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encore quartidi, 3me décade de brumaire, mais le lendemain la décade était supprimée et l'on écrivait simplement:

Du 25 de brumaire, l'an II de la République française. Enfin on arriva à la formule définitivement adoptée et que beaucoup de personnes employaient depuis quelque temps: Octidi, 28 brumaire, an II, l'an 2, etc. (18 novembre 1793, vieux style).

Cette mention se continuera jusqu'à la fin de la notation du calendrier républicain par exemple, octidi 18 brumaire, an III, ou primidi, 21 nivôse, an V.

On rencontrera cependant la mention de la date précédente du calendrier grégorien. On y verra même adjointe la première lettre des jours de la semaine, V. S. D., à partir du sextidi, 26 pluviôse, l'an II de la République française (V. 14 février 1794, vieux style); c'est que l'on fut obligé de rappeler l'ancien calendrier par suite des difficultés que le calendrier répu blicain rencontra dans son application, et l'on écrivit plus tard : Sextidi, 16 germinal, l'an VI de la République française une et indivisible (jeudi, 5 avril 1798, vieux style).

Cette dernière se trouve être la dernière de cette série qui disparaît quelque temps à cause des peines sévères que le gouvernement du Directoire édicta contre les journalistes qui fai-saient encore usage du calendrier grégorien.

Quoique cette période de rigueur dura peu, la vieille formule grégorienne ne reparut en tête du Moniteur que le samedi, 11 nivôse, an XI de la République (1er janvier 1803) (1).

Avant de citer le rapport de Fabre d'Eglantine et de passer au récit des luttes que suscita l'institution d'un nouveau calen drier, disons dès à présent que la réforme ayant trait à la division du jour en parties décimales n'a jamais été sérieusement appliquée.

(1) La notation du jour de la semaine remontait à huit ou neuf mois auparavant, au dimanche, 28 germinal, an X (18 avril 1802).

On trouve parfois des montres ou des horloges révolutionnaires ayant des cadrans divisés en 10 parties, et construites en conformité du décret de la Convention sur la division du jour et de l'heure. L'usage de ces instruments de mesures se répandit fort peu et encore n'existe-t-il pas, à notre connaissance, de montre ou d'horloge purement décimale. Toutes ont conservé la division duodécimale; tantôt les heures anciennes sont numérotées de 1 à 24 en concordance avec les 10 heures décimales, tantôt, au contraire, le cadran porte la division 1-12 avec les 5 heures décimales correspondant à la moitié du jour. Le musée Carnavalet, à Paris, le musée historique d'Orléans, par exemple, possèdent un certain nombre de ces curieux objets.

La fixation du commencement de l'année au minuit qui précède, à l'observatoire de Paris, l'équinoxe vrai d'automne, avait, il est vrai, pour avantage de placer le commencement de l'année civile au commencement de l'année astronomique, mais il avait le désavantage, que d'ailleurs signalera Laplace dans son rapport au Sénat, de donner à l'année une longueur irrégulière.

La précession des équinoxes est la cause de cette irrégularité que les astronomes signalèrent et que Romme reconnut volontiers puisqu'il prépar a un projet de loi déterminant un mode régulier d'intercalation. Les événements de thermidor, qui provoquèrent son suicide, empêchèrent le dépôt de ce projet de loi qui ne fut jamais repris.

Ainsi, la division du mois en trois décades, pas plus que la division du jour en parties décimales ne furent pour ainsi dire jamais employées. Le principal auteur de la réforme avouait lui-même que son œuvre était imparfaite: cela montre qu'un tel bouleversement dans le comput des jours mérite plus d'études que le calendrier républicain n'en avait motivé.

Aussitôt le vote de la loi, la commission exécutive de la Convention nationale adressa à tous les agents du pouvoir public

une longue instruction qui résumait ou plutôt refondait les loist du 5 octobre 1793 (15 du premier mois), et du 4 frimaire, an II (23 novembre 1793), votées d'après les rapports de Romme et de Fabre.

Dans son Instruction sur l'emploi du nouveau calendrier, le comité exécutif ordonna aux fonctionnaires de ne prendre de congé que les « décadis, » demanda la fermeture ces jours-là << des caisses publiques, des postes et messageries, des établissements publics d'instruction, des spectacles, des rendez-vous de commerce comme bourses, foires et marchés, » exigea «des corps administratifs, des municipalités, un empressement à prendre toutes les mesures que peut leur suggérer l'amour de l'ordre et du bien public afin d'accélérer les changements que demande la nouvelle division de l'année, » ce ne fut que par contrainte que la plupart de ceux qui firent usage du calendrier se décidèrent à l'adopter.

<«< C'est aux bons citoyens, disait encore la Convention à la fin de son instruction, c'est aux sociétés populaires, aux soldats de la patrie qui se montrent les ennemis implacables de tous les préjugés, à donner l'exemple dans leur correspondance publique ou privée et à répandre l'instruction qui peut faire sentir les avantages de cette loi salutaire.

« C'est au peuple français tout entier à se montrer digne de lui-même, en comptant désormais ses travaux, ses plaisirs, ses fêtes civiques, sur une division du temps créée pour la liberté et l'égalité, créée par la Révolution même qui doit honorer la France dans tous les siècles. >>

L'article ayant trait à la division du jour en parties décimales n'en fut pas moins lettre morte: on verra plus loin l'accueil qui fut fait à la réforme, malgré l'appel chaleureux de la Convention.

GEORGES VILLAIN.

(A suivre.)

AUTOGRAPHES & DOCUMENTS

RÉVOLUTIONNAIRES

ROBESPIERRE JEUNE ET CHARLOTTE ROBESPIERRE.

Je trouve dans la série révolutionnaire de la précieuse collection d'autographes de feu M. Dubrunfaut la lettre suivante, écrite d'Arras par Robespierre jeune, le 26 avril 1790, à son frère Maximilien, alors député du Pas-de-Calais à l'Assemblée nationale.

« 26 avril 90.

« Je t'ai écrit aujourd'hui par la poste, mais des nouvelles inquiétantes sollicitent une seconde lettre. On vient de nous assurer qu'on décachète beaucoup de lettres. Plusieurs personnes se plaignent de cette violation du secret. Ton long silence nous fait croire cette nouvelle. Tire-nous des plus fortes alarmes.

<< L'Assemblée nationale pourrait décréter rapidement. Cette accélération facile n'est-elle pas une présomption de machinations sourdes. Un vicaire a fait ici un sermon très incendiaire. Nous l'avons dénoncé à notre club. De tes nouvelles aussitôt. Tu juges bien des alarmes que nous éprouvons, adieu.

« DE R. >>

« A Monsieur, Monsieur de Robespierre, député à l'Assemblée nationale, rue Saintonge, no 30, à Paris. »

La même collection, dont je rédige en ce moment le catalogue, contient une lettre de Charlotte Robespierre à son frère Maximilien, écrite d'Arras le 9 avril 1790. En voici le texte :

4e ANNÉE. - II.

42

« Nous recevons une lettre de toi, cher frère, qui date du 1er avril, et nous sommes le 9. Je ne sais si ce retard vient de la faute de celui à qui tu l'as adressée. Une autre fois je te prie de nous l'adresser directement. Je viens d'apprendre dans le moment que l'on est content de la contribution patriotique. M. Nonot, constamment bon patriote, vient de m'apprendre cette nouvelle avec celle-ci qu'il tient de M. de Vralie et qui formalise beaucoup ceux qui aiment la liberté. Je ne sais si vous savez que l'on a fait une quête, il y a environ quatre mois, pour le soulagement des pauvres de la ville. Chaque citoyen y a contribué selon ses facultés. Aujourd'hui les officiers municipaux sont d'avis de faire continuer la contribution pour trois autres mois. Il y a beaucoup de personnes qui ne veulent plus payer. Elles donnent pour raison qu'il ne faut pas nourrir les pauvres à rien faire, que l'on doit les faire travailler à démolir le rempart de la cité. M. le maire de la ville, qui, apparemment, a su qu'on refuserait de payer, s'est imaginé de dire que si on refusait de payer il se ferait autoriser de l'Assemblée nationale et taxerait lui-même ce que l'on doit payer. Si M. Nonot ne se trompe pas, car le propos est si ridicule que je ne puis me persuader qu'il soit vrai, si donc M. Nonot a bien entendu, M. de Fojeux aura de l'occupation, car il y en a qui refuseront exprès pour voir ce qui en résultera. Je ne sais si mon frère n'a pas oublié de vous parler de madame Marchand. Nous sommes brouillés! Je me suis permise de lui dire ce que les bons patriotes devaient penser de sa feuille, ce que vous en pensiez. Je lui ai reproché son affectation à toujours mettre des notes infamantes pour le peuple, etc. Elle s'est fachée, elle soutint qu'il n'y avait pas d'aristocrates à Arras, qu'elle connaissait tous patriotes, qu'il n'y avait que les têtes exaltées qui trouvaient sa gazette aristocrate. Elle me dit un tas de bêtises et depuis elle ne nous envoie plus sa feuille. Occupe-toi, cher frère, de m'envoyer ce que tu m'as promis. Nous sommes encore dans un

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