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en 1085, à So ans. Guischard avoit de grandes qualités: vaste dans ses projets, ferme dans ses résolutions, vif dans ses entreprises, il tenta beaucoup, et réussit presque toujours; mais il ternit l'éclat de ses exploits par une ambition effrénée, à laquelle il sacrifioit tout.

II. GUISCARD, Voyez BOURLIE.

GUISCHARD, (Charles) colonel au service du roi de Prusse, manioit également bien l'épée et la plume. Cet officier, dont le nom militaire étoit Quintus Icilius, avoit servi avec distinction dans la dernière guerre. Il profita du loisir que la paix lui laissoit, pour mettre au net ses Mémoires militaires sur les Grecs et les Ro

mains, dont la dernière édition est de Berlin, 1774, 4 vol. in-8°, ou 2 vol. in-4. Quoiqu'il y ait quelques idées particulières dans cet ouvrage, et qu'il déprime trop le célèbre chevalier Follard, on ne peut qu'estimer la sagacité

et l'érudition de l'auteur.

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I. GUISE, (Claude DE LORRAINE, duc de) étoit cinquième fils de Féné II, duc de Lorraine, et de Philippe de Gueldre, sa seconde femme. Après avoir contesté inutilement la succession du duché de Lorraine à Antoine de Vaudemont, son frère aîné il vint s'établir en France, et y épousa Antoinette de Bourbon, princesse du sang, le 18 avril 1513. Sa valeur, son génie hardi, ses grandes qualités, et la faveur du cardinal Jean de Lorraine son frère, cimentèrent sa puissance. Il fonda une maison qui fit trembler les successeurs légitimes de la couronne. C'est en sa faveur que le comté de Cuise

fut érigé en duché-pairie au mois de janvier 1527. Il mourut en 1550, après s'être signalé en plusieurs occasions, et sur-tout à la bataille de Marignan. Il n'étoit alors âgé que de 22 ans. Il y reçut plus de vingt blessures, et auroit péri très-certainement, si Adam de Nuremberg, son écuyer, në lui eût sauvé la vie aux dépens de la sienne, en lui faisant un bouclier de son corps. Claude de Guise laissa six fils et quatre filles, dont l'ainée épousa Jacques Stuart V, roi d'Ecosse. De ses six fils, l'un fut I. François : Voy. ci-dessous II. GUISE. II. Charles, cardinal: Voy. LORRAINE, III. Claude, duc d'Aumale: Voy. AUMALE.IV. Louis, cardinal Voy. ci-après, au n° vi. V. François, grandprieur et général des galères, mort en 1563.- VI. Réné, mar

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n° 1.

quis d'Elbœuf: Voy. ELBŒUF.

François DE LORRAINE, l'aîné de tous, eut trois fils: le second, Charles, fut duc de Mayenne: Voy. MAYENNE. Le troisième, Louis Voyez ci-après n° vi. L'aîné étoit Henri, qui est l'objet de l'article III. GUISE..... Parmi les fils d'Henri, deux méritent une place dans ce Dictionnaire. L'un fut cardinal: Voy.le no vi. L'autre étoit Charles : Voy. le n° IV. GUISE. Le fils aîné de Charles fut Henri, qui mourut sans laisser de postérité : Voy. v. GUISE. Son frère puîné, nommé Louis, fut duc de Joyeuse, et mourut en 1654, avant son frère; mais il laissa de la fille du duc d'Angoulême, qu'il avoit épousée, Louis-Joseph de Lorraine, duc de Guise, mort en 1671 son fils unique, François-Joseph, mourut au berceau à l'âge de 5 ans, en 1675. Cette famille subsiste encore dans les

branches collatérales des ducs d'Elbeuf; Voy. II. HARCOURT.

II. GUISE, (François de LORRAINE, duc de) et d'Aumale, fils aîné de Claude de Lorraine, duc de Guise, né au château de Bar, le 17 février 1519, fut appelé LE BALAFRE, à cause d'une blessure qu'il reçut au siége de Boulogne, en 1545. Frappé entre le nez et l'œil droit par une lance, tout le fer avec un tronçon de bois resta dans la plaie. Ambroise Paré, fameux chirurgien, fut obligé de prendre des tenailles de maréchal pour arracher ce tronçon, et de lui mettre le pied sur le visage. Tous les spectateurs frémissoient Guise seul părut tranquille, et ces mots : Ah ! mon Dieu, furent les seuls qu'il laissa échapper pendant cette cruelle opération. Malgré l'heureux succès de Paré, les chirurgiens désespérèrent long-temps de la vie de Guise. Cependant il guérit si bien qu'il ne lui resta qu'une légère cicatrice. Son courage se montra bientôt d'une manière éclatante en 1553, à Metz, qu'il défendit vaillamment contre Charles-Quint. Les troupes de l'empereur, engourdies par le froid, laissèrent plusieurs soldats après elles. Le duc de Guise, loin de les faire assommer, comme faisoient quelques généraux de ces temps malheureux, les reçut avec humanité. Pendant le siége de Metz, un officier Espagnol lui écrivit pour lui demander un de ses esclaves, sauvé dans la ville avec un cheval de prix qu'il avoit dérobé. Guise renvoya le cheval, après l'avoir payé à celui chez qui il se trouvoit. Mais quant à Fesclave, il répondit qu'il ne contribuaroit pas à remettre dans les

fers un homme devenu libre en mettant les pieds sur les terres de France. Ce seroit, ajouta-t-il; violer les priviléges de ce royaume, qui consistent à rendre la liberté à tous ceux qui la viennent chercher. Autant sa valeur avoit paru durant le siége, autant'sa générosité éclata-t-elle après. Personne ne connoissoit mieux les règles de l'honneur, et ne sa→ voit mieux réparer une offense. A la bataille de Renti, 13 août 1554, où il fit des prodiges de valeur, Saint-Fal, un de ses lieutenans, s'avançant avec trop de précipitation, il l'arrêta en lui donnant un coup d'épée sur le casque. On lui dit, après la ba taille, que cet officier étoit blessé de ce traitement: Monsieur de Saint-Fal, lui dit le duc, en présence de tous les officiers, et dans la tente même du roi, Vous êtes offensé du coup que je vous ai donné, parce que vous avanciez trop, mais il vaut mieux que je vous l'aie donné pour vous arrêters que pour vous faire avancer. Ce coup est plus glorieux qu'humi liant pour vous. Alors il prit pour juges tous les capitaines, qui con vinrent qu'un coup reçu pour arrêter l'excès d'ardeur et de cou rage, faisoit plus d'honneur que de tort: et Saint-Fal fut satisfait.... Plusieurs autres avantages en Flandre et en Italie, firent proposer à quelques-uns de faire le duc de Guise Vice-roi de la France; mais ce titre paroissant trop dangereux dans un sujet puissant et belliquenx on se contenta de lui donner celui de Lieutenant général des armées du Roi, au dedans et au dehors. Les malheurs de la France ces sèrent, dès qu'il fut à la tête des troupes. En huit jours, il prit Calais et tout son territoire,

au

milieu de l'hiver. Il chassa pour toujours de cette ville les Anglois, qui l'avoient possédée 210 ans. Cette conquête, suivie de celle de Thionville, prise sur les Espagnols, mit le duc de Guise au-dessus de tous les capitaines de son temps. Il prouva que le bonheur ou le malheur des états dépend souvent d'un seul homme. Maître de la France sous Henri II, dont il avoit épousé la sœur, il le fut plus encore sous François II. La conspiration d'Amboise, tramée en 1560 par les Protestans, pour le perdre, ne fit qu'augmenter son crédit. Le parlement lui donna le titre de Conservateur de la patrie. Son autorité étoit telle, qu'il recevoit assis et couvert, Antoine, roi de Navarre, qui se benoit debout et tête nue. Le connétable de Montmorenci lui donnoit du Monseigneur et du Votre très-humble et très-obéissant serviteur, tandis que Guise Jui écrivoit simplement, Monsieur le Connétable, et au bas, Votre bien bon ami. Après la mort de François II, cette autorité baissa, mais sans être entièrement abattue. Dès-lors se formèrent les factions des Condé et des Guise. Du côté de ceuxci, étoient le connétable de Montmorenci et le maréchal de SaintAndré; de l'autre, étoient les Protestans et les Coligni. Le duc de Guise, aussi zélé Catholique qu'ennemi des Protestans, avoit résolu de les poursuivre les armes à la main. Passant, le 1er mars 1562, auprès de Vassi, sur les frontières de la Champagne, il trouva des Calvinistes qui chantoient les Pseaumes de Marot, dans une grange. Ses domestiques les insultèrent. On en vint aux mains; et il y eut près de 60 de

et

ces malheureux tués, et 200 de blessés. Cet événement imprévu, que les Protestans appellent le Massacre de Vassi, alluma la guerre civile dans tout le royaume. Le duc de Guise prit Rouen, Bourges, et gagna la bataille de Dreux, le 19 décembre 1562. Le soir de cette glorieuse journée, il s'enferme sans défiance dans la même tente avec le prince de Condé ; il partage avec lui son lit, et dort d'un profond sommeil à côté de son rival, dans lequel il ne voyoit plus, après la victoire, qu'un parent et un ami. Le duc de Guise fut alors au comble de sa gloire. Vainqueur par-tout où il s'étoit trouvé, il étoit l'idole des Catholiques le maître de la cour; affable, généreux, et en tout sens, le premier homme de l'état. Il se préparoit à assiéger Orléans, le centre de la faction Protestante et leur place d'armes, lorsqu'il fut tué d'un coup de pistolet, le 24 février 1563, par Poltrot de Méré, gentilhomme Huguenot. Les Calvinistes, qui, sous Henri II et François II, n'avoient su que prier et souffrir ce qu'ils appeloient le martyre, étoient devenus, dit un Historien, des enthousiastes furieux; ils ne li soient plus l'Ecriture, que pour y chercher des exemples d'assas sinats. Poltrot se crut un dod, envoyé de Dieu pour tuer un Chef Philistin. Le parti aussi fanatique que lui, fit des vers à son honneur; et il reste encore des estampes avec des inscriptions, qui élèvent son meurtre jusqu'au ciel, quoique ce ne fût que le crime d'un furieux, aussi lâche qu'imbécille... Valincourt a écrit sa Vie, in-12. Il parut en 1576 une satire sanglante, contre lui, le Cardinal son frère, et les

autres

äntres Guisé, sous le titre de Légende de Charles, Cardinal de Lorraine, etc., par François de 'Isle, in-8. On la trouve dans le tome vi des Mémoires de Condé, in-4.o Le nom de l'auteur est supposé; on la croit de Regnier de la Planche. Aux traits flétrissans que renferme cette satire, nous substituerons ceuxci; ils font trop d'honneur à ce héros, , pour les laisser dans l'oubli. Un jour qu'il visitoit sơn camp, le baron de Lunebourg, un des principaux chefs des Reistres, trouva mauvais qu'il voulût examiner sa troupe, et s'emporta jusqu'à lui présenter le bout de son pistolet. Le duc de Guise tira froidement l'épée, éloigna le pistolet et le fit tomber. Montpezat, lieutenant des gardes de ce prince, choqué de l'insolence de l'officier Allemand, alloit lui ôter la vie, lorsque Guise lui crie: Arrêtez, Montpezat; vous ne savez pas mieux tuer un homme que moi. Et se tournant vers l'emporté Lunebourg: Je te pardonne, lui ditil, l'injure que tu m'as faite; il n'a tenu qu'à moi de m'en venger. Mais pour celle que tu as faite au Roi, dont je représente ici la personne, c'est à lui d'en faire la justice qu'il lui plaira. Aussitôt il l'envoya en prison, et acheva de visiter le camp, sans que les Reistres osassent murmurer, quoiqu'ils fussent naturellement séditieux. On avoit averti le duc de Guise, qu'un gentilhomme Huguenot étoit venu dans son camp, à dessein de le tuer; il le fit arrêter. Ce Protestant lui avoua sa résolution. Alors le duc lui demanda: Est-ce à cause de quelque déplaisir que tu aies reçu de moi? Non, lui répondit le Protestant; c'est parce que vous

Tome VI.

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êtes le plus grand ennemi de ma Religion. Eh bien! répliqua Guise, si tu religion te porte à m'assassiner, la mienne veut que je te pardonne, et il le renvoyai réponse sublime et dont l'auteur d'Alzire a fait un usage admirable dans la dernière scène de cette tragédie... Le duc de Guise avoit une intrépidité qui l'accompagnoit meine dans les accidens où sa personne étoit intéressée. On lui nontra un jour un homme qui s'étoit vanté de le tuer; il le fit venir, le regarda entre les deux yeux, et lui trouvant un air embarrassé et timide: Cet homme-là, dit-il en levant les épaules, ne me tucra jamais ; ce n'est pas la peine de l'arrêter... Henri II le créa duc d'Aumale, en 1547, et érigea en 1552, sa terre de Joinville en principauté..... Voyez l'art. COLIGNY, n° II, à la fin. Sa femme, Anne d'Est, petite fille de Louis XII, morte en 1607, se remaria au duc de Nemours.

III. GUISE, (Henri de LORRAINE, duc de) fils ainé du précédent, naquit le 31 décembre 1550. Son courage commença à se déployer à la bataille de Jarnac en 1569, et se soutint toujours avec le même éclat. Un coup de feu qu'il reçut à la joue, dans une rencontre près de ChateauThierri, le fit surnommer le BALAFRE, ainsi que son père, François de Lorraine; mais cette blessure ne lui ota rien des charmes de sa figure. Voyez ix MARGUERITE. Sá bonne mine, son air noble, ses manières engageantes luti concilioient tous les cœurs. Idole du peuple et des soldats, il voulut se procurer les avantages que le suffrage public lui promettoit. Il se mit à la tête

d'une armée, sous prétexte de défendre la foi Catholique contre les Protestans. Ce fut le commencement de la Ligue, confédération d'abord projetée par son oncle, le Cardinal de Lorraine. La première proposition de cette association funeste fut faite à Paris On fit courir, chez les bourgeois les plus zélés, un Projet d'Union pour la défense de la Religion du Roi, et de la liberté de l'Etat ; c'est-à-dire pour opprimer à la fois le roi et l'etat. Le duc de Guise, qui vouloit s'élever sur les ruines de la France, anime les factieux, remporte plusieurs victoires sur les Calvinistes, et se voit bientôt en état de prescrire des lois à son souverain. Il force Henri III à publier un édit qui anéantissoit tous les priviléges des Huguenots. Il demanda impérieusement la publication du concile de Trente, l'établissement de l'Inquisition, la cession de plusieurs places de sûreté, le changement des gouverneurs et plusieurs autres choses qu'il savoit que le roi ne pouvoit ni ne devoit accorder. Henri III, fatigué de ses insolences, lui défend de paroître à Paris: le duc y vient malgré sa défense, le 9 mai 1558. De là la journée des Barricades, qui lui donna un nouveau crédit, en faisant éclater sa puissance aux yeux des ligueurs et des partisans du roi. Son autorité étoit si grande, que les corps de garde de la capitale refusèrent de recevoir le mot du guet, que le prévôt des marchands vouloit leur donner de la part du roi, et ne voulurent recevoir l'ordre que du duc de Guise. Henri III fut forcé de quitter Paris, fuyant devant son sujet, et obligé de faire la paix avec lui. « Les en

treprises contre l'autorité royale firent enfin résoudre le roi, dit l'abbé de Choisi, à se défaire du duc de Guise, qui les animoit toutes, même assez ouvertement. Il avoit été averti que la duchesse douairière de Montpensier, sœur du duc de Guise, avoit eu l'insolence de dire qu'elle espéroit qu'avec des ciseaux d'or qu'elle portoit toujours à son côté, elle lui couperoit les cheveux pour le confiner dans un monastère. Il reçut en même temps un billet qui ne contenoit que ces mots: La mort de CONRADIN et la vie de CHARLES; faisant allusion à la conduite de Charles d'Anjou, frère de St. Louis, qui avoit fait mourir Conradin de Suabe, son compétiteur au royaume de Naples. Le roi, sur tant d'avis qu'on lui donnoit de prendre garde à lui, consulta le maréchal d'Aumont, Rambouillet, et Beauvais-Nangis, qui tous trois conclurent que, n'étant pas possible de faire le procès dans les formes au duc de Guise, convaincu de tant de crimes de lèse-majesté, il falloit se résoudre à l'assassinat; seule voie sûre et immanquable, par la confiance aveugle où étoit le duc. Les ordres furent donnés pour l'exécution. Crillon, mestre de camp des Gardes Françoises, ne s'en voulut pas charger. Je me battrai contre lui, dit Crillon; il me tuera, je ne parerai point: mais en même temps je le tuerai. Quand on veut bien donner sa vie, on est maitre de celle d'autrui... Lognac, premier gentilhomme de la chambre, et capitaine des 45 gentilshommes Gascons de la nouvelle garde du roi, en prit la commission; il en choisit neuf des plus déterminés, et les fit cacher dans un cabinet du roi. Le duc de Guise

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