient hautement qu'on ne peut vivre agréablement, si on ne vit avec sagesse, avec honnêteté, avec justice».

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