condition réalisée, on n'est point en présence d'une donation à cause de mort, mais bien d'une donation entre vifs dont les tiers ont été avertis par l'insinuation conformément au droit commun. D'après la législation nouvelle, la donation étant entre vifs, son émolument ne fait plus partie de la succession du donateur, comme sous la législation antérieure d'après laquelle elle ne valait que comme donation à cause de mort. Par suite la Falcidie ne lui est plus applicable; par suite encore elle reste valable si le donateur est, depuis qu'il l'a faite, devenu insolvable au moment de sa mort. Les créanciers que l'insinuation à d'ailleurs avertis, si la donation est considérable, ne pourraient se plaindre qu'en exerçant l'action paulienne comme pour toutes donations entre vifs. Son émolument est considéré, une fois la confirmation réalisée, comme sorti du patrimoine du donateur du jour où la donation a été faite. Mais entre temps la donation reste en suspens, et c'est le donateur qui est considéré comme en ayant l'émolument dans son patrimoine. Jusqu'à la confirmation le donataire n'aurait pu agir en justice comme propriétaire et la confirmation tacite ne pourrait valoir si le donateur survivait (6). Justinien n'a pas été jusqu'à considérer la donation comme valable sous la condition résolutoire de la révocation. Cependant revenant en arrière sur la législation du sénatusconsulte, il n'a pas maintenu la solution élégante qui, tout en permettant les donations entre vifs, ne maintenait entre époux que les libéralités à cause de mort. Justinien tranchant une controverse décida, par l'une des cinquante décisions, que les donations à cause de mort n'étaient pas soumises à la formaliré de l'insinuation, qu'elles aient été faites ou non au moment de la mort. (6) Labbé sur Machelard: Textes sur les donations entre époux, p. 319. Mais ces donations, comme le fideicommis verbal, exigeaient la présence de cinq témoins. Ces règles s'appliquaient entre époux comme entre étrangers (7). Quant aux dispositions testamentaires, je ferai simplement observer qu'elles ont perdu de leur importance depuis que les donations entre vifs sont confirmées par le silence de l'époux donateur, et depuis qu'il existe entre époux des gains de survie conventionnels. Les maris ne font plus guère à leurs femmes que des legs d'usufruit (8). 34. Dans le droit postérieur à Justinien, l'insinuation disparaît avec la législation de l'Ecloga. Celle-ci la remplace en exigeant que les donations entre vifs soient, comme les donations à cause de mort, faites en présence de cinq témoins ou seulement de trois dans les endroits éloignés des centres de population. L'impératrice Irène exigea la présence de sept ou de cinq témoins suivant la même distinction. Enfin les textes du milieu du IXe siècle parlent généralement de cinq témoins. Avec Basile le Macédonien l'insinuation reparut telle qu'à la fin du règne de Justinien. Mais Léon ne maintint pas cette institution: il exigea la présence de trois témoins pour les donations à concurrence de cinq cents nomismata, et en outre la rédaction d'un écrit pour les donations supérieures à cette quotité. Harménopoule déclare que cette disposition est restée en vigueur. L'insinuation n'existait pas plus dans les codes valaque et moldave que dans la législation néo-grecque. Je n'ai rien de particulier à dire sur les libéralités testamentaires, sauf que le droit byzantin porta au tiers la réserve accordée par la Falcidie à l'héritier grevé et appliqua le même taux à la légitime, ce qui changea la quarta en τρίτον. (7) 4. C. 8. 57. 25. С. 5. 16. (8) C. th. 3. 9. - C. J. 5. 10. Succession ab intestat. 35. Nous savons que lorsque Justinien refondit par les novelles 118 et 127 la matière des successions ab intestat, ce qui constitue la meilleure partie de son œuvre, il laissa subsister, à côté de la vocation des nouvelles classes d'héritiers par lui établies, et après elles, le droit du conjoint appelé par le préteur à la bonorum possessio unde vir et uxor. Le droit successoral du conjoint est donc le même sous Justinien qu'à l'époque classique : il vient après tous les parents; mais il prime le fisc. On peut même dire que la position du conjoint s'est améliorée indirectement par la suppression des possessions de biens propres aux successions des affranchis. En outre et antérieurement à la novelle 118, Justinien décida en 537 que la femme pauvre prendrait, même en face de descendants, un quart, sur lequel s'imputeraient les legs, dans la succession du mari riche. La novelle 53 attribua le mème droit au mari (1). Enfin la novelle 117 (2) restreignit le droit de la veuve, non du veuf, à une part virile s'il y avait plus de trois enfants ou souches de descendants, part en propriété si l'un des enfants au moins était né d'elle, si non en usufruit, sans que son droit pût en aucun cas dépasser cent livres d'or. La novelle 118 maintint tacitement ces dispositions; elle déclare formellement au contraire (3) maintenir l'odieuse disposition de la novelle 115 (4), d'après laquelle le fisc est préféré au conjoint hérétique (le droit de succession était refusé aux hérétiques). L'Ecloga modifia la législation de Justinien sur les successions, mais ce fut d'une manière peu heureuse. Elle (1) Nov. 53. 6. - Auth. Præterea. C. 6. 18. (2) Ch. 5. (3) Ch. 6. (4) Ch. 3, 14. distingua sept classes d'héritiers. Le conjoint ne figure que dans la sixième, et encore le fisc y concourt-il avec lui pour la moitié des biens. Basile le Macédonien revint au pur droit de Justinien. Mais ce droit fut de nouveau altéré sous Léon le philosophe et ses successeurs. Léon avait décidé qu'à défaut de testament les biens d'une personne morte en captivité sans descendants ni ascendants seraient attribués au fisc, sauf un tiers employé en œuvres pies ; cette dernière disposition fut généralisée par Constantin Porphyrogénéte qui l'apppliqua même en présence d'ascendants. D'un autre côté, Léon le philosophe, qui semble avoir réduit au sixième degré le degré de parenté successible, rétablit au profit du conjoint pauvre le droit à la quarte, ou à une part virile en propriété en présence de plus de trois enfants, sauf dispositions testamentaires contraires. Le code moldave reproduisit à peu près ces dispositions. Après les quatre classes d'héritiers du droit de Justinien, venait le conjoint; à son défaut les biens étaient employés en institutions pieuses: de plus, la loi imposait aux héritiers l'obligation de leur consacrer pour la mémoire du défunt un quart ou un tiers des biens. Le code valaque, qui n'appelait les parents à la succession que jusqu'au huitième degré, appelait également le conjoint à leur défaut. Le fisc était encore exclu: à défaut de conjoint, on employait les biens à des fondations religieuses pour le repos de l'âme du défunt. Enfin le droit commun néo-grec suit le manuel d'Harménopoule, c'est-à-dire la législation de Léon le sage et de Constantin Porphyrogénète. Secondes noces 36. J'en aurais fini avec le Bas-Empire gréco-romain, et par conséquent avec la première partie de ce travail, s'il ne me restait à étudier un ensemble de règles spéciales inconnues du droit classique, et qui, au cas de secondes noces, régit les libéralités entre époux d'une manière toute différente de celle que nous avons exposée. Nous avons dit qu'au commencement de l'empire les secondes noces étaient vues favorablement par le législateur. La même influence qui fit tomber en désuétude les lois caducaires, fit considérer par les empereurs du Bas-Empire les secondes noces comme néfastes (1). Le christianisme, par une réaction exagérée contre l'abus du divorce, dépassa en sens inverse la juste mesure par sa prédilection pour le célibat et par son mépris pour la femme et pour le mariage, ne voyant qu'un remède dans le sacrement qui accompagnait celui-ci (2). A un premier point de vue, la femme qui convolait en secondes noces, fut frappée de certaines déchéances par le seul fait de son convol avant l'expiration des dix mois de deuil, délai qui fut bientôt porté à un an. Ainsi elle était notée d'infamie et perdait tous les biens qu'elle avait acquis de son premier mari, soit à titre de gains nuptiaux, soit à titre de libéralités : ces biens faisaient retour aux héritiers de celui-ci (3). Elle ne pouvait en outre disposer, de quelque manière que ce fût, en faveur de son nouveau mari de plus du tiers de ses biens : le caractère accessoire de libéralité qu'avait la constitution de dot était considéré dans ce cas comme en étant le principal (4). Ces déchéances s'appliquaient, qu'il y eût ou non des enfants issus du premier mariage. A un second point de vue, deux séries de dispositions législatives vinrent protéger les enfants du premier lit de l'époux qui se remariait. Les unes leur assurèrent l'avoir des biens que celui-ci avait acquis du patrimoine de (1) 3, 1. С. 5. 9. (2) Tertulien: De cultu feminarum. I. 1. (3) 1: pr., 2, 3, 4; 2. C. 5, 9. (4) 1, 1. С. 5. 9. |