Page images
PDF
EPUB

pour la Constitution? (Applaudissements des tribunes.) Tel est, Messieurs, ce que vous demande le département.

Je demande le renvoi des pièces, que je dépose sur le bureau, au comité des Douze, pour les examiner, en vous observant cependant que tout est tranquille, parfaitement tranquille dans la ville de Dijon, grâce au zèle et à la vigilance de la municipalité.

M. Oudot. M. Guyton-Morveau aurait pu ajouter que le peuple a donné une aussi grande preuve de modération, lorsque, sur la réquisition du directoire, il a reconduit, dans leur couvent, 3 ou 4 religieuses, qu'il voulait aussi transférer dans un local placé sous les yeux de l'administration.

(L'Assemblée renvoie les pièces relatives à cette affaire à la commission extraordinaire des Douze.)

M. Jouneau, au nom du comité militaire, fait un rapport et présente un projet de décret sur la pétition de quelques officiers de la gendarmerie nationale, tendant à obtenir un supplément d'appointements; il s'exprime ainsi :

Messieurs, l'Assemblée constituante décréta le 18 août 1790, que les officiers, sous-officiers et soldats qui, par la nouvelle formation, éprouveront une réduction sur leur traitement actuel, le conserveront jusqu'à ce qu'ils en obtiennent un équivalent. Cette loi devait s'étendre à toutes les armes et à tous les individus qui les composent. Cependant vous avez déjà été obligés de rendre plusieurs décrets pour la faire appliquer à des corps à qui les payeurs refusaient de tenir compte du supplément d'appointements qui leur étaient dus. Quelques officiers des grenadiers de la gendarmerie nationale sont du nombre de ceux qui ont réclamé en vain l'exécution de la loi à leur égard. Ils vous ont alors présenté une pétition pour que vous voulussiez bien décréter en leur faveur ce que vous aviez fait dans plusieurs circonstances, et notamment pour les 29° et 30 divisions de la gendarmerie nationale de Paris.

Votre comité militaire, Messieurs, à qui vous avez renvoyé l'examen de cette pétition, l'a trouvée juste et bien fondée, et il vous observe que le comité militaire de l'Assemblée constituante avait porté le même jugement de la réclamation dont il s'agit, par une décision du 22 septembre 1791, qui est jointe aux pièces.

Voici, en conséquence, le projet de décret qu'il m'a chargé de vous présenter:

« L'Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport de son comité militaire sur la pétition de quelques officiers des grenadiers de la gendarmerie nationale, tendant à obtenir un supplément d'appointements; considérant que l'article 7 du décret du 18 août 1790, dit que les officiers, sous-officiers et soldats qui, par l'effet de la nouvelle organisation, éprouveront une réduction sur leur traitement actuel, le conserveront jusqu'à ce qu'ils en obtiennent un équivalent, et qu'en attendant ils seront payés du supplément sur les états particuliers, et voulant faire jouir promptement les pétitionnaires du bénéfice de la loi, décrète qu'il y a urgence.

« L'Assemblée nationale, après avoir décrété l'urgence, décrète ce qui suit:

«Les officiers des grenadiers de la gendarmerie nationale, dont les appointements ont été réduits par la nouvelle organisation de leur corps, recevront conformément, à l'article 7 du

décret du 18 août 1790, un supplément qui équivaudra à la diminution qu'ils ont éprouvée, et ce, sur des états particuliers, dans la forme prescrite. >>

(L'Assemblée décrète l'urgence et adopte ce projet de décret.)

M. Lambert (Joseph), au nom du comité de l'ordinaire des finances, fait la troisième lecture (1) d'un projet de décret relatif à la taxe des lettres aux armées de France sur le territoire étranger; ce projet de décret est ainsi conçu :

L'Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport de son comité de l'ordinaire des finances, et les 3 lectures du projet de décret lu à ses séances des 7, 16 et 23 juin, après avoir déclaré qu'elle était en état de délibérer, décrète ce qui suit:

« Les lettres adressées aux armées seront taxées conformément au tarif de 1791, jusqu'au dernier bureau de poste de la frontière, sans que la taxe puisse être augmentée pour le transport de la frontière aux armées, lorsqu'elles seront sur territoire étranger.

[ocr errors]

(L'Assemblée décrète qu'elle est en état de délibérer définitivement, puis adopte le projet de décret.)

M. Jouneau, au nom du comité militaire, fait un rapport et présente un projet de décret relatif à l'avancement des adjudants dans les deux nouvelles divisions de gendarmerie nationale; il s'exprime ainsi :

La loi du 28 août 1791, portant création de 2 divisions de gendarmerie nationale destinées pour la sûreté de Paris, ne s'est point expliquée sur l'avancement des adjudants qui y sont attachés. Cet oubli n'a pas tardé d'être aperçu; et dès qu'il est venu à vaquer des places de lieutenant, on a senti la nécessité de le faire réparer, afin de ne pas priver les adjudants du droit que ceux des troupes de ligne ont, concurremment avec les sergents ou maréchaux des logis, de parvenir au grade d'officier. La pétition qui vous a été présentée à ce sujet, et que vous avez renvoyée à votre comité militaire, n'offre pas une question difficile à résoudre en ouvrant la loi sur l'avancement aux différents grades de l'armée, on trouve les dispositions qui manquent à celle du 28 août, et votre comité n'a pas cru pouvoir mieux faire que de les adopter en leur entier, puisqu'il concilie, par là, les intérêts des adjudants et des maréchaux des logis, sans rien changer aux règles sur l'avancement militaire, décrété par l'Assemblée constituante.

Une autre demande a aussi été faite, Messieurs, par les officiers supérieurs de ces 2 divisions au département de Paris, qui vous l'a transmise. Elle consiste à faire nommer un secrétaire-greffier et un commis-greffier à chaque division. Votre comité ne s'est pas dissimulé que les divisions de la gendarmerie nationale des départements ont chacune 3 secrétaires-greffiers, quoiqu'elles soient les 2 tiers moins fortes que celles dont il s'agit; mais il a cependant pensé qu'à cause de leur réunion dans la même ville, un seul secrétaire-greffier pourrait suffire à chacune d'elles, surtout si vous adoptez la proposition que je suis chargé de vous faire, de diviser les fonctions du quartier-maître trésorier.

(1) Voy. ci-dessus, séance du 16 juin 1792, page 257, la deuxième lecture de ce projet de décret.

Vous savez, Messieurs, que la loi du 28 août, que je vous ai déjà citée, dit que le même quartier-maître trésorier fera le service auprès de deux divisions destinées pour la sûreté de Paris. Cette cumulation de fonctions a donné lieu jusqu'ici à beaucoup de plaintes, et en effet, il est aisé de concevoir qu'un même homme qui est aux ordres de deux chefs de corps différents, qui doit son travail à deux conseils d'administration où il peut être appelé en même temps, ne saurait guère manquer de s'attirer quelques reproches, et de laisser, sans qu'il y ait de sa faute, plusieurs objets relatifs à son service s'arriérer.

Votre comité est donc d'avis, Messieurs, qu'il y ait un quartier-maître trésorier attaché à chacune des 29 et 30 divisions de gendarmerie nationale, et il hésite d'autant moins à vous le proposer, que les appointements du quartiermaître trésorier actuel ayant été fixés à raison de ses doubles fonctions, il n'y a aucune augmentation de dépense à faire. Par ce moyen, vous doublerez l'activité de l'administration de chaque division; vous ferez cesser les réclamations qui ont eu déjà lieu contre le double emploi dont il s'agit; et ce qui est bien plus important, vous serez sûrs que dans le cas où la séparation des deux divisions deviendrait nécessaire, elles auraient chacune leur état-major complet.

Voici le projet de décret qui a été arrêté au comité militaire :

« L'Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport de son comité militaire, considérant que la loi du 28 août 1791, portant création de deux nouvelles divisions de gendarmerie nationale, ne s'explique point sur l'avancement des adjudants qui y sont attachés; voulant rectifier cet oubli, et faire quelques changements que le bien du service et l'avantage de ces deux divisions nécessitent, décrète qu'il y a urgence.

« L'Assemblée nationale, après avoir décrété l'urgence, décrète ce qui suit:

Art. 1°r.

« Les maréchaux des logis nommés aux places d'adjudants, concourront, du moment de leur nomination, avec tous les lieutenants, sans cependant être brevetés, pour arriver à la compagnie, et ils pourront rester adjudants jusqu'à ce que leur ancienneté les y porte.

Art. 2.

Lorsqu'il vaquera une place de lieutenant dans l'une des 29 ou 30° division de gendarmerie nationale, et qu'elle appartiendra au tour des maréchaux des logis, les deux adjudants concourront au choix comme les maréchaux des logis.

Art. 3.

Dans le cas où un maréchal des logis moins ancien que les adjudants sera nommé à une lieutenance, les adjudants jouiront, en gratification, par supplément d'appointements, des appointements de lieutenant; s'il n'y avait qu'un des adjudants qui se trouvât plus ancien que le maréchal des logis, il jouirait seul de ladite augmentation.

Art. 4.

Il y aura un quartier-maître trésorier attaché à chacune des 29° et 30° division de gendarmerie

nationale. En conséquence, celui qui remplit ces deux places sera tenu de déclarer la division à laquelle il désire de rester fixé ; et l'autre division procédera à la nomination du sien, en se conformant à l'article 9 du titre II du décret du 23 septembre 1790. Leurs appointements seront les mêmes que dans les troupes de ligne.

Art. 5.

« Il sera, en outre, attaché à chacune desdites divisions un secrétaire-greffier, qui sera nommé conformément à la loi du 16 février 1791, et jouira du traitement fixé par ladite loi. Ce traitement sera payé à compter du jour de la formation de chaque division; au moyen de quoi il ne sera accordé aucune autre somme pour tenir lieu d'indemnité à ceux qui ont rempli jusqu'à ce moment les fonctions de secrétaire-greffier. (L'Assemblée décrète l'urgence et adopte le projet de décret.)

MM. Noissette et Champy, députés extraordinaires de la ville de Strasbourg, sont admis à la barre. L'un deux porte la parole, au nom des corps administratifs; il s'exprime ainsi :

«Messieurs (1), vous voyez devant vous deux députés extraordinaires de la ville de Strasbourg, chargés par leurs concitoyens de solliciter de votre justice la réparation due à des administrateurs qui jouissent de la confiance publique et qui ont été calomniés de la manière la plus grave, et en même temps la plus indiscrète, par des hommes qui, exerçant les premières fonctions du pouvoir exécutif, doivent être les premiers protecteurs de l'ordre et de la confiance due aux magistrats du peuple.

[ocr errors]

Chargés aussi de déposer sur l'autel de la patrie les prémices de la contribution volontaire que les citoyens de Strasbourg consacrent à la défense de la liberté, ils supplient l'Assemblée nationale d'agréer le don d'une somme de 10,114 liv. 14 s. 3 d. (2), somme modique, mais fournie tout entière par le petit nombre de ceux à qui leur empressement n'a pas permis d'attendre la clôture de la souscription ouverte à la maison commune. (Vifs applaudissements.)

La pétition dont nous sommes porteurs vous instruira, Messieurs, de toute l'étendue de nos griefs et de tout ce qu'une grande commune offensée réclame de votre sollicitude, de votre vigilance et de votre justice. Jusqu'à ces derniers temps la ville de Strasbourg, marchant avec une imposante unanimité à l'achèvement de la Révolution et à l'établissement de la Constitution, avait présenté à l'Empire l'exemple de la plus belle conquête que les vrais principes de la liberté aient pu faire sur sa surface.

(1) Bibliothèque nationale Le 34, n° 95.

Assemblée législative.

(2) Voici le détail du don patriotique offert, au nom de la ville de Strasbourg, par les deux députés extraordinaires de cette ville, ainsi qu'il résulte du procèsverbal de la séance La ville de Strasbourg offre en assignats 5,520 livres; en or, 190 livres; en argent 343 1. 11 s.; une quittance de 2 lingots or et argent, remis à la monnaie de Strasbourg, estimés de valeur de 499 1. 2 s.; une épée à garde d'argent; une tabatière d'or estimée de la valeur de 330 livres; une tabatière et une paire de boucles d'argent. Il est dit, en cutre, que les administrateurs et les employés du département du Bas-Rhin ont remis à la caisse du district de Strasbourg la somme de 3,000 livres; enfin, que le sieur Stuber a remis gratuitement 3 marcs pierre infernale pour le service de l'armée du Bas-Rhin, de valeur de 200 livres.

Une ville privilégiée, gouvernée par des magistrats de son choix, fière de la ressemblance de son antique constitution avec la constitution de ceux des cantons suisses qui jouissent de la plus grande prospérité, avait fait à la grande société des Français le généreux sacrifice de ce qu'elle pouvait regarder comme ses droits; et se fondant avec joie, avec orgueil, dans un Empire régénéré par la philosophie, se faisait gloire d'un amour de la liberté que n'avait point préparé la haine de l'oppression. Son maire et ses administrateurs, forts de la confiance d'un peuple droit, juste, éclairé, avaient réprimé sans violence les efforts d'une aristocratie qui n'est que méprisable, lorsqu'elle ne trouve pas des alliés dans les fauteurs de l'anarchie. L'Assemblée nationale n'entendait prononcer le nom de la ville de Strasbourg qu'accompagné des témoignages de dévouement à la belle cause que soutiennent les Français. Les autorités y étaient religieusement respectées; les troupes de ligne n'y trouvaient que des exemples de subordination; les sociétés patriotiques n'y prêchaient que l'obéissance à la loi, et les ennemis du nouveau régime, forcés de chercher hors de ses murs des suppôts et des espérances, n'acquéraient, en la considérant, que la désolante conviction qu'une Constitution dont ils affirmaient l'établissement impossible, s'enracinera profondément dans le sol que couvrent des négociants, des artisans, des propriétaires, des hommes attachés par une honnête industrie, par de louables affections, à la prospérité de la grande société dont ils font partie.

« Tout a changé dans ces derniers temps. Une horde d'hommes inconnus dans la première époque de la Révolution, des hommes nés sur cetté Révolution, comme l'insecte dévorant sur la feuille d'un bel arbre, des hommes sans propriétés, sans industrie que l'on puisse avouer, sans mœurs, et par conséquent sans patrie, ont eu besoin d'une autre liberté que celle qui vit à l'ombre des lois. A ces hommes, il fallait d'autres révolutions, d'autres bouleversements, d'autres chefs, une autre Constitution. Ils ont calomnié les autorités légales; ils ont tenté de corrompre la bonne foi du peuple, et d'égarer le zèle de la force armée. Pénétrant dans les sociétés patriotiques, dans les cercles, dans les groupes, dans les camps, ils ont levé partout l'étendard de la licence; étendard qui se fùt bientôt humilié devant celui de la liberté, s'ils n'avaient trouvé le chemin des autorités suprêmes auxquelles le sort de l'Empire est confié.

« Des ministres qui cherchaient leurs correspondants ailleurs que dans ceux qui leur ont été donnés par la Constitution, ont accueilli et légalisé leurs honteuses calomnies. Des lettres qui, dans l'histoire des événements extraordinaires qui nous pressent, formeront elles-mêmes un incident extraordinaire, ont accusé une portion de nos administrateurs et de nos magistrats, des plus absurdes complots; nulles pièces n'accompagnent ces ridicules dénonciations ; et nous demandons des pièces; et nous demandons que la lumière se répande sur ces tortueuses intrigues; et nous demandons que le calme nons soit rendu, que nos magistrats soient justifiés, respectés. Telle est, Messieurs, l'honorable mission dont nous sommes chargés, au nom d'une ville dont les murs sont au nombre des plus inexpugnables boulevards de la Constitution; au nom d'une ville où l'on ne veut ni aristocratie ni factieux; au nom d'une ville où l'on

veut mourir pour la liberté, mais ne mourir que pour elle.

Nous affaiblirions, Messieurs, le sentiment que nous sommes chargés d'exciter dans nos législateurs, si nous ne leur soumettions pas, dans ses propres termes, l'adresse que la grande majorité de nos concitoyens actifs nous a chargés de mettre sous vos yeux, et qu'accompagnent des pièces dont nous devons remettre le dépôt entre vos mains (1).

Adresse du conseil général de la commune et de la majorité des citoyens actifs de la ville de Strasbourg à l'Assemblée nationale.

<< Législateurs,

«Le ministre de l'intérieur, dans une lettre adressée par lui au maire de Strasbourg, lui a demandé des éclaircissements sur une dénonciation qu'il a reçue d'une conspiration, dont le but est de livrer cette ville à l'ennemi; les moyens, un or corrupteur dont on indique, ditil, la distribution et l'emploi; les auteurs enfin, le maire lui-même et quelques-uns des administrateurs du département. L'envoi des éclaircissements invoqués par le ministre eût été sans doute la réponse des accusés, s'il eût articulé des faits, communiqué les dénonciations et nommé les dénonciateurs. Empressés de repousser une inculpation atroce, les fonctionnaires dénoncés réclament du ministre cette communication, qu'il n'eut pas dù se faire demander. Et nous aussi, nous la sollicitons. Quelle que soit la valeur de cette dénonciation, il importe quelle soit jugée. Notre sûreté est compromise, ou par de perfides magistrats conjurés avec nos ennemis, ou par des factieux non moins perfides, conjurés contre les lois et les dépositaires de l'autorité. Accusateurs ou accusés, conspirateurs ou calomniateurs, il existe des traîtres, il faut qu'ils soient connus, confondus, punis.

« Nous demandons que le ministre communique à l'Assemblée nationale la dénonciation portée contre les fonctionnaires publics désignés dans sa lettre, que les pièces qui la motivent ou l'appuient, soient déposées sur le bureau, et que l'Assemblée prononce incessamment sur cette dénonciation.

[ocr errors]

Après cette première démarche, commandée par le besoin pressant d'une prompte et égale justice, il nous reste à remplir un devoir sacré et indispensable. Il résulte de la lettre du ministre que la publicité donnée à ces accusations a produit sur beaucoup d'esprits, sur vous-mêmes, peut-être, une impression défavorable aux accusés. C'est cette impression que nous voulons, que nous devons effacer, afin que ce soient les faits et non les préventions qui les jugent. Législateurs, vous avez peut-être entendu le langage de la calomnie, écoutez celui de la vérité.

« Quels que soient les auteurs de ces mystérieuses délations, ils n'ont pas exprimé les sentiments des citoyens de cette ville. Non, l'opinion publique n'a point parlé par leur bouche. En vain, depuis longtemps, on s'efforce de l'égarer; en vain, quelques factieux, la plupart étrangers, corrupteurs avides d'une Révolution

(1) Voy. ci-après, aux annexes de la séance, page 509, le texte des pièces déposées sur le bureau de l'Assemblée par MM. Noissette et Champy.

qu'ils n'ont pas faite, et dont ils veulent envahir les fruits sans en avoir partagé les travaux, perfides agitateurs d'un peuple éclairé et sage, qui les pénètre et les méprise, ont tenté de ternir du souffle impur de la calomnie, la réputation de tous les dépositaires des pouvoirs. Ils sont connus et jugés.

«S'il était permis de percer d'avance le voile dont le ministre a couvert les délations dont il s'est rendu l'organe, peut-être en trouverionsnous les auteurs dans ces apôtres de l'anarchie; peut-être ont-ils espéré pouvoir accréditer dans l'éloignement des inculpations repoussées sur les lieux par l'opinion générale.

Législateurs, ces hommes, si légèrement accusés de conspirer contre la Constitution, sont ceux qui l'ont établie et consolidée dans ce département et qui, aujourd'hui, la défendent contre les rebelles, les despotes et les factieux. M. Dietrich surtout, maire de cette commune, a consacré à la chose publique des talents supérieurs, un caractère ferme, une infatigable activité et un dévouement à toute épreuve. Porté deux fois à cette place éminente et orageuse, il a su préserver cette ville des troubles qui ont désolé presque tous les autres points de l'Empire. Législateurs, il siégerait parmi vous, si les électeurs du département du Bas-Rhin avaient consulté leur reconnaissance plutôt que leur intérêt. Justes appréciateurs du mérite et de ses services, ils le dédommagèrent d'un sacrifice pénible. Vous avez reçu vous-mêmes les expressions de leurs sentiments, et vos procèsverbaux conservent encore ce glorieux témoignage rendu à ses talents et à son patriotisme par les représentants d'un département entier. Il n'a pas démérité depuis, et les calomnies d'une odieuse cabale n'ont fait qu'accroître sa gloire et notre estime.

« Il avait demandé à aller lui-même confondre à vos yeux ses détracteurs; mais le conseil général de la commune et tous les citoyens n'ont pas cru que son absence pùt être sans danger pour la sûreté de cette ville et de l'Empire.

« Nous vous déclarons, et par vous, à la France entière, que Frédéric Dietrich, maire de Strasbourg, et les autres fonctionnaires publics dénoncés au ministre de l'intérieur comme coupables du projet de conspiration mentionné dans sa lettre du 11 de ce mois, ont toujours joui et jouissent encore de toute notre confiance.

[merged small][ocr errors]

M. Brunck et plusieurs membres (à droite): L'impression et la mention honorable!

D'autres membres (à gauche) : La question préalable!

(L'Assemblée ordonne la mention honorable de l'adresse, l'insertion au procès-verbal, l'impression et le renvoi des pièces à la commission extraordinaire des Douze.)

Une députation des citoyens de la commune de Monceaux, près Paris, est admise à la barre. M. BILLARD, orateur de la députation, s'exprime ainsi :

Les citoyens de la commune de Monceaux ont payé leurs impositions et les trois termes de la contribution patriotique. En leur nom, je vous apporte une respectueuse et inaltérable soumission aux lois, un dévouement sans bornes à la Constitution et un don patriotique de 295 livres,

dont 269 liv. 10 s. en assignats et 25 liv. 10 s. en espèces.

M. le Président répond à la députation et lui accorde les honneurs de la séance.

(L'Assemblée accepte cette offrande avec les plus vifs applaudissements et en décrète la mention honorable au procès-verbal, dont un extrait sera remis aux donateurs.)

M. Cambon, secrétaire, annonce les dons patriotiques suivants :

1o Des citoyens de Nantes envoient, par l'entremise de la dame Monistrol-Bonnet, épouse de l'inspecteur des douanes de Bayonne, 170 livres en assignats, et en espèces, annoncées par la poste, 63 liv. 19 s.

2o Le sieur Poitevin-Lacroix, receveur de la douane de Calais, envoie 30 livres en assignats.

3o Le sieur Buché, capitaine général des douanes nationales à Nantes, envoie 100 livres en assignats.

4° Un inconnu envoie un bouton de manchette

en or.

5o La municipalité du bourg du Plan de Cuques, près Marseille, envoie 150 livres en assignats.

M. Ducos. La société des Amis de la Constitution, séante à Saint-André-de-Cubzac, département de la Gironde, m'a chargé de remettre à l'Assemblée 369 livres en argent, pour subvenir aux frais de la guerre. De même, la société des Amis de la Constitution, séant à Portets, même département, remet, en une reconnaissance du sieur Guilbaud, administrateur de la caisse patriotique de Bordeaux, qui constate la remise pour le compte de la nation, 611 livres en espèces, et 768 livres en assignats.

(L'Assemblée accepte ces offrandes avec les plus vifs applaudissements et en décrète la mention honorable au procès-verbal, dont un extrait sera remis à ceux des donateurs qui se sont fait connaître.)

M. Blanchard, au nom du comité militaire, soumet à la discussion (1) un projet de décret concernant le payement des troupes et leur traitement pendant la campagne; ce projet de décret est ainsi conçu :

Décret d'urgence.

« L'Assemblée nationale, d'après les observations du ministre de la guerre, et sur la motion d'un de ses membres, considérant qu'il est instant de régler tout ce qui est relatif au payement des troupes et à leur traitement pendant la campagne, ayant entendu le rapport de son comité militaire, a décrété l'urgence.

Décret définitif.

« L'Assemblée nationale, ayant décrété l'urgence, décrète définitivement ce qui suit:

Art. 1er.

« Les dispositions des articles 2 et 3 des décrets des 18 et 20 avril dernier, sur la solde des gens de guerre, auront lieu, à compter du 1er avril de la présente année et jusqu'à ce qu'il en soit

(1) Voy. Archives parlementaires, 1r série, t. XLIV, séance du 29 mai 1792, page 248, le rapport de M. Blanchard.

autrement ordonné, pour les sous-officiers et soldats qui ont été payés en assignats, ainsi que pour l'augmentation de la masse générale des

corps.

Art. 2.

« L'augmentation de traitement accordée par les décrets cités dans l'article ci-dessus, aux capitaines, lieutenants et sous-lieutenants des armées, pour raison de la perte en assignats, aura lieu également, à dater du 1er avril de la présente année et jusqu'à ce qu'il en soit autrement ordonné, dans toutes les garnisons, quartiers et cantonnements, ainsi que pour les sous-officiers et soldats, à l'exception des places où le payement doit être fait en numéraire, conformément aux dispositions de l'article 4 du même décret et à celui du 1er mai, pour les troupes qui sont en Corse.

Art. 3.

« Le supplément de 4 onces, ajouté à la ration de pain de munition, par les décrets des 17 et 21 février dernier, n'aura lieu que pour les sous-officiers et soldats ou volontaires seulement, faisant partie des armées; les rations accordées aux officiers de tous grades, continueront d'être de 24 onces.

Art. 4.

« A compter du 1er juillet prochain, il sera fourni à chaque officier, indépendamment des rations de pain et des rations de fourrage, déterminées par les décrets des 17-27 février et du 23 avril derniers, des rations de viande d'une livre chacune, et des rations de riz de 4 onces, jusqu'à concurrence du nombre de rations de pain attribuées par lesdits décrets à chaque grade.

« Le prix des rations de viande sera fixé à 10 sols et celui des rations de riz à 2 sols, dont le montant sera retenu sur les appointements des officiers qui les auront reçues.

Art. 5.

«En conséquence des dispositions de l'article ci-dessus, et des facilités accordées aux officiers pour se procurer des vivres, il sera payé dans les armées, à dater du 1er juillet prochain, à chaque officier, de quelque grade qu'il soit, sur ses appointements, une somme de 50 livres en numéraire; au moyen de quoi, l'augmentation du quart pour les lieutenants et sous-lieutenants, et du sixième pour les capitaines, n'aura lieu que sur leur paye en assignats, déduction faite de celle qui sera affectée au payement des rations attribuées à chaque grade, soit qu'elles aient été prises ou non.

Art. 6.

«La fourniture du riz et des légumes secs ne devant avoir lieu qu'à défaut de légumes verts, il sera donné aux sous-officiers, soldats et gardes nationaux volontaires, lorsque la fourniture du riz et des légumes n'aura pas lieu, ce qui sera déterminé par le général, un supplément de solde de 6 deniers par jour pour se procurer des légumes verts.

Art. 7.

Les gratifications et traitements réglés par

les précédents décrets, pour les armées du Nord, auront lieu sur le même pied, pour celles qui sont ou pourront être rassemblées dans le Midi. » (L'Assemblée décrète l'urgence et adopte ce projet de décret.)

Les six ministres entrent dans la salle. Ils se rendent aux ordres que l'Assemblée leur a donnés par un décret rendu dans la séance du vendredi, 22 juin 1792, au soir (1).

M. le Président. Les ministres étant rendus à l'Assemblée, je vais leur annoncer ce que l'Assemblée m'a chargé de leur dire.

(Les ministres se lèvent pour entendre la notification du décret.)

M. le Président : « Deux objets urgents et de la plus haute importance excitent en ce moment la sollicitude du Corps législatif.

« Le premier est la nécessité d'arrêter les troubles excités par le fanatisme.

« Le second est l'intérêt pressant de placer une armée de réserve entre les frontières et Paris. « Le roi est chargé, par la Constitution, de veiller à la sûreté générale de l'Etat.

« L'Assemblée nationale vous ordonne de lui rendre compte, par écrit, à sa séance de demain, des mesures qui ont été prises pour y parvenir. »

M. Lajard, ministre de la guerre. D'après le message que j'ai eu l'honneur de remettre, de la part du roi, à l'Assemblée nationale, et les mesures qui y étaient indiquées, j'ai cru qu'il était de mon devoir, depuis le renvoi que l'Assemblée a fait à son Comité militaire, d'ajouter aux courts développements que j'avais donnés hier, des développements plus considérables. Je supplie l'Assemblée de vouloir bien en entendre la lecture. D'après les intentions du roi, très conformes aux vœux de l'Assemblée nationale, mon premier soin, en acceptant le ministère, a été de prendre les mesures nécessaires pour la sûreté de la capitale, de manière à en assurer la tranquillité dans toutes les suppositions.

Je me suis appliqué à connaître exactement notre situation à cet égard, et à en faire part à l'Assemblée nationale. En comparant d'abord les états de situation dressés par mes prédécesseurs avec le tableau que vous en a offert M. Dumouriez, j'ai aperçu une différence qui m'a engagé encore plus à constater la réalité de nos moyens, de nos ressources et des difficultés que nous avons à vaincre. J'espère pouvoir en former nn état fidèle, et être en état, sous peu de jours, de le mettre sous les yeux de l'Assemblée nationale.

Le premier aperçu que j'en ai présenté à Sa Majesté a suffi pour la déterminer à faire la proposition qu'elle vous a faite hier au soir. Je vous demande la permission d'en développer encore mieux l'utilité, et de vous faire part des précautions que j'ai déjà prises,, et qui, dans la supposition même de toute autre mesure, tendent directement à la sûreté de la capitale. J'ai cru ne pouvoir trop me håter de répondre aussi au sage empressement que montre l'Assemblée nationale à cet égard.

En jetant un coup d'œil militaire sur les frontières qui couvrent la capitale, on aperçoit d'abord que la majeure partie est assez fortifiée par l'art ou par la nature pour inspirer des motifs de confiance; mais il existe pour ainsi dire

(1) Voy. ci-dessus, séance du 22 juin 1792, au matin, page 472, le texte du decret rendu.

« PreviousContinue »