Page images
PDF
EPUB

ÉDITS

DÉCLARATIONS,

ARRÊTS ET RÉGLEMENS,

CONCERNANT

LES MATIERES CRIMINELLES,

SUIVANT LEUR ORDRE CHRONOLOGIQUE QUATRIEME PARTIE,

V v v

IV. Partic.

1

ÉDITS, DÉCLARATIONS,

ARRÊTS ET RÉGLEMENS,

CONCERNANT LES MATIERES Criminelles, fuivant leur ordre chronologique.

QUATRIEME PARTIE,

ÉDIT DU ROI HENRI II.

Sur le fait des femmes groffes & des enfans morts nés; avec l'arrêt de réglement de la Cour de Parlement, pour la publication dudit édit - du 19 mars 1698.

Du mois de février 1556.

HENRY, par la grace de Dieu, Roi de France: A tous préfens & à venir; SALUT.

Comme nos prédéceffeurs & prégéniteurs très - chrétiens Rois de France, aient par actes vertueux & catholiques, chacun en fon endroit, montré par leurs très louables effets qu'à droit & bonne raifon, ledit hom très-chrétien, comme à eux propre & pécu. lier, leur avoit été attribué: en quoi les voulant imiter & fuivre, ayons par plufieurs bons & falutaires exemples témoigné la dévotion que nous avons à conferver & garder ce tant célebre & excellent titre, duquel les principaux effets font de faire imiter les créatures que Dieu envoie fur terre en notre royaume, pays, terres & feigneuries de notre obéiffance, aux facremens par lui ordonnés : & quand il lui plaît les rappeller à foi, leur procurer curieufement les autres facremens pour ce inftitués, avec les derniers honneurs de fépulture. Et étant duement avertis d'un crime très-énorme & exécrable, fréquent en notre royaume, qui eft, que plufieurs femmes ayant conçu enfans par les moyens déshon

V v vij

nêtes ou autrement, perfuadées par mauvais vouloir & confeil, déguifent, occultent & cachent leurs groffeffes, fans en rien découvrir & déclarer : & avenant le tems de leur part & délivrance de leur fruit, occultement s'en délivrent, puis le fuffoquent, meurdriffent, & autrement fuppriment, fans leur avoir fait impartir le S. facrement de baptême: ce fait, les jettent en lieux fecrets & immondes, ou enfouiffent en terre profane, les privant par tel moyen de la fépulture coutumière des chrétiens. De quoi étant prévenues & accufées pardevant nos Juges, s'excufent, difant avoir eu honte de déclarer leur vice, & que leurs enfans font fortis de leurs ventres morts, & fans aucune apparence ou efpérance de vie : tellement que par faute d'autre preuve, les gens tenans, tant nos cours de parlement, qu'autres nos Juges, voulant procéder au jugement des procès criminels faits à l'encontre de telles femmes, font tombés & entrés en diverses opinions: les uns concluans au fupplice de mort, les autres à queftion extraordinaire, afin de fçavoir & entendre par leur bouche fi à la vérité le fruit iffu de leur ventre, étoit mort ou vif. Après laquelle queftion endurée, pour n'avoir aucune chofe voulu confeffer, leur font les prifons le plus fouvent ouvertes, qui a été & eft caufe de les faire retomber, récidiver & commettre tels & femblables délits, à notre très-grand regret & fcandale de nos fujets : à quoi pour l'avenir nous avons bien voulu pourvoir.

Sçavoir faifons, que Nous defirant extirper & du tout faire ceffer lefdits exécrables & énormes crimes, vices, iniquités & délits qui fe commettent en notredit royaume, & ôter les occafions & racines d'iceux dorénavant commettre, avons (pour à ce obvier) tatué & ordonné, & par édit perpétuel, loi générale & irrévocable, de notre propre mouvement, pleine puiffance & autorité royale, difons, ftatuons, voulons, ordonnons & nous plaît, que toute femme qui fe trouvera duement atteinte & convaincue d'avoir célé, couvert & occulté, tant fa groffeffe que fon enfantement, fans avoir déclaré l'un ou l'autre, & avoir prins de l'un ou de l'autre témoignage fuffifant, même de la vie ou mort de fon enfant, lors de l'iffue de fon ventre, & qu'après, fe trouve l'enfant avoir été privé, tant du faint-facrement de baptême, que fépulture publique & accoutumée, foit telle femme tenue & réputée d'avoir homicidé fon enfant. Et pour réparation, punie de most & dernier fupplice, & de telle rigueur que la qualité particulière du cas le méritera: afin que ce foit exemple à tous, & que ci-après n'y foit aucun doute ni difficulté. Si donnons en mandement par ces préfentes à nos amés & féaux confeillers les gens tenans nos cours de parlement, prévôt de Paris, baillifs, fénéchaux & autres nos officiers & jufticiers, ou à leurs lieutenans & à chacun d'eux, que cette préfente ordonnance, édit, loi, ftatut, ils faffent chacun en droit foi, lire, publier & enregistrer, & incontinent après la réception d'icelui, publier à fon de trompe & cri public, par les carrefours & lieux publics, à faire cris & proclamations, tant de notre ville de Paris, qu'autres lieux de notre royaume, & auffi par les officiers des feigneurs hauts-jufticiers en leurs feigneuries & juftices; en manière qu'aucun n'en puiffe prétendre caufe d'ignorance', & de trois mois en trois mois. Et outre qu'il foit lu & publié aux prônes des meffes paroiffiales defdites villes, pays, terres & feigneuries de notre obéiffance, par les curés, ou vicaires d'icelles ; & icelui édit gardent & obfervent, & faffent garder & obferver de point en point felon fa forme & teneur, fans y contrevenir. Et pour ce que de cefdites préfentes l'on pourra avoir affaire en plufieurs lieux, nous voulons qu'au vidimus d'icelles, fait fous le fcel royal, foi foit ajoutée comme à ce préfent original; auquel en témoin de ce, afin que ce foit chofe ferme & ftable, nous avons fait mettre notre fcel. Donné à Paris au mois de Février, l'an de grace mil cinq cent cinquante-fix, & de notre regne le dixieme.

Ainfi figné fur le repli, par le Roi en fon confeil, CLAUSSE.

Leɛla, publicata & registrata, audito & requirente procuratore generali regis, Parifiis in parlamento, quarto die martii, anno domini millefimo quingentefimo fexto, Sic fignatum à DU TILLET, Collation eft faite à l'original, ainfi figné, DU TILLET,

· ARRÊT DE LA COUR DE PARLEMENT.

Du dix-neuf mars 1698.

Qui ordonne que l'édit du Roi Henri II du mois de février 1556, concernant les femmes groffes, fera lu & publié de trois mois en trois mois aux prônes des meffes paroiffiales.

EXTRAIT DES REGISTRES, DE PARLEMENT.

VU par la cour le procès criminel fait par le bailli de la ville & comté de Sancerre, à

la requête du procureur fifcal, demandeur & accufateur, contre Marguerite Tolleron, fervante domeftique de Leonard Defclouzeaux, manoeuvre, demeurant au village de Marolle, défendereffe, accufée, prifonnière ès prifons de la conciergerie du palais, appellante de la fentence contre elle rendue par ledit Juge le 21 février dernier, , par laquelle ladite Tolleron auroit été déclarée duement atteinte & convaincue d'avoir célé & couvert fa groffe & fon enfantement, latité fon part, & enterré dans un jardin hors la fépulture publique & accoutumée, fans avoir pris aucun témoignage de la vie & mort d'icelui, même de lui avoir caufé & procuré la mort; pour réparation de quoi condamnée d'être pendue & étranglée jusqu'à ce que mort s'enfuive à une potence, qui feroit pour cet effet dreffée par l'exécuteur de la haute juftice en la place publique dudit Sancerre à jour & heure du marché, pour, l'exécution faite, le corps de ladite Tolleron refter expofé à ladite potence une demi-heure durant, & enfuite enterré en terre fainte, & fes biens déclarés acquis & confifqués au profit du fieur dudit lieu, & autres qu'il appartiendroit, & où confiscation auroit lieu; & pour obvier autant que faire fe peut à tels acci'dens, & empêcher que femblable malheur n'arrive à l'avenir, ordonné que conformément à l'ordonnance de Henri III de l'année 1686, celle de Henri II de l'année 1556, concernant les femmes qui recelent leur groffeffe & enfantement, feroient lues & publiées par les curés de la ville de Sancerre, & de la paroiffe de Gardefort, aux prônes de leurs meffes paroiffiales, de trois mois en trois mois; à quoi ledit procureur fifcal fera-tenu de tenir la main, & d'en certifier quand befoin feroit, à la prononciation de laquelle fentence ledit procureur fifcal en auroit interjetté appel à minimá. Conclufions du procureur général du Roi, ouïe & interrogée ladite Tolleron accufée fur fa cause d'appel, & cas à elle impofés; tout confidéré, LADITE COUR en tant que touche l'appel interjetté par ladite Tolleron, a mis & met l'appellation & fentence de laquelle a été appellé au néant, emendant pour réparation des cas mentionnés au procès, condamne ladite Tolleron d'être battue & fuftigée nue de verges, ayant la corde au col, par les carrefours & lieux accoutumés dudit lieu, & à l'un d'iceux flétrie d'un fer chaud fur l'épaule dextre, marqué d'une fleur-de-lys; ce fait bannie du reffort du parlement à perpétuité, lui enjoint de garder fon ban aux peines portées par la déclaration du Roi. Dé clare tous fes biens fitués en pays de confifcation acquis & confifqués à qui il appartiendra, fur iceux & autres non fujets à confifcation préalablement pris la fomme de deux cents livres d'amende vers le fieur dudit lieu; & en conféquence fur l'appel à minimá interjetté par ledit procureur fifcal, les parties hors de cour & de procès ; & faifant droit fur les conclufions du procureur général du Roi, ordonne que fuivant la déclaration du Roi Henri II du mois de février 1556, concernant les femmes & filles qui recelent leur groffeffe & enfantement, & la teneur du mandement porté au bas d'icelle, ladite décla ration fera lue & publiée de trois mois en trois mois aux prônes des meffes paroiffiales, par les curés de toutes les paroiffes du reffort de la cour, ensemble le préfent arrêt. Enjoint aux fubftituts dudit procureur général de tenir la main à l'exécution d'icelui, & d'en certifier ladite cour au mois ; & pour l'exécution du préfent arrêt, ladite cour a renvoyé & renvoye ladite Tolleron prifonniere pardevant ledit Juge, auquel enjoint pareillement de faire publier ladite ordonnance, & de faire mention dans les fentences

« PreviousContinue »