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droit après cette durée ('). A moins qu'on ne dise que cette épithète a été employée pour exclure le cas où il aurait été expressément convenu entre les parties que le bail durera indéfiniment, jusqu'à ce que l'une des parties ait donné congé à l'autre ; on peut soutenir cependant que la tacite reconduction pourrait s'opérer même dans cette hypothèse (2). Notamment la tacite reconduction s'applique aux baux de chasse ().

1403. Les règles de la tacite reconduction s'appliquent évidemment au bail à colonage partiaire (*). Du reste, l'art. 13 de la loi du 10 juillet 1889 porte : « Les dispositions de la section première du titre Du louage, contenues dans les art. 1736 à 1741 inclusivement, sont applicables aux baux à colonat partiaire ».

L'art. 1738 notamment s'applique à ces baux et non pas l'art. 1776, spécial aux baux à ferme; donc la tacite reconduction se termine par le congé et non par l'expiration du temps nécessaire pour recueillir les fruits (").

Nous examinerons plus loin si l'emphytéose (") et le bail à convenant (7) sont susceptibles de tacite reconduction.

Les règles de la tacite reconduction sont applicables aux baux de biens domaniaux ().

Le C. civ.

En Prusse, un an, ou si la durée du premier bail a été fixée, la mê ne durée, ou enfin s'il s'agit d'immeubles ruraux, la période nécessaire à la récolte. allemand ne contient rien de particulier sur ce point.

(1) V. infra, n. 1425.

(2) V. infra, n. 1408.

Paris, 15 déc. 1897,

(3) Cass. req., 13 avril 1899, S., 1900. 1. 17, D., 99. 1. 598. S., 99. 2. 293 (impl.). Giraudeau, Lelièvre et Soudée, La chasse, 2o éd., n. 26 ; Chenu, Chasse et procès, p. 77; de Neyremand, Quest. sur la chasse, 2o éd., p. 270; Esmein, Note, S., 1900. 1. 17. Sur la durée, v. infra, n. 1425 bis.

-

(*) Trib. civ. Apt, 28 déc. 1897, Gaz. Pal., 98. 1. 659. — Trib. civ. Saint-Amand, 26 mai 1899, S., 1901. 2. 285. Guillouard, II, n. 630; Huc, X, n. 359. — Le contraire avait été jugé avant la loi de 1889. - Cass. civ., 21 oct. 1889, S., 89. 1.

453, D., 90. 1. 124.

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(5) Trib. civ. Apt, 28 déc. 1897, précité. — Trib. civ. Saint-Amand, 26 mai 1899, précité. Huc, X, n. 359; Bouissou et Turlin, Tr. th. et prat. du métayage, n. 454.

- Contra Guillouard, II, n. 630. — V. cep. aussi avant la loi de 1889, Cass.,

21 oct. 1889, précité.

(6) V. infra, n. 1463.

() V. infra, n. 1505 et 1506.

(*) Sol. Régie, 3 mai 1888, Rev. de l'enreg., n. 63, p. 218.

1404. La tacite reconduction est-elle applicable aux baux de meubles ? Non, d'après l'opinion générale ('); on admet que le locataire ou le propriétaire peuvent, à toute époque, mettre fin au bail des meubles.

C'était déjà la solution de Pothier (2) et les motifs sur lesquels il la fondait sont reproduits par les auteurs modernes. Il disait qu'«< il y a certains temps auxquels il est d'usage que commence le temps des baux de maisons et qu'il est difficile de trouver à les louer en sus-terme, au lieu que le louage des meubles commence en tout temps ».

Nous reconnaissons qu'il n'existe pour les meubles aucun terme fixé par l'usage des lieux : mais ce n'est pas une raison pour permettre à chaque partie de mettre fin à la location sans congé signifié d'avance; le congé est exigé par le bon sens et les art. 1738 et 1759 sont assez généraux pour être appliqués aux meubles. Quant au délai du congé, il sera fixé par le juge (3).

En tous cas, la tacite reconduction peut être convenue valablement dans le bail des meubles (*).

1405. Il va sans dire que le bail consenti par acte écrit est tout autant susceptible de tacite reconduction que le bail verbal; les textes sont formels ('); le contraire a été cependant décidé (*).

1406. La tacite reconduction, quoiqu'étant surtout fréquente à la suite d'un bail fait pour une certaine durée, est également possible quand le bail a été fait sans durée déterminée (7). C'est en envisageant l'hypothèse la plus usuelle que la loi a été amenée à ne parler que du premier cas. Le bail fait sans durée déterminée n'a pas de fin normale; voilà

(1) Troplong, II, n. 461 ; Duvergier, II, n. 234; Guillouard, II, n. 685; Valery, Du louage des meubles, p. 18, n. 38; Huc, X, n. 274.

2) N. 371.

(3) V. infra, n. 1428.

() Trib. civ. Liège, 8 juil. 1885, Belg. judic., 85, 959.

(*) V. supra, n. 1402.

(6) Douai, 3 déc. 1894, Gaz. Pal., 95. 1. 387.

(7) Contra Nancy, 9 mai 1896, Loi, 10 juil. 1896. Arntz, IV, n. 1166; Laurent, XXV, n. 331; Guillouard, II, n. 501; Huc, X, n. 334; Planiol, II, n. 1732. V. supra, n. 1402.

pourquoi la loi n'a pas songé qu'il pût être continué par tacite reconduction, la tacite reconduction supposant un bail expiré : mais comme certaines circonstances peuvent mettre fin au bail sans durée déterminée, la tacite reconduction n'y est pas impossible. C'est seulement si l'on envisage la tacite reconduction comme la continuation d'un bail terminé par l'expiration du temps fixé, qu'elle doit être limitée aux baux écrits, c'est à-dire à ceux qui, ayant une durée déterminée par la convention expresse ou légalement présumée des parties, prennent fin de plein droit à l'expiration du terme fixé. Il est manifeste, à ce point de vue, qu'il ne peut pas être question de tacite reconduction pour les baux sans écrit, dont la durée est indéfinie et qui ne prennent fin que par un congé. Mais cette conception est fausse, comme nous le montrerons (').

Par suite, si, après le congé donné, le preneur reste en jouissance avec le consentement du bailleur, il y a tacite reconduction. On ne peut invoquer, en sens contraire, l'art. 1739 dont il sera question plus loin (2). Ce texte dit que, dans le bail à durée déterminée, le congé empêche la tacite reconduction; cela tient à ce que ce congé a pour but non de mettre fin au bail qui est terminé par l'expiration de la durée, mais précisément d'empêcher la tacite reconduction. Au contraire, dans le bail sans durée déterminée, le but du congé est de mettre fin au bail; le bail se termine dès lors à une époque déterminée et la situation est ainsi la même que si le bail était fait pour une durée déterminée; par suite le maintien du preneur en jouissance emporte tacite reconduction.

Tout ce qui est vrai, c'est que l'ancien bail continue tant "qu'un congé n'a pas été donné.

Il en est de même pour le bail qui est stipulé devoir continuer d'année en année; tant qu'un congé n'est pas donné, c'est toujours le même bail qui lie les parties (3). Après le congé donné, si les conditions de la tacite reconduction se rencontrent, il y a effectivement tacite reconduction.

(V. infra, n. 1408.

() V. infra, n. 1413.

Nancy, 9 mai 1896, Loi, 10 juil. 1896.

III. Conditions auxquelles est subordonnée la tacite reconduction.

1407. Pour qu'il y ait tacite reconduction, il faut :

1° Que le bail soit terminé;

2o Que le preneur reste en possession ;

3° Que les deux parties consentent à ce maintien en possession;

4° Qu'il n'ait pas été donné congé;

5° Que le preneur soit maintenu en sa qualité de preneur.

I. Condition relative à la fin du bail.

1408. Il faut d'abord que le bail soit terminé.

Il n'est pas nécessaire d'ailleurs qu'il soit terminé par l'arrivée du temps fixé; si la loi suppose le contraire, c'est qu'elle envisage le cas le plus usuel; mais les raisons de décider sont les mêmes, quelle que soit la cause de la cessation du bail.

Il peut y avoir, par exemple, tacite reconduction en cas de résiliation du bail par la vente de la chose louée ou par l'expropriation de cette chose pour cause d'utilité publique.

De même, après la mort du preneur qui met fin au bail à colonage partiaire, il peut se produire une tacite reconduction (').

C'est pour ces motifs que la tacite reconduction n'est pas, malgré les termes contraires de la loi, impossible dans le bail fait sans durée déterminée (2).

II. Condition relative au maintien du preneur en possession.

1409. Il faut que le preneur «< reste en possession » (3); cette condition est formellement indiquée par l'art. 1738, et les art. 1739 et 1759 la reproduisent; il est facile de la justifier: à défaut de convention faite avec le bailleur, la volonté du

(" Huệ, X, n. 359.
(2) V. supra, n. 1406.
(3) Argou, II, p. 289.

preneur ne peut guère se manifester que par son maintien en possession.

Le maintien en possession doit être prouvé par la partie qui invoque la tacite reconduction (').

III. Condition relative au consentement des parties.

1410. Il faut, aux termes du même art. 1738, que le preneur «< soit laissé en possession », c'est-à-dire que le bailleur ait consenti à son maintien en possession; en effet, la tacite reconduction repose aussi bien sur la volonté du bailleur que sur celle du preneur (2).

Le bailleur ne sera pas réputé avoir laissé le preneur en possession:

Si cette possession n'a pas duré assez longtemps pour que la volonté du bailleur soit certaine; nous verrons, en effet, que le congé qui empêche la tacite reconduction peut être donné même après l'entrée en jouissance du preneur (");

Si le bailleur était trop éloigné de la situation de la chose pour savoir que le preneur était resté en jouissance (*), ou s'il a ignoré ce maintien en jouissance (");

Si le bailleur, tout en connaissant le maintien en jouissance, a cru qu'il s'expliquait autrement que par l'intention du preneur de continuer le bail (*).

Le preneur, également, n'est pas réputé avoir consenti au renouvellement du bail, si son maintien en possession n'a duré que peu de temps ou s'explique par d'autres raisons (7).

(Trib. civ. Bordeaux, 18 déc. 1901, Rec. Bordeaux, 1902. 3. 17. D'après ce jugement le bailleur ne fait pas celle preuve en prouvant que le preneur a laissé un objet dans l'immeuble.

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(Trib. civ. Perpignan, 12 juill. 1893, Gaz. Pal., 93. 2. 634. Trib. civ. Seine, 9 nov. 1895, Droit, 16 janv. 1896. - Trib. paix Wervicq, 17 déc. 1896, Jurispr. trib. belg, 97. 89. — Guillouard, I, n. 410 et II, n. 502 et 6C0; Hue, X, n. 334. (3) V. infra, n. 1416.

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Guillouard, I, n. 410.
Guillouard, I, n. 410.

') Cass., 9 fév. 1875, S., 75. 1. 158, D., 76. 1. 27. (*) Caen, 26 août 1880, Rec. Caen, 1881, p. 175. 6) Trib. civ. Seine, 9 nov. 1895, Droit, 16 janv. 1896 (acquéreur qui a cru que le preneur n'avait pas fini son bail).

(7) Trib. civ. Bordeaux, 16 avril 1894, Rec. Bordeaux, 94. 2. 95 (garde des clés pendant trois ou quatre jours s'il a été convenu que les parties visiteraient ensemble l'appartement). Trib. civ. Lyon, 8 mai 1884, Mon. jud. Lyon, 18 oct. 1894

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