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venir au directoire du département par la voie du district un tableau des ecclésiastiques domiciliés dans son territoire, en distinguant ceux qui auront prêté le serment civique et ceux qui l'auront refusé : ces tableaux serviront à former les listes dont il sera parlé ci-après.

» 3. Ceux des ministres du culte catholique qui ont donné l'exemple de la soumission aux lois et de l'attachement à leur patrie en prêtant le serment civique suivant la formule prescrite par le décret du 27 novembre 1790, et qui ne l'ont pas rétracté, sont dispensés de toute formalité nouvelle; ils sont invariablement maintenus dans tous les droits qui leur ont été attribués par les décrets précédens.

» 4. Quant aux autres ecclésiastiques, aucun d'eux ne pourra désormais toucher, réclamer ni obtenir de pension ou de traitement sur le trésor public qu'en représentant la preuve de la prestation du serment civique, conformément à l'article premier ci-dessus : les trésoriers, receveurs ou payeurs qui auront fait des paiemens contre la teneur du présent décret seront condamnés à en restituer le montant, et privés de leur état.

» 5. Il sera composé tous les ans une masse de pensions dont les ecclésiastiques auront été privés par leur refus ou leur rétractation du serment; cette masse sera répartie entre les quatre-vingt-trois départemens pour être employée par les conseils généraux des communes soit en travaux de charité pour les indigens valides, soit en secours pour les indigens invalides (1).

» 6. Outre la déchéance de tous traîtemens et pensions les ecclésiastiques qui auront refusé de prêter le serment civique, ou qui le rétracteront après l'avoir prêté, seront par ce refús ou cette rétractation même réputés suspects de révolte contre la loi et de mauvaises intentions contre la patrie, et comme tels plus particulièrement soumis et recommandés à la surveillance de toutes les autorités constituées.

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>>7. En conséquence tout ecclésiastique ayant refusé de prêter le serment civique (ou qui le rétractera après l'avoir prêté ), qui se trou- · vera dans une commune où il surviendra des troubles dont les opinions religieuses seront la cause ou le prétexte, pourra, en vertu d'un arrêté du directoire du département, sur l'avis de celui du district, ètre éloigné provisoirement du lieu de son domicile ordinaire, sans préjudice de la dénonciation aux tribunaux, suivant la gravité des cir

constances.

» B. En cas de désobéissance à l'arrêté du directoire du département les contrevenans seront poursuivis dans les tribunaux, et punis de l'emprisonnement dans le chef lieu du département; le terme de cet emprisonnement ne pourra excéder une année.

(1) Cet article appartient à M. Lémontey, qui le proposa dans la séance du 23 novembre.

9. Tout ecclésiastique qui sera convaincu d'avoir provoqué la désobéissance à la loi et aux autorités constituées scra puni de deux années de détention.

>>10. Si à l'occasion des troubles religieux il s'élève dans une commune des séditions qui nécessitent le déplacement de la force armée les frais avancés par le trésor public pour cet objet seront supportés par les citoyens domiciliés dans la commune, sauf leur recours contre les chefs, instigateurs et complices des émeutes.

11. Si des corps ou des individus chargés de fonctions publiques négligent ou refusent d'employer les moyens que la loi leur confie pour prévenir ou pour réprimer une émeute ils en seront personnellement responsables; ils seront poursuivis, jugés et punis conformément à la loi du 3 août 1791.

12. Les églises et édifices employés au culte dont les frais sont payés par l'État ne pourront servir à aucun autre culte.

» Les églises et oratoires nationaux que les corps administratifs auront déclarés n'être pas nécessaires pour l'exercice du culte dont les frais sont payés par la nation pourront être achetés ou affermés par les citoyens attachés à un autre culte quelconque pour y exercer publiquement ce culte, sous la surveillance de la police et de l'adminis tration: mais cette faculté ne pourra s'étendre aux ecclésiastiques qui se seront refusés au serment civique exigé par l'article 1er du présent décret (ou qui l'auront rétracté), et qui par ce refus ou cette rétractation sont déclarés, suivant l'article 6, suspects de révolte contre la loi et de mauvaises intentions contre la patrie.

» 13. La vente ou la location des églises ou oratoires dont il est parlé dans l'article précédent ne peuvent s'appliquer aux églises dont sont en possession, soit privée, soit simultanée avec les catholiques, les citoyens qui suivent les confessions d'Augsbourg et helvétique, lesquels sont conservés en leurs droits respectifs dans les départemens du Haut et du Bas-Rhin, du Doubs et de la Haute-Saône, conformément aux décrets des 17 août, 9 septembre et 1er décembre 1790.

» 14. Le directoire de chaque département fera dresser deux listes; la première comprenant les noms et demeures des ecclésiastiques sermentés, avec la note de ceux qui seront sans emploi et qui voudront se rendre utiles; la seconde comprenant les noms, et demeures de ceux qui auront refusé de prêter le serment civique, avec les plaintes et les procès-verbaux qui auront été dressés contre eux : ces deux listes seront arrêtées incessamment de manière à être présentées s'il est possible aux conseils généraux de département avant la fin de leur session actuell e.

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» 15. A la suite de ces listes les procureurs généraux syndics rendront compte aux conseils de département (ou aux directoires si les conseils sont séparés) des diligences qui ont été faites dans leur

ressort pour rexécution des décrets de l'Assemblée nationale constituante des 12, 24 juillet, et 27 novembre 1790, concernant l'exercice du culte catholique salarié par la nation; ce compte rendu présentera le détail des obstacles qu'a pu éprouver l'exécution de ces lois, et la dénonciation de ceux qui depuis l'amnistie ont fait naître de nouveaux obstacles ou les ont favorisés par prévarication ou par négligence.

» 16. Le conseil général de chaque département (ou le directoire si le conscil est séparé) prendra sur ce sujet un arrêté motivé qui sera adressé sur le champ à l'Assemblée nationale avec les listes des ecclésiastiques sermentés et non sermentés (ou qui se seront rétractés), et les observations du département sur la conduite individuelle de ces derniers ou sur leur coalition séditieuse soit entre eux, soit avec les Français transfuges et déserteurs.

» 17. A mesure que ces procès-verbaux, listes et arrêtés seront adressés à l'Assemblée nationale, ils seront remis au comité de législation pour en faire un rapport général et mettre le corps législatif à portée de prendre un dernier parti afin d'extirper la rébellion, qui se déguise sous le prétexte d'une prétendue dissidence dans l'exercice du culte catholique. Dans un mois le comité présentera l'état des administrations qui auront satisfait aux articles précédens, et proposera les mesures à prendre contre celles qui seront en retard de s'y conformer.

» 18. Comme il importe surtout d'éclairer le peuple sur les piéges qu'on ne cesse de lui tendre au sujet d'opinions prétendues religieuses, l'Assemblée nationale exhorte tous les bons esprits à renouveler leurs efforts et à multiplier leurs instructions contre le fanatisme; elle déclare qu'elle regardera comme un bienfait public les bons ouvrages à la portée des citoyens des campagnes qui lui seront adressés sur cette matière importante, et d'après le rapport qui lui en sera fait elle fera imprimer et distribuer ces ouvrages aux frais de l'Etat, et récompensera leurs auteurs. >>

DE L'ÉMIGRATION. (Voyez à ce sujet, tomes III et V, les discussions de l'Assemblée constituante.)

L'Assemblée et le roi étaient également frappés des progrès de l'émigration; mais ces deux pouvoirs, mus par des considérations différentes, ne pouvaient pour y remédier se rencontrer dans les moyens : l'Assemblée voyait la France; Louis XVI sa famille et les ci-devantnobles: l'Assemblée voulait empêcher et punir; Louis ne voulait qu'inviter et attendre. Cependant une discussion solennelle ne pouvait manquer de s'ouvrir bientôt à la tribune nationale; Louis XVI essaya

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de la retarder en portant le premier des paroles de paix aux transfuges, que n'avait pu toucher la conduite généreuse du corps constituant. (Voy. t. V, p. So, le décret d'amnistie.). PROCLAMATION du roi concernant les émigrations.

« Le roi, instruit qu'un grand nombre de Français quittent leur patrie et se retirent sur les terres étrangères, n'a pu voir

sans

rab être vivement affecté une émigration aussi considé

rable; et quoique la loi permette à tous les Français la libre sortie du royaume, le roi, dont la tendresse paternelle veille sans cesse pour l'intérêt général et pour tous les intérêts particuliers, doit éclairer ceux qui s'éloignent de Jeur patrie sur leurs véritables devoirs et sur les regrets qu'ils se préparent. S'il en était parmi eux qui fussent séduits par l'idée qu'ils donnent peut-être au roi une preuve de leur attachement, qu'ils soient détrompés, et qu'ils sachent que le roi regardera comme ses vrais, ses seuls amis, ceux qui se réuniront à lui pour maintenir et faire respecter les lois, pour rétablir l'ordre et la paix dans le royaume, et pour y fixer tous les genres de prospérité auxquels la nature semble l'avoir destiné.

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Lorsque le roi a accepté la Constitution il a voulu faire cesser les discordes civiles, rétablir l'autorité des lois, et assurer avec elles tous les droits de la liberté et de la propriété : il devait se flatter que tous les Français seconderaient ses desseins; cependant c'est à cette même époque que les émigrations ont semblé se multiplier; une foule de citoyens abandonnent leur pays et leur roi, et vont porter chez des nations voisines des richesses que sollicitent les besoins de leurs concitoyens! Ainsi, lorsque le roi cherche à rappeler la paix et le bonheur qui la suit, c'est alors que l'on croit pouvoir l'abandonner et lui refuser les secours qu'il a droit d'attendre de tous !

» Le roi n'ignore pas que plusieurs citoyens, des proprié taires surtout, n'ont quitté leur pays que parce qu'ils n'ont pas trouvé dans l'autorité des lois la protection qui leur était due: son cœur a gémi de ces désordres ; mais ne doit-on rien pardonner aux circonstances? Le roi lui-même n'a-t-il pas eu ses chagrins! Et lorsqu'il les oublie pour ne s'occuper que du bonheur commun n'a-t-il pas le droit d'attendre qu'on suive son

exemple? Comment l'empire des lois s'établira-t-il si tous les citoyens ne se réunissent pas auprès du chef de l'État? Comment un ordre stable et permanent peut-il s'établir et le calme renaître si par un rapprochement sincère chacun ne contribue pas à faire cesser l'inquiétude générale? Comment enfin l'intérêt commun prendra-t-il la place des intérêts particuliers si au lieu d'étouffer l'esprit de parti chacun tient à sa propre opinion, et préfère de s'exiler à céder à l'opinion commune?

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Quel sentiment vertueux, quel intérêt bien entendu peut donc motiver ces émigrations! L'esprit de parti, qui a causé tous nos malheurs, n'est propre qu'à les prolonger. Français qui avez abandonné votre patrie, revenez dans son sein! C'est là qu'est le poste d'honneur, parce qu'il n'y a de véritable honheur qu'à servir son pays et à défendre les lois. Venez leur donner l'appui que tous les bons citoyens leur doivent ; elles vous rendront à leur tour ce calme et ce bonheur que vous chercheriez en vain sur une terre étrangère. Revenez donc, et que le cœur du roi cesse d'être déchiré entre ses sentimens, qui sont les mêmes pour tous, et les devoirs de la royauté, qui l'attachent principalement à ceux qui suivent la loi ! Tous doivent le seconder lorsqu'il travaille pour le bonheur du peuple. Le roi demande cette réunion pour soutenir ses efforts, pour être sa consolation la plus chère; il la demande pour le bonheur de tous. Pensez aux chagrins qu'une conduite opposée préparerait à votre roi : mettez quelque prix à les lui épargner, ils seraient pour lui les plus pénibles de tous.

» Fait à Paris, au conseil d'état, le 14 octobre 1791. Signé Louis. Par le roi. Delessart. »

LETTRE du roi aux officiers généraux et commandans des troupes de terre. Du 14 octobre 1791.

» En acceptant, monsieur,la Constitution, j'ai promis de la maintenir au dedans et de la défendre contre les ennemis du dehors. Cet acte solennel de ma part doit bannir des esprits toute incertitude; il détermine en même temps de la manière la plus précise et la plus claire la règle de vos devoirs et les motifs de votre fidélité. Mon intention est que vous annonciez aux troupes qui sont sous vos ordres que ma détermination, que

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