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CHAY IN tar la chofe demeure à cet égard dans le droit commun des autres fujets du Roi ainfi les prévôts royaux prennent connoiffance des crimes commis par les commenfaux.

31. Il n'y a que les baillis & fénéchaux qui puiffent connoître des crimes & délits commis par les eccléfiaftiques dans l'étendue de leurs jurifdictions immédiates, ou dans le reffort de leurs bailliages ou fénéchauf fées, quand ils inftruisent conjointement avec l'official de l'évêque diocéfain, comme on le verra au chap. 6.

32. Les Juges prévôts, vicomtes, viguiers & châtelains royaux, ne peuvent prendre connoiffance des crimes ou délits commis par des eccléfiaftiques, non plus que de ceux qui font commis par des gentilshommes. 33. Les officiers de judicature ont le même privilége; nul autre Juge que les baillis & fénéchaux peut connoître des crimes par eux commis, fuivant ledit article 10.

Sous le mot d'officiers de judicature, font compris tous les officiers qui ont des charges de judicature par provifions du Roi ou des feigneurs, & non pas par des fimples commiffions; mais ces termes ne s'entendent que des Juges & procureurs du Roi, ou fifcaux, non des miniftres inférieurs de juftice, lefquels n'ont nul privilege,

34. Le lieu dans lequel le crime a été commis, regle, comme on l'a déjà dit, la compétence du Juge qui en doit connoître, foit qu'il foit Juge royal, ou qu'il foit fimplement Juge d'une juftice feigneuriale & fubalterne. Mais il y a une obfervation à faire fur les étrangers, concernant les crimes pat eux commis; ce qui ne peut arriver à l'égard du lieu du délit que de deux manieres, dans le royaume ou en pays étranger. Au premier cas, il n'y a point de difficulté que fi l'étranger a commis le crime dans le royaume, il y doit être puni par les Juges, & fuivant les loix du royaume, comme étant le lieu du délit, auquel est dû la réparation & vindicte publique pour fervir d'exemple, fans qu'il puiffe demander fon renvoi devant les Juges de fon pays, la qualité d'étranger ne pouvant fournir un moyen d'incompétence, parce que les étrangers ve nant en France, font fujets aux loix du royaume, & pour la tranfgreffion en doivent fubir la peine, qui n'a été ordonnée que pour la confervation de ceux qui vivent fous les loix, regnicoles cu étrangers. Nous avons fur cela plufieurs exemples de notre jurifprudence. C'eft fur ce principe qu'en 1731 on a fait le procès extraordinaire au châtelet de Paris à un Hollandois, comme complice d'un crime capital commis par fon ordre par fon valet en France; & par arrêt du parlement, intervenu fur l'appel de la fentence,, ce valet a été condamné à la roue & exécuté, & fon maître à la même peine, mais par contumace.

Au fecond cas, pour juger la queftion de favoit fi l'étranger peut être puni au lieu où il eft trouvé, on examine la qualité de celui qui a fait l'injure, & la qualité- de celui qui l'a reçue; c'est-à-dire, fi l'accufateur eft François, & l'accufe étranger, ou fi l'accufé & l'accufateur font tous deux étrangers. Si l'accufé eft François, il ne peut décliner fes Juges naturels, & conféquemment l'étranger eft bien fondé d'en demander la réparation, quoique le délit ait été commis hors du royaume. Il en eft II. Partie.

A qui appar tient la con

noiffance des crimes des ec cléfiaftiques

Quelles per fonnes font comprises fous le nom d'oficiers de

judicature.
A qui appar
tient la con-
noiffance des

crimes com

mis par les étrangers

de même fi l'accufé eft étranger, & l'offenfé François, quoique le fait foit arrivé en pays étranger; ainfi qu'il a été jugé contre un Italien trouvé en France, accufé d'avoir tué à Boulogne en Italie un gentilhomme François qui étoit logé en fa maifon. Cet arrêt eft rapporté par Airault, livre premier de l'ordre judiciaire, article 4, nombre 8.

La difficulté eft plus grande quand le crime eft commis hors du royaume, & que les accufés & accufateurs étrangers fe trouvant en France, en demandent la réparation. Pareille queftion s'eft préfentée au parlement de Paris, entre deux particuliers natifs de la ville de Sienne en Italie, nommés Pierre Barghefi & François Mafioli, accufés par un marchand Arménien de lui avoir volé dans la ville de Venife une boîte de diamans. Les accufés demandoient leur renvoi pardevant les Juges de la république de Venife. Par arrêt du 13 février 1671, rapporté au Journal du Palais, la grand'chambre & tournelle affemblées, ils furent déboutés de leur renvoi, & condamnés aux galeres pour neuf années. Cependant au même journal, l'on rapporte un autre arrêt donné en l'audience de la chambre de la tournelle du Parlement de Provence, du 19 janvier 1672, qui a jugé le contraire ; & qu'un criminel étranger qui a commis un délit hors du royaume, ne peut y être pourfuivi par un autre étranger qui l'y rencontre. La conteftation étoit entre deux gentilshommes Génois, l'un accufateur & l'autre accufé, pour raifon d'un vol fait en la ville de Genes. Par cet arrêt, ils furent renvoyés en leur pays.

Quoique ces deux arrêts paroiffent contraires, néanmoins l'efpece n'eft pas femblable. Au premier cas, les accufés étoient de Sienne en Italie, l'accufateur étoit d'Arménie, & le renvoi étoit demandé devant les Juges de la feigneurie de Venife. Au fecond cas, c'étoient deux gentilshommes Génois, pour raifon d'un vol fait en la ville de Gênes. Si bien qu'en la premiere efpece, il n'y avoit que le crime de commis en la ville de Venife, les parties n'y ayant été que paffageres, comme elles l'étoient en France, les accufés étant originaires de la ville de Sienne, & l'accufateur originaire d'Arménie : mais en la feconde efpece, l'accufé & l'accufateur étoient fujets des Juges de la république de Gênes, où le délit avoit été commis; de forte que ce crime n'ayant point été commis en France, & le renvoi étant requis pardevant les Juges naturels des parties, & Juges du lieu du délit : cette confidération a pu fervir de motif à l'arrêt du parlement de Provence, fondé fur le droit des gens, en rendant ce qui eft dû à qui il appartient. Il n'en eft pas de même à l'égard de la premiere efpece, parce que le renvoi étoit requis devant les Juges dont les parties n'étoient point fujettes, puifque les accufés étoient de la ville de Sienne, & l'accufateur originaire d'Arménie, qui font des états différens, régis par différens princes & fouverains; fi bien que les Juges de la feigneurie de Venise n'étant point les Juges naturels des parties, le renvoi étoit requis devant des Juges incompétens; on ne pouvoit donc y avoir égard; aufli n'étoit-il pas poffible de les envoyer en leurs pays pour les juger, puifqu'ils étoient de différens états; il falloit donc néceffairement les juger, encore qu'ils fuffent étrangers, particuliérement lorfqu'on ne peut les renvoyer pardevant leurs Juges naturels : ce qui fait affez connoître que

ces arrêts n'ont qu'une contrariété apparente, & qu'au fond ils ont jugé
fur deux efpeces très-différentes l'une de l'autre.
L'article 20 du titre i de l'ordonnance de 1670,
décide que tous Juges,
à la réferve des Juges & confuls, & des bas & moyens jufticiers, peuvent
connoître des infcriptions de faux, incidentes aux affaires pendantes par-
devant eux, & des rébellions commifes à l'exécution de leurs jugemens.

I

Quels Juges peuvent concriptions de faux.

noitre des inf

1.

CHAPITRE

Des cas royaux.

I I.

A qui appar

tient la con

cas royaux. I

ENTRE les Juges royaux, il n'y a que les baillis, fénéchaux & préfidiaux, à l'exclufion totale des Juges de feigneurs, même de duchés-pai- noiffance des ries, qui puiffent connoître des cas royaux, tels que font les crimes de lèfe-majefté humaine en tous les chefs, facrilége avec effraction, rebellion aux mandemens de juftice ou du Roi, port d'armes, & de la police qui en dépend, affemblées illicites, féditions eu émotions populaires, force publique, fabrication, altération ou expofition de fauffe monnoie, corrections des officiers royaux, malverfations par eux commifes dans leurs charges, crime d'héréfie, bien entendu contre des laïcs, & non contre des ecclefiaftiques; ce feroit en ce cas le Juge d'églife qui en connoîtroit quant au délit cornmun; trouble public fait au fervice divin, comme meurtre fait dans l'églife, foit par des laïcs, foit par des eccléfiaftiques; rapt & enlevement de perfonnes par force & violence, & autres cas royaux, expliqués par les ordonnances & réglemens. Aft. 11 du tit. 1 de l'ordonn. de 1670.

Le terme de préfidiaux, employé dans cet article 11 de l'ordonnance, s'entend des Juges d'une province, comme baillis & fénéchaux, qui font ainfi défignés Juges préfidiaux par l'édit de Cremieu & autres ordonnances, avant la création des confeillers de préfidiaux.

Le bailli du palais connoît de tous les cas royaux dans fon territoire, fuivant l'édit du mois d'octobre 1712.

On appelle cas royal, le cas auquel le Roi a intérêt comme Roi, fouverain maître & feigneur de fon royaume, pour la confervation de fa perfonne & de fes droits, ou pour la manutention de fon autorité royale, de la police & de l'intérêt public. En un mot, tout ce qui s'appelle cas royal eft de la compétence des baillis, fénéchaux royaux & préfidiaux, à l'exclufion & privativement à tous autres juges royaux & non royaux, tels que font les juges des juftices feigneuriales & fubalternes.

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2. La fauffeté commife au fceau d'une fentence d'un prévôt royal, eft un cas royal; cependant le prévôt royal en connoît, fuivant un arrêt du Juin 1659, rendu entre les officiers du bailliage & ceux de la prévôté de Montdidier; de même que tout haut- jufticier connoît de la falfification de fon fceau, fuivant l'arrêt du 21 Juin 1614, entre les officiers de la féné chauffée de Riom & ceux du duché de Montpenfier. Le crime d'affaffinat prémédité a été compris pour la premiere fois parmi les cas prévôtaux dans l'article 12 du tit. de l'ordonnance de 1670;

Cas royal;

ce que c'eft.

Fauffetécom mife au fceau,

d'une fentence d'un prévôt royal, eft un cas royal.

L'affaffinat ef un cas royal.

Si le crime d'incendie et un cas royal.

A qui appartient la con

noiffance des délits commis par les Juges de feigneurs.

mais l'article de la déclaration du Roi du 5 février 1731, qui explique
tous les crimes prévôtaux par leur nature, ne fait point mention de l'aflaf-
finat prémédité, & porte expreffément qu'aucuns autres crimes que ceux
de la qualité marquée dans cet article, ne pourront être réputés cas pré-
vôtaux par leur nature. Ainfi le crime d'affaflinat prémédité ou de guet-
à-pens n'est plus cas prévôtal; il n'eft pas non plus cas royal par
cas royal par lui-même
s'il n'eft commis fur le grand chemin ou chemin royal, ou n'eft accompa-
ghé d'autres circonftances portées en l'art. 1 du tit. 1 de l'ordonn. de 1670.
3. Le crime d'incendie ou boute feu, peut n'être pas du nombre des
cas royaux; & il n'eft royal que quand il eft fait avec deffein prémédité,
pour exciter une émotion & un défordre public dans le lieu, foit ville,
bourg ou village, ou quand l'incendie eft fait des églifes & autres lieux
publics.

4. Les baillis & fénéchaux, par l'autorité qu'ils ont fur les Juges de juftices feigneuriales qui relevent d'eux immédiatement ou médiatement, ont la connoiffance des délits & abus qu'ils commettent dans l'administration de la juftice, & des concuffions & exactions, s'ils en commettent dans leurs fonctions de Juges. On a déjà obfervé que les prévôts royanx n'en peuvent pas connoître, & que cela s'entend des Juges & procureurs filcaux, & non des notaires, fergens & autres bas officiers des juftices feigneuriales, de concuffions & exactions defquels les Juges des feigneurs font compétens de connoître dans l'étendue de leurs jurifdictions, de même que le prévôt royal en connoît dans la fienne à l'égard de ces bas officiers. A qui appar. 5. Quoique par cet article 1 du titre de l'ordonnance de 1670, la tient la con- connoillance du crime de lèfe-majefté en tous fes chefs foit attribuée aux noiffance du baillis & fénéchaux, néanmoins le parlement eft feul compétent de crime de lèfe- juger le crime de lèfe-majefté au premier chef. Tel eft l'ufage qui fe trouve confirmé par plufieurs exemples.

majefté au premier chef.

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il

pu

A quoi il faut ajouter que non-feulement le parlement connoît immédiatement du crime de lèfe-majefté, mais même qu'il interpofe fon aurtotité dans tous les cas, où il trouve qu'elle est néceffaire. C'est pourquoi peut prendre connoiffance en premiere inftance & immédiatement d'une plainte de fcandale public, de faits graves qui intéreffent tout l'ordre blic & la police générale. Cer ufage de la cour de connoître immédiatement en premiere inftance de certains faits importans, a fon fondement dans l'ordonnance de Charles VIII, du mois de juillet 1493, art. 97 & 98, qui le permet à la cour, lorfqu'il y a grande & urgente caufe, & qu'elle voit que faire fe doit.

6. Pour rendre le crime de facrilege cas royal, il faut qu'il ait été commis avec effraction; fans quoi il tomberoit dans la compétence ordinaire, fans exclufion des autres Juges compétens pour connoître des crimes.

Ainfi c'est avec raifon que cet article 11 de l'ordonnance de 1670, a ajouté au facrilege, mis par l'article 10 de celle de Cremieu au nombre des cas royaux, les mots avec effraction, parce que le facrilege en luimême n'offense pas la perfonne du Roi.

Mais lorfque le crime de facrilege fe trouve accompagné de port d'armes & violence publique, ou lorfque l'effraction fe trouve avoir été faite dans

les murs de clôtures ou toits de maifons, portes & fenêtres extérieures quand même il n'y auroit eu ni port d'armes, ni violence publique; en ces deux cas ce crime eft prévôtal, fuivant l'art. 5 de la déclaration du Roi du 5 février 1731.

pre

On diftingue ordinairement trois fortes de crimes de facrilege. La miere eft lorfqu'on vole une chofe facrée dans un lieu facré, comme feroit le ciboire, le foleil où l'on met l'hoftie facrée, & les vafes facrés deftinés pour le fervice divin; ou un meurtre commis en la perfonne d'un prêtre dans l'églife, fa fant fes fonctions facerdotales ou curiales La feconde, quand on vole une chofe facrée dans un lieu qui n'eft pas facté. La troifieme, lorsqu'on vole une chofe profane dans un lieu facré. La punition de ces crimes peut être différente. Dans le premier cas, le coupable feroit puni de mort, qui feroit le feu, après avoir fait l'amende honorable, & avoir eu le poing de la main droite coupé. Dans les deux autres especes, la punition feroit arbitraire, fuivant la qualité, l'âge & le fexe du coupable & les circonftances particulieres du fait, comme s'il s'agiffoit d'un meurtre commis en la perfonne de tout autre eccléfiaftique dans l'églife.

Par fentence du châtelet de Paris du 7 juin 1741, confirmée par arrêt du 12 du même mois, Pierre Bouvart Pafquier, prêtre du diocefe du Mans, convaincu de vol d'un calice & d'une patene d'argent, fait par lui après avoir célébré la meffe dans l'églife du Saint-Efprit, & d'avoir expofé en vente ledit calice & ladite patene à des Juifs, a été condamné à faire amende honorable au-devant de la principale porte de l'églife de Paris, & audit lieu érant nue tête, à genoux & en chemife, ayant la corde au col, tenant entre fes mains une torche ardente de cire jaune du poids de deux livres, dire & déclarer à haute & intelligible voix, que méchamment & comme mat avifé, il a commis ledit vol du calice & de la patene mentionnés au procès, dont il fe repent, &c.ce fait pendu & étranglé, enfuite brulé & fes cendres jettées au vent. Il n'a pas été condamné à avoir la main droite coupée, parce qu'étant prêtre, le facrilege ne confiftoit à avoir torché les vafes facrés.

pas

7. On appelle rebellion aux mandemens du Roi, lorfqu'ils font donnés par la propre perfonne du Roi, ou par fes fecrétaires d'état, de fon ordre exprès; & rebellion au mandement des officiers royaux de juftice, de juftice, forfqu'elle eft faite à l'exécution des fentences, arrêts & jugemens, ou en maltraitant un officier royal ou d'autre juftice da s les fonctions de fa charge. La connoiffance des excès commis en la perfonne d'un huiffier ou fergent exécutant les mandemens, fentences, arrêts ou jugemens de justice, appartient au Juge qui a donné le mandement ou rendu le jugement, & non au Juge du lieu où les excès ont été faits & commis, parce que c'est pour ainsi dire au premier Juge que l'injure a été faite. Voyez l'arrêt du 10 février 1626, aù Journal des Audiences. Voyez l'article 20 du titre premier de l'ordonnance de 1670. Autre chofe feroit fi ies excès avoient été commis en la perfonne du fergent hors les fonctions de fa charge.

8. La police du port d'armes regarde la permiffion ou la défenfe de porter des armes, mais le port d'armes n'eft cas royal qu'en tant qu'il eft, joint à un crime d'affemblée illicite; & en ce dernier cas, c'eft un crime

Différentes

efpeces de cri

mes de facri

lege.

De la rébellion aux mandemens du

Roi,ou à ceux

des officiers

de juftice.

Si le port

d'armes cftan cas royal.

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