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qu'on lui disoit que le siége n'étoit pas vacant tant que M. Boulogne vivroit, il reprit brusquement: Eh bien, je le ferai fusiller; le siége sera bien vacant alors. Cette aimable plaisanterie fut répétée plus d'une fois, et les chanoines de Troyes purent craindre que leur attachement à leur évêque ne fût une raison pour tourmenter, de nouveau, ce prélat, et peut-être pour le faire périr. Le caractère connu du desposte justifioit ces alarmes. Plusieurs chanoines crurent pouvoir céder à l'orage, et une partie du chapitre prit une délibération pour accorder des pouvoirs à l'ecclésiastique qui avoit été nommé l'année précédente à l'évêché de Troyes. Les événemens qui suivirent, rendirent cette mesure aussi nulle par le fait qu'elle l'étoit de droit. M. Boulogne, sorti des cachots où l'avoit retenu la violence, reprit en main l'administration du diocèse auquel on l'avoit arraché. Les divisions dont l'église de Troyes étoit menacée, se calmèrent aussitôt, et l'ivraie que l'homme ennemi y avoit semée, disparut à la voix du pasteur légitime qui rentra dans tous ses droits.

NOUVELLES POLITIQUES.

Une ordonnance du Roi, du 5 mai, défend aux autorités d'obéir aux contributions ou réquisitions que quelques généraux étrangers se permettroient dans les provinces, contre les intentions des souverains alliés.

LOUIS, par la grâce de Dieu, Roi de France et de Navarre;

Voulant donner aux Princes de notre sang une marque de notre attachement, et aux armées une preuve de notre satisfaction;

Sur le rapport de notre ministre de la guerre, le conseil d'Etat entendu,

Avons ordonné et ordonnons ce qui suit:

Art. 1. Notre bien-aimé frère, MONSIEUR, comte

d'Artois, reprendra le titre de colonel-général des Suisses.

2. Notre cousin, le prince de Condé, reprendra le titre de colonel-général de l'infanterie de ligne.

3. Notre neveu, le duc d'Angoulême, est revêtu du titre de colonel-général des cuirassiers et des dragons. 4. Notre neveu, le duc de Berry, prendra le titre de colonel-général des chasseurs et des chevau- légers lanciers.

5. Notre cousin, le duc d'Orléans, prendra le titre de colonel-général des hussards.

6. Notre cousin, le duc de Bourbon, prendra le titre de colonel-général de l'infanterie légère.

7. Les généraux que le gouvernement précédent avoit nommés aux fonctions de colonels-généraux, auront le titre de premiers inspecteurs-généraux de leurs armes respectives, sous les ordres des princes que nous avons nommés colonels-généraux, et conserveront le traitement, les honneurs et les prérogatives dont ils jouissent

en ce moment.

- LOUIS, par la grâce de Dieu, etc.

Sur le compte qui nous a été rendu par notre ministre secrétaire d'Etat de la guerre, que, par suite d'une fausse interprétation de l'arrêté du gouvernement provisoire, du 4 avril 1814, plusieurs militaires se seroient crus autorisés à quitter leurs drapeaux pour retourner dans leurs familles, sans avoir préalablement obtenu leur congé absolu;

,

Voulant user de clémence envers eux et en même temps faire jouir des mêmes avantages ceux qui sont restés fidèles à leurs drapeaux, et qui peuvent être susceptibles, par leur position, d'obtenir des congés absolus ;

Sur le rapport de notre ministre secrétaire d'Etat de guerre, notre conseil d'Etat entendu ;

Avons ordonné et ordonnons ce qui suit :

er

Art. 1. Les conscrits de la classe de 1815, qui sont Sous les drapeaux, sont autorisés à rentrer dans leurs familles; ceux qui y sont rentrés y sont maintenus.

2. Tous les autres militaires en activité de service qui, par une fausse interprétation de l'arrêté du gouvernement provisoire, du 4 avril 1814, ont quitté leurs drapeaux pour se rendre dans leurs familles, sans en avoir obtenu la permission légale, sont considérés comme étant en congé limité.

3. Notre ministre secrétaire d'Etat de la guerre se fera rendre compte du nombre de militaires de chaque corps qui sont dans cette position. Il fera délivrer des congés absolus à ceux qui y ont des droits, et il fixera un terme aux autres, pour qu'ils aient à rejoindre leurs corps respectifs.

Signé, LOUIS.

-S. A. R. MONSIEUR est allé, le 16, à l'hôtel royal des Invalides. Il a visité avec le plus grand soin, et en donnant partout les marques du plus vif intérêt, les salles, les dortoires, la bibliothèque, l'infirmerie; il est ensuite entré au réfectoire, où les militaires invalides réunis l'ont salué des cris de vive le Roi! vive MONSIEUR! S. A. R. a goûté la soupe, et s'est fait ouvrir le pain dont elle a examiné la qualité. Parvenu à l'extrémité du réfectoire, MONSIEUR s'est fait verser du vin, et de ce ton de franchise chevaleresque qui est son partage, il a bu à la santé des braves invalides. Les acclamations réitérées de ces dignés vétérans, les témoignages de leur profonde émotion, la vivé et unanime expression de leur dévouement au Roi et à son auguste maison, ont été leur réponse au toast du Prince, qui a paru extrêmement sensible à l'enthousiasme que sa présence excitoit. Il a daigné promettre de rendre compte au Roi des bons sentimens dont il avoit reçu l'hommage, et s'est

retiré en témoignant sa satisfaction de l'ordre et de la tenue de toutes les parties de l'établissement.

L'ancien vice-roi d'Italie est arrivé à Paris. On assure qu'il sera fait maréchal de France. Il a eu l'honneur d'être présenté au Roi. La Princesse, son épouse, s'est retirée à Munich.

Bonaparte est arrivé à l'île d'Elbe. Ce qu'on a dit de ses frayeurs, sur sa route, est parfaitement exact. Ce caractère si énergique a eu peur en plusieurs rencontres. Il avoit alors recours aux commissaires qui l'accompagnoient, et réclamoit leur protection d'un air fort humilié. Il s'est déguisé une fois pour échapper aux fureurs du peuple. Il est curieux de comparer cette poltronnerie avec la jactance et la hauteur qu'il affectoit dans ses discours et dans ses bulletins. Il nous avoit dit que l'adversité ne le trouveroit point au-dessous de lui-même. Il n'avoit pas prévu, sans doute, que l'épreuve dût être si rude et si prochaine. Il a, dit-on, formé le projet de se bâtir un palais dans son île. En attendant, il se contente d'une maison où il a trois pièces seulement. On ajoute que les habitans ne l'ont pas trop mal reçu.

- La princesse Catherine de Wurtemberg, qui avoit été mariée à Jérôme Bonaparte, a passé, le 29 avril, par Neuchâtel, en Suisse. Elle se rend à Berne, auprès de Jérôme, dont elle persiste à partager le sort. Cette princesse a éprouvé plus d'un malheur. Depuis la chute de la famille à laquelle elle étoit alliée, elle a été attaquée, sur la route d'Auxerre, par des hommes apostés, qui lui ont pris son argent et ses bijoux. Laissée dans la détresse, elle a été obligée d'écrire à un souverain magnanime pour réclamer des secours qui la missent en état de continuer sa route. Elle a été reçue avec honneur en Suisse, qui paroît devoir être l'asile de plusieurs membres de cette famille. Joseph est à Lausanne, et Louis à Vevay. Jetés, malgré eux, à ce qu'on dit, dans les routes

de l'ambition, ils se tiendront sans doute tranquilles dans leur retraite, et y trouveront le repos dont ils peuvent jouir avec le magnifique traitement qu'on leur laisse.

On découvre tous les jours de nouvelles injustices du perturbateur de l'Europe. Il avoit fait enfermer dans un couvent, à Rome, l'infante d'Espagne, veuve du roi d'Etrurie. Il lui avoit ôté ses Etats, en 1807, sans lui donner rien en compensation. Il devoit lui donner, ainsi qu'au prince, son fils, héritier de la branche de Parme, une rente annuelle de 400,000 fr. Il trouva plus expéditif de la mettre, ainsi que son fils, dans un couvent, à Rome, où on laissoit cette malheureuse princesse manquer du nécessaire. Elle ne pouvoit voir personne. Elle est enfin sortie de sa prison, le 29 janvier dernier, au bout de trente mois de détention. C'est le roi de Naples qui a ordonné son élargissement.

TURIN, 10 mai. Hier et aujourd'hui, il est entré ici beaucoup de troupes autrichiennes, infanterie et cavalerie. M. le général Bubna a fait publier ce matin une déclaration du maréchal prince de Schwartzemberg, au nom des puissances alliées, datée de Paris, le 25 avril, et adressée aux sujets des Etats de Terre-Ferme de S. M. le roi de Sardaigne au-delà des Alpes, et à ceux du comté de Nice. On leur annonce qu'ils vont rentrer sous la domination de cette auguste famille, qui, pendant tant de siècles, a fait leur bonheur et leur gloire; qu'en conséquence d'une convention faite avec la France, les troupes autrichiennes vont prendre possession de leur pays au nom de leur souverain légitime, VICTOR-EMMANUEL. En attendant l'arrivée de S. M. sarde, ses Etats seront administrés par un gouverneur militaire chargé de leur défense, et par un gouverneur civil, assisté d'un conseil de régence.

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