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IMPRIMERIE DE H. FOURNIER ET C®, RUE DE SEINE, 14, BIS.

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DE L'ESPAGNE

AU DIX-NEUVIÈME SIÈCLE.

PREMIÈRE PARTIE.

L'Espagne a fini par nous contraindre à nous occuper sérieusement de son sort. Il a fallu que les convulsions de son agonie exerçassent, à Paris, un contrecoup qui déterminât un changement ministériel, pour amener le pays à comprendre que le drame joué au-delà des Pyrénées avec des péripéties si brusques et si sanglantes, n'était pas étranger à ses destinées elles-mêmes. Alors seulement notre solidarité dans un conflit qui décidera de la vitalité des idées que l'Europe entière appelle à bon droit les idées françaises, s'est révélée éclatante à tous les yeux.

Il a pu sembler commode, pendant trois années, de ne prêter aux

(1) Nous sommes heureux de pouvoir 'offrir à nos lecteurs, sur une question qui préoccupe aussi vivement l'attention publique, l'opinion développée d'un homme que ses études et sa haute sagacité ont mis à même d'en porter un jugement calme et approfondi. On ne saurait admettre trop de témoignages impartiaux et éclairés sur un sujet aussi compliqué. Dans deux articles insérés également dans cette Revue, un autre de nos collaborateurs a traité la question espagnole d'une façon non moins curieuse. Il est remarquable que, tout en différant sur certains détails, malgré quelques dissidences partielles, MM. de Carné et Viardot se soient rencontrés sur tous les points fondamentaux: la vérité ne peut que gagner à cette confrontation d'opinions consciencieuses. (N. du D.)

affaires de la Péninsule qu'une attention distraite et secondaire, et d'en remettre la solution au hasard des événemens; on a pu prendre ses mesures pour s'arranger tour à tour avec MM. de Zea-Bermudez, Martinez de la Rosa, de Toreno, Mendizabal, peut-être même pour accueillir une combinaison toute différente si elle venait jamais à prévaloir; mais cette politique, qui fut long-temps funeste à l'Espagne avant que la France comprit qu'elle pouvait lui devenir funeste à elle-même, semble près de toucher à son terme; et quelles que puissent être les impossibilités actuelles de l'intervention, j'ose dire qu'il est peu de bons esprits qui ne déplorent comme un malheur et comme une faute le refus opposé en 1835 aux vœux du ministère espagnol. J'ajouterai qu'il n'est pas un homme de pénétration qui, sans prétendre déterminer aujourd'hui ou l'époque ou les conditions de notre concours, ne considère la coopération française comme inévitable dans la crise péninsulaire.

L'Espagne ne sortira du chaos où elle se débat entre deux principes également stériles, que par la prépondérance de la France venant en aide à un ordre politique analogue au sien: telle fut toujours notre inaltérable conviction; et ceux qui ont pu garder quelque souvenir des vues émises par nous sur cette matière, pourront attester qu'à nos yeux, cette idée, long-temps avant les complications actuelles, s'était produite avec une autorité qui domine les résolutions les mieux concertées, les volontés les plus énergiques.

Il est sans doute d'une bonne politique de circonscrire la sphère de son action selon la mesure de ses véritables intérêts; et c'est parce que ce rôle a été celui de la monarchie de 1830 dans les principales transactions diplomatiques de ces dernières années, qu'en maintenant la paix de l'Europe, elle y a solidement fondé son crédit. Mais la modération présuppose également la force et la prévoyance, et ce n'est qu'en réservant formellement certaines questions qu'on acquiert le droit d'abandonner certaines autres. Or, si à Lisbonne s'agitait une question anglaise, à Varsovie une question russe, à Constantinople une question européenne, la direction des événemens dont l'Espagne est le théatre appartenait à la France par le poids même dont ils doivent peser dans la balance de ses propres destinées.

Elle y devait intervenir au même titre qu'en Belgique, car l'indépendance de ce nouveau royaume n'a pas plus d'importance, en ce qui touche nos intérêts au dehors, que la consolidation d'un bon système de gouver nement en Espagne ne doit en exercer sur notre régime intérieur.

Pour faire comprendre cette connexité, il faudrait pénétrer jusqu'au fond de l'abîme où s'agite la malheureuse Espagne, comme un malade qui se retourne sur un lit de tortures, poursuivi par des hallucinations fẻ

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