éternelles, et l'harmonie des brises, et les échos į son père immortel : voilà les cinquante filles qui qui répètent les stances de l'Arioste et du Tasse, encore aujourd'hui ne font qu'une mer de délices. Les chants des néréides n'ont point cessé! On explique ce mythe par l'existence réelle de quelque prince ami de la paix, débonnaire, qui, par un noble amour de l'humanité seulement, en faveur du commerce et non de la guerre, aurait fait faire un grand pas à l'art naissant de la navigation, et dont les navigateurs regardaient les conseils comme les oracles d'un dieu. L'attitude et les attributs du bon Nérée étaient modestes comme lui. Il portait néanmoins une robe vert de mer ainsi que le fier Neptune, mais il se contentait de la conque d'un triton, espèce de trompette avec laquelle, comme un berger, il appelait les monstres marins d'un bout de son empire à l'autre : une pierre antique le représente ainsi. A peine son culte passa-t-il dans la grande Grèce : s'il eut chez elle quelques autels, on ne sache pas qu'il y ait compté un seul temple; mais les poëtes de l'Ausonie ne l'abandonnèrent pas; ils continuèrent à chanter ses vertus et les délices de son empire. DENNE-BARON. furent engendrées de Nérée l'irréprochable, et leurs actions aussi furent sans reproche. » Ces noms, au nombre de cinquante, composent vingt-cinq vers dans la Théogonie: c'est une période musicale, tant ils ont de mélodie; leurs significations toutes maritimes sont charmantes; les voilà selon l'ordre des noms, elles donneront une idée du système et du génie poétique des anciens jours. Ces néréides s'appelleraient, en français: Celle qui prime, la Tempérée, Celle qui sauve, Celle qui bat la rive, la Généreuse, la Posée, le Sérénité, l'Azurée, la Vague rapide, la Grotte, la Légère, la Fleurissante, la Gracieuse, la Mielleuse, la Bonne rade, l'Admirable, la Déesse à tous, l'Aimable, la douce Querelleuse, Celle qui donne, la Première, Celle qui soulève, la Puissante, l'Insulaire, la Riveraine, la Soigneuse, Celle qui fait don, la Lactée, Celle qui voit tout, la Légère à cheval, l'Intelligente à cheval (cela s'entend des chevaux marins), l'Attente des flots, Celle qui apaise les vagues, le Flot, la Rive, le Soin de la mer, l'Héritière azurée, Celle qui traverse la mer, Celle qui parle avee douceur, Celle qui parle bien, le Soin des peuples, Celle qui a beaucoup, la Science de soi, la Reine qui délie, la douce Brebis, la Sablonneuse, Celle qui dompte les chevaux, la bonne Traversée, l'équitable, la Prévoyante, l'Irréprochable. Ne dirait-on pas de nos noms pittoresques de vaisseaux? On voit, par ces appellations de bon augure, quels étaient les offices des néréides. Toujours bonnes, toujours riantes, elles portaient secours aux victimes du furieux Neptune. Elles soulevaient les navires engagés dans les syrtes, elles les poussaient, elles les tournaient au vent propice, elles soutenaient sur les vagues les naufragés, elles détournaient la proue des écueils. Les matelots grecs tendaient vers elles leurs bras suppliants; aujourd'hui, dans les périls, ils lèvent les yeux au ciel et prient, en place de ces profanes sœurs, la Pagania, la Toute-Sainte, la vierge Marie. Du miel, du lait et de l'huile, emblème de leur douceur, étaient les offrandes que préféraient ces charmantes filles; quelquefois, mais rarement, le sang d'un chevreau rougissait leurs autels, élevés ordinairement au bord des flots, où elles avaient des bois sacrés. Pausanias l'historiographe dit, dans ses Corinthiaques, avoir vu à Gabala un temple célèbre qui leur était consacré. Des reines insu NÉRÉIDES. Ces filles de Nérée et de Doris étaient au nombre de 50, selon Hésiode, de 50 selon Homère. Apollodore les réduit au petit nombre de quatre. Nous citerons seulement ici le dénombrement que fait le poëte d'Ascra du chœur des Néréides; nous traduirons mot pour mot cette naïve poésie dont le parfum a traversé trente siècles. «Or, de Nérée et de Doris à la belle chevelure, la fille du fleuve Océan si reculé, furent engendrées dans la mer stérile les plus aimables filles parmi les déesses, et Proto, et Eucrate, et Sao, et Amphitrite, et Eudora, et Thétis, et Galène, et Glaucé, Cymothoé, et Spio, et Thoé, et l'aimable Thalie, et la gracieuse Mélité, et Euliméné, et Agavé, et Pasithée, et Érato, et Eunicé, aux coudes de rose, et Doto, et Proto, et Pherousa, et Dynamène, et Nésée, et Actée, et Protomédie, Doris et Panope, et la belle Galatée, et l'aimable Hippothoé, et Hipponoé aux coudes de rose, et Cymodoce, qui, dans la mer obscure, avec Cymatolége et avec Amphitrite, aux talons charmants, apaise facilement les flots et les haleines des vents impétueux; et Cymo, et Eione, et Halimède, qui porte une belle couronne, et l'enjouée Glauconome, et Pontoporia, et Liagore, et Évagore, et Laomédie, et Polynome, et Autonoé, et Lysianossa, et Évarné, d'un si aimable naturel et d'une irréprochable | laires ou régnant sur les côtes usurpèrent le titre beauté, et Psamathe, au corps si gracieux, et la divine Ménippé, et Néso, et Eupompe, et Thémisto, et Pronoé, et Nemertès, qui a l'âme de de néréides. On donnait le nom de naïades et de sirènes à des poissons qui avaient comme un buste de femme, selon Pline. C'est une espèce de phoque à large et belle poitrine, et qui a des yeux à peu près semblables aux yeux humains, très-grands et très-expressifs. J'en ai vu un vivant dans l'eau douce à Paris. Des médailles romaines représentent les néréides, femmes par le haut et poissons par l'extrémité. En général, les monuments antiques nous les offrent jeunes, souriantes, tenant une branche de corail, riche bouquet des mers que l'air rend semblable à la pourpre, ayant des perles dans les cheveux, et montées sur quelques monstres marins qui, par leurs formes bizarres, contrastent avec leurs graces de jeunes filles. Quelquefois, elles sont assises sur un dauphin, ou sur un cheval de mer, ou sur un taureau à queue de poisson, qu'elles flattent de leurs mains blanches. Pline a vu un beau bas-relief en marbre, œuvre de Scopas, où le chœur des filles de Nérée semblaient faire écumer les ondes. Sur leurs épaules voltigeait ordinairement une draperie légère, couleur des vagues en repos. Ainsi est vêtue une belle statue d'Amphitrite tirée des ruines de la villa Antonin, en Italie. Cette néréide tient un gouvernail dont elle presse le dos écailleux d'un monstre marin couché paisiblement à ses pieds. Un rostre ou éperon de vaisseau sort de la base de cette statue. Quelquefois aussi les filles de Nérée tenaient d'une main le trident, de l'autre un dauphin, ou une victoire, ou une couronne. Les précieuses fresques d'Herculanum nous offrent trois de ces divinités subalternes dont l'imagination riante des Grecs avaient égayé leur archipel. DENNE-BARON. NÉRÉIDÉES. Nereideæ. Ordre premier de la classe des annélides, dans la méthode de Savigny (Systèmes des annél., p. 5 et 7) qui lui donne pour caractères distinctifs: des soies pour la locomotion; des pieds pourvus de soies rétractiles subulées; point de soies rétractiles à crochets; une tête distincte, munie d'yeux et d'antennes; une trompe protractile presque toujours armée de mâchoires. Les néréidées diffèrent essentiellement de l'ordre des hirudinées par la présence de soies pour la locomotion; elles partagent ce caractère avec les serpulées et les lombricines; mais elles se distinguent essentiellement de ces deux ordres par l'absence de soies rétractiles à crochets et par leur tête distincte, munie d'yeux et d'antennes. Cet ordre, le plus nombreux de la classe des annélides, renferme plusieurs familles dont on va présenter le tableau, après avoir fait connaître d'une manière plus complète les caractères distinctifs qui viennent d'être mentionnés. Savigny, dont il convient de suivre la méthode, parce qu'il est le premier et jusqu'à présent le seul auteur qui ait étudié avec précision l'organisation extérieure des annélides, a reconnu aux annélides néréidées: 1o une tête, 2o une trompe ou la bouche, 5o le corps proprement dit et les appendices. La tête consiste en un petit renflement antérieur et supérieur, sans articulation mobile; elle supporte les antennes et les yeux. Les antennes sont de trois sortes et au nombre de cinq : deux extérieures, deux mitoyennes et une impaire; elles existent simultanément ou séparément. Elles sont plus ou moins rétractiles, et plus ou moins sensiblement articulées. L'antenne impaire est toujours plus voisine du premier anneau du corps que les deux autres qui s'en éloignent ou s'en rapprochent plus ou moins. Les yeux, dont le nombre varie de deux à quatre, sont toujours placés derrière les antennes, et entre celles-ci et le corps. La trompe est composée d'un seul anneau ou de deux anneaux distincts; dans l'état de repos elle est retirée dans le corps; mais l'animal, lorsqu'il veut s'en servir, la fait saillir en la déroulant. Cette trompe, qui est charnue, constitue essentiellement la bouche; elle est presque toujours armée de mâchoires. Tantôt elle est garnie de tentacules, et tantôt elle est nue. Les mâchoires, toujours placées à l'orifice de la trompe, sont au nombre de sept ou de neuf, articulées les unes au-dessus des autres, les deux rangs étant supportés par une double tige, sans compter deux pièces plus simples, cornées ou la lèvre inférieure. Les tentacules sont inarticulés, contractiles, épars sur la trompe ou disposés en couronne à son orifice. Le corps se divise en anneaux ou segments qui portent chacun une paire de pieds, à laquelle se trouve communément associée une paire de branchies. Le premier segment, seul ou réuni à quelques-uns des suivants, forme souvent un anneau plus grand que les autres, plus apparent que la tête, et qu'on a pu facilement confondre avec elle. Le dernier segment offre un anus plissé, tourné en dessus. Les pieds se subdivisent généralement en deux rames : l'une supérieure et dorsale, l'autre inférieure ou ventrale; cette distinction n'est pas toujours tellement tranchée qu'il soit facile, dans tous les cas, de la reconnaître; la rame ventrale est la plus saillante et la mieux organisée pour le mouvement progressif. Un examen plus attentif permet de distinguer à chaque rame deux autres parties: les cirres et les soies. Les cirres sont des filets tubuleux, subarticulés communė pas peu contribué à faire prendre les premiers segments du corps pour la tête ou pour une portion de la tête. La dernière paire de pieds constitue par une transformation analogue les styles ou longs filets qui accompagnent l'anus, et ter ment rétractiles, fort analogues aux antennes; ce sont les antennes du corps, comme l'a dit ingénieusement Savigny. De même qu'il y a deux rames, il existe deux sortes de cirres: les cirres supérieurs ou les cirres de la rame dorsale, et les cirres inférieurs ou les cirres de la rame ven-minent ordinairement le corps. Enfin, certaines paires de pieds semblent parfois privées de cirres supérieurs; c'est sur les espèces où cette absence a lieu que se manifeste la présence des élytres ou écailles dorsales; appendices propres à une seule famille (les aphrodites), et qui quelquefois manquent eux-mêmes. trale. Les premiers sont constamment plus longs que les seconds. Les soies sont des parties trèsimportantes de la rame; elles traversent les fibres de la peau, et pénètrent avec leurs fourreaux dans l'intérieur du corps où sont fixés les muscles destinés à les recevoir. Savigny les nomme soies subulées, setæ subulatæ, ou simplement soies, setæ. Il en distingue deux sortes, les soies proprement dites et les acicules. Les soies proprement dites (festuca), toujours grêles et nombreuses, sont rassemblées par rangs complexes ou par faisceaux qui ont chacun leur gaîne propre, et sortent des côtés ou du sommet de chaque rame. La rame ventrale n'a communément qu'un seul de ces rangs ou de ces faisceaux. La rame dorsale en a souvent deux et quelquefois davantage. Quant à la forme particulière des soies, elles sont cylindriques ou prismatiques, aplaties, droites ou légèrement courbées, et presque toujours rétrécies sensiblement de la base au sommet; vers le sommet, quelquesunes ont une petite dent et paraissent fourchues, d'autres sont légèrement dilatées et garnies d'aspérités: il y en a même qui ont la pointe réfléchie, ou courbée ou torse, surmontée d'une arête ou d'une petite lame mobile; toutefois la plupart l'ont droite et simplement aiguë. Il est rare que leur intérieur soit fistuleux: presque toutes sont solides, fermes et roides; cependant, il en existe qui sont fines et flexibles comme les cheveux. Les acicules (aciculi) sont des soies plus grosses que les autres, droites, coniques, très-aiguës, contenues dans un fourreau dont l'orifice particulier se reconnaît à sa saillie. Les acicules se distinguent encore par leur couleur brune, noire ou différente de celle des autres soies auxquelles ils sont associés. Quelques genres en manquent, et quand ils existent, on en trouve rarement | chaque anneau, entre les cœcums de l'estomac, On a vu qu'à chaque paire de pieds se trouvait communément associée une paire de branchies. Ces branchies varient beaucoup dans leur étendue et leur configuration. Elles sont distribuées sur les côtés du corps, une à chaque pied, qui quelquefois semble subdivisée en plusieurs autres. Elles manquent communément près de la tête et de l'anus, et toujours elles y sont moins développées qu'au milieu du corps; elles sont aussi plus ou moins rouges dans l'état de vie. Ces branchies ne sont pas toujours distinctes : quelquefois les vaisseaux semblent pénétrer dans les cirres et les convertir en organes respiratoires; quelquefois ils s'arrêtent et rampent à la base des rames. Savigny ne s'est guère occupé que de l'organisation extérieure de ces animaux. Blainville a présenté quelques observations sur leur anatomie. L'œsophage est assez étroit; il reçoit l'insertion de deux sortes de glandes salivaires assez longues, un peu entortillées. L'estomac est large, quelquefois rétréci et comme étranglé vers la jonction de chaque segment, de manière à constituer autant de lacunes. La circulation lui a paru très-simple. Il croit qu'il existe une veine ventrale recevant le sang qui vient des branchies, et le versant dans une artère dorsale, dont il est chassé et refoulé dans toutes les parties du corps. Il ne dit pas comment le sang qui a servi à la nutrition revient aux branchies. Les ovaires consisteraient, selon lui, en utricules blanchâtres granuleuses, qui se trouvent aux côtés de plus d'un à chaque rame ou à chaque faisceau et qui ont leur orifice à la base des appendices; Savigny partage l'ordre des néréidées en plu- | cher et s'unir à la moelle épinière ou au cerveau. sieurs familles, et le divise de la manière sui- Mais le côté vraiment merveilleux de cette disvante: position des nerfs, c'est qu'un si petit nombre † Branchies en forme de petites crêtes, ou de d'instruments accomplissent tant d'actes diverpetites lames simples, ou de languettes, ou de sifiés, conservent constamment dans leurs foncfilets pectinés tout au plus d'un côté; quelque- tions l'ordre le plus parfait. Ils ont beau s'éparfois ne faisant point saillie et pouvant passer piller dans des organes souvent dissemblables, pour absolument nulles. Des acicules. beau s'unir entre eux et s'entremêler jusqu'à la Familles : les APHRODITES, les NÉRÉIDES, les confusion avec les filets d'autres nerfs; bien qu'il EUNICES. 나 Branchies en forme de feuilles très-compliquées, ou de houppes, ou d'arbuscules trèsrameux, toujours grandes et très-apparentes. Point d'acicules. Famille: les AMPHINOMES. paraisse exister dans leurs mailles mystérieuses un courant pour la sensation et un courant pour les mouvements volontaires, on ne voit jamais ni désordre ni incertitude dans tant d'actes et de rapports partout si compliqués. La soudaineté et la précision, voilà les principaux caractères des actes nerveux. Si maintenant vous demandez de quelle nature est ce commerce universel des nerfs avec les organes et des nerfs entre eux, sans doute on devra répondre avec la réserve commandée par un tel sujet. Cependant, pour être moins manifeste, le but de toutes ces con NERFS, SYSTÈME NERVEUX. Les nerfs sont les organes du sentiment. Ce sont des cordons blanchatres, mous et pulpeux, qui se répandent et se ramifient dans chaque partie du corps, et qui tiennent attachés à la moelle épinière ou au cerveau. Quand on réfléchit qu'il n'y a pour tout le corps humain que 42 paires de nerfs, et qu'en-nexions des nerfs et du cerveau n'en est pas suite on envisage à combien de fonctions ces nerfs président, combien d'organes ils tiennent enchaînés pour n'en former qu'un tout, qu'un individu, dans l'impossibilité où l'on est de pénétrer les secrets de la nature, on se borne à admirer sa puissance. Quatre-vingt-quatre nerfs! el ce nombre suffit à toutes les sensations comme à tous les mouvements; et c'en est assez pour mettre en jeu toutes les fonctions, pour donner l'unité et l'harmonie à des rouages innombrables; assez, dis-je, pour éclairer l'intelligence et pour obéir à tous les commandements de la volonté; assez pour établir un juste accord entre le physique et le moral de l'homme, et pour mettre Thomme lui-même en communication avec l'univers! - Encore, de ces 42 paires de nerfs, y en a-t-il quatre paires pour l'œil, pour l'œil et ses muscles; trois presque entières pour la langue, deux pour les muscles et pour la peau de la face, deux autres pour les sens de l'ouïe et de l'odorat; en tout, dix paires pour la tête, ce qui réduit à 32 paires ou à 64 le nombre des nerfs destinés au reste du corps. Nous remarquons à cette occasion que le nombre des nerfs paraît plutôt proportionné à l'énergie des mouvements qu'à la vivacité des sensations: ainsi, le nez et l'oreille, qui sont immobiles, n'en ont qu'une paire chacun ; et les yeux, sur les 8 nerfs qu'ils reçoivent, n'en gardent que deux pour la sensation de la vue. - Ces 84 nerfs se subdivisent en des milliers de filets nerveux, dont le vaste réseau embrasse le corps, après l'avoir de toute part pénétré, et tous ces troncs nerveux vont s'atta moins concevable. Outre les sensations et l'intelligence, dont le système nerveux fournit seul tous les instruments; outre les mouvements, dont il est l'excitateur; outre la volonté, dont lui seul transmet les ordres; outre les expressions qu'il prête aux passions et à la pensée, en sollicitant la parole, les gestes et la physionomie, outre ces différentes attributions des nerfs, il faut bien que quelque chose tienne tous les organes enchaînés les uns aux autres, pour que de tant de parties diversifiées résulte un ensemble individuel où tout conspire au même but, où tout tend à l'unité. Or, ce que nous savons des nerfs nous les montre propres à cette grande destination, dont tous les autres organes paraissent formellement incapables.-Disons toutefois qu'indépendamment de ces 84 nerfs qui s'unissent au cerveau ou à la moelle épinière, il existe au dedans de nous un autre grand nerf très-complexe, qui porte le nom de grand sympathique. Ce dernier nerf est plus grand, plus compliqué dans ses ramifications, moins blanc et moins nacré, plus noueux, plus plexueux, et aussi plus irrégulier que les autres nerfs. Il est en outre plus insensible qu'eux, et ses nombreux filets, partout joints aux leurs, se répandent presque exclusivement autour des artères, et, avec elle et par leur moyen, dans ceux de nos organes sur lesquels la volonté ne paraît avoir aucun empire. On sait que ce nerf communique dans le crâne, autour de l'artère carotide interne, avec des filets échappés de la be et de la 6o paires des nerfs cérébraux; on sait qu'au bas en paraît être le foyer essentiel ou principe vital. - Il est bien probable que c'est au moyen de ce nerf que nous ressentons le besoin d'aliment, les impressions de la faim et de la soif, le sentiment pénible de certains mouvements internes et de beaucoup de douleurs, telles que les coli du trone il s'anastomose en arcade avec ses propres rameaux, tandis que le cerveau s'interpose entre ses premiers filets supérieurs. Ces anastomoses si singulières nous aident à expliquer pourquoi les maux des yeux et du cerveau donnent lieu à des vomissements et font perdre l'appétit, et pourquoi les maladies du foie et duques, les nausées, les spasmes hystériques, etc. Nous sommes un peu plus savants quant aux 84 nerfs qui viennent du cerveau ou de la moelle épinière. Voici ce que nous savons d'essentiel à leur sujet: 1o tous sont constants dans tous les hommes, et toujours parfaitement réguliers et symétriquement disposés à droite et à gauche. 2o Certains, comme l'optique, l'auditif et l'olfactif, ne servent qu'à la vue, à l'ouïe et à l'odorat; mais ceux qui servent au goût et au toucher sont en même temps excitateurs du mouvement. Tout ce qu'on a dit des nerfs de la sensation, qu'on prétendait être distincts de ceux du mouvement volontaire, est purement hypothétique. Tous les nerfs de l'échine, la racine postérieure comme l'antérieure, se distribuent également dans les muscles et dans la peau. 3o Ceux qui ventre produisent des maux de tête, la migraine, la tristesse et l'hypochondrie. Tissot surtout a fait à ce sujet des supputations à perte de vue. Le principal renflement du nerf grand sympathique, autrement dit le ganglion semi-lunaire, est placé dans le ventre au-dessous du diaphragme, et les filets qui émanent de ce renflement s'unissent et concourent à plusieurs autres renflements des ganglions, ainsi qu'à de nombreux entrelacements nommés plexus. Tel paraît être le point central de ce nerf, et c'est dans le lieu même qu'il occupe que se font sentir les vives impressions de la crainte, du désir et de l'espérance. Le grand sympathique lui-même forme, depuis la tête jusqu'aux coccix, une multitude de plexus et 24 ganglions ou petits cerveaux. Voilà tout ce qu'on sait de ce nerf. Mais ❘ s'unissent au cerveau sont croisés, je veux dire on ne connaît précisément ni sa nature, ni sa que le nerf du côté droit provient du côté gaupremière origine, ni ses maladies, ni ses usages. che du cerveau, et réciproquement. Il en résulte On a fait à son occasion beaucoup plus d'hypo- que si le côté droit du cerveau est malade, ce thèses qu'il n'a de ganglions. Si je m'abandon- sont les nerfs qui vont au côté gauche du corps nais à mon tour à faire des conjectures sur ce qui sont affaiblis, irrités ou paralysés: coup de grand réseau nerveux, j'oserais envisager cet sang à gauche, paralysie à droite, et vice versa. ensemble d'anneaux étroitement unis qui le com- 4o Les nerfs sont les premiers formés, les preposent comme le moyen autant que l'image du miers accrus des orgenes; ils sont aussi les premutuel enchaînement des organes, recevant de miers à s'affaiblir. 5o Piquez un nerf, irritez-en ses nerfs et agissant hors du domaine de la la pulpe, aussitôt surviendront des convulsions volonté. Puisque, après avoir soigneusement dans les muscles où s'en distribuent les rameaux. énuméré les viscères dont la solidaire action La même chose se remarque mêmedans un tronconstitue notre existence animale, je trouve çon séparé du corps. En portant le bistouri sur parité de nombre entre eux, et les renflements le trajet des nerfs d'un membre qui vient d'être du grand sympathique, je m'autorise de cela amputé, vous verrez des convulsions effrayantes pour conclure que chacun de ces renflements dans tout le membre séparé: c'est un phénoest un centre d'action, ayant le gouverne- mène qui fait frémir. A la même cause doivent ment exclusif d'un de ces viscères; et je vois être attribuées les convulsions et les grimaces de dans l'ensemble de ces renflements, le lien certains guillotinés. Le docteur Sue eut la stumerveilleux, par qui, de tant d'actes diver- pidité de conclure de pareils faits que les supsifiés, résulte le tout parfait de la vie. Obser- pliciés souffrent encore après leur détroncation. vant ensuite les connexions de ce nerf avec ceux Le cœur continue de palpiter quelques instants de l'épine et du cerveau, je n'hésite plus à le après avoir été séparé d'un corps plein de vie, croire l'agent le plus puissant de ces phéno- et pourtant le cœur est parfaitement insensible. mènes de concomitance qu'on nomme sympa- M. Richerand s'en est assuré dans une opération thies, et je le mets de moitié dans ceux des actes mémorable autant que malheureuse. Harvey fit vitaux qui n'ont point la volonté pour seul mo- toucher à Charles Ier un cœur mis à nu par une bile ni la pensée pour objet. Je lui attribue sans carie du sternum, et le jeune lord qui consentit hésiter l'association des actes de pur instinct à cette épreuve n'accusa aucune douleur. C'est avec ceux dont nous avons la conscience; et, qu'en effet, des contractions et des mouvements plaçant au cerveau le siége de l'âme, lui-même I convulsifs ne sont pas des preuves irrécusables |