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dans lequel se trouvait l'immeuble lors de l'entrée en jouis

sance.

750. Le preneur peut faire à l'immeuble les modifications que le bailleur l'a d'avance autorisé à faire (1) et, dans ce cas, le bailleur ne peut en exiger la suppression, alors même que ces modifications entraîneraient à sa charge une obligation de garantie vis-à-vis d'un autre preneur (*).

Cette autorisation comporte le droit de faire les modifications accessoires nécessitées par les modifications principales (3).

Si le bailleur autorise simplement les modifications qui ne nuiront pas aux intérêts de l'immeuble, aucune modification. ne peut être faite sans l'assentiment du bailleur (*).

S'il a interdit de changer la forme de l'immeuble ou l'état des lieux, cette clause peut être regardée comme une clause de style, laquelle ne défend pas les changements que le preneur peut faire en l'absence de toute clause (5).

751. A moins de clause contraire, on doit supposer que si le bailleur s'est réservé le droit d'autoriser les modifications, les changements apportés ne peuvent disparaître ou être eux-mêmes modifiés sans l'assentiment du bailleur (6).

Mais, néanmoins, le bailleur peut exiger leur suppression (7).

752. Il va sans dire que le bailleur peut renoncer au droit d'exiger la suppression des modifications (*).

Il y renonce implicitement s'il stipule que les modifications lui appartiendront à la fin du bail.

Dans ce cas le preneur ne peut les supprimer (9), mais il

(1) Bordeaux, 2 mai 1894, Rec. Bordeaux, 94. 1. 209. 97. 2. 27.

(2) Paris, 19 juil. 1895, précité.

(3) Bordeaux, 2 mai 1894, précité.

(*) Bordeaux, 2 mai 1894, précité.

(5) Limoges, 26 déc. 1898, Rec. Riom, 1901. 404.

(6) Bordeaux, 2 mai 1894, Rec. Bordeaux, 94. 1. 209.

(7) Trib. civ. Lyon, 21 avril 1893, Gaz. Pal., 93. 1. 710.

Paris, 19 juil. 1895, S.,

(8) Décidé qu'il y renonce implicitement en prolongeant le bail. Trib. civ. Seine, 14 janvier, 1891, Loi, 5 fév. 1891. — V. supra, n. 748. (9) Cpr. pour les constructions, supra, n. 641.

n'en est pas moins propriétaire pendant le cours du bail des additions faites à la chose (').

SECTION VI

OBLIGATION DE NE PAS ABANDONNER L'IMMEUBLE

753. S'il s'agit d'une maison, d'un appartement ou d'une boutique, l'obligation de jouir en bon père de famille entraîne l'obligation soit de l'habiter, soit de faire veiller par des tiers à ce que l'immeuble soit aéré et chauffé de manière à ne pas se dégrader (). Aussi verrons-nous que le preneur est responsable des dégradations que sa présence aurait empêchées. Certains partisans du système de la réalité du droit du preneur ont cependant permis au preneur d'abandonner l'immeuble, sauf toutefois, disent-ils, le maintien de son obligation de payer les loyers, à raison des obligations personnelles qu'il a contractées ("). Ils n'ont pas remarqué que, parmi ces obligations, figure celle de jouir en bon père de famille, et qu'elle s'oppose à l'abandon.

Mais le preneur n'est pas obligé d'habiter ou d'exploiter lui-même; ainsi il peut faire gérer le commerce établi dans l'immeuble loué par un commis ou un gérant (*).

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() Grenoble, 15 juill. 1896, D., 98. 2. 303 (organes neufs ajoutés à des métiers). - Cpr. pour les constructions, supra, n. 616 s. - L'arrêt précité conclut avec raison qu'en cas d'incendie avant la fin du bail, le preneur assuré peut réclamer de la Compagnie d'assurances une indemnité. (2) Douai, 8 fév. 1854, D., 55. 2. 3. Amiens, 15 mars 1894, Rec. d'Amiens, 94. 173. Trib. civ. Amiens, 26 déc. 1891, Rec. d'Amiens, 93. 16 (le preneur ne peut fermer le magasin loué pour cesser son commerce ou le transporter ailleurs, si ce magasin était depuis longtemps destiné à ce commerce. Il en est ainsi même si, en prenant le magasin à bail, il a en même temps acheté du propriétaire luimême le fonds de commerce qui y était exploité). — Liège, 30 déc. 1890, Pand. pér. belg., 91, n. 313. Bruxelles, 25 avril 1895, Jurispr. trib. belg., 96. 262. · Trib. civ. Bruges, 6 juin 1876, Pasier., 76. 3. 344. Trib. civ. Anvers, 12 fév. 1884, Journ. trib. belg., 84. 651. Trib. civ. Louvain, 18 fév. 1886, Journ. trib. belg., 86. 1112. - Trib. civ. Bruges, 7 janv. 1895, Pasier., 95. 3. 226. Trib. civ. Verviers, 13 fév. 1895, Jurispr. trib. belg., 95. 327. — Duvergier, I, n. 437 ; Guillouard, I, n. 194 et 271; Agnel, n. 320; Huc, X, n. 308; Arntz, III, n. 1142. - Contra Liège, 30 déc. 1890, Gaz. Pal., 91. 2, Suppl., 2.

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Lyon, 1er juill. 1892, D., 93. 2. 88.

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De même il importe peu que l'un

Il va sans dire que, s'il s'agit d'une maison de campagne qu'il est d'usage d'habiter seulement pendant certains mois de l'année, le preneur satisfait à son obligation en l'habitant pendant ce temps (').

Le bâtiment dépendant d'une ferme doit être également habité par le fermier ou par un de ses préposés (2). Est-il tenu d'habiter lui-même s'il lui est interdit de sous-louer? Nous nous occuperons de cette question à propos de la souslocation.

Nous avons cité le texte de l'art. 4 de la loi de 1889, qui oblige le colon partiaire à habiter la ferme louée (3).

754. Rien ne force un preneur, en principe, à se livrer dans tout le cours du bail au commerce même qu'il exerçait lors de son entrée en jouissance ().

Toutefois il doit maintenir le commerce l'immeuble avant son entrée en jouissance (5).

exercé dans

Le preneur peut même choisir un commerce similaire du commerce exercé par un autre preneur (*), quoiqu'en certaines circonstances cette situation puisse entraîner la responsabilité du bailleur.

A plus forte raison le preneur peut-il ajouter au commerce exercé lors de son entrée en jouissance un commerce nouveau (7).

des preneurs associés cesse d'habiter l'immeuble, si le siège de la société y reste fixé. Trib. civ. Bruxelles, 2 fév. 1881, Jurispr. trib. belg., XXX, 199.

(1) Trib. civ. Seine, 9 juin 1891, Gaz. Trib., 8 sept. 1891 (donc pas de responsabilité pour le vol des objets loués avec cette maison). Guillouard, II, n. 271. Décidé même qu'il n'est aucunement obligé de l'habiter. Amiens, 8 juil. 1890,

Rec. d'Amiens, 90. 223.

(2) Guillouard, II, n. 524.

(3) V. supra, n. 712.

(*) Alger, 14 déc. 1889, Rev. algér., 90. 202 (pour le cas où le bail a été consenti par le vendeur d'un fonds de commerce). Trib. civ. Seine, 29 mars 1893, Gaz. Pal., 93. 1. 483. - Contra Trib. civ. Seine, 7 fév. 1887, Droit, 8 fév. 1887. II peut donc sous-louer pour une autre destination et aller exercer son commerce ailleurs. Alger, 14 déc. 1889, précité.

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(5) V. infra, n. 767.
(6) V. supra, n. 719.”

(7) On pourrait imputer la solution contraire à Cass. req., 1er mars 1899, S., 1901. 1. 126, qui donne au locataire le droit d'exercer un commerce accessoire à celui indiqué dans le bail, parce que ce commerce était exercé déjà dans l'immeuble avant son entrée en jouissance.

755. Une usine doit être exploitée, sous peine par les preneurs de réparer les dégâts causés ou de voir prononcer la résiliation avec dommages-intérêts (').

755 bis. Le preneur n'a pas le droit de modifier l'enseigne du commerce exercé dans l'immeuble; il peut y faire une addition (2), sauf s'il diminue ainsi la clientèle (3).

756. Le preneur manque à son obligation de conserver s'il quitte l'immeuble, le laisse à l'abandon, et si des tiers profitent de son absence pour causer des dommages à la propriété ("). Il en est de même si le preneur laisse les terres sans culture (").

C'est ce qui arrive dans le cas où le preneur, par crainte d'un danger chimérique résultant de la guerre, abandonne l'immeuble ("); nous avons vu que, si le danger était réel, le preneur a, au contraire, une action contre le bailleur.

757. Le preneur ne peut transporter ailleurs l'industrie ou le commerce qu'il exerçait dans l'immeuble loué, si cette industrie ou ce commerce y étaient déjà exercés antérieurement (7); car le preneur profiterait ainsi de la clientèle qui y était attachée et s'approprierait cette clientèle, dont la jouissance seule lui a été donnée.

A plus forte raison ne le peut-il pas si, explicitement ou implicitement, le bail lui a imposé l'obligation de maintenir son commerce (*).

Il en est autrement de l'industrie ou du commerce que le preneur a lui même introduits dans l'immeuble loué (), et

(1) Cass. req., 12 nov. 1889, S., 91. 1. 203. Besançon, 4 juin 1846, S., 47.2. Aubry el Rau, IV, p. 481, § 367,

534.

(2) Cass. req., 1er mars 1899, S., 1901. 1. 126.

(3) Cass. req., 1er mars 1899 (impl.), précité.

() Argou, II, liv. III, chap. XXVI, p. 285.

(5) Dijon, 13 août 1901, Gaz. Trib., 6 nov. 1901. - Argou, loc. cit.

(6) Orléans, 14 juill. 1871, S., 72. 2. 237.

D., 74. 2. 160. — Guillouard, I, n. 391.

Paris, 28 août 1873, S., 73. 2. 256,

(7) Limoges, 11 fév. 1889 (impl.), D., 90. 2. 345.

Besançon, 21 mai 1897, D.,

98. 2. 127. Trib. paix Valence, 17 déc. 1895, Mon. jug. paix, 96. 258.

() Par exemple, si le bail portait que l'immeuble resterait garni des marchandises composant le commerce du preneur et qu'elles seraient affectées à ce commerce jusqu'à la fin de la location. Trib. civ. Seine, 9 mai 1896, Droit, 31 mai

1896.

(9) Limoges, 11 fév. 1889, précité.

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on doit y assimiler ceux qui y étaient exercés antérieurement si l'occupant antérieur, le bailleur, par exemple, avait cédé son fonds de commerce à un tiers (').

SECTION VII

OBLIGATION DE NE PAS ÉPUISER LE SOL

758. L'obligation de jouir en bon père de famille emporte défense d'épuiser le sol pour lui faire produire hâtivement des récoltes importantes (2).

Ainsi le preneur ne peut défricher un bois (3).

De même, s'il s'agit d'un bail de mine, minière ou carrière, - et à cet égard il importe peu que cette concession soit un véritable bail, car, ainsi que nous l'avons remarqué, l'obligation de jouir en bon père de famille est commune à tous les détenteurs de biens d'autrui, le preneur ne peut, pendant la durée du bail, extraire une quantité trop considérable de produits, de manière à les épuiser très rapidement (*); il y a là une question de mesure, sur laquelle la convention a pu rester muette, en raison même de l'obligation que nous venons de signaler.

Les auteurs qui ont soutenu l'opinion contraire, en se basant sur la liberté que le silence de la convention assure au preneur, ont méconnu, croyons-nous, l'obligation de jouir en bon père de famille. Cette obligation, objectent-ils, consiste uniquement à prendre les précautions nécessaires pour ne pas endommager l'immeuble. Cela ne répond pas, selon nous, à la définition du bon père de famille; le bon père de famille est celui qui jouit de sa propriété avec modération, de

(1) Besançon, 21 mai 1897, précité.

(*) Guillouard, II, n. 522; Hue, X, n. 362.

(3) Guillouard, II, n. 522.

-

(*) Grenoble, 5 mars 1835, S., 35. 2. 320, D. Rép., vo Louage, n. 285. — Troplong, 1, n. 315. Contra Duvergier, I, n. 404; Guillouard, I, n. 199. — Cpr. FuzierHerman, art. 1709, n. 30. L'arrêt précité décide avec raison que, si pendant le bail d'une carrière voisine d'une ville, le démantèlement des fortifications a entraîné une augmentation de constructions dans cette ville et, par suite, une exploitation plus considérable de la carrière, susceptible de l'épuiser rapidement, le bailleur peut exiger une indemnité, les parties n'ayant songé qu'à une exploitation normale.

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