Page images
PDF
EPUB
[ocr errors]

lui-même & résigné à une perfonne capable, & que la résignation a été admise avant qu'il y eût aucune provifion de l'Ordinaire, ni du Pape, alors la résignation in favorem eft valable. C'est ce qui a été jugé par arrêt du 27 juillet 1694, rapporté au Journal des Audiences, rendu fuivant les conclufions de M. de Lamoignon, avocat général, plaidans Mes Nouer le jeune & Sachot; parce que, felon les Canoniftes, le résignataire ne tire pas un droit du réfignant, mais du collateur, fumit jus à coliatore, non à refignante: & comme obferva M. l'avocat général lors de cet arrêt, fi l'églife fe trouve purgée d'un injufte poffeffeur, & qu'elle foit entierement fatisfaite, il n'eft pas néceffaire d'entrer dans la difcuffion des cas qui ont donné lieu à l'accufation.

Ainfi en faifant attention aux efpeces des arrêts de 1620, 1626 & 1694, non aux intitulés qui leur font donnés par les Arrêtiftes qui les rappor

l'on reconnoît qu'ils ne font point contraires entr'eux, mais qu'ils font conformes aux véritables principes..

C'eft auffi fur cette jurifprudence & fur ces principes qu'il faut tempérer le fentiment de Guymier, Coras & Louet, loc. cit. qui tiennent indiftinctement contre du Moulin & Tournet, qu'un bénéficier, quoique coupable de vice atroce qui a rendu fon bénéfice vacant & impétrable de plein droit, peut réfigner, même in favorem, avant la condamnation, & même pendant l'appel.

Au refte, voyez Blondeau, verbo benefice, à l'article quibus modis benefi cium amittitur, où il fait l'énumération des crimes ou délits qui font vaquer les bénéfices de jure & facto. Voyez auffi Papon en fes Notaires, tom. 2, liv. 8, des interdits & actions poffeffoires pour bénéfices.

33. Mornac, fur la loi premiere au digefte de iis qui effuderint vel deje cerint, parle d'un fait criminel qui arriva de fon tems. Un particulier fut accufé & convaincu d'avoir jetté de la chaux détrempée dans du vin fur le vifage & dans les yeux d'un autre, afin de le rendre aveugle; ce crime eft grave & la peine eft arbitraire, les ordonnances n'ayant pas prévu un fait de cette qualité; un tel coupable ne pourroit guere éviter les galeres ou le banniffement, avec des intérêts civils confidérables, quand même l'offenfé ne feroit pas devenu aveugle.

34.

L'héritier d'un accufé qui décéde pendant l'inftruction du procès, peut être affigné en reprife, & eft tenu quant aux peines pécuniaires & intérêts civils ou dommages & intérêts, fi par l'événement du procès il en eft adjugé à la partie civile; il n'y a que la peine afflictive qui foit éteinte par la mort de l'accufé; il feroit même tenu des provifions adjugées contre l'accufé de fon vivant. Arrêt du parlement de Paris du 29 juillet 1628, rapporté par Eardet, tom. 1, liv. 3, chap. 12. Voy. Louet, let. A, fom. 18. Un dénonciateur n'a pas le même droit; il ne peut point contraindre les héritiers de l'accufé de reprendre après fa mort le procès criminel; c'eft ce qui a été jugé par arrêt du 14 décembre 1703, conformément aux conclufions de M. Joly de Fleury, avocat général, parce qu'un dénonciateur eft fans intérêt. Journal des Audiences. La partie publique n'a pas non plus le droit d'affigner les héritiers en reprife, parce que fon feul objet eft Ja vengeance publique, qui ne peut plus avoir lieu. Mais un plaignant,

Efpece de crime où la peine eft ar

bitraire.

En quel cas la partie civile peut affigner en reintérêts ciprife pour les vils, l'héritier d'un accufé décédé ruction du pendant linfprocés.

Si le dénon

ciateur le

peut.

[merged small][merged small][merged small][ocr errors]

fans s'être rendu partie civile, le pourroit, parce qu'il peut obtenir des dommages & intérêts, aux termes de l'art. 5 du titre 3 de l'ordonnance de 1670.

35. En matiere de fubftitution ou de fideicommis, la mort civile a le même effet que la mort naturelle; la mort naturelle; de forte que par la mort civile, la fubftitution ou fideicommis n'eft pas moins ouverte que par la mort naturelle. Arrêt du parlement de Paris en la grand'chambre, fur les conclufions de M. Talon, avocat général, du 25 mai 1660. Il est rapporté dans le Journal des Audiences, tom. 2, liv. 3, chap. 22.

Les fubftitutions finiffent par le crime de leze-majefté, fubftitutiones expirant crimine læfæ-Majeftatis, dit Mornac fur la loi 31, au dig. de pignoribus. Il en rapporte un arrêt du parlement de Paris, du 23 août 1613.

36. Un condamné par fentence à une peine emportant mort naturelle ou civile, avec confifcation de biens, & de laquelle fentence le condamné étoit appellant, mais s'étoit fauvé des prifons pendant fon appel, eft capable de recueillir une fucceffion échue pendant l'appel, cette capacité de fuccéder lui ayant été confervée in vim de fon appel. Bardet, tom. 2, liv. 1, chap. 45, rapporte la queftion dans une caufe qui fe préfenta en 1632, en la chambre de la Tournelle du parlement de Paris. C'étoit un particulier qui avoit été condamné aux galeres à perpétuité par une fentence, & à qui il étoit échu une fucceffion pendant l'appel, & dans le tems qu'il s'étoit évadé des prifons, avant que d'être transféré fur l'appel qu'il avoit déclaté interjetter de la fentence lors de la prononciation qui lui en fut faite. Procès pour favoir à qui appartiendroit cette fucceflion, ou au condamné, ou à fon frere. M. Bignon, avocat général, conclut en fa→ veur du condamné, par le feul moyen que la fucceffion étoit échue pendant fon appel, & qu'en matiere criminelle l'appel éteint la fentence de condamnation, & laiffe le condamné dans fon droit & capacité de fuccéder jufqu'après le jugement de Pappel par le parlement ou autre cour en dernier reffort. Cependant la caufe fut appointée par arrêt du 18 décembre 1632.

Au refte, il faut obferver que l'axiome en matiere criminelle, appellatio extinguit judicatum, fuivant la loi 1, ff. ad fenatufconf. Turpilian. n'est paint abfolument vrai, puifque la fentence peut être confirmée fur l'appel; mais il faut dire, pour parler plus jufte, qu'en matiere criminelle, l'appel fufpend l'exécution de la condamnation, comme il eft décidé en la loi 6, §. 1,.ff. de his qui notant. infam.

37. Il y a des criminaliftes qui penfent qu'un accufé d'avoir bleffé grievement un autre, fi le bleffé vient à décéder après quarante jours, ne peut être pourfuivi, ni être condamné tanquam de occifo, mais feulement tanquam de vulnerato, & par conféquent qu'il peut être feulement condamné en des dommages & intérêts, ou intérêts civils, & autres peines pécuniaires. Nous avons fur cela, entr'autres arrêts, un arrêt du parlement d'Aix en Provence, en la chambre de la Tournelle, du 19 janvier 1652; qui est rapporté par Boniface en fes arrêts, tom. 2, part. 3, chap. 19. Mais voyez ci-après, chap. 2, fect. 7, dift. 5, nomb. 10. 38. Un enfant impubere n'eft point capable de délit, & fon pere ne

liv. I,

peut être condamné civilement aux dommages & intérêts envers la partie civile. Ainfi jugé par deux arrêts du parlement de Paris, en la chambre de la Tournelle, des 9 juin 1625,& 19 mars 1629. Dans l'efpece du premier arrêt, c'étoit un enfant âgé de fept ans trois mois, qui ayant jeté un éclat de bois à un autre enfant de fept à huit ans, lui avoit crevé un œil. Dans le cas du fecond arrêt, c'étoit un enfant de huit ans, qui jouant avec d'autres enfans de fon âge, reçut un coup de pierre, dont il perdit l'œil qui feul lui reftoit, ayant perdu l'autre dans une maladie : il accufoit Pierre Bois de lui avoit jetté la pierre. Ces deux arrêts font dans Bardet, tom. 1, liv. 2, chap. 46; & liv. 3, chap. 34. Voyez ciraprès, chap. 2, fect. 3, nomb. 22.

39. Le juge d'Eglife ne peut point condamner au banniffement, parce qu'il n'a pas de territoire; inais il peut enjoindre à un prêtre de fortir de fon diocèfe, fuivant un arrêt du 15 juillet 1631, rapporté par Bardet: ce qui doit s'entendre lorfque ce prêtre n'eft pas originairement de fon diocèse; car autrement il ne pourroit pas l'en faire fortir, sauf à lui faire fon procès.

A l'égard des juges des feigneurs, ils ne peuvent pas, ni même les juges royaux, bannir hors du royaume; ils ne le peuvent pas même hors du reffort du parlement; ils le peuvent feulement hors de leur reffort, à tems ou à perpétuité. La maxime en eft conftante au parlement de Paris; il y en a un arrêt tour récent du 11 février 1743, pour Vendôme. Mais cette maxime n'eft pas fuivie au parlement de Rouen. Voyez ci-après, part. 3, chap. 24, nomb. 42. Au refte, il faut remarquer que toute condamnation au banniffement à perpétuité emporte mort civile.

! 40. Il y a entr'autres deur déclarations du Roi des juillet 1681 &
27 août 1701, contre les vagabonds, gueux de profeffion &
gens fans
aveu, portant qu'ils feront attachés à la chaîne pour être conduits aux gas
leres & y fervir à perpétuité, fans faire, pour parvenir à cette condamna
tion, aucunes procédures. Il y a pareillement à ce fujet un réglement du
parlement de Paris, du 25 Mai 1693.

41. Si l'accufé a été pourfuivi à la requête du procureur du Roi, ou du procureur-fifcal, ou de M. le procureur-général, il ne peut être condamné aux dépens.t

[blocks in formation]

aux

condamnés

dépens envers la par

Par arrêt du 12 juillet 1702, il a été fait defenfes à un prévôt de condamner les accutés aux frais du procès, lorfqu'il n'y aura d'autre partie tie publique. que le fubftitut de M. le procureur général. Cet arrêt eft rapporté par Bruneau, Mat, crimin. part. 2, tit. 30, max. 7. De même un eccléfiaftique auquel le promoteur auroit fait faire le procès, ne doit pas être condamné aux dépens envers lui. Augeard, tome 2, chap. 46, en rapporte un arrêt du 6 février 1700, fur les conclufions de M. Joly de Fleury, avocat'général, qui l'a ainfi jugé, & déclaré abufive une fentence de l'official de Sens, qui avoit condamné un prêtre accafé aux dépens envers le promoteur, qui étoit feul partie. Il n'y a que la partie civile, s'il y en a une, envers laquelle un accufé puiffe être condamné aux dépens.

Mais en ce cas, on peut condamner le coupable envers le Roi, out fenvers le feigneur, en l'amende. Voyez ci-devant, nombre 26; ou à l'aumône ad pios ufus, par rapport aux eccléfiaftiques.

CHAPITRE II.

Des Crimes & Peines en particulier.

CE Chapitre fera divifé en différentes fections, où il fera traité de la nature de chaque crime en particulier. L'on fera voir quelles perfonnes font recevables à en faire la dénonciation, ou à en rendre plainte ; de quelle peine chaque crime doit être puni; & quoiqu'il foit traité de la compétence des Juges en matiere criminelle dans la feconde partie, on en parlera fommairement, en expliquant la nature de chaque crime en particulier,

SECTION PREMIERE.

Du crime de Luxure.

Ce terme de luxure renferme plufieurs efpeces de crimes contre la chaf teté; favoir, la fornication, l'avortement, recelement de groffeffe, fuppofition & expofition de part, le maquerellage, l'adultere, la bigamie la poligamie, l'incefte, le rapt & viol, le péché contre nature.

L'on commence par ces fortes de crimes, pour être plutôt forti de ce bourbier.

[blocks in formation]

1. La fornication eft quelquefois un terme générique qui comprend toutes les efpeces de crimes qui font contre la pureté. Ici ce mot de fornication, terme doctrinal & théologique, fe prend pour le péché de luxure, qui fe commet entre perfonnes libres, c'eft à-dire, entre perfonnes de différent fexe, qui ne font ni l'une ni l'autre liées par le facrement de mariage, ni par un vœu folemnel de religion, ni le mâle engagé dans les ordres facrés.

2. La fornication prife dans fon fens étroit, & dont il s'agit ici, se divife en fornication fimple, qui fe commet avec des perfonnes libres, mais débauchées, appellée en latin fornicatio; & en fornication qui fe commet avec des perfonnes libres & d'honnête condition, qui s'appelle en latin ftuprum.

3. Par rapport à la fornication fimple, comme on ne s'eft propofé de Des diffé- traiter cette matiere qu'en jurifconfulte, & non en cafuifte, & en théolo rentes efpe- gien, l'on obfervera feulement qu'encore que cette fornication rende ces de forni- coupable devant Dieu, fuivant les textes facrés, même que, comme l'encation. feigne Saint-Thomas, elle foit défendue par la loi naturelle, néanmoins il n'y a point de peine judiciaire contre ce crime; c'est-à-dire, que celui qui a connu charnellement une prostituée, n'en eft pas puni, fuivant la loi fi uxor non fuerit 13, §. fed & in ea 2, ff. ad leg. Juliam de adulter, & la loi fi ea, 22 cod. eodem, que nous fuivons en ce point, non pas pour autorifer ces crimes, mais en les tolérant, & en laiffant la vengeance à

Dieu; fauf à févir par nos loix du royaume contre les fcandales & proftitutions publiques, comme on le verra ci-après à la diftinction troisieme.

C'eft pourquoi Papon, livre 22, titre 8, après Paul de Caftre, tient que force commife contre une proftituée publique, n'cft même pas digne de mort ni d'aucune autre peine, fuivant Ranchin, part. 3, concluf. 184, à moins que ce ne fût une femme mariée, auquel cas la force eft capitale comme ledit Papon codem après Balde : ce qui doit s'entendre en cas que l'on ait pu favoir que cette proftituée étoit mariée; car une telle perfonne étant trouvée en lieu public de proftitution, il n'y auroit point lieu à l'accu fation d'adultere contre celui qui fe feroit proftitué avec elle.

Cependant fi un geolier avoit eu commerce avec fa prifonniere, foit proftituée publique ou non, il feroit fujet à la peine de mort, foit qu'il l'eût connue de force ou de gré, fuivant la jurifprudence du Sénat de Chambery, atteftée par Jean Faber in §. item lex inftit, de public. judic.. ce qui n'a pas lieu par-tout, comme l'obferve Julius Clarus, lib. lib. 5, Sentent. §. fornicatio, num. 25, qui dit que quand il s'agit d'une prostituée, le geolier ne doit pas être puni fi févérement, quoiqu'il l'ait connue de force; contre Bartole, qui tient in lege inauditum, ff. de ficariis, que le geolier n'eft puniffable de la force, que quand il a connu fa prifonniere femme prostituée. Auffi Papon, loc. cit. rapporte-t-il un arrêt du parlement de . Bordeaux de l'an 1536, qui a condamné le geolier de Saint Eloy de la ville de Bordeaux à être battu de verges dans la conciergerie, pour avoir connu une fienne prifonniere contre fon gré, quoiqu'elle fût une proftituéc. Voyez ci-après, nombre 8.

4. Quant à la fornication appellée ftuprum, c'eft à dire, avec une perfonne libre, d'une condition honnête, & qui n'eft pas une proftituée publique, il y a des parlemens qui condamnent à la mort ou à époufer; mais au parlement de Paris, & prefque dans tous les autres parlemens du royaume, à moins que cette efpece de fornication ne foit accompagnée de viol, rapt, & autres circonftances aggravantes, la peine de ce délit fe réduit en dommages & intérêts plus ou moins forts, fuivant les facultés & la qualité des parties. Ainfi jugé par l'arrêt du 28 avril 1691, rapporté au journal des audiences; & lorfqu'il eft furvenu un enfant de cette efpece de fornication, le pere eft obligé de le nourrir.

5. La déclaration & ferment de la fille, non proftituée à plufieurs, qu'elle eft groffe d'un tel., fuffit pour obliger l'accufé à nourrir l'enfant par provifion. Cette prétendue maxime eft atteftée par Faber, cod. de probatio. nib. definit. 18; par Papon, liv. 22, titre 9, art. 13. Cependant cela ne feroit aucun préjudice pour le jugement du fond: neque enim alimentorum caufa veritati facit prajudicium, leg. 10, ff. de his qui fui vel alieni juris funt, Et contre un home marié, cette feule déclaration de la fille, ne feroit pas fuffifante pour l'obliger par provifion à nourrir l'enfant, fuivant le même Faber, cod. de teftib. definit. 49, & Papon, loc. cit.

Mais l'ufage eft conftant parmi nous, que la déclaration & le ferment de la fille, quoique non proftituée à plufieurs, qu'elle eft groffe des œuvres d'un tel, ne fuffifent point pour obliger l'accufé à nourrir l'enfant par provifion; cela peut fuffire feulement pour accourder une provifion d'une

1. Part,

C

[ocr errors][merged small]

Si la décla ration de la fillefuffitpour obliger l'accufé à nourrir l'enfant par provision.

« PreviousContinue »