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core imprimée, et je compte vous l'envoyer aussi; vous verrez que je ne m'en suis tiré qu'à force d'être court. Nous avons encore deux autres places à remplir; l'une paraît destinée à M. de Limoges, et je désirerais beaucoup que notre ami l'abbé Le Blanc pût obtenir la seconde. Je n'en désespère pas absolument, et je suis persuadé que vous en seriez fort aise.

Mes respects et les compliments de Mme de Buffon à Mme de Ruffey. Conservez-moi les mêmes sentiments d'amitié dont vous m'avez toujours honoré, et soyez sûr que personne n'est avec un plus sincère et plus inviolable attachement que je le suis, mon cher Président, votre très-humble et très-obéissant serviteur.

(Inédite. De la collection de M. le comte de Vesvrotte.)

LXIV

AU PRÉSIDENT DE BROSSES.

BUFFON.

Paris, le 11 février 1761.

M. de Fontette, que j'ai trouvé dimanche à Versailles, pourrait vous dire, mon cher Président, que ma première question, lorsque je l'ai vu, a été de demander si vous n'étiez pas encore à Montfalcon. Je le croyais, et ne voulant pas qu'il vous en coûtât 6 fr. de port pour quelques plates paroles, je me suis abstenu de vous les envoyer. Ne me grondez donc pas, je vous en supplie, car ce serait à tort. D'ailleurs, je ne veux pas que la nécessité des attentions diminue la confiance que j'ai dans votre amitié; elle m'est trop chère pour que je puisse imaginer de la perdre. L'abbé Le Blanc est en effet tout de bon sur les rangs pour l'Académie française, et quoiqu'il y ait beaucoup de gens qui sollicitent, les uns pour Marmontel, les autres pour Saurin, les autres pour Batteux, pour Trublet, etc., je crois que l'abbé Le Blanc sera élu, et je lui ferai part du désir que vous avez qu'il réussisse.

La succession de l'abbé Sallier ne consiste qu'en mobilier,

et je ne crois pas, lorsque tout sera vendu, qu'il y ait plus de 30 ou 35000 livres. Sur cette somme, il a fait ôter un legs d'environ 10 ou 12 000 liv. qu'il a fait à Mme de Monconseil', à laquelle il a donné sa vaisselle et argenterie; ensuite des legs de 4 à 5000 liv. pour des domestiques; un autre de 2000 liv. pour son exécuteur testamentaire. Otez encore 3 ou 4000 liv. de petites dettes, et au moins encore autant de frais funéraires, d'inventaires et de scellés, et enfin ce qu'il en coùtera pour les réparations d'un bénéfice où ni lui ni son prédécesseur bénéficier n'avaient jamais été depuis plus de cinquante ans; je crains qu'il ne me reste pas assez pour faire le bien que j'avais projeté, qui était de donner à un pauvre neveu, que son oncle n'avait jamais connu, autant qu'il aurait eu s'il fût mort intestat. Je laisse toute cette affaire à discuter entre l'exécuteur testamentaire et les économats, et je pars la semaine prochaine pour retourner à Montbard, où j'espère demeurer jusqu'au mois de juin ou de juillet, et où vous devriez bien venir passer vos vacances de la Pentecôte; car je sais d'avance que vous n'en aurez point cette automne, puisque vous présiderez à la chambre des vacations. Mes respects, je vous supplie, à Mme de Brosses, et tous mes compliments à M. votre frère. Il me semble que, depuis que Voltaire réside en Bourgogne1o, il est devenu furieusement babillard. Voyez seulement son épître à Mme de Pompadour, sa réponse à M. Déodatie, ses missives au sujet du roman de Rousseau ", dans lequel, par parenthèse, je trouve aussi bien du rabâchage, et vous m'avouerez que nos beaux esprits sont plus abondants que jamais, je ne dis pas en idées, mais en paroles. Mes mauvais yeux m'empêchent de lire, et ceci m'en dégoûte. Adieu, mon cher Président, je vous embrasse bien sincèrement.

(Inédite.

De la collection de M. le comte de Brosses.)

BUFFON.

LXV

A L'ABBÉ LE BLANC.

Montbard, le 23 mars 1761.

J'ai été aussi surpris qu'indigné de cette élection à l'Académie française1 que vous m'avez apprise, mon cher ami. Vous avez raison : c'est plus contre Duclos, contre Voltaire et contre d'autres que l'on agit, que contre vous et que contre les autres aspirants. C'est le temps du régime des médiocres; mais, quoiqu'ils soient en grand nombre et que ce nombre augmente chaque jour par le succès de leurs cabales, il faut espérer qu'ils ne réussiront pas toujours, et je sais bien bon gré à Saurin d'avoir vu tranquillement la plate préférence qu'ils ont donnée à l'abbé Trublet. Je voudrais, mon cher ami, que vous eussiez un peu de cette tranquillité; les choses changeront de face, et peut-être à l'heure que nous y penserons le moins. Donnez-moi des nouvelles de la seconde élection'; car quelque dégoûté que je sois de l'Académie, j'y prendrai toujours intérêt à cause de vous. Mme de Buffon me charge de vous faire mille amitiés de sa part, ainsi que Mme et M. Daubenton; il compte arriver à Paris d'aujourd'hui en quinze jours. Je ne puis, mon cher ami, que vous renouveler les assurances du sincère et inviolable attachement avec lequel je serai toute ma vie votre très-humble et très-obéissant serviteur.

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LXVI

A M. DE PUYMAURIN

Au Jardin du Roi, le 16 janvier 1762.

J'ai reçu, monsieur, la petite caisse que vous avez eu la bonté de m'envoyer par la messagerie de Toulouse, et il faut que vous me permettiez de me plaindre de ce que vous en avez payé le port. C'était bien assez de la chose même, sans augmenter encore vos dons de l'argent qu'il vous en a coûté. Ces pétrifications m'ont fait grand plaisir, et tiendront bien leur place au Cabinet du Roi, où nous en avons déjà quelquesunes de semblables. La composition de l'ivoire, qui est par fibres croisées, à peu près comme les mailles des bas, est très-reconnaissable dans les morceaux que vous m'avez envoyés. L'épaisseur des couches qui se séparent les unes des autres est aussi très-bien marquée, et, en les comparant avec d'autres, on pourra en tirer des indications sur l'accroissement annuel des défenses de l'éléphant. Je ne puis donc, monsieur, vous remercier assez de ce présent; mais je ne voudrais pas vous engager à vous défaire en ma faveur de ce qui vous reste, à moins que vous n'ayez la bonté de me demander en échange les choses qui pourraient vous être agréables.. Il est singulier que ces défenses d'éléphant se soient trouvées à si peu de profondeur; elles ont apparemment été roulées et entraînées avec les terres du sommet du coteau, où il est vraisemblable qu'elles étaient autrefois plus profondément enterrées. On trouve de ces défenses fossiles dans plusieurs provinces de l'Europe, et jusqu'en Sibérie. A l'égard des cornes de cerf, elles sont très-communes dans cet état de pétrification, et il n'est pas étonnant qu'on en trouve dans le pays de Comminges et dans les contrées adjacentes, quoiqu'il y ait plus de deux cents ans que cette race d'animaux y soit détruite; c'est probablement parce qu'on y a, depuis

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ce même temps, détruit les forêts et défriché les terrains couverts de bois. On voit par le traité de Gaston Phoebus 3, comte de Foix, que de son temps le cerf y était commun, et qu'il y avait même alors des rennes en France, puisqu'il donne la manière de les chasser, et qu'il en fait un article particulier sous le titre de chasse du rangier. Cependant les rennes rangiers sont aujourd'hui relégués bien loin de nous, et ne se trouvent guère qu'en Laponie et au delà du cinquante-cinquième degré de latitude nord.

Je ne puis, monsieur, que vous offrir mes services, et vous assurer de la reconnaissance et du respect avec lesquels j'ai l'honneur d'être, monsieur, votre très-humble et très-obéissant serviteur. BUFFON.

(Cette lettre, dont nous devons la connaissance à l'obligeance de M. Laroche-Drillière, a paru en 1808, dans le journal du département de la HauteGaronne. Elle a été publiée par le baron de Puymaurin, fils de celui à qui elle est adressée. Le baron de Puymaurin, membre de la chambre des députés pendant toute la durée de la Restauration, mourut le 14 février 1841; il était né à Toulouse, le 5 décembre 1757.)

LXVII

AU PRESIDENT DE RUFFEY.

Paris, le 11 février 1762.

J'ai remis aujourd'hui, mon cher monsieur, à notre ami le président de Brosses, les tomes huitième et neuvième de mon ouvrage que je vous prie d'agréer, et qu'il s'est chargé de vous envoyer par la première occasion qu'il pourra trouver. Vous devriez bien faire comme lui, et venir quelquefois passer l'hiver à Paris; car je suis affligé toutes les fois que je pense au peu d'occasions que nous avons de nous voir. Cependant, mon cher monsieur, cela ne diminuera jamais les sentiments de la tendre amitié et du respectueux attachement que je vous ai voués. BUFFON.

(Inédite. De la collection de M. le comte de Vesvrotte.)

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