Page images
PDF
EPUB

COURS D'APPEL.

de son enquête; que les dix-sept autres témoins ont été régulièrement dénoncés et qu'il n'y a pas lieu d'écarter leurs dépositions des débats;

Attendú, en effet, que l'on a indiqué le nom de la commune où ils ont leur domicile; que la mention de-la rue et du numéro n'est point exigée et que l'appelant ne pourrait invoquer l'absence de ces indications que si elle avait été de nature à l'induire en erreur sur l'individualité des témoins entendus;

Attendu que l'appelant n'a pu conserver aucun doute sur la personnalité des témoins produits par l'intimé; que la profession de chacun d'eux a été indiquée; que ce sont ou des officiers de police ou des voisins, et que la partie de Me Soupart n'a pas pu être trompée par les prénoms inexacts donnés à quelques-uns d'entre eux;

Au fond :

Attendu qu'il résulte des enquêtes prises dans leur ensemble que la rue du Colombier était déjà fréquentée par quelques filles publiques à l'époque où l'intimé y a ouvert sa maison; qu'il ne faut donc pas apprécier la situation de Hirter comme si Boglin s'était établi dans un quartier jusque-là paisible et convenablement habité;

Mais, attendu que l'intimé a aggravé la situation en construisant une maison du genre de celle dont il s'agit au procès; que l'importance de celle-ci et la publicité donnée à l'existence de ce lieu de débauche ont été pour les voisins la source d'un dommage qui doit être réparé;

Attendu que l'on voit par la déposition du huitième témoin de l'enquête contraire, Madeleine Pauwels, épouse Peeters, qu'il y avait de fréquentes batailles dans la maison de Boglin et que l'intervention de la police était souvent nécessaire; que cette voisine ajoute que le voisinage était devenu inhabitable et que son mari, qui est ouvrier menuisier, a été obligé par son patron d'aller habiter une autre rue;

Attendu que le dix-septième témoin, Barbe Deridder, veuve Francquart, dépose dans le même sens; qu'elle déclare qu'elle a quitté la rue du Colombier à cause de la maison de prostitution de l'intimé et rapporte des scènes scandaleuses qu'on pouvait voir de la rue et qui se passaient dans la cuisine, lors du repas des prostituées;

Attendu qu'en tenant compte de la diminution de valeur locative subie par l'immeuble

(1) Compar. Gand, 4 juin 1881 (PASIC, 1881, II, 326).

(2) Conf. DEMOLOMBE, édition belge, t. XII, no 254, p. 86, et Bruxelles, 2 février 1863 (PASIC., 1863, II, 333). Voy. aussi LAROMBIÈRE, sur l'art. 1:21, no 7.

de l'appelant et des documents de la cause,
on peut équitablement fixer à 7,000 francs
le montant de la réparation qui lui est due;

Par ces motifs, ouï M. Van Schoor, avocat
général, en ses conclusions conformes, met
à néant le jugement dont appel; émendant,
condamne l'intimé à payer aux appelants la
somme de 7,000 francs, avec les intérêts judi-
ciaires; condamne l'intimé aux dépens des
deux instances.

Du 8 août 1881.

Cour de Bruxelles.

3 ch.- Prés. M. Eeckman. -Pl. MM. Hahn
et De Broux.

[blocks in formation]

FONDATION EN
DE L'ENSEIGNEMENT PRIMAIRE.
FAVEUR
CHARGES D'UNE DONATION PRINCIPALE EN
STIPULATION POUR AU-
FAVEUR DU CULTE.
TRUI.

ACCEPTATION APRÈS LE DÉCÈS DU DONATEUR.

FORMES.

VALIDITÉ.

CONDITIONS
LOI DU

DÉPOSSESSION.

ILLICITES RÉPUTÉES NON ÉCRITES.
19 DÉCEMBRE 1864.
DROIT DE RÉTENTION.
FONDATION.

-

REVENUS DE LA

Les fabriques d'église sont incompétentes pour recevoir et gérer les libéralités faites au profit de l'enseignement primaire, et il en était ainsi même avant la loi du 23 septembre 1842 (1). Lorsqu'une donation est faite en faveur du culte à une fabrique d'église, à charge de créer une école primaire, on ne peut considérer la fondation ainsi faile au profit de l'enseignement comme constituant une condition illicite qui doit être réputée non écrite.

Sont illicites, au contraire, les dispositions qui attribuent la gestion de cette fondation à la fabrique et le choix des instituteurs au curé doyen.

Les stipulations au profit d'un tiers, lorsque telle est la condition d'une donation que l'on fait à un autre, ne sont pas assujetties à l'acceptation expresse el solennelle des donations ordinaires (2) et peuvent même élre acceptées après le décès du donateur (3).

Est légal l'arrêté royal pris en exécution de la loi du 19 décembre 1864, qui restitue à l'au· torité communale la gestion d'une fondation au profit de l'enseignement primaire dont est grevée une donation faite au profit du culte à une fabrique d'église.

(3) Voy. conf. DEMOLOMBE, édition belge, t. X, no 92, p. 32 et les autorités qu'il cite; LAROMBIÈRE, sur l'article 1121, no 8; cass. franç., 22 juin 1859 (D. P., 1859, 1, 385; SIREY., 1861, 1, 151) et les notes.

La fabrique n'a pas, dans ce cas, un droit de rétention jusqu'au remboursement de ses impenses et des constructions qu'elle a fait élever pour le service de la fondation sur un terrain dont elle est propriétaire (1).

Son obligation de remettre les revenus de la fondation prend naissance à la date de l'arrêté royal qui détermine l'établissement compétent.

(LA FABRIQUE DE L'ÉGLISE DE COUTHUIN, C. LA COMMUNE de couthuin.)

Jugement du tribunal de Huy, du 2 décembre 1880, ainsi conçu :

« Attendu que, par acte reçu de Me Loumaye, notaire à Couthuin, le 23 octobre 1858, Jean-François-Albert-Ferdinand de Léonard, prêtre, chanoine honoraire de la cathédrale de Liège, a fait donation entre-vifs et irrévocable à la fabrique de l'église primaire de Couthuin, d'une maison de maître, cuisine, salon, place à manger, cabinet, greniers, chambre, caves, four, fournils, logement de fermier, fenils, hangar, grange, remises, étables, appendices et dépendances, le tout couvert en ardoises et ne formant qu'un ensemble; en outre, plusieurs jardins, terres labourables, prairies, bois, le tout contenant 30 hectares 81 ares, situé à Couthuin;

« Attendu que cette donation était faite sous la condition entre autres « que la partie « des bâtiments désignée au numéro premier « de l'indication générale et qui consiste en « un corps de logis et tout le bâtiment, caves, « greniers, etc., qui existent depuis la grange « jusqu'à la grande porte susdésignée et qui « fait entrée du côté desdits vergers et tels « que ces bâtiments, y compris la petite tou«relle, sont aujourd'hui occupés par deux <«< religieuses institutrices, sont donnés pour << servir en tous temps d'école gratuite fon« dée dès aujourd'hui au profit et pour l'in«<struction des jeunes filles de Couthuin, « Reppe et Lavoir et pour servir de logement « et à tous les usages nécessaires aux per<< sonnes qui seront chargées de donner l'in«struction, lesquelles seront autant que « possible deux religieuses ou autres per«sonnes au choix exclusif du curé de Couthuin; les personnes ainsi préposées à «<l'instruction jouiront en leurdite qualité «de 9 ares de jardin à prendre hors des biens « donnés; que le donateur impose en outre « à la fabrique l'obligation de payer annuel«<lement et perpétuellement une somme de « 600 francs pour traitement des personnes

(1) Voy., quant au droit de rétention, ce Recueil, 1881, 2e partie, pages 210, 277, 310 et 360.

a préposées à l'instruction gratuite dont il « est ci-dessus fait mention; cette somme « payable intégralement et par quart, de tri<< mestre en trimestre, et une autre somme << annuelle et perpétuelle de 300 francs pour << ameublement, entretien de l'école, chauf«fage des institutrices et desdites écoles « compris; si cette somme n'est pas entière«ment dépensée chaque année, l'économie << profitera à ladite fabrique; toutefois le curé « de Couthuin et ses successeurs seront seuls «aptes, en leurdite qualité, à juger la néces«sité de l'emploi total ou partiel de cette << somme >>;

« Attendu qu'un arrêté royal en date du 14 janvier 1839, a autorisé la fabrique de Couthuin à accepter la donation du chanoine de Léonard et que, depuis cette époque, ladite fabrique est en possession de tous les immeubles donnés; que l'école fondée par la même donation a continué depuis lors à être ouverte aux jeunes filles pauvres, qui y ont reçu l'instruction de deux institutrices religieuses nommées par le curé-doyen de Couthuin;

«Attendu qu'un arrêté royal en date du 20 janvier 1880, pris en conformité de la loi du 19 décembre 1864, et de celle du 1er juillet 1879, a décidé que « la gestion de la fon«dation d'instruction primaire créée par le «chanoine de Léonard était remise sans pré«judice du droit des tiers, à l'administration «< communale de Couthuin et que, conformé«ment à l'article 52 de la loi du 19 décem«bre 1864, la fabrique de l'église de ladite « localité conserverait la régie des biens « donnés, à l'exception de ceux qui sont af«fectés au service de l'école et des institu<«trices et à la charge de payer annuellement « à l'administration communale une somme «de 900 francs >>;

« Attendu qu'en vertu de cet arrêté, qui a été notifié à la fabrique, le 5 février 1880, la commune, après plusieurs démarches amiables restées sans effet, a, par exploit de l'huissier Pâquet en date du 27 août 1880, fait assigner la fabrique de Couthuin et en tant que de besoin les dames Marie-Barbe Delhalle et Pauline Piette, religieuses tenant l'école des filles à Couthuin, aux fins de voir condamner la fabrique à livrer à la demanderesse les immeubles désignés à l'arrêté royal du 20 janvier, la somme de 900 francs, plus 1,000 fr. à titre de dommages-intérêts, les intérêts judiciaires et les dépens, et en ce qui concerne les défenderesses Delhalle et Piette, voir dire que le jugement à intervenir leur sera com

mun;

« Attendu que les défenderesses, pour repousser cette action, soutiennent : 1° qu'à la date du 14 janvier 1859, la fabrique de Couthuin était compétente pour accepter et

gérer une fondation au profit de l'enseignement primaire; que, par conséquent, l'arti cle 42 de la loi du 19 décembre 1864 n'était pas applicable et que l'arrêté royal du 20 janvier est illégal; 2° subsidiairement, que la fondation étant faite au profit des deux communes de Couthuin et de Lavoir, l'arrêté du 20 janvier 1880 a encore violé la loi en en remettant la gestion à la seule commune de Couthuin; que, tout au moins, la fabrique n'est tenue de remettre à la commune demanderesse que la part indivise lui revenant dans les immeubles et revenus de la fondation, part à calculer en raison de la population respective des deux communes avantagées; 5o que la fabrique a un droit de rétention sur les bâtiments d'école, parce que, d'une part, ces bâtiments sont érigés en partie sur le terrain de la fondation, en partie sur le terrain de la fabrique, et parce que d'autre part la fabrique a fait, à ses frais, à ces bâtiments des impenses importantes; 4° que le jardin réclamé par l'assignation n'est pas celui laissé par le chanoine de Léonard; qu'il appartient à la fabrique de désigner l'emplacement de ce jardin; 5o que les sommes de 300 francs et de 600 francs ne peuvent être réclamées à dater de l'arrêté du 20 janvier, mais seulement à dater du jugement à intervenir ou tout au plus du jour de l'assignation; 6o que la demande de 1,000 francs de dommages-intérêts n'est pas recevable, faute par la commune d'avoir été autorisée à ester en justice de ce chef; 7° que la même fin de non-recevoir est opposable à l'action formée contre les défenderesses Delhalle et Piette, laquelle action ne peut à aucun titre procéder contre ces dernières ;

<< Attendu qu'il y a lieu pour le tribunal d'apprécier la valeur de ces différents moyens et des réponses qui y ont été faites au nom de la commune demanderesse;

« Sur le premier moyen :

«Attendu que pour prétendre que la fabrique avait, à la date du 14 janvier 1839, qualité pour recevoir et administrer une fondation créée au profit de l'enseignement primaire, la défenderesse se fonde sur ce qu'à cette date l'article 23 de la loi du 23 septembre 1842 n'avait pas encore proclamé la compétence des administrations communales pour tout ce qui concerne l'enseignement primaire; que, dès lors, rien ne s'opposait à ce qu'une fabrique d'église, qui constitue une personne civile, investie comme telle d'une capacité générale d'acquérir, fût appelée à recueillir et à administrer les biens donnés en faveur de l'enseignement par le chanoine de Léonard;

«Attendu que ce raisonnement de la défenderesse ne saurait être admis; qu'en effet,

d'une part, avant que la loi de 1812 eût investi les communes du droit de recevoir et de gérer les libéralités faites au profit de l'enseignement primaire, l'Etat seul, en vertu de l'article 17 de la Constitution, était le représentant légal de l'enseignement public à tous les degrés; que, d'un autre côté, les personnes civiles, telles que les fabriques d'église, n'ayant d'existence qu'en vertu de la loi et en vue de l'objet pour lequel la loi les crée, n'ont qu'une capacité qui se restreint dans les limites mêmes de leur institution; que les fabriques d'église notamment, instituées par le décret du 30 décembre 1809, pour veiller à l'entretien et à la conservation des temples, administrer les fonds affectés à l'exercice du culte, assurer cet exercice et le maintien de sa dignité (art. 1er du décret), sont absolument incapables en dehors de la mission spéciale pour laquelle elles ont reçu une délégation de l'autorité publique; qu'en matière d'enseignement notamment et à part l'enseignement spécial dont il est question dans l'article 9 de la loi du 19 décembre 1864, les fabriques d'église sont radicalement incompétentes;

«Attendu, dès lors, qu'en confiant à la fabrique de Couthuin la gestion et la direction de l'école fondée par le chanoine de Léonard, l'arrêté de 1839 a perdu de vue les principes qui régissent la matière et rattaché la gestion de cette fondation à un établissement dépourvu de toute capacité en matière d'enseignement primaire, moyen ou supérieur;

«Attendu que, dans ces conditions, l'arrêté royal du 20 janvier 1880 a été porté régulièrement et en conformité de la disposition de l'article 49 de la loi du 19 décembre 1864, ainsi conçu :

«Dans un délai qui ne pourra excéder un «an à partir de la publication de la présente <«<loi, la gestion de toutes les fondations d'en<«<seignement ou de bourses ayant une admi«nistration distincte ou rattachée à des éta«<blissements incompétents sera, par arrêté « royal pris sur l'avis de la députation per<«<manente de la province et des administra«tions intéressées, et sans préjudice des << droits des tiers, remise aux administrations « compétentes, d'après la présente loi, pour « régir les fondations semblables, en appli<< quant, s'il y a lieu, les dispositions des ar«ticles 32 et 35 ci-dessus »;

«Attendu que vainement la fabrique insiste et prétend enfermer la demanderesse dans le dilemme suivant: ou bien la fabrique était compétente en 1839, et alors l'arrêté de 1880, est illégal, ou bien la fabrique était incompétente, et alors la donation faite à son profit par le chanoine de Léonard, à condition par

litigieux;

elle de donner l'enseignement aux filles de | aucun texte à l'appui de la prétention d'exerCouthuin et Lavoir est une libéralité subor-cer un droit de rétention sur les immeubles donnée à une condition contraire aux lois; cette condition, des lors, aux termes de l'article 900 du code civil, est réputée non ferite; la donation devient pure et simple et la fabrique a le droit de conserver les biens libres de toutes charges;

« Attendu que ce dilemme repose sur une confusion d'idées évidente; que la donation du chanoine de Léonard contient deux libéralités, l'une au profit de la fabrique, l'autre en faveur des enfants pauvres des communes de Couthuin et Lavoir; en d'autres termes, la charge imposée au donataire principal consiste à créer ou maintenir perpétuellement, et à doter l'école déjà existante alors au profit des enfants des communes prénommées; que cette charge n'a rien d'illicite et ne saurait être réputée non écrite; que la seule condition illicite, et qui dût être reputée non écrite, est celle qui, méconnaissant les principes de notre droit public, attribuait la gestion de cette fondation d'enseignement à la fabrique, et le choix des institutrices au curé-doyen de Couthuin; que c'est cette condition que l'arrêté de 1839 aurait-dû tenir pour non écrite et que, à son défaut, l'arrêté de 1880 a, à bon droit, écartée, en restituant la gestion à l'autorité communale;

« Sur le second moyen :

«Attendu que, si la fondation du chanoine de Léonard est faite au profit des jeunes filles des deux communes de Couthuin et de Lavoir, cette dernière commune, invitée par l'autorité supérieure à faire valoir ses droits à cette libéralité, a, sous la date du 13 février 1877, pris une délibération par laquelle elle déclare abandonner toute prétention qu'elle peut avoir de ce chef; qu'il y a tout lieu de croire que cette délibération a été approuvée par l'autorité supérieure; qu'en tous cas elle n'a pas été annulée par elle;

« Attendu, d'un autre côté et quelle que soit la valeur de cette délibération, qu'aux termes de l'article 12 de la loi du 19 décembre 1854, article invoqué par la défenderesse elle-même, lorsqu'une fondation intéresse plusieurs communes et que, d'après les dispositions de l'acte de fondation ou d'après la nature des biens légués, la gestion de ceux-ci doit être indivise, il appartient au roi de désigner parmi les administrations intéressées, et après avoir pris leur avis, celle qui aura la régie de la dotation; qu'au surplus, la fabrique est sans intérêt à vouloir remettre la gestion aux deux communes plutôt qu'à celle d'entre elles qui a été désignée par l'arrêté royal;

« Sur les troisième et quatrième moyens : « Attendu que la défenderesse n'invoque

Attendu que, si ce droit de rétention est consacré par certaines dispositions du code civil art. 867, 1675, 1719, 1918) et si des considérations d'équité l'ont souvent fait admettre en faveur du possesseur de bonne foi, il y a d'autant moins lieu de le reconnaitre à la fabrique, dans l'espèce, que, d'une part sa prétendue créance pour impenses n'est ni justifiée, ni liquide; qu'en tous cas, elle pourra de ce chef exercer son recours contre la fondation et que, d'autre part, si, comme elle l'affirme, les bâtiments d'école tels qu'ils existent aujourd'hui, notamment la grande classe, sont en partie érigés sur le terrain de la fabrique, celle-ci ne peut se prévaloir de cette circonstance, qui est le résultat de son propre fait, pour tenir en échec l'exécution d'un arrêté royal et entraver un service public; qu'il suffira donc de lui réserver les droits qu'elle peut avoir de ce chef à faire valoir contre la fondation de Léonard;

«Attendu que les mêmes raisons s'opposent à ce que la fabrique se maintienne en possession du jardin dépendant de l'école; qu'il conste des documents du litige que le jardin existe, avec son affectation au service des institutrices, depuis 1858 et que l'emplacement de ce jardin aurait été désigné par le chanoine de Léonard lui-même; qu'il ne peut done y avoir de doute sur l'identité du jardin réclamé par la demanderesse, lequel, d'après les conclusions de cette dernière, n'est autre que le jardin actuellement occupé par les religieuses, sauf à en réduire la contenance, si elle est supérieure à 9 ares;

« Sur le cinquième moyen:

«Attendu que la fabrique, qui avait géré la fondation de Léonard en vertu de l'arrêté du 14 janvier 1839, s'est vu retirer son mandat par l'arrêté du 20 janvier 1880, qui lui a été notifié le 5 février suivant; qu'elle est tenue, comme tout comptable de deniers publics, de rendre compte de sa gestion à son successeur avec pièces à l'appui; qu'en outre, en persistant, après la notification de l'arrêté qui lui retirait ses pouvoirs, à conserver l'administration de la fondation, elle s'est placée, à l'égard de la commune demanderesse, dans la position d'un tiers qui a géré la chose d'autrui malgré le propriétaire; qu'elle est donc tenue de renseigner à la demanderesse, à partir du 5 février 1880, tous les revenus de la fondation, qu'elle perçus sans droit, et notamment la rente annuelle de 900 francs destinée au traitement des institutrices et à l'entretien et au chauffage du local, et ce sans préjudice à l'obligation qui incombe à la même fabrique, à titre de donataire du cha

noine de Léonard, de continuer à perpétuité en mains de la nouvelle administration, le service de ladite rente de 900 francs;

« Sur le sixième moyen :

Attendu que l'arrêté de la députation permanente du conseil provincial de Liège, qui a autorisé la demanderesse à ester en justice, porte « Vu la délibération en date du « 25 juin 1880, par laquelle le conseil com«munal de Couthuin sollicite l'autorisation « d'ester en justice contre la fabrique de « l'église primaire de cette localité, à l'effet « de la faire mettre en possession des biens « et revenus de la fondation d'instruction << primaire créée par le chanoine de Léonard... « arrête Le conseil communal est autorisé « aux fins dont il s'agit »;

« Attendu que la délibération du conseil communal de Couthuin visée dans cet arrêté portait, de son côté : « Le conseil communal

de Couthuin... attendu qu'il importe à « l'administration communale de se mettre « immédiatement en possession des biens « dont la gestion lui a été confiée par le sus« dit arrêté royal, et notamment des bâtiments « d'école et des 9 ares de jardin; considé<< rant, en outre, qu'il y a lieu de réclamer « à l'administration fabricienne intéressée la « somme de 900 francs que celle-ci doit payer « annuellement à la commune en vertu de « l'arrêté royal précité...; par ces motifs, « décide qu'il y a lieu d'ester en justice con«tre la fabrique de l'église primaire de « Couthuin, à l'effet de se faire mettre en « possession des immeubles et des sommes « susmentionnées, objet de ladite fondation « d'instruction »>;

«< Attendu que, si l'autorisation de plaider doit être spéciale, il faut cependant admettre qu'elle s'étend aux accessoires de l'objet litigieux pour lequel l'autorisation a été obtenue;

<«< Attendu qu'on doit en général considérer comme accessoires de l'objet de la demande non seulement les fruits de la chose, les intérêts courus ou à courir, les frais de l'instance, mais aussi les dommages-intérêts occasionnés au demandeur postérieurement à l'arrêté d'autorisation; d'où il suit que, dans l'espèce, la commune demanderesse n'avait pas besoin d'une autorisation spéciale pour formuler sa demande de dommages-intérêts;

«Attendu, au surplus, que la demanderesse ne justifie d'aucun dommage qui ne soit suffisamment réparé par la solution donnée au litige et par la condamnation de la défenderesse aux dépens;

« Sur le septième moyen :

«Attendu que la demanderesse, n'ayant été autorisée à ester en justice que contre la fabrique de l'église de Couthuin, n'était pas recevable à appeler à la cause les religieuses

institutrices Delhalle et Piette; que son action n'ayant d'ailleurs d'autre objet que de se faire remettre la gestion de la fondation de Léonard, ne procède nullement contre les institutrices, qui n'élèvent aucune prétention à l'exercice de cette gestion;

«Par ces motifs, le tribunal, ouï M. Fréson, procureur du roi, en ses conclusions conformes, condamne la fabrique de Couthuin à livrer à la demanderesse les immeubles désignés à l'arrêté royal du 20 janvier 1880, savoir, etc... >>

Appel de la fabrique de Couthuin.

ARRÊT.

LA COUR; Attendu que la fabrique appelante se prévaut vainement du défaut d'acceptation de la donation relative à l'enseignement primaire par une administration compétente;

Attendu, en effet, que cette fondation n'a pas été créée en ordre principal par le chanoine Léonard, mais constitue une charge de la donation qu'il a faite en faveur du culte à la fabrique de Couthuin, donation que celleci a régulièrement acceptée du vivant du donateur, après y avoir été autorisée par arrêté royal;

Que la loi n'assujettissant pas les libéralités au profit d'un tiers, lorsqu'elles sont la charge d'une donation faite à un autre, à l'acceptation solennelle et expresse, et le don ainsi fait pouvant être accepté par le gratifié aussi longtemps que le donateur ne l'a pas révoqué et même après le décès de ce dernier, il s'ensuit que la commune intimée, administration compétente, a accepté utilement et est en droit de réclamer la libéralité dont il s'agit, faite au profit de l'enseignement primaire;

Par ces motifs et ceux des premiers juges, ouï M. Detroz, premier avocat général, et de son avis, confirme le jugement dont est appel; condamne la fabrique appelante aux dépens.

[merged small][merged small][ocr errors][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][ocr errors][merged small][ocr errors][ocr errors][merged small]
« PreviousContinue »