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1822.

Fuite générale

royalistes.

chef de partisans le plus habile, joignait l'a-
vantage de conduire des troupes disciplinées.
D'Érolès se présenta pour reprendre Castel-
follit. Mina l'attendait dans une forte po-
sition, et lança sur lui une cavalerie qui
mit tout son corps en déroute. Les meilleurs
soldats de d'Érolès périrent dans cette ren-
contre. Mina reprit Balaguer, bloqua Urgel, le
principal point d'appui des royalistes; et, avec
une ardeur que ne
que ne ralentissaient pas
pas les ri-
gueurs de l'hiver, il se porta sur le Trapiste
qu'il battit et sépara de son lieutenant Bes-
sières, ensuite sur Quésada qui se vit suc-
cessivement chassé de tous les points qu'il
occupait dans la Navarre. Ce fut là qu'on
vit deux des frères O'Donnel, combattant
dans deux partis contraires, se chercher
avec rage dans la mêlée. Ils eurent le bon-
heur de ne pouvoir s'atteindre.

La régence d'Urgel avait eu l'humiliation de des guérillas quitter cette ville, et c'était maintenant de Puicerda, l'extrême frontière de l'Espagne, qu'elle prétendait donner ses lois à ce royaume. Bientôt il n'y eut plus d'autre asile pour les royalistes espagnols que la France, dont ils avaient déjà reçu les secours clandestins. Les soins de l'hospitalité allèrent jusqu'à leur fournir des armes. Le souvenir des guerres de la

Vendée inspirait pour eux un vif intérêt aux royalistes, quoiqu'ils eussent mal soutenu le parallèle avec les intrépides paysans et les héroïques chevaliers du Bocage. Le baron d'Érolès avait eu avec eux le triste rapport d'avoir vu brûler son magnifique château et ses vastes domaines. C'était un sacrifice qu'il avait fait d'avance en s'engageant dans la guerre civile. Quésada vint à Paris raconter ses malheurs plutôt que ses exploits. D'Erolès qui le suivit de près dans cette capitale, inspira plus d'intérêt. Quant au Trapiste, il se réfugia pour quelque temps dans un couvent de son ordre rétabli à Toulouse. L'empressement était extrême de voir ce mystérieux personnage. Ses dehors répondaient mal au portrait que l'imagination avait pu s'en tracer. Les traits de ce moine guerrier étaient communs et sombres. Dans les exercices de piété qu'il partageait avec ses frères, il tâchait de se distinguer par des démonstrations de ferveur qui paraissaient exagérées. Le silence sévère de la Trape fut alors utile à sa renommée. Tout le prestige allait tomber, s'il avait eu occasion de montrer la fougue grossière de son imagination, les emportemens cruels de son intolérance, enfin tout ce qui dénote la folie d'un solitaire qui veut con

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duire le siècle. Le compagnon de sa triste gloire dans les guerres civiles, le curé Mérino, avait été également battu dans la Castille, et le nom de brigands qu'on prodigue dans les guerres de parti, s'appliquait parfaitement aux restes honteux de sa troupe pillarde. Barcelone oubliait le long deuil causé par la fièvre jaune pour célébrer les triomphes de Mina. La terreur joignait ses hommages à ceux de l'enthousiasme patriotique. Après des rigueurs excessives, Mina fit publier une amnistie dont profitèrent et abusèrent bientôt les faibles restes de l'armée de la Foi. Du fond de sa retraite, le Trapiste eut la douleur d'apprendre la reprise de la Seo-d'Urgel où il avait déployé son intrépidité. Enfin Puicerda, ce dernier et faible refuge de la régence, lui fut enlevé.

Mais au centre de l'Espagne le pacte fait Imprudente avec les modérés dans la nuit du 7 juillet les constitutionnels. allait se rompant chaque jour. Le procureur

persécution contre

fiscal, le colonel Paradès, chargé d'instruire sur les événemens de cette journée, avait osé lancer un mandat d'amener contre celui même auquel la reconnaissance publique avait rapporté cette grande victoire, le général Morillo, et il avait usé de la même rigueur contre sept anciens ministres à la

fois; c'étaient Martinez de la Rosa et ses collègues : le motif était qu'ils avaient négocié non-seulement avec le roi, mais avec les gar des rebelles, et leur avaient offert des changemens à la constitution, ce que chacun de ces illustres exilés nie aujourd'hui avec la même fermeté qu'ils s'en défendaient alors. Comme les cortès avaient seuls le droit de déférer les ministres à la justice, le mandat fut cassé; mais un club dont la puissance paraissait s'élever au-dessus de celle des cortès, s'obstinait à faire une ingrate confusion des absolutistes et des modérés. La plupart de ces derniers comprirent que leur perte, retardée par l'imminence du danger, serait le premier gage de la victoire, et, chaque jour, le club landaburien leur en répétait l'imprudente menace. On fit bien plus; le procureur fiscal, le colonel Paradès, instruisit contre le frère du roi, don Carlos, et osa rendre un jugement qui condamnait ce prince aux galères. Cette procédure fut encore cassée; mais cette horrible ignominie jetée

Bourbon faisait en France, parmi les royalistes, l'effet d'un cri aux armes. Le club landaburien trop fidèle copiste de notre révolution voulut se préparer à la guerre par une loi de suspects. Appuyée avec feu par des

1822.

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Supplice du

orateurs qui en reconnaissaient l'horrible violence, mais en déclaraient l'absolue nécesşité, elle fut combattue par cet Augustin Arguellès, qui connaissait tout le poids des fers imposés par la tyrannie. Sa voix prévalut encore, et cette proposition fut écartée par la majorité.

Depuis long-temps l'horreur des constitugénéral Ellio. tionnels s'était portée sur. le général Ellio qui, l'un des premiers, avait appelé le retour de l'absolutisme, et réprimé avec une grande sévérité plus d'une sédition militaire. Prisonnier à Valence, on l'avait arbitrairement privé du bienfait de la loi d'amnistie. Chaque jour, depuis deux ans, on appelait sa condamnation que cette même loi devait rendre, impossible. Les royalistes ne perdaient pas de vue un chef si important. Pour le recouvrer, ils séduisirent une vingtaine de soldats d'un régiment d'artillerie qui se soulevèrent au milieu de Valence, et reçurent le renfort convenu d'une soixantaine de royalistes. L'audace leur tint lieu du nombre. Ils marchèrent sur la citadelle. Ellio, du fond du cachot, put les entendre répéter son nom, le proclamer leur chef, s'approcher, combattre avec furie; enfin il les vit pénétrer jusqu'à lui. Soit que sa résignation

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