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avais promis hier, c'est pour éviter ce qu'aurait eu de cruel le moment de la séparation : je lègue le cachet à mon fils. »

Vers les neuf heures, le commandant de la garde natiotionale, accompagné des prêtres Jacques Roux et Pierre Bernard, se présenta au Temple, et annonça à Louis la mission dont il était chargé. « L'heure de votre supplice est arrivée, >> lui dit-on.

A ces mots, le roi demande la permission d'être quelques minutes avec son confesseur. Ce court entretien fini, il présente un paquet au prêtre Jacques Roux (1), et le prie de vouloir bien le remettre au conseil-général de la commune. Ce prêtre lui répond : Je n'ai d'autre mission que de vous conduire à l'échafaud.— Cela est juste, réplique le roi, et il remet ce même paquet à un autre commissaire de la commune qui veut bien s'en charger. « Je vous demande, dit-il aux commissaires, de recommander à la commune les personnes qui ont été à mon service, et de la prier de vouloir bien placer Cléry auprès de la reine; » et se reprenant avec précipitation, auprès de ma femme. Puis se retournant vers le commandant de la force armée, marchons, lui dit-il.

Il descendit de la cour, traversa à pied la première cour de sa prison, et monta ensuite dans une voiture avec son confesseur. Il était escorté de plusieurs détachemens de cavalerie, et d'un grand nombre de canons que l'on traînait devant et derrière lui, avec un bruit horrible. Le peuple répandu sur son passage gardait un silence morne.

Il était sorti du Temple à neuf heures quelques minutes; il arriva sur la place Louis XV, dite la place de la Révolution, à dix heures dix minutes.

Il employa le temps qu'il mit à parcourir ce trajet, à réciter les prières des agonisans, ou à lire dans un livre de piété. Un chapeau rond qui ombrageait sa figure, ne permit d'en observer tous les mouvemens; mais dans les inter

pas

(1) Ce paquet renfermait son testament,

valles où on put démêler ses traits, on remarqua, au milieu même de sa tristesse, un grand fonds de sérénité. Il était vêtu d'un habit puce, d'une veste blanche, d'une culotte grise; ses bas étaient blancs, ses cheveux peignés, et son teint nullement altéré.

Arrivé au lieu de l'exécution, il mit trois minutes à descendre de voiture, pendant lesquelles il parla encore à son confesseur qui, voyant qu'il le quittait enfin pour s'avancer vers l'exécuteur, lui cria : Allez, fils de saint Louis, montez aux cieux.

Louis étant au bas de l'échafaud, le fixa et y monta de pied ferme. Monté sur cet échafaud, il avança de quelques pas pour parler à la multitude armée qui l'environnait ; mais à peine avait-il prononcé ces paroles: Français, je meurs innocent, je pardonne à mes ennemis; je désire que ma mort.... qu'un roulement de tambours, ordonné par le commandant de la force armée (1), empêcha d'en entendre davantage.

Louis, les mains tendues vers le peuple, veut commander le silence, le bourreau ne sait s'il doit saisir la victime; une voix inconnue lui crie: Fais ton devoir. Louis perdant alors toute espérance, ôte lui-même son habit, détache sa cravate et se présente à la mort; les bourreaux s'en emparent, la hache le frappe, sa tête tombe à dix heures quinze minutes. L'exécuteur la saisit par les cheveux, et la montre à la multitude, dont les cris de vive la république se prolongent alors jusqu'au sein de la Convention, dont le lieu des séances n'était distant que de quelques pas du lieu du supplice.

Ainsi mourut, à l'âge de trente-huit ans quatre mois et vingt-huit jours, Louis seizième du nom, dont les ancêtres régnaient en France depuis plus de huit cents ans.

(1) Santerre.

L'aspect de son cadavre produisit des sensations diverses sur l'ame des spectateurs : les uns coupèrent des morceaux de ses vêtemens, d'autres cherchèrent à se procurer de ses cheveux; ceux-ci trempèrent leurs sabres dans son sang, comme s'il eût été un talisman qui devait les rendre vainqueurs de tous les tyrans de la terre; ceux-là s'en allaient l'ame froissée; un Anglais, plus hardi, se jette au pied de l'échafaud, trempe un mouchoir dans le sang qui couvre la terre, et disparaît.

Dans la capitale, la masse des citoyens paraissait engourdie par une torpeur générale; on osait à peine se regarder dans les rues. La tristesse était peinte sur toutes les physionomies, une inquiétude sourde semblait miner toutes les ames. Le lendemain de l'exécution, on n'était point encore sorti de cet accablement, qui paraissait même avoir gagné les membres de la Convention, étonnés, effrayés d'un coup si hardi, et des suites qu'il semblait présager.

Immédiatement après son exécution, le corps de Louis fut transporté dans le cimetière de l'ancienne église de la Madelaine. Il fut placé dans une fosse de six pieds en carré, adossée contre le mur de la rue d'Anjou, et dissous à l'instant par la grande quantité de chaux vive dont on eut la précaution de le couvrir.

FIN DES ÉCLAIRCISSEMENS HISTORIQUES ET DES PIÈCES OFFICIELLES.

PREMIER VOLUME.

AVIS DES LIBRAIRES-ÉDITEURS.

NOTICE SUR LA VIE DU MARQuis de FerriÈRES.

AVERTISSEMENT placé par l'auteur en tête de la première
édition.

P.

j

vij

XV

LIVRE 1er.

ASSEMBLÉE bailliagère. - Arrivée des députés à Paris,
avril 1789.-Émeute au faubourg Saint-Antoine,
27 et 28 avril. Ouverture des états-généraux, 5 mai.
-Querelles entre les ordres. Conférences. — Intri-
gues. - Le tiers-état se constitue en Assemblée natio-
nale, 17 juin. Séance royale, 23 juin. - Réunion
des ordres, 27 juin.

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-

-

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LIVRE II.

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La cour, revenue de sa frayeur, tranquillise la noblesse.
Dans les premiers jours de juillet, le roi fait avan-
cer des troupes. Déclaration des droits de l'homme.
Renvoi de Necker et des ministres, 11 juillet 1789.
Insurrection de Paris. Conduite du prince
Lambesc. Prise de la Bastille, 14 juillet. Incer-
titude de la cour. -"le roi vient à l'Assemblée, 15
juillet.

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LIVRE III.

-

Rappel de Necker et des ministres exilés, 16 juillet 1789.
-Le lendemain, Louis XVI se rend à Paris à l'Hôtel-
de-Ville.. Le comte d'Artois et ses enfans sortent du
royaume.Mort de Foulon et de Berthier, 22 juil-

71

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Décrets du 4 août.
Chute de l'an

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cien gouvernement. - Premier rapport du comité P.
de constitution. Violens débats.

156

145

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Intrigues des différens partis. Lettre du comte d'Es-
taing à la reine. — Arrivée du régiment de Flandres
à Versailles. Repas des gardes-du-corps. Mouve q
mens à Paris.Insurrection.Marche de la
Та milice"
parisienne à Versailles. Massacre des gardes-du-
corps. Invasion du château. - Le fói ét la famille I
royale sont conduits à Paris. 'sasoltotilenc

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264

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LIVRE V.

L'Assemblée nationale à Paris.

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