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avec eux en 1787, étaient un malheur réel pour la cause des nations on en a déjà signalé l'origine (1).

Le cabinet de Versailles trop inquiété chez lui ne s'occupait que faiblement des affaires extérieures. Son inaction dans les troubles de Hollande et pendant la guerre de Turquie sera un monument éternel d'impéritie et de pusillanimité. Il commit une faute plus grave et plus fatale encore en méprisant les propositions faites par Tippoo-Saïb. Ce prince, fils et successeur du grand Hyder-Aly, envoya une ambassade au roi, en 1788, proposant d'expulser les Anglais de l'Inde, pourvu qu'on lui fournît quelque appui. Ainsi, sans la faiblesse de son ministère et la déprédation de ses finances, il était peut-être réservé à Louis de mériter le titre de libérateur de l'Inde comme il avait déjà mérité celui de sauveur de l'Amérique. On doit regretter que le gouvernement, sans calculer d'autre chances que le bien qui devait en résulter un jour pour la France et l'Europe entière, ne se soit pas décidé à tenter l'entreprise. Il n'était pas impossible de cacher pendant longtemps les préparatifs, et de trouver ensuite un prétexte quelconque pour une expédition de long cours, qui eût porté, au prince musulman, les moyens de fixer

(1) Nous ne craignons pas d'affirmer que l'alliance de la Hollande avec l'Angleterre eut les plus funestes résultats pour les intérêts européens. Il est vrai que celle qui fut conclue plus tard entre la France et la République batave causa les plus grands dommages au commerce et aux colonies hollandaises; ce qui a fait dire à tous les marchands qui jugent les effets sans remonter aux causes, que les relations de l'Angleterre étaient les seules convenables à cette république. Mais l'homme d'État ne s'y trompera pas, et saura apprécier la différence qui existe entre ces deux époques.

Les rapports forcés de la Hollande après l'invasion de 1795, lors

Origine

le sort des rives de l'Indus et du Gange. On n'en fit rien, et Tippoo livré par cette démarche au ressentiment des Anglais, se vit bientôt accablé par les forces de Cornwalis, assiégé dans Seringapatnam, et trop heureux de gagner du temps en sacrifiant la moitié de ses États, par un traité dont le vainqueur ne tarda pas à s'affranchir. La négligence que le ministère mit à profiter de si belles occasions pour déployer la politique nationale est d'autant plus repréhensible, qu'en entreprenant à propos des guerres nécessaires et avantageuses, il eût conservé la considération dont il jouissait depuis la paix de 1783, et détourné l'orage prêt à éclater sur lui.

On a vu quels furent les résultats malheureux de sa faiblesse, soit dans ses relations au dehors, soit dans ses rapports avec les ennemis plus dangereux de l'in

térieur.

Après avoir tracé une esquisse rapide des premières de la causes et des premiers mouvements de la révolution, il coalition ne me reste qu'à indiquer les changements qu'elle ap

porta dans la politique des cabinets, et les premières démarches hostiles qui en furent la suite.

Les versions sur l'origine de la coalition ont autant varié qu'il y a eu de partis; on n'a pas été plus d'ac

que toute balance maritime était déjà rompue, devaient mettre en effet toutes les colonies au pouvoir des Anglais, et ruiner le commerce qui fait le premier besoin des Provinces-Unies. Quelques relations interlopes, seul dédommagement de ces revers, cessèrent dès l'avénement de Bonaparte à l'Empire. Son joug dut leur paraitre insupportable, mais les maux qu'elles ont soufferts prouvent d'autant mieux combien le despotisme maritime qui a été le résultat de l'alliance monstrueuse de la Hollande et de l'Espagne avec l'Angleterre pèse sur l'univers.

cord sur les causes qui purent décider une alliance d'intérêts aussi divisés ; les uns l'attribuent à la peur qu'inspira le parti révolutionnaire, les autres à l'ambition des cabinets, et peut-être ces deux opinions ne sont-elles pas dénuées de fondement.

Les atteintes portées au pouvoir monarchique en France, avaient en effet jeté l'alarme dans toutes les cours; les rois, les ministres et leurs favoris crurent également y trouver de funestes présages, et tous les trônes leur parurent un instant ébranlés. Ils comptaient pour rien la différence qui existait entre leur position et celle de la cour de France, entre les mœurs et les habitudes de leurs peuples, l'esprit d'ordre et la soumission de leurs armées, et le caractère turbulent des Français. Les premières alliances de ces cours purent donc être attribuées à l'instinct de leur conservation réciproque; mais par la tournure que les affaires prirent dès la première campagne, il ne fut pas difficile de s'apercevoir que si la peur contribua à réunir leurs. forces, l'ambition les engagea bientôt à en profiter.

Les outrages dont Louis XVI était menacé tous les jours, l'espèce de captivité dans laquelle on le retenait, les dangers mêmes qui semblaient s'amonceler sur sa tête, décidèrent ses conseillers à lui proposer différents moyens de s'y soustraire, de rétablir son autorité, et de rendre au trône la considération qu'il avait perdue. Le ministre Montmorin présenta à ce prince un plan dont les bases principales étaient :

« 1° D'entamer avec la cour de Vienne et avec les >> autres puissances une négociation, à l'effet de simuler » une coalition de tous les États européens qui devaient » menacer la France, mais ne pas lui faire la

guerre.

» 2o De correspondre à cet effet avec le comte de Mercy, ministre de l'empereur Léopold, chargé de » l'exécution de ce plan par la cour de Vienne.

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» 3. De mettre ainsi le Roi à même de conjurer par » des négociations ce danger simulé et de tirer parti de » ce service rendu à la nation pour adresser une der

»nière déclaration aux cours.

» On se flattait de pouvoir rédiger cet acte impor» tant, de manière à ce que tout en prenant la défense » de l'honneur et de l'indépendance nationale, il servît » en même temps de concordat entre l'autorité royale » et la majorité du peuple français. Pour atteindre plus » sûrement ce but, la déclaration serait soumise à la >> sanction des assemblées départementales convoquées » à cet effet démarche solennelle et imposante qui déjouerait les factieux et rétablirait l'harmonie entre » le souverain, la noblesse et le peuple.

:

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Le Roi autorisa, au mois d'avril 1791, M. de Montmorin à entretenir les intelligences nécessaires à l'exécution de ce projet dont il ne prévit pas les inconvénients. Un examen plus sérieux eût prouvé qu'il était aussi dangereux qu'insuffisant, puisqu'il supposait une abnégation complète d'intérêts et d'ambition de la part de tous les cabinets européens, qu'il immiscait avec tant d'imprudence dans les affaires intérieures de la France. Il paraît au reste que le projet de M. de Montmorin avait été concerté entre lui et M. de Calonne, puisqu'il s'accordait parfaitement avec les démarches de ce ministre, qui avait déjà eu une entrevue avec l'empereur Léopold, à Florence, et l'avait décidé à intervenir dans les troubles de sa patrie.

Mais par suite de ce caractère mobile et indécis,

concerté

avec le

qui causa tous les malheurs des princes dans les temps Projet de troubles, le Roi prenait la résolution de s'enfuir du royaume, et en faisait un mystère à ses ministres. Ce roi de dernier plan parut se rattacher avec l'arrivée du Roi Suède de Suède sur les rives du Rhin. Soit que ce monarque fuite de pour la se fût réellement concerté avec Catherine, les princes Louis. français ou les ministres secrets de Louis, soit qu'il voulût aspirer à la gloire de rétablir l'autorité royale en France, comme il l'avait fait dans son pays, il s'était rendu en Belgique au mois de mai 1791, sous prétexte de prendre les eaux de Spa, pour les blessures reçues dans la guerre de Finlande.

Le dessein de Gustave III était de se mettre à la tête des émigrés, du régiment royal suédois et des troupes françaises restées fidèles, et de rétablir Louis XVI dans toute l'étendue de son autorité ; afin ; d'en rendre la réussite plus certaine, le Roi devait se joindre à lui pour rallier tous les mécontents du royaume. Ce concours de circonstances a fait penser à beaucoup de personnes que cette singulière entreprise fut le résultat des pouvoirs secrets donnés à M. de Breteuil, et on crut en trouver la preuve dans l'attention des conseillers du Roi à mettre un prince naturellement ami et allié de la France à la tête de l'expédition, pour ne pas laisser la direction de la guerre à une puissance rivale, telle que la Prusse ou l'Autriche. Ce calcul qui ferait honneur à leurs intentions n'en fait guère à leur jugement diplomatique ; car une guerre civile était toujours une calamité qui devait déchirer la France, et dont trop de voisins jaloux et puissants étaient intéressés à profiter. D'ailleurs, c'était une erreur grossière d'imaginer que la révolu

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