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précédens, qui font entièrement favorables aux lieutenans criminels.

5°. Plufieurs réglemens ont décidé la queftion en faveur des lieutenanscriminels. Filleau, part. 2, tit. 1, chap. 14, en rapporte deux, dont l'un du 14 juillet 1573, & l'autre du 7 mars 1594. Le même Filleau en rapporte encore un du 29 août 1579, au chap. 13. Il est vrai que Chenu édit. de 1620, tit. 5, chap. 13, pag. 189, rapporte un arrêt contraire du 8 janvier 1603; mais cette antinomie de jurifprudence doit être fixée par l'édit de février 1661, qui eft poftérieur à ces réglemens. Cet édit eft rapporté dans le Recueil de maréchauffée, tome 1, pag. 829. Le Roi y dit : «Voulons que nos lieutenans-criminels affiftent aux jugemens des procès inftruits par les prévôts des maréchaux, & y président en l'abfence » des préfidens préfidiaux ». Voilà la queftion bien nettement décidée. A l'égard de la feconde queftion, la réfolution de la premiere en faveur du lieutenant-criminel, contre le lieutenant général civil, détermine cette feconde queftion en faveur du lieutenant particulier affeffeur criminel, contre le lieutenanr particulier affeffeur civil, parce que ce font les mêmes raifons de décider, puifque fi toutes matieres criminelles ont été éclipfées de l'office de lieutenant-général civil, pour en attribuer la con. noiffance au lieutenant-criminel; de même les mêmes matieres ont été. éclipfées de l'office de lieutenant particulier civil, pour en donner la connoillance privativement à lui, au lieutenant particulier affeffeur criminel. Ce qui eft prouvé, 1o. par l'édit de création de lieutenans particuliers affeffeurs criminels, du 16 juin 1686, rapporté par Néron, t. 1, p. 672; qui porte que les lieutenans particuliers civils ne connoîtront à l'avenir que du civil feulement, défuniffant de leurs offices la connoiffance & ju» rifdiction criminelle, qui appartiendra par préférence à lui, au lieute»nant particulier criminel, en cas d'abfence du lieutenant - général

criminel ».

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2o. Par divers réglemens qui ont décidé unanimement qu'en l'abfence du lieutenant-criminel, le lieutenant particulier affeffeur criminel aura toutes les fonctions & prérogatives qui lui font attribuées, à l'exclufion du lieutenant particulier civil, & de tous autres, qui ne pourra connoître des matieres criminelles qu'en abfence du lieutenant particulier affeffeur criminel. Filleau en rapporte plufieurs, part. 2, tit. 2; au chap. 5, il en rapporte un du 21 janvier 1604; au chap. 6, deux autres, dont l'un du 25 mai 1605, & l'autre du 4 juillet de la même année; au chap. 8, un du 26 janvier 1607. Chenu, édit. de 1620, tit. 6, en rapporte auffi plufieurs; au chap. 1, un du 26 avril 1604; au chap. 2, un autre du 21 janvier 1604; au chap. 3, un du 25 mai 1605, & un autre du 4 juillet de la même année; au chap. 5, un du 25 janvier 1607, au chap. 6, un du 23 septembre 1609; enfin, au tit. 40, chap. 62, un arrêt du 29 novembre 1604. Néron, tome 2, page 610 en rapporte un du 30 août 1631. HenGreffiers cri- rys, tome 1, livre 2, chap. 4, queft. 23, un autre du 10 août 1644. minels ne

peuven expédier d'euxmêmes aucuns actes.

19. Il eft défendu aux greffiers criminels, à peine de faux, de recevoir & expédier aucun acte, ordonnance & jugement, feuls & fans le lieutenant-criminel, ou autre officier, en cas de maladie, récufation ou ab fence du lieutenant-criminel,

noiffance des

nels faits aux ducs & pairs..

20. Il n'y a que le parlement de Paris qui puiffe connoître en premiere A qui appar inftance & en dernier reflort des affaires & matieres criminelles qui regardent perfonnellement les ducs & pairs de France. Il y a même plufieurs exemples dans nos hiftoires, que nos Rois ont préfidé au jugement du procès extraordinairement fait & inftruit à un duc & pair; mais cette formalité n'eft pas nécefiaire : c'eft le parlement en corps & aflemblé en la grand'chambre, & non en la chambre de la tournelle, qui juge un pareil procès. C'eft auffi de cette maniere que les parlemens & aurtes cours fupérieures. Des procès jugent le procès extraordinairement fait à un préfident ou confeiller. Les maîtres des requêtes, comme faifant partie du parlement de Paris, ne peuvent non plus être jugés en matiere criminelle, que par le parlement de Paris aflemblé en la grand'chambre.

21. Si plufieurs Juges tirés des différens parlemens, font commis pour l'inftruction & le jugement d'un procès criminel, & qu'un de ces Juges vienne à décéder, les autres ne peuvent plus procéder ni juger; il faut néceffairement retourner au fupérieur qui a commis, pour en nommer un autre à fa place.

22. Un Juge délégué par le Roi en matiere criminelle, peut fubdélé guer, contre la régle générale que le Juge délégué ne peut fubdéléguer; mais toujours un pareil délégué ne peut & ne doit excéder ni pafler les bornes & les termes de fa commiffion; car tout Juge délégué où commis ne peut point inftrumenter ni fe tranfporter hors l'étendue de fon reffort, à moins que l'arrêt ou jugement qui le commet, ne le lui permette, à peine de nullité de la procédure & de l'inftruction qu'il feroit. 23. Le Juge qui a inftruit ou jugé une affaire criminelle, ne peut en connoître fur l'appel de la procédure ou de la fentence; autrement il feroit deux fois juge dans une même affaire.

24. Ce n'eft pas affez qu'un Juge interdit par un décret qui emporte interdiction ou autrement, obtienne un arrêt qui, en le recevant appellant, faffe défenfes de mettre à exécution le décret, pour rentrer dans fes fonctions; il faut que l'arrêt permette par provision à l'accufé de continuer fes fonctions. C'eft à quoi on doit bien prendre garde quand on obtient un arrêt de défenfes contre un décret d'ajournement perfonnel, ou de prife de corps décerné contre un officier, ou autre fentence ou juge ment d'interdiction; car fi ces termes manquoient dans l'arrêt ou juge ment, l'officier ne pourroit pas faire fes fonctions en vertu & fur le fondement du fimple arrêt de défenfes.

voyez

25. Il y en a qui prétendent que les baillis & fénéchaux ont la connoiffance des délits, abus, malverfations, concuffions & exactions, que les Juges des juftices feigneuriales qui reffortiffent devant eux, commettent dans l'adminiftration de la juftice, & par appel aux parlemens; mais ci-après, chap. 5, nombre 3. Si les feigneurs laiffent leurs Juges fe défendre comme ils jugeront à propos, ils ne font tenus d'aucune des peines pécuniaires qui pourroient être prononcées contre leurs officiers autre chofe feroit, fi les feigneurs avoient pris leur fait & caufe, & s'étoient rendus parties aux procès, pour fe joindre à eux & les défendre.

crimine's des préfidens, maîtres requêtes,

confeillers.

De plufieurs Juges comun ve. mis, nant à mou

rir, les autres ne peuvent plus juger. Juge commis ar le Roi peut fubdéléguer.

Juge qui a jugé en cau e principale, ne peut l'être

fur l'appel.
Ce qu'il faut
obferver
quand on ob-
tient un arrém

de défenses
contre un dé-

cret décerné contre un of ficier.

A qui appar tient la connoiffance des

délits commis par les Juges de fei

gneu:s.

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Ce que doit

faire un Juge

qui eft troublé dans les

fonctions de fa charge.

De la prévention.

26. Un Juge offenfé & maltraité dans les fonctions de fa charge, ne doit pas connoître de ce fait; tout ce qu'il peut faire de mieux, c'est de dreffer un procès verbal du fait, & s'adreffer au parlement ou autre cour fupérieure dont il releve, pour y obtenir un arrêt en forme de commiffion, fur les conclufions du procureur-général de cette cour, par lequel il fera commettre un Juge pour informer du contenu au procès-verbal, qui fera attaché à la requête, en forme de plainte, & pour faire le procès à l'accufé jufqu'à fentence définitive, fauf l'appel au parlement ou autre cour qui aura donné l'arrêt.

Il est ici à remarquer que les parlemens & autres cours fupérieures ne commettent que des Juges royaux, & non des Juges fubalternes ou de juftices de feigneurs.

Un Juge inférieur, quoiqu'incompétent, peut faire quelques fonctions de fon miniftere, comme pour faire ceffer le fcandale & prévenir un péril

éminent.

Les Juges fubalternes, les officiaux & Juges eccléfiaftiques ne peuvent connoître des contraventions aux ordonnances royaux, ni faire le procès à des Juges & autres officiers royaux, dans les fautes, abus & malverfations par eux commis dans leurs fonctions; il n'y a que les Juges royaux qui aient ce pouvoir: cependant le Juge inférieur étant Juge du lieu du délie, pourroit informer fur la plainte, afin d'aflurer les preuves, même décréter & interroger tous accufés, même pour cas royaux ou prevôtaux. Voyez la déclaration du Roi du 5 février 1731, art. 21 infrà, chap. 3.

27. En matiere criminelle, les Juges royaux n'ont point entr'eux de prévention qui priveroit le Juge naturel & compétent de la connoiffance du crime ou délit. Article 7 du tit. 1 de l'ordonnance de 167c.

I

Cependant lorsqu'il y a négligence ou connivence de la part des Juges ordinaires royaux, d'informer & décréter après trois jours complets depuis le crime ou délit commis, il eft permis aux Juges fupérieurs d'en prendre la connoiffance, mais non à un autre Juge royal, égal & non fupérieur du Juge négligent; c'eft ce que nous apprenons dans le fufdit article: ce qui s'appelle plutôt & plus ordinairement dévolution pour cause de négligence, & à titre de bien public, que prévention. Au refte, après toutes les peines prononcées contre les Juges par les ordonnances anciennes & nouvelles, faute de faire informer, décréter & faire le procès aux criminels & coupables, il ne devroit point y avoir en cela de négligence de leur part; leur honneur & leur devoir y font même intérellés.

Il y en a qui prétendent, fur le fondement de l'édit du mois de novembre 1554, & de l'article 11 de la coutume de Bretagne, qu'il ne fuffit pas pour acquérir cette prévention ou dévolution, d'avoir décrété le premier; qu'il faut outre cela que le décret ait été exécuté; mais cet article 7 dú titre i de l'ordonnance de 1670 ne le dit point. L'on voit aufli dans les articles 9 & 10 de la déclaration du Roi du 5 février 1731, qui parlent de la prévention entre les préfidiaux, prévôts des maréchaux & Juges ordinaires, qu'il fuffit pour la prévention d'avoir informé & décrété; aing il faut s'en tenir aux termes dudit article 7.

Mais quand le prévôt royal a informé & décrété dans les trois jours,

enfuire il eft négligent de pourfuivre, il n'y a plus lieu à la prévention ou dévolutiou au bailli royal; il ne refte que la voie de l'appel de déni de juftice, après les fommations requifes, même la prife à partie.

Il faut obferver que la prévention portée par cet article 7, ne doit avoir lieu que quand il s'agit de crimes graves, c'eft-à-dire, qui méritent peine afflictive, & qui font de nature à être pourfuivis d'office à la requête du miniftere public: c'est l'efprit de l'ordonnance, & cela eft fondé en grande raifon , parce qu'autrement l'on ne peut imputer aucune négligence au prévôt royal.

Il y a cette différence entre la prévention ou dévolution, & la concur rence en matiere de compétence, que la prévention eft le droit qu'un de plufieurs Juges a d'attirer à foi la connoiffance du crime ou délit, comme en ayant connu le premier; au lieu que la concurrence eft le droit que divers & différens Juges ont de connoître du crime commis.

C'est une jurisprudence conftante, qu'en cas de conflit de jurisdiction entre la royale & la fubalterne, la provifion doit toujours demeurer au Roi jufqu'après le jugement ou arrêt définitif fur le conflit. Il n'y a pas même de prévention par aucun Juge de feigneur, quoique celui qui auroit prévenu fût Juge fupérieur & du reffort immédiat de l'autre, ni par les Juges royaux ; car ou le cas eft royal & privilégié, ou il ne l'eft pas, mais un fimple délit commun: dans le premier cas, la prévention feroit inutile, patce que les Juges de feigneurs, même de duchés pairies, ne font pas compétens de connoître des cas royaux & privilégiés, & les juger: dans le fecond cas, qui eft le délit commun, les Juges de feigneurs ne pourroient être prévenus par leurs fupérieurs immédiats, qu'au cas qu'ils euffent été négligens d'informer & décréter trois jours complets après le crime commis: c'est ainfi qu'il faut entendre l'article 8. Mais quant à la prévention des baillis & fénéchaux royaux fur les Juges fubalternes non. royaux, dans les cas du délit commun, elle peut avoir lieu, fi les Juges fubalternes & non royaux n'ont informé & décrété, fuppofé qu'il y eût lieu au décret, dans les vingt-quatre heures complettes après le crime commis: art. 9.

Il y a des coutumes & des ufages où la prévention a lieu fans aucun délai par les Juges fupérieurs, fubalternes & immédiats, & par les Juges royaux, fupérieurs immédiats des juftices fubalternes: telles font les coutumes de Vermandois, Senlis, Compiegne, Poitou, Tours, Anjou, Maine & plufieurs autres. Dans les unes, la prévention fe fait fans, revendication ; & dans quelques autres elle eft conditionnelle, c'est-à-dire, qu'elle fe fait par revendication; en forte que fi la revendication n'eft pas formée, le Juge qui aura prévenu continuera à connoître de l'affaire dont il n'étoit juge que par prévention.

En général, la maxime eft néanmoins certaine, qu'un jufticiable peut demander fon renvoi fans le feigneur, & le feigneur fans fon jufticiable; de maniere cependant que la demande du jufticiable en renvoi cefferoit, fi le feigneur agiffoit & requéroit le renvoi, foit en perfonne, soit par fon procureur-fifcal.

Le prévôt de Parisa auffi la prévention fans aucun délai fur les Juges de

A quiappar. tient la connoiffance des

crimes com

mis par des gentilshommes ou des officiers de judicature.

feigneurs, dans la ville & fauxbourgs de Paris feulement; mais le Juge de l'abbaye de Saint-Germain-des-Prés a été déclaré exempt de cette prévention par arrêt du 30 décembre 1617, tapporté par Chenu en fon traité des offices, tit. 42, chap. 10.

Cependant par un arrêt du 15 janvier 1739, rendu fur les conclufions de M. d'Agueffeau, avocat-général, plaidans MM. de la Goutte, Viel, Laverdy, Cochin & Gillet, avocats, il a été jugé que les commiffaires du châtelet avoient la prévention dans le détroit de la jurisdiction de l'abbaye de Saint-Germain-des-Prés, pour l'appofition des scellés & confec- tion d'inventaire.

La prévention fans délai des baillis & fénéchaux royaux fur les Jugės des feigneurs, peut auffi avoir lieu, quand les baillis & fénéchaux font fondés en poffeffion ancienne,

28. Les Juges prévôts, quoique Juges royaux, ne' peuvent connoître des crimes commis par des gentilshommes, ou par des officiers de judicature; article to du titre i de l'ordonnance de 1670. Cette compétence appartient aux baillis & fénéchaux, defquels les prévôts, vicomtes, viguiers & châtelains royaux font les fubalternes, & dont le pouvoir eft arrêté en cette partie.

Dès que par la difpofition de cet article, les prévôts, vicomtes, viguiers & châtelains royaux ne font exclus de connoître des crimes & délits, que par rapport aux gentilshommes & officiers de judicature, ils peuvent connoître des crimes & délits commis par autres perfonnes laïques, parce que leur exclufion eft bornée & limitée aux feuls gentilshommes & officiers de judicature. Cependant, fuivant l'article 11 de la coutume de Normandie, le Juge vicomte ne peut connoître du crime qu'incidemment à une contestation civile pendante devant lui, comme juge naturel des affaires civiles entre roturiers : il ne peut directement prendre connoiffance des affaires criminelles, quoiqu'entre perfonnes roturieres; il n'a aucune compétence à cet égard fur eux.

que

29. Les Juges des feigneurs, du moins les Juges hauts jufticiers, peuvent connoître des crimes commis par les gentilshommes & les officiers de judicature dans l'étendue de leur juftice; en quoi ils ont plus de pouvoir les prévôts, vicomtes, viguiers, châtelains royaux qui font exclus de cette compétence par l'ordonnance: c'eft la difpofition du fufdit article 11, qui ne fait en cela que confirmer l'ancienne jurifprudence, comme nous P'apprenons de l'article s de l'édit de Crémieu, & de la déclaration du Roi du 23 février 1536 fur l'édit de Crémieu.

30. Les baillis & fénéchaux royaux peuvent non-feulement connoître des crimes commis par les gentilshommes & officiers de judicature dans l'étendue de leurs bailliages & fénéchauffées, mais encore des crimes commis par les roturiers dans leur reffort & jurifdiction immédiate.

Quelles perSous le mot de gentilshommes, il faut entendre non-feulement les nobles fonnes font d'extraction, mais encore les nobles par charges & dignités, & les ancomprises noblis. Les commenfaux de la maison du, Roi & des princes du fang de gentilshom royal n'ont pas ce privilége, quoiqu'ils prennent la qualité d'écuyer

fous le mot

mes.

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