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résultant pour l'Etat de la propriété de la prison, est de tant.

Jusqu'ici je n'ai parlé que du revenu brut et annuel; or, la loi n'impose que le revenu net. Qu'est-ce que le revenu net d'une maison? La loi du 1er décembre 1790, concernant la contribution foncière, répond à cette question, dans l'article 10 du titre II. Le revenu net et imposable d'une maison est les trois quarts du revenu total, l'autre quart représentant les réparations et le dépérissement progressif.

L'article 14 du même titre ne considère que 2 tiers du revenu des usines comme matière imposable, attendu que les bâtiments des fabriques sont plus sujets à dégradation et à dépérissement que les maisons particulières.

Dans laquelle des 2 espèces de maisons placera-t-on les édifices et maisons employés à un service public? Je pense que ce serait se conformer à l'esprit de la loi que de ne les imposer qu'à raison de 2 tiers du revenu. En effet, ces maisons sont des sortes d'ateliers où l'affluence des particuliers est continuelle, où les préposés au service, qui tous disposent plus ou moins de la chose commune, sont très multipliés, et où, de plus, l'œil du maître, l'œil de la propriété manque toujours. Les prisons surtout sont exposées à de continuelles dégradations, par une suite des projets d'évasion qui s'y succèdent sans cesse. Il paraît donc très juste d'assimiler les édifices employés au service public, aux ateliers des manufactures et usines; il y a parité de raisons entre les uns et les autres pour les traiter de même.

Il reste à examiner comment et par qui la cotisation de ces propriétés doit être acquittée. Pour résoudre cette question, il faut d'abord les diviser en différentes classes.

La première comprend les propriétés nationales, c'est-à-dire celles dont la jouissance est censée commune à toute la nation, et dont l'entretien est à ses frais. Telles sont les églises, cimetières de paroisses, les églises et habitations de couvent, l'hôtel des Invalides, l'école militaire, l'Arsenal, les casernes des troupes de ligne, l'Observatoire, le Panthéon, l'hôtel des Monnaies, l'école de chirurgie, la Bibliothèque, le cabinet d'histoire naturelle, les académies, les Gobelins, la Savonnerie, les hôpitaux, l'Université, les écoles de droit, les collèges, l'évêché, le collège royal, le tribunal de cassation, les prisons, les Tuileries, le Louvre, les hôtels des ministres, le Trésor national, la caisse de l'extraordinaire, l'hôtel de la régie des enregistrements, l'hôtel des payeurs de rentes, l'hôtel des fermes, le grenier à sel, l'hôtel de la ferme du tabac, le Champ-de-Mars, l'esplanade des Invalides, les boulevards, le Jardín des Plantes, le jardin de l'Arsenal, l'emplacement de la Bastille, etc.

La deuxième comprend les propriétés dont la jouissance est donnée aux départements, telles que les casernes de la gendarmerie, les tribunaux de district, les prisons, les maisons de justice et d'arrêt, etc.

La troisième comprend les propriétés dont la jouissance est à la municipalité, telle que les moulins à eau mouvants et fixes, les maisons de détention près des juges de paix, les maisons de correction, police municipale et correctionnelle, l'Hôtel-de-Ville, les comités de section, les corps de garde, les anciennes halles, la nouvelle halle aux blés, la halle aux veaux, le marché aux chevaux, la halle aux draps, la halle aux

comparer à des usines dont tous les bâtiments sont simples, strictement indispensables pour leur exploitation, la plupart de construction très légère, presque tous en bois, peu solides et encore moins commodes, avec des monuments destinés à passer à la postérité, où tout est sacrifié à un luxe d'architecture, et à une décoration ruineuse. Le Panthéon, par exemple, passe pour avoir déjà coùté plus de 20 millions; en déduisant le tiers, il resterait plus de 12 millions, dont l'intérêt à 5 0/0 offrirait 600,000 livres de matière imposable, et attirerait au cinquième une contribution de 120,000 livres par la nation.

Le Palais, s'il faut juger de la dépense qu'il a occasionnée par la durée des deniers pour livre que l'on avait imposés dans tout le ressort du ci-devant parlement de Paris, a dù coùter plus de 12 millions; en déduisant le tiers, il resterait 8 millions représentatifs de 400,000 livres de produit imposables au cinquième à 80,000 li

vres.

Les nouvelles barrières de Paris ont coûté peut-être 30 millions; en déduisant le tiers, toujours suivant le mode de M. le procureur général syndic, il resterait 20 millions, devant produire, à 5 0/0, un million de matière imposable; et ce million, taxé au cinquième, devrait une contribution de 200,000 livres. Cependant l'on met en fait qu'elles ne seraient pas louées toutes ensemble 50,000 livres.

Si nous voulions chercher sur cette proportion exagérée la contribution à obtenir pour le cabinet et jardin du roi, l'Observatoire, l'hôtel des Invalides, l'hôtel des Monnaies, l'Arsenal, la Bibliothèque, les Gobelins, le petit Châtelet, la halle aux blés, l'hôpital général, et cent autres édifices nationaux ou communaux, nous arriverions à prouver qu'entre la nation et la commune de Paris on trouverait peut-être à atteindre par cette combinaison de M. le procureur général syndic, le tiers de la somme répartible sur l'impôt foncier. Il est vrai que comme la nation aurait à supporter pour sa part peut-être 3 millions, et la commune beaucoup plus que le montant de ses sols additionnels, il faudrait en définitive rendre à la nation son déficit, et à la commune les fonds de ses dépenses, le tout par une réversion bien réelle de cet allégement idéal.

Voilà pourtant en dernière analyse le résultat de tout ce système de M. le procureur général syndic; aussi est-il forcé d'en avouer lui-même la futilité et de convenir que si le Trésor national, les départements, les districts et les municipalités, sont ainsi fictivement taxés pour les immeubles qui leur sont propres, il faudra que toutes ces parties payantes se retrouvent par des rejets et des réimpositions qui tomberont toujours sur la nation, c'est-à-dire sur les véritables contribuables.

Aussi tout le fruit qu'il en espère, comme il le dit, page 34, c'est d'avoir l'état de ces différentes propriétés, de reconnaître celles qui par vente ou par location, pourront être à l'avenir frappées de l'impôt; c'est enfin pour que les citoyens puissent connaître ceux de ces immeubles, qui aggravent inutilement leurs contributions, et surtout pour que les sols additionnels aient un principal déterminé qui devienne la base de leur produit; cette dernière considération est si subtile qu'elle passe, nous l'avouons, notre intelligence, il nous semble que cette addition d'immeubles, neutre pour l'impôt, peut bien augmenter la matière imposable; mais que

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C'est un principe que la contribution foncière étant une charge du propriétaire, et l'usufruit étant une propriété temporaire, la contribution doit être à la charge de l'usufruitier.

C'est une vérité de fait que la contribution de toute espèce de fonds qui, comme les maisons, ne produit point de fruits annuels et est habitée par son propriétaire, ne peut être payée que sur les revenus annuels tirés d'une autre source.

D'après le principe, on peut établir une règle commune à toutes les propriétés publiques et ne rapportant aucun produit, que la contribution de toute propriété publique, possédée en usufruit par quelque corps particulier, sera payée par l'usufruitier. Ainsi, par exemple, la contribution foncière d'une partie des Tuileries, doit être payée par le roi, puisqu'il en est usufruitier.

Par une conséquence de la seconde observation, quand la nation, un département, un district, une municipalité, une fabrique, un collège, jouit d'une propriété qui, par elle-même, ne rapporte pas de fruits sur lesquels la contribution puisse être acquitée, la nation, le département, le district, la municipalité, la fabrique, le couvent, le collège, propriétaire possesseur, ou simplement usufruitier, doit payer la contribution sur les revenus effectifs qu'il peut retirer d'ailleurs. Ainsi, par exemple, la nation possédant outre ses édifices servant à l'établissement public et ne produisant rien, des domaines productifs, la régie nationale qui les administre doit acquitter la contribution des édifices sur les revenus des domaines territoriaux.

Mais ces règles ne s'étendent pas à un grand nombre de cas. En effet, peu de propriétés publiques sont possédées par des usufruitiers, et toutes ne sont pas réunies dans les mains des administrations qui en jouissent avec des revenus sur lesquels la contribution puisse être acquittée. Par exemple, les départements ni les districts n'ayant aucun revenu foncier à leur disposition, ils ne peuvent acquitter, sur ces revenus qu'ils n'ont pas, la contribution foncière des édifices nationaux dont ils ont la jouissance; il peut arriver, il doit même arriver, que la nation même n'ait plus de revenus; les municipalités doivent aussi être avant peu dans le même cas; comment dans ces circonstances ou même en cas d'insuffisance des revenus fonciers pour payer la contribution, cette contribution sera-t-elle payée ?

Elle ne peut l'être que par une contribution répartie sur tous ceux qui participent à la jouissance de la chose imposée; ainsi dans la supposition dont il s'agit, la contribution des édifices nationaux serait comprise dans les dépenses de la nation et imposée sur la nation; celle des édifices départementaux, comprise dans les dépenses des départements, et imposée en sols additionnels sur les départements.

Le même principe sera suivi pour les édifices servant aux besoins d'un district, pour ceux d'une municipalité: c'est ce principe que je vous propose de fixer par un des articles du projet d'arrêté qui va passer sous vos yeux.

Ici l'on pourrait se proposer une question, on pourrait se demander sí ce n'est pas faire une chose illusoire, inutile, même onéreuse, que de cotiser à la contribution foncière les édifices

sans cette addition il y a toujours lieu à un résultat certain; car, soit qu'on obtienne en comprenant ces immeubles, 60 millions de matière imposable, mais que sans eux on n'atteigne que 50 millions, il résulte toujours, de l'une ou de l'autre hauteur, une somme fixe qui devient le régulateur de la somme répartible; et comme c'est seulement ce capital répartible qui devient la mesure du produit des sols additionnels, la matière imposable, à quelque degré qu'elle s'élève, n'influe absolument en rien sur les accessoires il y a plus de cotes soumises à la répartition; la contribution de chaque cote décroît de cet accroissement de matière; mais la somme répartible ne pouvant varier, et les sols additionnels étant indivisibles de son montant, ils ne peuvent éprouver aucune variation.

:

Un calcul que M. le procureur général syndic a perdu de vue dans ceux auxquels il s'est livré, et qui pourtant valait bien la peine d'être relevé, c'est celui du temps qu'il faut employer à vérifier, toiser, évaluer tous ces édifices nationaux et communaux, et tous les terrains des boulevards, promenades et jardins publics qu'il veut faire comprendre dans le rôle; si pour chaque édifice il faut faire la recherche de ce qu'il a coûté, ou le devis de ce qu'il coûterait, assurément nous ne croyons pas qu'on termine ce travail en un an de temps; et s'il faut attendre sa confection pour la clôture de la matrice des rôles, il ne faut pas espérer d'en avoir cette année en recouvrement: ce sera peut-être encore notre faute; il n'a pas calculé non plus toute la dépense de cet immense travail; il est pourtant aisé de prévoir qu'elle serait considérable; ce qu'il y a de bien sûr, c'est qu'elle est inutile.

nationaux, puisque leur cotisation doit être payée maintenant sur le revenu du domaine foncier qui est diminué d'autant; on pourrait dire que c'est faire entrer au Trésor public sous le titre et par voie de contribution, ce qui y serait rentré sous le titre et par la voie du revenu foncier, sans autre différence que la perte des frais d'une perception d'une recette, d'un versement inutile, et de la déperdition inséparable de plusieurs maniements successifs.

Mais les réponses des administrateurs se borneraient à dire voilà la loi qui assujettit toute propriété foncière à la contribution foncière, et à une contribution proportionnelle et uniforme. Au fond ils pourraient ajouter que cette loi est sage et nécessaire.

1o Elle a eu, entre autres objets, celui de préparer la formation d'un cadastre; elle a dû par cette raison exiger que toute propriété fût scrupuleusement inscrite dans les tableaux de la matière imposable;

2o Toute propriété nationale peut être vendue à la suite; inscrite dès à présent dans le registre de la contribution, elle ne pourra y être soustraite quand elle sera propriété particulière, et dès à présent la matière imposable sera re

connue ;

3o La cotisation est un moyen de remettre chaque année sous les yeux des contribuables la masse des objets non productifs, servant à l'établissement public, et dont ils font les frais; et de tenir toujours les esprits attentifs aux réductions possibles et aux économies praticables dans ce genre de dépenses très considérables; la cotisation excitera la régie nationale des domaines nationaux à poursuivre les fausses dépenses d'établissement public, et les faire cesser;

4o Une autre raison pour les cotiser c'est que les sols additionnels des dépenses locales, tant administratives que municipales, étant proportionnés aux propriétés locales, et devant l'être, il faut qu'il existe un principal auquel les sols additionnels puissent être attachés.

Je conclus donc, Messieurs, que les propriétés publiques, quelles qu'elles soient, doivent être cotisées; qu'elles doivent l'être, non seulement parce que la loi existe, mais encore parce que la loi est juste et utile.

Nous ne reprendrons pas, Messieurs, toutes les dispositions de l'arrêté du directoire; elles ne sont que le résultat des reproches et des principes du réquisitoire de M. le procureur général syndic, et nous croyons avoir détruit les uns et les autres; nous ne pourrions que répéter sur chaque article de cet arrêté, les contradictions que nous avons relevées et les vérités que nous avons démontrées. D'ailleurs, si les attributions dont le directoire vous a dépouillés vous sont rendues par l'Assemblée nationale, comme vous devez l'attendre de sa justice, et que la direction de l'impôt continue de vous appartenir, cet arrêté ira se confondre avec ceux que vous avez dénoncés aux législateurs qui prononceront en même temps sur le sort de tous, en fixant par une loi les limites des droits et des pouvoirs du directoire en cette partie. Si, au contraire, l'Assemblée nationale pouvait consacrer les entreprises du comité contentieux, et celle du directoire, ou que trop confiants dans un amour de paix qui depuis 18 mois n'a fait, malgré tous nos efforts, qu'accroître vos sacrifices, vous crussiez devoir composer sur les droits que la loi vous assure, alors du moins dégagés de cette responsabilité dérisoire que le département vous impose de sa seule autorité pour les opérations qu'il a seul ordonnées, dirigées, exécutées et prolongées, de manière à user le premier trimestre de l'impôt dont il vous impose la garantie; devenus les agents purement passifs de ses décisions, vous le laisserez consommer ses essais et ses erreurs, et le temps en dévoilera le résultat; heureux, s'il ne découvre pas des entraves bien préjudiciables à l'intérêt national.

Quant à nous, Messieurs, qui sommes au moment de quitter cette carrière laborieuse et difficile, qui avons, depuis 2 ans, dirigé par nos seules études cette partie importante de vos fonctions, nous avons laissé dans les registres de la municipalité trop de traces de notre zèle à justifier la confiance qu'elle nous avait accordée, pour craindre un instant qu'elle nous soit ravie par les plaintes tardives et irréfléchies du département; mais s'il pouvait rester à aucun de vous le moindre doute sur la pureté de notre conduite, nous serons toujours prêts à l'offrir au plus grand jour, et ce sera même la récompense la plus flatteuse que vous puissiez accorder à nos services, que de nous fournir cette

occasion de vous convaincre de l'immensité des travaux dont la commission a été chargée, et du courage avec lequel elle les a terminés.

Quant au département qui a si promptement oublié et rétracté les éloges qu'il nous avait cent fois donnés, nous lui répétons encore qu'il se flatterait en vain de nous voir gémir en silence de ses oppressions, et rester victimes de la calomnie sans la repousser de toutes nos forces; quoique prêts à remettre les fonctions de la commission, nous nous engageons individuellement à répliquer à tous nouveaux réquisitoires, par lesquels M. le procureur général syndic se permettrait encore de nous inculper, et nous ne cesserons d'opposer la plus juste défense que quand il cessera de manifester la plus injuste partialité.

S'il nous est permis de vous proposer un avis, ce serait, Messieurs, de demander à l'Assemblée nationale, par les comités chargés de votre adresse, que les rôles définitifs foncier et mobilier de 1791 soient mis en recouvrement, pour ne pas faire souffrir plus longtemps et l'intérêt national et l'intérêt particulier de la municipalité si vous adoptez cette opinion, nous joindrons à ce mémoire quelques observations sur la forme de l'arrêté de ces rôles.

Paris, le 25 avril 1792.

TIRON,

Ex-lieutenant de maire et officier municipal, commissaire des impositions.

CHARON,

Officier municipal, commissaire des impositions.

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Officier municipal, commissaire Ex-officier municipal, commis

des impositions.

LESGUILLIER,

Officier municipal, administra-
teur-commissaire des imposi-

tions.

saire des impositions.

LE VASSEUR,

Officier municipal, administrateur commissaire des imposi

tions

Nota. Comme il eût été difficile de saisir, par une simple lecture, tous les détails de cette réponse, nous l'avons, Messieurs, fait imprimer à nos frais pour vous être distribuée, et vous mettre en état d'apprécier avec les reproches du directoire notre justification; elle devient même un nouveau compte de notre gestion, quoique nous l'ayons déjà rendu par dix rapports différents. Vous ordonnerez si nous devons rester chargés de cette dépense, ou si elle devra être supportée par la commune dont nous n'avons fait ici que défendre les droits.

DEUXIÈME ANNEXE (1)

A LA SÉANCE DE L'ASSEMBLÉE NATIONALE LÉGIS-
LATIVE DU MERCREDI 16 JUIN 1792, AU SOIR.

PROJET D'ORGANISATION GÉNÉRALE DES PONTS ET CHAUSSÉES, lu par DEVARAIGNE, au comité d'agriculture, le 9 mai 1792, l'an IVe de la liberté (2).

Messieurs, de toutes les parties qui composent le département du ministre de l'intérieur, la plus importante, sans contredit, est l'administration des ponts et chaussées. Elle se subdivise en trois sections: la première, dite des ponts et chaussées, comprend tous les projets de grandes routes, l'entretien de celles qui sont perfectionnées, et la construction des ponts et ponceaux nécessaires au passage des fleuves, rivières et ruisseaux. La seconde section comprend les canaux, les turcies et levées. les ponts-aqueducs, les écluses, les déversoirs et les autres ouvrages d'art que la navigation commande. Enfin la troisième section comprend les ports de commerce dont les constructions demandent des études particulières. 354 ingénieurs de différents grades, sont dispersés dans les 83 départements, pour la direction de ces travaux. A tant d'occupations, qui exigent des talents et de l'expérience, se réunissent encore une multitude d'ouvrages publics, que les corps administratifs sont autorisés à mettre sous la surveillance de ces mêmes ingénieurs. On doit donc regarder

(1) Voy. ci-dessus, même séance, p. 284, la discussion sur les ponts et chaussées.

(2) Bibliothèque nationale Assemblée législative, Administration, Bb.

l'organisation des ponts et chaussées comme une partie très essentielle de l'administration générale; et si l'Assemblée nationale n'y donnait toute son attention, elle perdrait bientôt le fruit d'un établissement qui a immortalisé un ministre, et qui honore la vieillesse d'un grand homme.

L'Assemblée constituante paraît cependant n'avoir pas assez soigné l'organisation des ponts et chaussées, soit qu'elle ait méconnu l'importance de cette partie, soit qu'elle ait puisé dans une mauvaise source les éclaircissements qui ont servi de base à ses décrets des 19 janvier et 18 août 1791.

L'imperfection de la première de ces lois a été reconnue par l'Assemblée constituante ellemême, puisque l'article 4 du dernier décret révoque plusieurs dispositions du décret précédent; la seconde loi est également imparfaite, puisqu'aucun article n'explique la composition de l'administration centrale des ponts et chaussées, qui provoquera toutes les dispositions relatives à l'examen des projets, à l'exécution des travaux, à l'emploi des fonds que la nation y destine, à la distribution des ingénieurs, à leur avancement en grade et à l'établissement de l'école qui doit former des successeurs à ces artistes. Tant d'intérêts publics n'ont point été réglés; la loi du 18 août n'effleure pas même ces grandes questions, L'administration centrale des ponts et chaussées ne paraît être jusqu'à présent qu'un établissement vague et concentré dans la seule volonté du ministre de l'intérieur, ou d'un délégué que l'Assemblée constituante a déjà rejeté par son décret du 10 avril 1791, et que l'Assemblée nationale n'a point encore avoué. Or, un seul agent ne saurait former une administration centrale, car cette dénomination indique évidemmement un centre où aboutis

sent des lumières et des connaissances. L'administration centrale des ponts et chaussées ne peut donc être autre chose qu'un comité d'artistes qui, par leur expérience et leurs observations, éclairent la responsabilité du ministre; si cette administration était composée d'autres éléments, elle ne serait plus dans la main d'un ministre. qu'une occasion de faveur, d'intrigue et de dépense inutile.

La loi du 18 août n'a fixé que provisoirement l'emplacement de l'école.

Pour remédier à ces omissions et imperfections, je propose un code général des ponts et chaussées, où les principaux articles des décrets des 19 janvier et 18 mars 1791 sont conservés avec des amendements et additions qui fixeront les rapports des divers agents de cette vaste administration.

Je diviserai mon travail en sept titres : Le premier titre traitera de la composition de l'administration centrale;

Le deuxième titre fixera les principes de la comptabilité;

Le titre troisième développera les fonctions, le traitement et le mode d'avancement des ingénieurs de tout grade.

Le quatrième titre traitera de l'école des ponts et chaussées, en déterminant l'instruction et l'avancement des élèves;

Le cinquième titre expliquera l'objet des assemblées des ponts et chaussées;

Le sixième titre règlera le mode d'exécution des travaux d'entretien et de nouvelle construction, et des ouvrages d'art de toute espèce;

Le septième et dernier titre fixera les pensions réservées aux ingénieurs qui ont bien servi la patrie.

De l'administration centrale des ponts et chaussées.

Je considère l'administration centrale des ponts et chaussées, comme un comité permanent d'artistes parvenus aux premiers grades par leurs talents par une longue expérience, et par le choix du roi. A ce centre de lumières aboutira la responsabilité du ministre, au lieu de reposer sur un agent étranger aux arts.

Je révoque l'emplacement provisoire de l'école, rue Saint-Lazare, hors de la barrière de Clichy, parce que ce local, proscrit par les articles 11 des deux décrets que j'ai cités, est onéreux à la nation; parce qu'il éloigne de l'instruction publique les élèves; parce qu'il est incommode pour les assemblées des ingénieurs, et parce qu'enfin les rapports qui subsistent entre le ministre et les fonctionnaires publics et les bureaux, l'école et l'administration centrale des ponts et chaussées souffrent d'un tel éloignement.

Je transfère au Louvre ces différents établissements, pour rapprocher les ingénieurs de la galerie destinée aux arts, par décret du 26 mai 1791; pour placer l'école à la portée de l'instruction publique; pour mettre l'administration centrale sous la main du ministre, et pour faciliter la correspondance avec les fonctionnaires publics. Le Louvre, consacré à la réunion de tous les genres d'instruction, nécessite le rapprochement de l'école des ponts et chaussées; et ce vaste édifice s'achèvera enfin pour remplir une grande destination.

De la comptabilité.

La comptabilité, dont les lois précédentes n'ont

point établi les bases, sera divisée en trois parties correspondantes aux trois sections des travaux publics, les routes, les canaux et les ports de commerce. L'authenticité des pièces comptables est déterminée par de sages précautions qui écarteront toute incertitude ou ambiguité dans le montant des épreuves.

Des fonctions, de l'avancement, du nombre et des appointements des ingénieurs.

La promotion aux grades, qui, dans la main d'un seul administrateur central, serait presque toujours le prix de l'intrigue, deviendra la récompense des talents, par le choix réfléchi d'une administration éclairée.

En fixant le nombre des ingénieurs en proportion avec l'étendue des travaux de chaque département, j'ai ôté aux corps administratifs la faculté abusive de nommer ici plus d'ingénieurs que réclamait le service, et ailleurs d'en demander moins.

J'ai retiré aux directeurs de départements et de districts le droit injuste de faire changer ou révoquer les ingénieurs. Quel est, en effet, l'artiste qui se soumettra aux caprices de ces autorités amovibles, dont la multiplicité, la rivalité et la méfiance exerceraient contre lui une inquisition perpétuelle et détourneraient au besoin pressant de sa défense les moments qu'il n'aurait consacrés qu'au travail. Un changement de résidence est pour l'ingénieur, père de famille, l'équivalent de la ruine, et pour le service, un échec; car la connaissance des localités assure la bonté des projets et facilite la surveillance des travaux. D'ailleurs, le génie veut un certain effort; il s'éteint sous le despotisme, il se vivifie par la liberté : la liberté et l'égalité, garanties par la Constitution à tous les Français, ne seraient-elles donc pour l'ingénieur qu'une promesse avortée devant des juges, la plupart si incompétents en matière d'art! Non, l'on n'avilira point des fonctionnaires si utiles à la nation, et leur modestie ne deviendra point un prétexte d'asservissement. Accordons à ces artistes de la considération, mettonsles en rapport décent avec les corps administratifs, ou bien nous verrions disparaître des grands travaux de l'Empire, ces ingénieurs qui disputeraient à leur tour aux administrations, un pouvoir temporaire dont elles auraient abusé contre eux.

Il n'appartient qu'au Corps législatif de révoquer, après vérification des délits, les ingénieurs qui auraient abusé de leurs fonctions; il ne convient qu'à l'administration centrale d'ordonner le déplacement pour le bien du service.

Je propose aussi d'améliorer raisonnablement le traitement des ingénieurs et de former trois classes d'ingénieurs ordinaires par rang d'ancienneté, car il paraît souverainement injuste de n'accorder à celui qui a 10 et 20 ans de service dans ce grade, que les mêmes appointements d'un débutant, et de traiter le premier ingénieur et les inspecteurs généraux avec plus de parcimonie que le premier commis des ponts et chaussées.

On doit accorder aux ingénieurs en chef des frais de bureaux, puisqu'il leur faut nécessairement à chacun un copiste et un dessinateur à gages, et que cet établissement indispensable leur occasionne des frais de loyer, de chauffage, de lumière et de fournitures de toute espèce. En laissant cet objet à la disposition des départe

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