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- Pour le duel il n'y a point de diftinction à faire; dès qu'un homme s'eft véritablement battu en duel & qu'il a été tué dans le combat d'un duel, fans qu'on en puiffe douter par les informations qui feront faites, fuivies de la procédure ordinaire en pareil cas, fon cadavre, s'il exifte, fera puni fuivant les peines de l'ordonnance, & au défaut de fon cadavre fa mémoire.

Enfin pour ce qui eft du crime de rébellion à la justice, il faut que celui qu'on veut punir dans fon cadavre ou dans la mémoire, ait été tué dans la rencontre même de fa rébellion, & non hors & après la rencontre de la rébellion.

Ces obfervations générales ainfi préfuppofées, il faut expliquer les formalités prefcrites pour faire dans ces cas le procès au cadavre de la perfonne qui s'eft défaite, ou à la mémoire du mort.

Par rapport à une perfonne qui s'eft défaite, 1°. le Juge fera & dreffera un procès-verbal du lieu où le défunt a été trouvé s'être défait. 2°. Il visitera & fera vifiter le corps mort par des chirurgiens & médecins qui drefferont leur rapport de ce qu'ils trouveront, & diront comme il s'eft tué. 3°. Il informera fur requête du Procureur du Roi ou procureur fifcal, de la vie & mœurs du défunt, s'il étoit fou, infenfé, furieux ou malade, & de la caufe pour laquelle il s'eft homicidié. 4°. Il nommera d'office un curatenr au cadavre du défunt, fi le cadavre eft encore exiftant, finon à fa mémoire; on ordonne quelquefois que le corps du mort qui avoit été enterré, fera exhumé; mais fi un parent du défunt s'offre pour faire la fonction de curateur, il fera préféré à tout autre, & en ce cas-là le Juge ne pourra en nommer un d'office, article 2 du tit. 22 de l'ordonnance de 1670; ce curateur n'eft nommé que pour la validité de la procédure. 5. Il fera prêter ferment à ce curateur en la maniere accoutumée. 6°. Il faut que ce curateur fache lire & écrire. 7°. La procédure extraor dinaire & l'inftruction du procès feront faites contre le curateur fuivant les formalités marquées par l'ordonnance pour inftruire les autres procès criminels extraordinaires, à la réserve que lors du dernier interrogatoire, le curateur fera debout, & nue tête feulement, & non fur la fellette. 8°. Son nom & fa qualité de curateur feront compris dans toute la procédure, mais non dans le jugement de condamnation, laquelle fera feulement rendue contre le cadavre ou la mémoire du défunt, articles 2 & 3 ibidem; c'est tout comme dans les procès qu'on fait aux muets & fourds.

Après cette procédure le procès fera mis ès mains du procureur du Roi, ou procureur fifcal; & enfuite fi le crime eft fuffifamment prouvé, il fera rendu un jugement, par lequel il fera ordonné que le corps mort du défunt fera traîné fur une claie par telles ou telles routes ou voies, & enfuite à être pendu par les pieds à une potence; ce fait, être traîné à la voierie, avec confifcation de biens.

Le curateur pourra même interjetter appel de la fentence rendue contre le cadavre ou la mémoire du défunt, par le confeil & l'inftigation de quelqu'un des parens du défunt; même ce parent pourroit l'y obliger, en faisant & avançant les frais, article 4 ibidem; le curateur prendroit en ce cas un pouvoir du parent, afin qu'on ne lui imputât rien, & crainte de défaveu; Le Juge pourroit auffi lui demander & lui faire repréfenter ce pouvoir, même le joindre au procès pour plus grande précaution; & en caufe d'appel III. Partie

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Formalités

du procès fait au cadavre, ou à la mé

moire d'un

défunt.

Punition des crimes pour lefquels en fait le procès au cadavre,

ou à la mé
moire d'un

défunt.
Ce que l'on

doit faire
avant que

d'inftruire le procès au ca davre..

ce curateur raftera en caufe, fans que la cour fupérieure où l'appel eft pena dant, puifle en nommer un autre, articles ibidem, à peine de nullité de la nouvelle nomination; mais quand il n'y auroit point d'appel, cette fentence de condamnation ne pourroit pas même être exécutée qu'elle ne fûte confirmée par arrêt, fur le vu & examen du procès.

La punition en ce cas peut être differente, fuivant l'ufage des provinces du royaume; à Paris, c'est de faire traîner le cadavre la face en bas, dans les principales rues, fur une claie, par l'exécuteur de la haute-juftice; pour le duel on pend le cadavre par les pieds.

Il faut obferver ici que le Juge, avant que d'inftruire le procès, même avant que de nommer un curateur au cadavre, doit fe transporter fur le lieu, informer & dreffer un procès verbal de l'état auquel le corps a été trouvé; il doit même lui appliquer fon cachet ou celui de la jurifdiction fur le front afin qu'on ne puiffe pas changer le cadavre & en fuppofer un autre à fa place; voyez à la fin du préfent chapitre, la teneur de la déclaration du Roi du 5 septembre 1612. Il faut qu'il le faffe tranfporter à la morgue, fi fait n'a été, où à la geole, qu'il le faffe voir & vifiter par les chirurgiens. jurés & ordinaires du fiege, & qu'il s'informe du lieu de fa demeure are dinaire, & de fa vie, mœurs & conduite, & h on ne s'eft point apperçu de quelques actions de folie, démence, phrénéfie ou fureur, ou du chagrin & défefpoir; en un mot, de tout ce qui pourra aller à charge & décharge par rapport à l'homicide volontaire de foi-même. Il eft bien à préfumer qu'une perfonne de bon fens ne peut fe réfoudre à fe tuer elle-même, prévenue qu'elle étoit qu'elle alloit ceffer de vivre, & déshonorer fa famille & la priver de fes biens, & d'ailleurs, comme chrétien, qu'elie perdroit fon ame; de forte qu'on peut dire qu'un fi cruel coup n'est dû qu'à la folie ou à la maladie : ainfi, pour condamner un cadavre à une pareille punition dans tous les cas marqués dans l'ordonnance, il faut des preuves ince clariores du fait qui pouvoit y donner lieu; & dans le doute il faut incliner pour faire échapper cette punition au cadavre, ou à la mémoire du défunt & épargner un pareil déshonneur à fa famille; fans parler de la perte de fes biens par la confifcation, qui a lieu au parlement de Paris pour les pays où elle eft admife, fans diftinguer fi le défunt s'eft tué par crainte de la peine ou autrement, pourvu qu'il n'ait pas été en démence ni maladie, comme l'attefte Bretonnier fur Henrys, tome 2, page 903 de l'édition de 1708, contre la difpofition du droit; Coquille, queftion 16, & les auteurs cités par Defpeilles; tome 2, page 124, nombre 22. En effet la maxime pour les les pays de confifcation, eft que, qui confifque le corps, confifque les biens. Pat l'atticle 1 du titre 22 de l'ordonnance de 1670, le procès doit être fait à l'homicide de foi-même : & l'ordonnance ne diftingue point fi celui qui s'eft tué lui-même, l'a fait par la crainte de la peine,

ou non.

Il y en a qui prétendent que pour que la juftice puiffe s'emparer d'un ca. davre, il faut que l'églife, par le miniftere d'un prêtre, n'y ait pas mis la maio; qu'en ce cas le bras féculier doit fe retirer, & laiffer porter ce miférable cadavre à la fépulture & dans ia terre deftinée par l'églife aux morts, & en laiffer le jugement à Dieu. Mais c'eft une erreur, voyez ci-après la dé claration du Roi du s feptembre 1712.

Une perfonne qui fe feroit voulu défaire, & qui n'auroit pu y réuffir par le fecours qui feroit furvenu, ne feroit pas punie pour cela, on la plaindroit plutôt que de la condamner.

Il femble que la connoiflance de l'homicide volontaire de foi-même que commettroit un prêtre ou autre eccléfiaft prêtre ou autre eccléfiaft que, devroit appartenir au bras féculier, c'eft-à dire au Juge royal, & non au Juge d'églife; que même pour faire le procès au cadavre, il ne feroit pas néceffaire de le faire conjointement avec le Juge d'églife, puisqu'il ne peut en ce cas prononcer aucune des peines canoniques & ordinaires pour délit commun. Voyez cidevant, partie 2, chapitre 6, fection 1, nombre 16.

Enfin, lorsqu'on fait le procès à la mémoire d'un défunt pour crime de lefe-majefté humaine, principalement au premier chef, par exemple à un noble, on le déclare roturier, lui & fa poftérité, on fait abattre fes statues, s'il en a, brifer fes armoiries, démolir fon château, couper fes arbres de haute-futaie, & fupprimer fon nom à jamais, & tout cela afin de laiffer une note éternelle d'infamie à la poftérité, du crime qui a donné lieu à ces différentes & honteufes punitions.

La déclaration du Roi du 5 feptembre 1712, regiftrée en parlement le 3 octobre de la même année, explique ce qui doit être obfervé par les Juges, lorfqu'il le trouvera des cadavres dans les rues de Paris, dans la riviere, & autres endroits, pour avoir connoiffance de la caufe de leur mort. Elle porte que lorsqu'il fe trouvera dans la ville & fauxbourgs de Paris, & dans les lieux circonvoifins, des cadavres de perfonnes que l'on foupçonnera n'être pas mortes de mort naturelle, foit dans les maifons, dans les rues & autres lieux publics ou particuliers, foit dans les filets des ponts, vannes des moulins & fous les bateaux qui font fur les rivieres, les propriétaires des maifons, s'ils y demeurent, finon les principaux locataires, les adbergistes, les voisins, les maîtres des ponts, les meuniers, bateliers, & généralement tous ceux qui auront connoiffance defdits cadavres, feront renus d'en donner avis auffi-tôr; favoir, dans la ville & fauxbourgs de Paris, au commiffaire du quartier, & dans les lieux circonvoifins, aux Juges qui en doivent connoître : auxquels Juges & commiffaires il eft enjoint de fe tranfporter diligemment fur le lieu, de dreffer procès-verbal de l'état auquel le corps aura été trouvé, de lui appliquer le feel fur le front, & le faire vifiter par chirurgiens en leur préfence, d'informer, & entendre fur le champ ceux qui feront en état de dépofer de la caufe de la mort, du lieu & des vie & mœurs du défunt, & de tout ce qui pourra contribuer à la connoiflance du fait, dont les commiffaires du châtelet de Paris feront rapport au lieutenant criminel, pour y être par lui pourvu, ainfi que par les autres Juges des lieux à qui la connoiffance en appartiendra, en conformité des ordonnances, & fuivant la forme prefcrite par l'ordonnance du mois d'août 1670, au titre 22. Fait défenfes à toutes perfonnes de faire inhumer lefdits cadavres avant que lefdits officiers aient été avertis, que la vifite en ait été faite, & l'inhumation ordonnée par les Juges, à peine d'amende contre les contrevenans à la préfente déclaration, même de punition corporelle comme fauteurs & complices d'homicide, s'il y échet; défend auxdits Juges de retarder l'inhumation, après l'exécution de ce que ci

Déclaration

du Roi concernantlesca.

davres trou

vés dans les

rues de Paris

ou autres endroits.

deffus ordonné, fous prétexte de vacations par eux prétendues, à peine d'interdiction.

En fuivant ce que l'on vient d'obferver, & les formules ci-devant don nées, il fera facile de faire le procès à un cadavre ou à la mémoire d'un défunt.

Procédure criminelle

abrogée par

Tordonance de 1670.

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De l'abrogation des appointemens, écritures & forclufions en matiere crimi nelle, avec le ftyle des requêtes de l'accufé, quand l'accufateur differe de faire procéder à la confrontation, ou de faire apprêter les charges, & à fin de nullité & par atténuation, & de la partie civile en réparation & intététs

civils.

LE mot d'abrogation veut dire ici abolition, extinction & fuppreffion de certaines procédures qui étoient en ufage en matiere criminelle, comme les appointemens à ouïr droit, produire, bailler défenfes & moyens de nullité, réponses, fournir de moyens d'obreption, d'en informer, donner écritures, forclufions & conclufions civiles, & tous autres appointemens, comme auffi l'ufage des défenfes, avertiffemens, inventaires, contredits, caufes & moyens de nullité, d'appels, griefs & réponfes, commandement de produire ou contredire, pris à l'audience, ou au greffe; tout cela eft abrogé par l'ordonnance de 1670, articles 1 & 2 du titre 23; mais au lieu de tout cela, l'ordonnance dans l'article fuivant permet aux parties, tant à l'accufé qu'à la partie civile, de préfenter leurs requêtes contenant leurs défenses ou moyens d'atténuation ou de nullité, & leurs conclufions : à laquelle requête elles attacheront les pieces que bon leur femblera, dont elles donneront & feront fignifier copie, favoir, l'accufé à la partie civile, s'il y en a une, ou à la partie publique, & la partie civile à l'accufé; & fi la partie publique jugeoit à propos de donner quelque requête dans le cours de l'inftruction du procès, elle feroit fignifiée avec copie à l'accufé: on pourra même de part & d'autre répondre à ces fortes de requêtes, mais par limple requête, à laquelle on pourra attacher les pieces qu'on croira être néceffaires ou utiles pour fa défense ou pour demandes, le tout pareillement fignifié & copie baillée, fans néanmoins que ces différentes requêtes puiffent empêcher ni retarder le jugement du procès, parce que toutes ces requêtes feront feulement répondues d'une fimple ordonnance en jugeant.

Il est à remarquer que l'ordonnance eft prohibitive de toutes les différentes procédures qui fe faifoient anciennement en matiere criminelle ; & dout elle abroge expreflément l'ufage: le Juge & les parties, foit l'accufé, foit la partie civile ou la partie publique, ne doivent pas les faire, a peine de nullité.

Il est encore à préfent d'ufage, fuivant l'ordonnance, de déclarer dans les vingt-quatre heures qu'on ne veut point fe rendre partie fur la plainte qu'on avoit rendue contre un accufé, fauf à la partie publique à prendre Faccufation en main, comme auffi d'admettre un plaignant à fe rendre partie

par un acte fubféquent, quoiqu'il eût déclaré par fa plainte qu'elle ne vouloit point fe rendre partie, même faire plaider à l'audience des incidens par des requêtes préfentées à cet effet.

Il eft d'ufage que l'on donne des requêtes pour moyens d'atténuation, qui contiennent des moyens de nullité & de juftification & des conclufions à fins civiles, mais toujours fans appointemens; elles font feulement répondues d'une ordonnance portant en jugeant, ou jointes au procès pour y avoir tel égard que de raifon; ce qui n'arrête & ne fufpend point le jugement du procès.

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Mais ce qu'il y a de vrai, c'eft que toutes ces requêtes & les moyens qui y font expliqués, ne font pas le plus fouvent un grand effet. Ce font les informations & les pieces du procès qui décident en matiere criminelle, à moins qu'on n'y établiffe des moyens de nullité péremptoires, & encore ces nullités n'iroient-elles tout au plus qu'à faire déclarer la procédure nulle, fans que l'accufé pût pour cela trouver fa juftification, & être renvoyé par un pareil jugement de fon accufation: la procédure feroit feulement recommencé, aux frais du Juge qui l'auroit faite, c'eft là le plus fouvent le fort des eccléfiaftiques appellans comme d'abus d'une procédure criminelle ou fentence de leur official, quand même il feroit dit par l'arrêt qu'il y auroit abus. Ces écritures ne fervent pas encore de grande chofe en matiere criminelle.

On ne fait point de productions nouvelles dans le grand criminel, mais feulement dans le petit criminel, comme dans une inftance appointée au confeil au petit criminel, ou bien dans un procès conclu comme en procès par écrit aux enquêtes fur un appel d'une fentence rendue au petit criminel; ces fortes d'appellations s'inftruifent & fe jugent comme les appella

tions en matieres civile.

De differen

tes requêtes

que peut don

ner l'accufé,

tion.

Les moyens ordinaires des requêtes employées pour moyens d'atténua- Des moyens tion, font; 1. ponr attaquer la procédure, fi on y peut trouver quelques d'atténua nullités. 2°. Pour combattre les dépolitions des témoins par des reproches contre leur perfonne, & en combattant leur témoignage par les raifons qu'on pourra avoir, par exemple, en faifant voir que les dépofitions fe contredifent manifeftement, & qu'il n'y a ni poffibilité ni convenance dans les faits que les témoins ont avancés. 3°. Pour atténuer, s'il eft poffible, le crime ou délit, & autres moyens de cette qualité, que le confeil de l'accafé pourra fournir, fuivant les circonftances.

Tout cela eft difficile dans les procès au grand criminel, parce que tout ce qui compofe le procès, eft fecret & caché à l'accufé, plainte, informations interrogatoires, récolement, confrontation & conclufions définitives de la partie publique; un accufé ne peut favoir que ce qu'il a pu recueillir dans le tems de l'inftruction de fon procès, foit dans les interrogatoires, foit à la confrontation, en fe défendant comme il a pu par fa bouche; dans cette fâcheufe & trifte extrémité, comment un accufé peut-il être défendu par autrui, même le plus éclairé, qui n'a rien par devers lui pour le défendre? ain un accufé ne peut fe défendre dans le grand criminel que par lui-même & par fa bouche. Chez les Romains un accufé avoit bien plus d'avantage, il étoit défen du par le miniftere d'avocats; c'eft delà que nous voyons ces grands & admica

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