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pourrai bien faire un voyage à Dijon au mois de mars ou d'avril. Je puis vous protester qu'une de mes plus grandes satisfactions sera de vous y voir et de vous y renouveler les témoignages de la tendre amitié et du respectueux attachement avec lesquels je serai toute ma vie, mon très-cher Président, votre très-humble et très-obéissant serviteur.

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Au Jardin du Roi, le 27 janvier 1774.

Nous sommes si loin l'un de l'autre, monsieur, que je n'ose pas vous proposer de venir au Jardin du Roi et que je ne voudrais pas aller au faubourg Saint-Honoré sans être sûr de vous y trouver. Je serais cependant enchanté de vous voir et de conférer avec vous, monsieur, d'une affaire de famille dont vous vous êtes entretenu avec M. le comte de La Rivière1. Je ne sais que d'aujourd'hui que vous êtes à Paris; sans cela j'aurais eu l'honneur de vous prévenir plus tôt, et, comme je n'ai plus que huit jours à rester ici, je vous serai obligé de me marquer le jour et l'heure où je pourrai vous trouver chez vous, et vous assurer des sentiments d'estime avec lesquels j'ai l'honneur d'être, monsieur, votre très-humble et trèsobéissant serviteur.

Le comte de BUFFON.

(Cette lettre a été publiée en 1854 dans l'Annuaire de l'Yonne. L'original appartient à M. Leclerc, juge de paix à Auxerre, homme aussi éclairé qu'obligeant.)

Madame,

CLI

A MADAME NECKER'.

Montbard, le 22 mars 1774.

J'ai reçu, au retour d'un petit voyage, la lettre pleine de bonté dont vous m'avez honoré. Elle augmente encore mes regrets; mais il me fut impossible de trouver un moment pour aller vous dire adieu, ainsi qu'à M. Necker. Je vous supplie de compter tous deux sur les sentiments profonds de l'estime et du respect que vous m'avez inspirés. Je vous proteste, madame, que je m'estimerais moi-même davantage, si je pouvais penser en tout aussi bien que vous et lui; mais la première de toutes les religions est de garder chacun la sienne2, et le plus grand de tous les bonheurs est de la croire la meilleure3. Je n'en ai pas moins eu un plaisir délicieux dans ces conversations où nous n'étions pas tout à fait d'accord, et vous reconnaîtrez, madame, par mon empressement à chercher les occasions de vous faire ma cour, la sincérité des sentiments que je vous ai voués.

J'ai reçu des nouvelles de votre charmante amie, Mme de Marchais, et je compte lui écrire au premier jour. Je vous supplie de baiser pour moi votre aimable enfant", à laquelle vous m'avez permis de présenter mon fils. J'espère être de retour vers le 20 de mai, et jouir souvent du plaisir de vous voir et de vous donner des marques du très-respectueux attachement avec lequel j'ai l'honneur d'être,

Madame,

Votre très-humble et très-obéissant serviteur.

(Inédite.)

BUFFON.

CLII

A M. NECKER.

Montbard, le 3 septembre 1774.

Je serais moi-même inconsolable, monsieur, si vous aviez quelque regret à vos soins ou le moindre doute sur ma reconnaissance 1. Je suis bien sûr que vous avez fait tout ce qui était en vous, monsieur, et mille fois plus que je n'ai jamais pu mériter auprès de vous. Indépendamment de ces obligations très-réelles et très-senties que je n'oublierai jamais, je sens avec plaisir tout ce que vous m'avez inspiré d'estime et d'amitié; et Mme Necker, la plus digne et la plus spirituelle des femmes, que j'aime de tout mon cœur et que je respecte de même, me permettra-t-elle comme vous de compter sur son amitié? J'ai l'honneur de lui envoyer cijoint un petit morceau fugitif, que j'aurais dû laisser fuir en en effet, parce qu'il a peu de valeur 2; mais je suis accoutumé à son indulgence, et je voudrais pouvoir faire graver à jamais la lettre et le jugement qu'elle a portés de mon écrit sur le premier chapitre de la Genèse. C'est réellement un chef-d'œuvre de bon sens, et où le discernement le plus exquis se trouve joint à la politesse la plus noble et à l'honnêteté la plus pure. Je fais passer mes remercîments par vous, monsieur, et je vous assure tous deux de la plus sincère et de la plus respectueuse amitié.

(Inédite.)

BUFFON.

CLIII

A M. DE GRIGNON,

CHEVALIER DE L'ORDRE DU ROI, CORRESPONDANT DE L'ACADÉMIE
DES SCIENCES'.

Montbard, le 20 octobre 1774.

Je vous fais bien des remercîments, monsieur, de m'avoir envoyé M. votre fils, et je ne puis vous dire assez combien j'en suis content. Je l'ai trouvé d'un caractère très-honnête, très-aimable, et beaucoup plus instruit qu'on ne l'est ordinairement à son âge. Il a grand soin de bien employer son temps, et il a de l'ardeur pour toutes les choses qui peuvent étendre ses connaissances. C'est sans compliment que je vous rends ce témoignage, monsieur. Il avait en vous un très-bon exemple; mais ni le bon exemple ni la bonne éducation ne peuvent donner autant de mérite et de discernement qu'il en a déjà, et vous devez être très-satisfait, ainsi que Mme votre épouse, d'avoir un enfant qui vous fait tant d'honneur. J'espère que j'aurai le plaisir de le revoir; et peut-être vousmême, monsieur, viendrez-vous à Paris cet hiver. Je crois même que les circonstances seront plus favorables qu'elles ne l'étaient pour obtenir du gouvernement la récompense qu'on doit à vos travaux.

J'ai l'honneur d'être, avec un très-sincère attachement, monsieur, votre très-humble et très-obéissant serviteur.

BUFFON.

(Inédite. Appartient à M. de Grignon, qui a bien voulu nous en donner communication.)

CLIV

A VOLTAIRE Ier,

A FERNEY.

Montbard, le 12 novembre 1774.

Si vous jetez les yeux, monsieur, sur la suscription de ma lettre, vous verrez que, dans le nombre assez petit des êtres de la première distinction, je pense très-hautement et de trèsbonne foi que vous êtes le premier. Ce ne sera pas comme le mathématicien de Syracuse, que, par une extrême politesse pour moi, vous avez la bonté de nommer Archimède premier; car jamais il n'existera de Voltaire second: différence essentielle entre l'esprit créateur qui tire tout de sa propre substance, et le talent qui, quelque grand qu'il soit, ne peut produire que par imitation et d'après la matière. J'espérais bien que ma petite note1 trouverait grâce devant vous, monsieur; mais je crois devoir en partie le bon accueil que vous lui avez fait aux mains qui vous l'ont offerte. Je puis vous dire à ce sujet que M. de Florian' m'a inspiré, dès les premiers moments, la plus grande confiance. Je l'ai trouvé si digne d'être de vos amis, que j'eusse désiré le voir assez longtemps pour devenir le sien; et cela serait arrivé, toujours en parlant de vous, monsieur, comme j'en ai toujours pensé, et comme il en pense et parle lui-même, avec cette tendre admiration qui ne s'accorde qu'à la supériorité qu'on aime, et qu'on ne peut aimer que quand on ne craint pas de l'avouer. Aussi le dernier trait qui fait la plus douce impression sur mon cœur est votre signature; j'ai ressenti un mouvement de joie en ouvrant votre lettre; j'ai admiré avec plaisir la fermeté de votre main et la fraîcheur de l'organe intérieur qui la guide. Avec plusieurs années de moins, je suis plus vieux que vous. Autre supériorité dont je suis loin d'être jaloux; mais n'est-il pas juste que la nature, qui, dès vos premières

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