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larcin; on joint auffi à la vindicte publique des condamnations pécuniaiSECT. XIV. res, comme reftitutions au quadruple, amende ou aumône.

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Ceux-là tombent dans le crime de péculat, qui font banqueroute &. emporten: les deniers du Roi, ou qui font redevables de fommes notables envers le Roi ou le public, fans pouvoir prouver aucune perte; ou ceux qui jouent les deniers royaux ou publics, ou qui les donnent à rente ou à intérêts, en font achats de meubles ou immeubles, ou qui les employent à bâtir; ou ceux qui changent ou billonnent les efpeces qu'ils ont reçues; ou ceux qui font de faux emplois ou omiflions, faufle recette, faulle dépenfe ou fauffe reprife, ou faux acquits pour augmenter leur dépenfe.

La preuve par témoins eft recevable en fait de péculat, à quelque fomme que fe montent les fommes qui donnent lieu à l'accufation: de plus, trois témoins dépofant de trois faits finguliers de la même nature, quoique différens pour le regard des perfonnes, valent autant qu'une dépofition en

tiere d'un témoin.

Les donations faites par les officiers, fermiers, comptables & receveurs qui fe trouv.roient redevables envers le Roi, & coupables de péculat, ou qui ont acheté des offices & charges, ou doté leurs enfans des deniers royaux, peuvent être répétées fur eux pour le paiement des reftitutions reliquats & condamnations adjugées au Roi. Il faut voir là-deflus l'ordonnance de Rouffillon du mois de janvier 1563, articles 16 & 17. L'on peut voir aufli à ce fujet l'ordonnance de 1629, depuis l'article 390, jufqu'à l'article 400; laquelle ordonnance eft obfervée en plufieurs points, à caufe de l'équité qu'ils contiennent.

La peine des comptables qui ont diverti les deniers royaux de leur caiffe, a été différente, fuivant l'ordre des tems.

Par les plus anciennes ordonnances, la peine étoit pécuniaire; on les condamnoit au double, ou tout-au-plus au quadruple.

Par une ordonnance du 8 juin 1565, regiftrée le 3 juillet suivant, ces coupables étoient privés à perpétuité de leurs offices, & punis d'une amende du quadruple, & de peines afflictives & corporelles.

Par une derniere déclaration du 3 juin 1701, ils doivent être punis de mort, fans que les Juges puiffent modérer cette peine, à peine d'interdiction, & de répondre en leurs propres & privés noms des dommages & intérêts.

Il faut dire la même chofe des receveurs des tailles, receveurs des confignations, des commiffaires aux faifies-ré lles, & aux receveurs publics qui ont épuifé leurs caifles, & en ont diffipé les deniers.

Quoi qu'en difent quelques auteurs, le crime de péculat ne fe peut prefcrire que par vingt années, & non pas par cinq ans, étant un crime capital. Par l'ordonnance de Moulins, art. 23; d'Orléans, art. 130, il est défendu à toutes perfonnes, de quelque qualité qu'elles foient, d'impofer & lever aucuns deniers fur les fujets du Roi fans fa permiffion expreffe, à peine d'être punis fuivant la rigueur des ordonnances.

SECTION QUINZIE ME.

Du crime de fortilege.

1. Généralement parlant, le fortilege est un

maléfice commis par un

mauvais chrétien, & contre la foi & la religion; c'est une hérélie, dit Julius Clarus, S. hærefis, nombre dernier.

Le fortilege, la forcellerie, la magie font mots fynonymes.

2. Il y a beaucoup de gens qui nient les forciers, & qui difent que ce font feulement des preftigiateurs : cependant il en eft parlé dans le texte facré, puifqu'il y eft dit que les forciers font punis de mort; l'églife en reconnoît. Un auteur a pouffé la chofe plus loin; il dit qu'il faut bien être incrédule pour ne pas croire qu'il y ait des forciers, & dire que ce n'eft qu'une illufion. Il y a des parlemens en France, comme celui de Paris, où l'on ne punit pas ces fortes de criminels comme forciers. mais comme impofteurs qui abufent de la religion pour tromper les gens fimples, ou qui par quelques herbes ou mauvaises compofitions de drogues, maléfices ou poifon, donnent ou caufent la maladie ou la mort à des beftiaux, comme chevaux, vaches, bœufs, brebis & moutons; d'où vient qu'on les regarde & on les condamne quelquefois comme des facrileges, en ce qu'ils abufent en certaines occafions des chofes faintes & facrées.

2. l y a encore des devins ou pronoftiqueurs qui fe mêlent de prophétifer & deviner, & qui font entendre qu'ils favent la penfée des hommes; ce qui eft une grande erreur, difent les peres, & entre autres faint Thomas d'Aquin: non norunt cogitationes hominum, neque futura aut contingentia agnofcunt, nifi ex conjectura.

4. La peine des criminels de fortilege, magie ou forcellerie, eft le dernier fupplice: on les châtie rigoureufement en Italie; à Genève on les brûle vifs; & lorfqu'ils font convaincus d'avoir fait mourir quelqu'un par leur att on les tenaille.

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En France on les pend & enfuite on les brûle; quelquefois on les condamne à être brûlés vifs, fuivant les diverfes circonftances des faits dont ils font accufés; & quelquefois auffi on les condamne à des moindres peines. Par arrêt du parlement de Paris en la tournelle criminelle, du 23 janvier 1740, plufieurs bergers des environs de Provins ont été condamnés; favoir fept d'entre eux au carcan & aux galeres les uns pour neuf ans les autres pour cinq ans, & d'autres au banniffement.

5 Quant aux prétendus devins ou pronoftiqueurs, c'est la peine du fouet avec le banniffement.

La connoiffance de ces fortes de crimes appartient au Juge laïc; mais fi l'accufé étoit un eccléfiaftique, voyez ci-après, partie feconde, de la compétence, chap. 6. fect. 4.

Il y a de très belles loix dans les livres de Juftinien, au code de malefic. mathemat. & dans le titre de epifcop. audient. pour la punition des devins & enchanteurs. Les empereurs Honorius & Théodofe écrivant à Cécilien un de leurs magistrats, lui mandent de bannir ces fortes de criminels, à moins qu'ils ne vouluffent confentir à voir brûler leurs livres en préfence des évêques ; ce qui montre en paffant que les évêques de ce tems-là n'avoient nulle jurifdiction pour ce regard : c'est la raison pour laquelle l'empereur Léon écrivoit à un de fes officiers de les punir de mort comme apoftats, fuivant ce que nous trouvons dans la novelle 65, Leonis.

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SECT. XV:
Si ce crime

eft un cas
royal.

De quelle maniere fe

faifoit autre fois la preuve de ce crime.

7. Suivant un arrêt du parlement de Paris du 12 mars 1588, le crime de forcellerie ou magie n'eft point un cas royal, ni de la compétence des prévôts des maréchaux. Il y a un arrêt dans Filleau, au nombre des régleinens pour le jugement des procès des accufés de fortilege, du 17 août 1602; on le trouve partie 2, tit. 3, chap. 17 des œuvres de cet arrêtifte, par la raifon que ce crime eft une efpece de crime de lefe Majefté divine: c'eft pourquoi on ne peut juger un pareil crime qu'à la charge de l'appel. Arrêt du même parlement du 10 août 1641, rapporté par Henrys, tome 1, liv. 4, chap. 6, quft. 99.

8. La preuve ou purgation des accufés de fortilege ou autres crimes, fe faifoit autrefois par attouchement d'un fer chaud, ou par immerfion dans l'eau; mais ce genre de preuves a été condamné comme fuperfti tieux. Voyez Pafquier, liv. 4, chap. 2.

9.

L'auteur des obfervations fur Henrys, tome 1, liv. 4, chap. 6, quest. 99, nous apprend qu'en 1672 le parlement de Rouen, qui croit affez aifément qu'il y a des forciers, ayant fait arrêter un très-grand nombre de bergers, & autres gens accufés d'être forciers, à qui ce parlement avoit fait le procès avec beaucoup de diligence, le Roi averti de cela, donna un arrêt de fon confeil, par lequel il fut enjoint à ce parlement de relâcher ces accufés. Cet auteur ajoute que cet arrêt eut le pouvoir de faire taire le démon, & que depuis ce tems-là on n'a plus entendu parler de forciers en Normandie. Mais il eft à croire que cet auteur n'a pas été bien informé; car on trouveroit plufieurs arrêts au greffe criminel de ce parlement, par lefquels ces fortes de criminels ont été condamnés au dernier fupplice; fi ce n'a pas été comme forciers ou magiciens, du moins ç'a été pour maléfices, impiétés & irréligion.

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1. II y a une grande différence à faire entre la banqueroute fraudoleuse, qui eft un véritable crime dont il s'agit ici, & faillite. Celle-ci a lieu lorfqu'un banquier, marchand, négociant ou intéreffé dans les affaires du Roi, fe trouve hors d'état de payer fes créanciers, par l'impuiffance & les difgraces qui lui font furvenues, fans qu'il y ait aucunement de fa faute; auquel cas il eft plus digne de commifération que de blâme.

Au contraire, la banqueroute frauduleufe fe commet par des banquiers, marchands, négocians & intéreffés dans les affaires du Roi, ou tous dépofitaires publics & autres, qui par leur dol, fraude, malice & mauvaife foi, divertiflent leurs effets, ou les dépôts qui leur ont été faits, fuppofent des créanciers par des actes fimulés, où déclarent plus qu'il n'est dû à leurs véritables créanciers. Voyez l'art. vo du titre 11 de l'ordonnance de 1673:

L'article 11 du même titre répute encore banqueroutiers frauduleux, les négocians & les marchands, tant en gros qu'en détail, & les banquiers, qui lors de leur faillite ne repréfenteront pas leurs regiftres &

journaux en la forme portée par les articles 1, 2, 3, 4, 5, 6 & 7 du titre 3 de la même ordonnance.

I

SECT. XVI.
Peine des

2. Quant à la peine du crime de banqueroute frauduleufe, fans rappeller ce qui eft porté à ce fujet par l'article 205 de l'ordonnance de Blois, banquerou& autres anciennes ordonnances, qui puniffoient de mort les banque- tiers routiers frauduleux, il fuffira d'obferver que l'article 12 du même tit. 11 de l'ordonnance de 1673 porte que les banqueroutiers frauduleux feront pourfuivis extraordinairement & punis de mort; ce qui a peu d'exécution; & communément tout le monde fe plaint de ce qu'on n'eft pas affez févere pour punir les banqueroutiers frauduleux, qu'on ne les met qu'au pilori ou au carcan, & que fouvent ils méritent la corde.

L'article 13 du même titre 11 porte, que ceux qui auront aidé ou favorifé la banqueroute frauduleufe, en divertiffant des effets, acceptant des tranfports, ventes ou donations fimulées, & qu'ils fauront être en fraude des créanciers, ou fe déclarant créanciers ne l'étant pas, ou pour plus grande fomme que celle qui leur étoit due, feront condamnés en 1500 liv. d'amende, & au double de ce qu'ils auront diverti ou trop demandé, au profit des créanciers.

Par arrêt du 30 mai 1673, rapporté dans le journal du palais, Jean Defves & le Mercier ont été condamnés à faire amende honorable aux pieds des grands degrés du palais, nuds en chemile, la corde au col, tenant chacun en leur main une torche ardente, ayant écriteaux devant & derriere, portant ces mots; favoir celui dudit le Mercier, banqueroutier frauduleux; & celui dudit Defves, fauteur, confeil & adhérant de banqueroute, & receleur des effets dudit le Mercier; & là étant à genoux, ledit le Mercier dire & déclarer que malicieufement & frauduleufement il a fait faillite & banqueroute à fes créanciers, recelé & détourné fes effets. mis des noms fuppofés dans fes regiftres; & ledit Defves, qu'il a favorifé & confeillé ladite banqueroute, & recelé les effets dudit le Mercier, dont ils fe repentent, en demandent pardon à Dieu, au Roi & à la justice; delà conduits par l'exécuteur le long des rues Saint-Denis & Saint-Honoré, à la croix du trahoir, pour y faire pareille amende honorable; & enfuite conduits par la rue des Prouvaires, dans les halles, au bas du pilori; & après mis & attachés audit pilori par trois jours de marché, & y demeurer pendant deux heures chaque jour, & faire quatre tours dudit pilori pendant ledit tems; ce fait, être menés & conduits aux galeres du Pour y fervir comme forçats l'efpace de neuf ans : permis aux créanciers de faire emprifonner lefdits le Mercier & Defves, après le tems expiré desdites neuf années de galeres, jufqu'à l'actuel paiement de leur dû. Depuis l'ordonnance de 1673, il eft intervenu plufieurs déclarations du Roi, au fajet des faillites & banqueroutes, que l'on trouvera dans aquatrieme partie de ce livre ; elles font des 18 novembre 1702, 11 janvier 1716, 13 juin audit an 1716, & 13 feptembre 1739.

Roi

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Il est encore intervenu fucceffivement d'autres déclarations du Roi, qui portoient attribution pour certains tems aux jurifdictions confulaires du royaume, de la connoiffance des faillites & banqueroutes; & au prévôt de Paris, de tous les procès mus & à mouvoir pour raifon des faillites &

Loix du royaume concernant

les banque

routes.

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routes.

banqueroutes qui s'ouvriroient dans la ville, prévôté & vicomté de Paris; mais cela n'a duré que jufqu'en 1719.

SECT. XVII. Quels Juges Ainfi à préfent les Juges-Confuls ne connoiffent plus de cette mat ere; connoiffent elle doit appartenir aux Juges ordinaires, chacun dans fon reffort, fauf des banque- l'exécution de ladite déclaration du Roi du 13 feptembre 1739, & fauf à l'égard des comptables, dont la connoiffance appartient à la chambre des comptes, en appellant pour le criminel un préfident & fix confeillers du parlement; & à l'égard des autres dépofitaires, & qui ont le maniement des deniers des fermes, dont la connoiffance appartient aux greniers à sel & élections en premiere inftance, & par appel ès cours des aides.

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Les apoftats

I.

SECTION DIX-SEPTIEME.

Du crime d'apoftafie.

1. L'apoftafie eft un crime dont eft coupable celui qui, après avoir reçu la foi, après avoir été éclairé de la lumiere évangélique, après avoir reconnu la vérité, & après avoir été baptifé, abandonne la foi pour se faire juif, païen, mahometan, ou de quelqu'autre religion.

2. L'on diftingue trois fortes d'apoftatie; la premiere, de ceux qui renoncent à la foi qu'ils ont profeffée au baptême, & à la religion qu'ils avoient jufqu'alors fuivie. Can, non poteft 2, q. 7.

La feconde, de ceux qui ayant fait vou de religion, ou reçu les ordres facrés, quittent leurs monafteres, ou se marient, & fe difpenfent euxmêmes de l'obfervation de leurs vœux, cap. fi quis venerit, & cap. extr. de majorit. & obedient.

illud.

La troisieme eft l'irrégularité qu'encourent ceux qui n'obfervent pas la regle à l'obfervance de laquelle ils fe font voués, qui n'en portent point l'habit, on qui font d'autres chofes défendues fous peine d'irrégularité.

3. Pour être coupable du crime d'apoftafie de la premiere efpece, il faut avoir été baptifé, & avoir reçu la foi catholique, apoftolique & romaine: comme auti il faut dénier tout le fymbole, parce que celui qui en crot une partie & rejette l'autre. eft feulement hérétique. Cependant ceux de la religion prétendue réformée peuvent devenir apoftats; ce qui arrive lorfqu'après avoir abjuré leur héréfie, & ayant profeffé la religion catholique, ils la quittent & retournent à leur premiere erreur, ce qui s'appelle relaps; c'eft le nom que l'on donne à cette efpece d'apoftafie, pour la diftinguer de celle des catholiques qui quittent la véritable religion. Voyez la déclaration du 14 mars 1724, qui rappelle les précédens édits & déclarations du royaume à ce fujer.

4. Les apoftats ne font point reçus à dépofer, ni porter témoignage en ne peuvent quelquamatiere que ce foit, ni à accufer, ni à dénoncer. Can, beatus, & êre témoins. can. fi quis verd 3, 9. 4.

Si le crime

d'apoft fie fe

pre!crit.

5. Le crime d'apoftafie ne fe preferit par aucun tems; mais l'action contre un défunt s'en preferit par cinq ans. Voyez ci-après, part. 3, chap, 1, fect. 3, nomb. 4.

Fin de la premiere partie.

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