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positions pour les belles lettres. On voulait l'engager à se consacrer au barreau; mais son inclination l'entraînait vers la littérature légère et la poésie. Il se contenta de se faire recevoir correcteur en la chambre des comptes de Dijon, en 1672, L'exercice de cette charge ne l'empêcha point de se rendre habile dans les langues grecque, latine, italienne et espagnole, dans l'histoire et dans la littérature. Il remporta le prix à l'académie française en 1671, par son poème du Duel aboli, qui fut le premier des sujets que distribua l'académie. Les sujets de ses autres pièces qui remportèrent aussi le prix, sont, pour l'année 1673, La Gloire des armes et des belles-lettres, sous Louis XIV; pour 1677, L'éducation de mon seigneur le dauphin; pour 1683, Les grandes choses faites par le roi en faveur de la religion; enfin pour l'année 1685, La Gloire acquise par le roi en se condamnant en sa propre cause. Sa pièce intitulée L'Académie française sous la protection du roi, ayant été envoyée trop tard en 1673, ne put être admise à l'examen. L'académie française se l'associa en 1713, et il était bien juste qu'un athlète qui avait été couronné cinq fois fût assis avec ses juges. La poésie ne faisait pas la principale occupation de La Monnoye; il avait su joindre dès sa jeunesse l'érudition aux belles-lettres. La parfaite connaissance des livres et des auteurs de tous les pays, et la discussion pénible des anecdotes littéraires dont aucune ne lui échappait, formaient en lui une érudition presque unique. Les bibliographes le regardaient comme leur oracle, et c'est ainsi qu'ils l'ap

pelaient, malgré le silence que sa modestie avait exigé d'eux. Les qualités de son cœur égalaient celles de son esprit; son caractère était gai et égal, poli et officieux. Ce littérateur estimable mourut à Paris le 15 octobre 1728, à 88 ans. Ses principaux ouvrages sont : 1o des Poésies françaises, in-8°, imprimées en 1716 et 1721; 2o de nouvelles Poésies, imprimées à Dijon en 1743, in-8°. Ces deux recueils méritent des éloges; il y a plusieurs vers heureux et quelques morceaux agréables. Le style en est quelquefois prosaïque, et la douce chaleur de la poésie ne s'y fait pas toujours sentir; mais dans ces sortes de collections tout ne peut pas être égal. 3° Des Noëls bourguignons, 1720 et 1737, in-8°, que l'on regarde comme un chef-d'œuvre de naïveté; mais il faut être Bourguignon pour la bien sentir. Quand on ne l'est pas, on peut bien trouver grossier ce qui paraît naïf à d'autres. 4° Les tomes 3 et 4 du Menagiana, de l'édition de 1715, en 4 vol. in-12, avec une Dissertation curieuse sur le livre De tribus impostoribus. Il s'attache à prouver que cette affreuse production n'a jamais existé, du moins en latin. Il peut se faire effectivement que d'abord ce livre ait été imaginaire, et que ceux qu'on a vus depuis n'aient été faits que d'après le titre; mais il paraît que La Monnoye se trompe en croyant qu'il n'existait pas en 1712; M. Crevenna, citoyen d'Amsterdam en possédait un exemplaire la tin dans sa riche bibliothèque, dont nous avons le Catalogue raisonné en 5 vol. in-4°. Cet exemplaire, de 46 pag. in-8", porte l'année 1598; il est vrai

que M. Crevenna le croit postérieur à cette date; mais il n'est pas vraisemblable qu'il soit plus récent que la Dissertation de la Monnoye. Il y a cependant des gens qui attribuent cette fraude à Straubius, qui fit imprimer ce livre à Vienne en Autriche en 1753, sur une prétendue ancienne édition qui est très suspecte, et peut-être imaginaire. M. Crevenna a une traduction française qui n'a aucun rapport avec l'exemplaire latin. L'un et l'autre sont des libelles très plats, sans esprit et sans raison, indignes d'attention, et plus encore d'une réfutation sérieuse. (Voy.VIGNES Pierre des.) 5° De savantes Notes sur la Bibliothèque choisie de Colomies; 6o des Remarques sur les Jugements des savants de Baillet, et sur l'Anti-Baillet de Ménage (voy. ce nom); 7° des Remar. ques sur les Bibliothèques de du Verdier et de la Croix-duMaine; 8o des Notes sur l'édition de Rabelais de 1715; elles sont plus grammaticales qu'historiques; 9° c'est à la Monnoye qu'on doit l'Edition de plusieurs poèmes français, imprimés chez Coustelier; et le Recueil de pièces choisies en prose et en vers, publié en 1714, à Paris, sous le titre de Hollande. On a encore de lui la Traduction en vers français de la Glose de sainte Thérèse (voyez ce nom), ouvrage qui prouve autant les talents du poète, que son goût pour le langage de la religion et d'une piété tendre. [La Monnoye avait des connaissances très étendues, était en correspondance avec plusieurs savants de l'Europe, et se faisait aimer autant par ses talents, que par sa modestie. ]

MONOSZLOI (André), d'une famille noble de Hongrie, fut élevé sur le siége épiscopal de Vesprin, après Vesprin, après avoir rempli avec zèle plusieurs autres emplois. On a de lui De invocatione et veneratione sanctorum, Tyrnau, 1589, in-4°. Cette matière y est amplement et savamment discutée. Nicolas Gyarmati, ministre réformé, attaqua cet ouvrage; mais Pierre Pazman, depuis cardinal, le fit repentir de sa témérité par une très solide et élégante réfutation, où il mit au néant tout ce que le ministre avait opposé à l'ouvrage du savant et pieux évêque.

MONOYER (Jean-Baptiste), peintre, né en 1635 à Lille, mourut à Londres en 1699. On ne pouvait avoir plus de talent que Monoyer pour peindre les fleurs. On trouve dans ses tableaux une fraîcheur, un éclat, un fini, enfin une vérité qui le dispute à la nature même. Milord Montaigu ayant connu ce célèbre artiste pendant son séjour en France, l'emmena à Londres, où il employa son pinceau à décorer son magnifique hôtel. On a aussi beaucoup de ses tableaux en France. —Antoine MONOYER, son fils, a été son élève et membre de l'académie.

MONPENSIER. Voy. MONT

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l'Ostéologie de Monro en français, sous ce titre : Traité de l'ostéologie, traduit de l'anglais de M. Monro, Paris, 1759, 2 vol. in-fol., avec un grand nombre de planches. C'est un vrai chef-d'œuvre de typographie. 2o Essai sur les injections anatomiques, traduit en latin, Leyde, 1741, in-8°; 3° Examen des remarques de MM. Winslow, Ferrein et Walthers, sur les muscles, Edimbourg, 1752; 4° Médecine d'armée, traduite en français par Le Bègue de Presle; 5. il a enrichi les Mémoires de la société d'Edimbourg d'un grand nombre de pièces intéressantes. Il vivait encore en 1765, dans un âge très avancé. Un de ses fils a publié sur l'hydropisie une Dissertation, que Savari a traduite en français, Paris, 1760, in-8°, et qui peut être d'un grand secours dans le traitement de cette maladie.

MONS-AUREUS. Voy MONT

Doré.

MONSIGNANI (Eliseus), natif du Frioul, entra dans la congrégation des carmes, fut nommé quatre fois procureur du père général de l'ordre, et mourut à Rome en 1737, après avoir publié Bellarium carmelitarum, Rome, 1715, 1718, 2 vol. infol., ouvrage qui a demandé beaucoup de recherches.

+ MONSIGNI (Pierre-Alexandre), célèbre musicien français, naquit d'une famille noble à Fauquemberg, dans l'Artois, en 1729. Le florentin Lulli avait introduit en France la musique dramatique; Gluck, Piccini et Sacchini l'y perfectionnèrent et y firent d'heureux imitateurs, tels que Philidor (né en 1726), Duni, Dauvergne, Laborde, Lemonnier et Monsigni. Ce dernier

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reçut les leçons de Giannotti, italien, et son premier essai fut un petit opéra, Les Aveux indiscrets, représenté, en 1759, à la foire Saint-Germain, berceau de l'opéra-comique, dont Monsigni fut un des inventeurs. Cet ouvrage eut un grand succès, et son auteur soutint ensuite sa réputation, malgré la concurrence de Grétry, rival redoutable et jaloux. L'avant-dernier duc d'Orléans lui donna, en 1765, la place de maître-d'hôtel dans sa maison, et Monsigni ayant perdu sa fortune par suite de la révolution les comédiens du théâtre Favart lui firent, en 1798, une pension de 2,400 francs. Deux ans après, il remplaca Piccini dans l'emploi d'inspecteur au Conservatoire de musique; mais il s'en démit en 1802, et eut pour successeur Martin (et non Martini), espagnol, né à Alicante. Il fut nommé, à la mort de Grétry, en 1813, membre de l'institut, ob. tint la croix de la Légion-d'Honneur dans la même année, et fut reçu, en 1816, à l'académie des beaux-arts. Monsigni était le doyen des musiciens; il habitait une petite maison au faubourg Saint-Martin, où il mourut le 14 janvier 1817, âgé de 88 ans. On a de lui, outre les Aveux indiscrets cités plus haut, les opéras suivants : Le Roi et le Fermier, 1762, qui eut plus de deux cents représentations; Rose et Colas, 1764; Le Déserteur, 1769; l'Ile sonnante, 1774 ( avec Colle); le Rendez-vous bien employé, 1775 (avec Anseaume); la Belle Arsène, 1775; Félix ou l'Enfant trouve, 1777. Il a composé aussi trois grands opéras, Aline, reine de Golconde, 1766; Pagannis de Marègue; Philemon et Baucis: ces deux derniers opéras n'ont

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MONSTIER (Artus du), récollet, né à Rouen, employa le temps que ses exercices de religion le laissaient libre, à travailler sur l'histoire de son pays. Il en a composé 5 vol. in-fol. Le 3o, qui traite des abbayes, a paru à Rouen en 1663, in-fol., sous le titre de Neustria pia, livre rare. L'auteur était mort en 1662, pendant qu'on imprimait ce volume, ce qui sans doute a einpêché les autres de paraître. Les deux premiers traitent des archevêques et évêques, sous le titre de Neustria christiana; 4e des saints, sous le titre de Neustria sancta; et le 5o, de différents objets, sous le titre de Neustria miscellanea. On a encore du P. du Monster : 1° De la sainteté de la monarchie française, des rois très chrétiens, et des enfants de France, Paris, 1638, in-8°; La piété française envers la sainte Vierge NotreDame de Liesse, Paris, 1637,

in-8°.

le

MONSTRELET (Enguerrand de), né à Cambrai au xve siècle, d'une famille noble et ancienne, devint gouverneur de cette ville, et mourut en 1453. Ila laissé une Chronique ou Histoire curieuse et intéressante des choses mémorables arrivées de son temps, depuis l'an 1400, où celle de Froissard finit, jusqu'en 1467, Paris, 3 v. in-fol. L'Huillier l'imprima en 1572, 2 vol. in-fol., et Denys

Sauvage en donna une édition en 1603. L'auteur y raconte d'une manière simple et vraie, mais très diffuse, la prise de Paris et de la Normandie par les Anglais, les guerres qui éclatèrent entre les maisons d'Orléans et de Bourgogne. Les quinze dernières années de son Histoire sont d'une main étrangère.

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MONT. V. DUMONT et ROBERT. MONTAGNE, ou MONTAIGNE (Michel de), naquit au château de ce nom dans le Périgord, le 28 février 1533, de Pierre Eyghem, seigneur de Montagne, d'une famille originaire d'Angleterre, et fut élu maire de la ville de Bordeaux. Son enfance annonça d'heureuses dispositions, son père les cultiva avec beaucoup de soin, et porta ses attentions pour lui jusqu'au scrupule; il ne le faisait éveiller le matin qu'au son des instruments, dans l'idée que c'était gâter le jugement des enfants que de les éveiller en sursaut. Dès l'âge de 13 ans, il eut fini son cours d'études, qu'il avait commencé et achevé au collége deBordeaux, sous Grouchy, Buchanan et Muret. Destiné par son père à la robe, il fut pourvu d'une charge de conseiller au parlement de Bordeaux; l'exerça quelque temps, et la quitta ensuite par dégoût pour cette profession. Il parcourut la France, l'Allemagne, la Suisse, l'Italie; mais on voit, par la relation qu'il a laissée de ses voyages, qu'il n'avait pas l'esprit observateur, et qu'il était bien plus occupé de plaisirs que des objets qui s'offraient à sa curiosité. Se trouvant à Rome en 1581, il y fut honoré du titre de citoyen romain; cette même année, il fut élu maire de Bordeaux, après le

il

maréchal de Biron. En 1582, les Bordelais l'envoyèrent à la cour pour y négocier leurs affaires. Après deux ans d'exercice, il fut encore continué deux autres années. Il parut quelque temps après aux états de Blois, en 1588. Ce fut sans doute pendant quelques-uns de ses voyages à la cour, que le roi Charles IX le décora

en fin

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du collier de l'ordre de SaintMichel, sans qu'il l'eût, dit-il, sollicité. Mais la vanité qui perce dans tous ses écrits rend cette circonstance très douteuse. Après différentes courses tranquille dans son château de Montagne, il s'y livra tout entier à la philosophie, qui chez lui était une espèce de scepticisme, et une liberté de penser qui ne tenait à rien. Sa vieillesse fut affligée par les douleurs de la pierre et de la colique, et il refusa toujours les secours de la médecine, à laquelle il n'avait point de foi. Il mourut d'une esquinancie, en 1592, à 60 ans. Montagne s'est peint dans ses Essais, mais il n'avoue pour l'ordinaire que quelques défauts indifférents, et dont même se parent certaines personnes. Il convient, par exemple, d'être indolent et paresseux, d'avoir la mémoire fort infidèle, d'être ennemi de toute contrainte et de toute cérémonie : « A quoi servirait-il de fuir la servitude >> des cours, si on l'entraînait »jusque dans sa tanière? » Quelquefois il lui échappe des aveux plus graves, et ce sont ceux qui

rendent le mieux son caractère. « Je suis, dit-il, tantôt sage, >> tantôt libertin; tantôt vrai, >> tantôt menteur; chaste, im» pudique; puis libéral, prodi

gue, avare; et tout cela selon que je me vire. » Il ne suivait

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dans sa morale et dans sa conduite que la raison humaine, ou plutôt l'idée et le caprice du moment, et, fermant les yeux la lumière de la foi, il flottait sans cesse dans un doute universel : il se plaignait de cette situation pénible, et regrettait la religion qu'une mauvaise philosophie lui avait fait perdre. « Quelle obligation, disait-il » n'avons - nous pas à la béni»gnité de notre souverain Créa>>teur, pour avoir déniaisé notre » croyance de ces vagabondes et » arbitraires opinions, de l'avoir logé sur l'éternelle base de sa »sainte parole. Tout est flottant » entre les mains de l'homme. » Puis-je avoir le jugement si flexible?» Ailleurs, il se reproche à lui-même que ses jugements de la veille ne sont jamais ceux du lendemain. On a de lui: 1o des Essais, ouvrage qui a été long-temps le seul livre qui attirât l'attention du petit nombre des étrangers qui pouvaient savoir le français. Le style n'en est, à la vérité, ni pur, ni correct, ni précis, ni noble; mais il est simple, vif, hardi et naïf. Malebranche prétend que c'est la corruption du cœur humain qui donne de l'attachement pour cette lecture, où elle trouve de quoi se rassurer et se nourrir, où elle reconnaît ses traits propres, et se contemple comme dans un portrait parfaitement ressemblant. Nicole, Pascal, et d'autres hommes célèbres ont porté de ce livre le même jugement. S'il est vrai que le cardinal du Perron l'a appelé le breviaire des honnétes gens, il ne peut, par honnétes gens, qu'avoir entendu les gens du beau monde, qui effective

ment le lisaient alors avec autant d'assiduité que les prêtres

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