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CI

A GUENEAU DE MONTBEILLABD.

1er août 1768.

Le service, mon très-cher monsieur, que vous et Mme de Montbeillard voulez me rendre, est si grand que je n'ose vous y engager un peu et ne puis vous en remercier assez1. Je suis sûr que notre pauvre malade en sera comblée. Elle n'aime personne autant que sa bonne amie, elle me l'a dit mille fois. Mais peut-être refusera-t-elle, parce qu'elle craindra de lui donner la peine du voyage et les tristes soins du séjour. Pour moi, mon cher monsieur, je le désire de tout mon cœur, et, que cela soit ou non, j'en conserverai toute ma vie la plus profonde reconnaissance.

BUFFON.

(Inédite. De la collection de Mme la baronne de La Fresnaye.)

GII

AU MÊME.

Jeudi soir, 1768.

C'est le service le plus touchant, le plus essentiel que vous puissiez ajouter à tant d'autres dont nous vous avons déjà l'obligation, mon très-cher monsieur, que de recevoir dans mon absence notre pauvre malade pour douze ou quinze jours'. Si je la laissais seule ou dans toute autre main, je serais très-inquiet; et je serai parfaitement tranquille tant que je la saurai près de vous. Cela même pourra contribuer à son mieux être, et ce sera encore un surcroît de reconnaissance; vous en multipliez chez moi les motifs à chaque instant. Je prendrai votre argent si vous pouvez vous en passer pendant

cinq ou six mois; j'aimerais mieux encore le prendre sur un billet rentuel avec des intérêts; mais c'est à vous, mon cher monsieur, à prescrire les conditions. M. Panckoucke vous envoie deux exemplaires, l'un pour vous et l'autre pour Madame, des six premiers volumes de la nouvelle édition de mon ouvrage. Je vous embrasse bien tendrement, et fais mille respects aux dames.

BUFFON.

(Inédite. — De la collection de Mme la baronne de La Fresnaye.)

CIII

AU MÊME.

Août 1768.

Seul avec les oiseaux, vous êtes mieux que moi, mon cher monsieur, qui depuis trois jours suis environné de monde1 et ne puis disposer de mon temps. Notre pauvre malade est un peu mieux, sans pouvoir néanmoins desserrer les dents, et souffrant toujours beaucoup, surtout les nuits, pendant lesquelles elle a de la fièvre et beaucoup d'agitation. Je persiste à croire qu'il n'y aura point d'abcès, malgré l'avis des médecins; mais, comme il paraît que le foyer du mal est dans les muscles de la mâchoire, la résolution de l'humeur sera peutêtre encore longue, et c'est ce qui nous désole. Mille tendres respects à Mme de Montbeillard. Mme de Prévost a bien soin de la malade; toutes deux vous font mille amitiés, et moi je vous remercie et vous embrasse, mon très-cher monsieur, de tout mon cœur.

L'expérience sur le fer a pleinement réussi.

BUFFON,

(Inédite. De la collection de Mme la baronne de La Fresnaye.)

CIV

AU MÊME.

Montbard, le 16 septembre 1768.

Quoique notre pauvre petite malade soit mieux, elle n'est pas encore bien, mon cher monsieur. La mâchoire est toujours serrée au point de ne pouvoir ouvrir la bouche, et la tumeur subsiste, sans douleur à la vérité, ce qui est d'un grand point, mais toujours dure et grosse, en sorte que l'incommodité et l'ennui de ne pouvoir manger peuvent encore durer plusieurs jours. Venez la voir, mon cher monsieur; je suis bien sûr du plaisir que vous lui ferez. Je ne vous parle pas du mien: j'aurais besoin de vous voir tous les jours pour être parfaitement heureux. Il faut parler de tous les oiseaux, gravés ou non gravés; c'est aussi mon avis comme le vôtre.

Je vous embrasse bien sincèrement, mon cher monsieur, et de tout mon cœur.

BUFFON.

(Inédite. De la collection de Mme la baronne de La Fresnaye.)

CV

AU PRÉSIDENT DE RUFFEY.

Montbard, le 10 janvier 1769.

J'ai reçu votre lettre, mon cher Président, avec la liste de Messieurs de votre Académie ; je l'appelle la vôtre, parce qu'en effet, si vous ne l'avez pas créée, vous l'avez au moins ressuscitée et rendue plus florissante qu'on ne pouvait l'espérer. C'est doublement servir sa patrie que d'y répandre en même temps des lumières et des encouragements, et tous les gens bien animés doivent sentir comme moi combien il vous en a coûté de peines, et tout le courage dont vous avez eu besoin

pour surmonter tous les obstacles qu'on opposait à vos vues. Je ne me lasserai jamais de vous réitérer sur cela mes félicitations, et de vous marquer en même temps les sentiments de l'estime et de l'ancienne amitié que je vous ai vouées. Je suis depuis longtemps dans une situation bien malheureuse. Je ne sais point encore quand elle changera; car ma pauvre malade est presque toujours au même état de désespoir et de douleur. Je sais que vous et Mme de Ruffey avez eu la bonté d'y prendre part. Depuis le jour que vous eûtes la bonté de la voir à Dijon, elle n'a pas cessé de souffrir, et souvent à l'excès. C'est au point que je ne puis même la quitter pour retourner à Paris, où mes affaires me demanderaient depuis près de deux mois. M. de Clugny, qui me paraît être fort de vos amis, et que vous venez de recevoir à votre Académie, me fit le plaisir de me dire de vos nouvelles à son retour de Dijon; c'est un homme de mérite, et duquel je fais grand cas.

Mes respects, je vous supplie, à Madame. Je ne vous parle pas de mes vœux au commencement de l'année, parce que dans tous les temps mes sentiments sont les mêmes pour vous, mon cher Président, et que cette année, comme toutes les précédentes, je suis et serai avec un sincère et respectueux dévouement votre très-humble et très-obéissant serviteur.

(Inédite. De la collection de M. le comte de Vesvrotte.)

GVI

AU MÊME.

BUFFON.

Paris, le 5 avril 1769.

Je connais depuis trop longtemps, monsieur, votre amitié, pour pouvoir douter de l'intérêt sincère que vous et Mme la présidente de Ruffey prenez à ma douleur. Ce fut d'abord une plaie cruelle et qui dégénère aujourd'hui en une maladie

que je regarde comme incurable et qu'il faut que je m'accoutume à supporter comme un mal nécessaire. Ma santé en est altérée, et j'ai abandonné au moins pour un temps toutes mes occupations. Conservez-moi toujours les mêmes sentiments dont vous m'honorez, et soyez convaincu de ceux du véritable et respectueux attachement avec lequel je serai toute ma vie monsieur, votre très-humble et très-obéissant serviteur.

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Je serais désolé d'avoir manqué, mon cher monsieur, à des amis aussi essentiels et aussi respectables que ceux dont vous me portez les plaintes; mais elles ne sont pas fondées. Je n'ai reçu aucune lettre de M. le comte de La Rivière1 depuis le décès de ma pauvre femme. Il est vrai que deux ou trois jours auparavant il m'en avait adressé une à Montbard, à laquelle je chargeai mon frère2 de répondre, et qui me dit s'en être acquitté. C'était, comme je vous le dis, deux ou trois jours avant le cruel événement, et par conséquent avant mon départ pour Paris. Depuis cette lettre je n'ai pas reçu la moindre chose de Thôtes, et je n'ai même su des nouvelles de la maison que par M. le vicomte3, que j'ai vu à Paris quelquefois. Je crois donc qu'on recevra mes excuses, et me suis déjà arrangé avec le chevalier de Saint-Belin pour aller à Thôtes à la Saint-Jean. Je serais charmé d'aller plus tôt et avec vous; mais mes affaires ne me permettent qu'un jour d'absence pour aller vous voir c'est le lundi de la Pentecôte que j'aurai cet honneur. Bonjour, mon cher monsieur, je vous embrasse bien sincèrement.

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