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AUGUSTIN-FRANCOIS BOUCHEREAU.

Lettre d'Augustin-François Bouchereau, ex-député de l'Aisne à la Convention, au premier Consul Bonaparte.

« Au premier Consul de la République française.

« Général Consul,

«< Augustin-François Bouchereau, propriétaire, à Chauny, département de l'Aisne,

« A l'honneur de vous exposer qu'à la suite de fonctions administratives, il fut député par le département de l'Aisne à la Convention nationale.

<< En cette qualité et réunissant les connaissances nécessaires, il fut chargé en l'an III d'une mission de huit mois, pour surveiller dans les deux départements de l'Aisne et l'Oise, les forêts et l'approvisionnement de Paris en bois.

<< Sorti par le sort à la fin de la session de la Convention, il fut continué dans la même mission, qu'il remplit encore pendant deux ans; et successivement il fut placé dans l'administration forestière de Compiègne et dans celle de Chauny.

« Il exerçoit ces dernières fonctions au moment de l'établissement des autorités actuelles. Appelé alors à remplir la place de conseiller de préfecture au département de l'Aisne, il n'hésita point à lui sacrifier celle d'agent forestier qu'il ne pouvait cumuler.

<< Mais comme il n'étoit point dans son intention de quitter la partie forestière, il y a sollicité de l'emploi lors de l'organisation dernière; il a même été porté sur la liste des candidats et cependant il n'a point été nommé, parce qu'on a considéré qu'il était conseiller de préfecture.

«En effet il a accepté cette place et il devoit au Gouvernement cette preuve de son dévouement; il était trop jaloux de la

confiance qu'il lui marquoit pour ne pas s'empresser d'y répondre. Mais il ne peut croire que ce soit une raison de l'écarter pour toujours des fonctions forestières, qu'il n'a quittées que parce qu'il y avoit incompatibilité et parce qu'il espéroit n'être point oublié lors de l'organisation dont on s'occupoit même en ce moment.

« C'est pourquoi, général Consul, il vous supplie de le faire replacer dans cette partie de l'administration publique où il étoit précédemment employé et où il a acquis, par un long exercice, des connoissances suffisantes pour remplir les fonctions que vous voudrez bien lui confier.

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Cette lettre, qui fait partie de la collection Dubrunfaut, nous donne quelques détails sur la carrière du conventionnel Bouchereau. La biographie de ce personnage n'est pas encore constituée et on ignore la date de sa naissance et celle de sa mort. J'espère que nos correspondants du département de l'Aisne nous renseigneront à ce sujet.

ÉTIENNE CHARAVAY.

ÉTUDE

SUR

LE CALENDRIER RÉPUBLICAIN

(Suite)

Le conseil des Cinq-Cents qui succéda à la Convention ne voulait pas qu'il tombât, car, à cette époque, les choses en étaient arrivées à ce point que le gouvernement aurait cru fournir une arme redoudable à ses ennemis, s'il avait laissé se répandre comme autrefois l'usage du calendrier grégorien. On assista donc à une lutte curieuse d'une part, le gouvernement qui s'acharnait à maintenir, coûte que coûte, le calendrier républicain, d'autre part une petite minorité de royalistes qui luttait ouvertement contre lui. Puis, entre eux, se désintéressant de cette question, la grande masse de la population, qui tout en étant en majorité républicaine, se trouvait plutôt en accord sur ce point avec les ennemis du gouvernement établi, soit parce que ses idées religieuses étaient opposées aux vues du gouvernement, soit parce que la pratique du calendrier la gênait dans ses affaires personnelles. Le gouvernement républicain lutta jusqu'au bout. C'était sous l'Empire que devait être consacré légalement l'abandon définitif de la réforme de la Convention.

En raison même des intérêts multiples qui s'y rapportent, les discussions qui eurent lieu au conseil des Cinq-Cents furent

toujours très importantes et méritent d'être connues. Elles ont toujours trait à des propositions de plus en plus énergiques ayant pour but d'imposer l'usage du calendrier républicain.

C'est ainsi que, dans la séance du 2 vendémiaire an VI (23 septembre 1797), Poulain Grandprey déposa la proposition suivante :

« Je demande le renvoi à une commission spéciale, qui sera chargée de faire un prompt rapport sur la proposition que je fais, de défendre à tous les journalistes de rappeler en tête de leurs feuilles d'autre ère que celle de la République, sous peine d'une prompte suppression, et à tous les citoyens d'employer d'autre manière de constater, dans des actes sous signature privée, les dates et époques postérieures à l'établissement du nouveau calendrier, à peine de nullité des mêmes actes.

« La commission, dont je demande la formation, vous présentera probablement des vues sur les moyens de faire coïncider la tenue des foires et marchés avec l'ère républicaine et de contraindre les fonctionnaires publics à s'y conformer.

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«Que peut l'exemple que donnent les représentants du peuple, disait encore Grandprey, sur des âmes couvertes de la rouille des anciens abus, su. des hommes pour qui la haine de la République et le mépris des formes républicaines sont un besoin?

« Il faut des lois qui les contraignent à déguiser leur affection pour tout ce qui leur rappelle des temps qu'ils regrettent; il faut les placer entre leur intérêt et leur haine pour leurs usages.... il faut enfin, que tout ce qui est du domaine de la législation, tout ce qui est sous l'autorité et la surveillance du gouvernement, nous rappelle sans cesse cette division de l'année, qui déconcerte en même temps les calculs du latinisme et ceux des partisans des rois (1). »

(1) Réimpression de l'ancien Moniteur, tome XXV, pages 471-472.

Le conseil applaudit et renvoya la proposition de PoullainGrandprey à la commission d'Instruction publique mais ce n'est que neuf mois après que son rapporteur Bonnaire put résumer ses travaux, parce que la commission dut se réunir souvent et délibérer de concert avec la Commission des Institutions républicaines.

A peine le Parlement eut-il manifesté la volonté de faire observer rigoureusement le repos décadaire et l'usage du calendrier républicain que de nombreuses protestations s'élevèrent, émanant à la fois du parti réactionnaire et du parti des indiffé

rents.

Les catholiques s'émurent de ces dispositions nouvelles qui allaient gêner l'exercice de leur culte, et firent entendre leurs doléances quant aux indifférents et aux républicains modérés, ils raillèrent les législateurs ou firent entendre d'assez bonnes raisons pour combattre les dispositions du gouvernement.

Parmi les nombreuses brochures satyriques qui parurent à ce propos, nous citerons La dispute du diable entre Monsieur Dimanche et la citoyenne Décade, comme donnant le ton de ces anodines protestations.

Quant aux argumentateurs sérieux, ils ne manquaient pas et nous en avons pour preuve La lettre d'un campagnard du Nord au conseil des Cinq-Cents sur le repos décadaire, datée du 29 frimaire an VI (19 décembre 1797).

L'auteur de cet écrit, qui signe Guyot, ancien électeur du Nord, s'adresse aux députés de son département et particulièrement au citoyen Duhot.

« Avec sa petite taille, dit-il, le citoyen Duhot aurait-il voulu piler du ciment pendant dix jours avant de se reposer ?

<< Il lui est doux de montrer une fois le jour les gradins du Sénat; mais aurait-il aussi facilement, cent fois chaque jour, du matin au soir, pendant toute une décade, monté son fardeau en haut d'une échelle, au second ou au troisième étage? Eut-il,

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