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de selles, de harnais et de housses précieuses aux armes du roi, adressées à M. de Vergennes, plénipotentiaire à Coblentz.

Le 20 du même mois, la discussion sur l'émigration s'ouvrit dans l'Assemblée. Plusieurs discours furent prononcés; des orateurs voulaient laisser à chaque Français la liberté de quitter à son gré le sol natal, et repoussaient toute mesure répressive à cet égard; d'autres faisaient sentir la nécessité d'arrêter les progrès d'une désertion qui fournissait des forces aux puissances coalisées prêtes à nous faire la guerre. La discussion fut ajournée et reprise au 25 octobre.

Le 28 de ce mois survint un décret qui ordonne qu'il sera fait dans Paris une proclamation portant réquisition au premier prince français, Louis-François-Stanislas-Xavier, de rentrer, sous un mois, dans le royaume, à peine de déchéance de son droit à la régence. Le 30 du même mois, un autre décret proroge ce délai, et accorde à ce prince deux mois à dater de la proclamation.

Enfin, le 8 novembre 1791, la rédaction définitive du décret contre tous les émigrés fut présentée et adoptée. En voici la substance:

« Les Français rassemblés au-delà des frontières sont déclarés suspects de conjuration contre la patrie. Si, au premier janvier prochain, ils restent encore en état de rassemblement, ils seront déclarés coupables de conjuration, poursuivis comme tels, et punis de mort,

» Les princes français, les fonctionnaires civils et militaires émigrés, seront, au 1er janvier 1792, considérés comme atteints du même crime et passibles de la même peine.

>> Les revenus des conjurés, condamnés par contumace, seront, pendant leur vie, perçus au profit de la nation, sans préjudice des droits des femmes et créanciers légitimes. Dès à présent tous les revenus des princes français seront séquestrés, etc. »

Ce décret contient quelques autres mesures, et notamment la convocation, s'il y a lieu, de la haute-cour nationale dans les premiers jours de janvier.

par

Dans la séance du 12 novembre, les ministres présentèrent à l'Assemblée la liste des décrets sanctionnés le roi. Celui du 30 octobre, qui prononçait la peine de déchéance contre le prince Louis-Stanislas-Xavier, s'il ne rentrait en France au 1er janvier prochain, fut de ce nombre. Mais le roi apposa son veto sur le décret du 8 novembre, qu'on vient de faire connaître. Ce refus de sanction prouva la liberté dont jouissait le roi, et excita des mécontentemens.

Pour en atténuer l'effet, Louis XVI publia, le 12 novembre, une proclamation tendante à ramener les émigrés à leur devoir. Il leur représente que

leur rassemblement au-delà des frontières lui cause un profond chagrin et trouble la tranquillité publique. « On n'a plus le droit d'accuser les trou>>bles de sa patrie, dit-il, lorsque, par une absence

>> concertée et des rassemblemens suspects, on » travaille à entretenir dans son sein l'inquiétude » et l'agitation. Il n'est plus permis de gémir sur >> l'inexécution des lois et sur la faiblesse du gou>> vernement, lorsqu'on donne soi-même l'exemple » de la désobéissance, et qu'on ne veut pas recon>> naître pour obligatoires les volontés réunies de >> la nation et de son roi. >>

Cette proclamation n'atteignit pas le but auquel elle semblait tendre, et ne changea rien au cours des événemens.

Le terme fixé par le décret du 30 octobre pour la rentrée des émigrés étant expiré au 1er janvier 1792, le 2 de ce mois l'Assemblée rendit un décret dont voici les dispositions principales:

Des Français fugitifs ont conçu le projet d'attenter à la liberté de la France; ils ont calomnié cette nation, ses représentans et son roi; ils ont élevé des doutes sur la sincérité de son acceptation de la constitution; ils ont appelé à eux et entraîné dans leur complot d'autres Français; ils ont entamé, avec les puissances étrangères, des négociations et pris des mesures hostiles contre la France; ils se sont procuré à cet effet des armes et des chevaux, ont fomenté des troubles intérieurs, tenté d'ébranler la fidélité des agens du pouvoir exécutif dans plusieurs villes frontières ; ils ont recruté et enrôlé dans l'intérieur de la France, même au nom du roi.... L'Assemblée décrète qu'il y a lieu à accusation contre Louis-Stanislas-Xavier, Charles

Philippe et Louis-Joseph, princes français, et contre N... Calonne, ci-devant contrôleur-général, N... La Queuille, l'aîné, et Grégoire Riquetti, ci-devant députés; qu'ils seront traduits à la haute-cour nationale comme prévenus de crime de haute-trahison contre l'État, etc.

Ce décret, quoique sanctionné le 13 janvier par le roi, étant d'une exécution très-difficile et presque impossible, doit, par cette seule considération, être rangé parmi les lois comminatoires et dangereuses.

Le 9 février 1792 l'Assemblée décréta que les biens des émigrés seraient mis sous les mains de la nation pour l'indemniser des dépenses qu'a nécessitées et que nécessitera leur conduite hostile. Le 13 de ce mois le roi sanctionna ce décret. Plusieurs autres affaires, des troubles sur divers points de la France et des faits dignes de l'histoire fournirent de nombreuses matières aux discussions de la nouvelle Assemblée.

Après l'émigration, l'objet qui fixa le plus son attention fut les troubles résultant du serment des prêtres exigé par la constitution civile du clergé.

L'Assemblée constituante avait permis aux prétres non-conformistes de célébrer l'office divin dans les églises des prêtres assermentés'. Les évêques

'La municipalité de Paris accorda aux prêtres qui avaient refusé le serment et à leurs adhérens, huit églises; celles des Carmélites du faubourg Saint-Jacques, du Val-de-Gráce, des

s'opposèrent à cet accommodement. Ils firent considérer ceux qui avaient prêté serment comme des prêtres intrus et schismatiques, avec lesquels les non-assermentés ne devaient avoir aucune communication; ils ordonnèrent à ces derniers de se procurer des lieux particuliers pour célébrer les offices, de tenir un double registre de naissance, de mariage et de mort, et un troisième registre où ils dresseraient secrètement un procès-verbal de l'institution des curés assermentés, et que, dans ce procès-verbal, ils protesteraient fortement contre les actes de ces curés; ils leur recommandaient principalement d'instruire leurs paroissiens, de manière à les attirer et à les affermir dans leur parti d'opposition.

Les évêques firent répandre en même temps des lettres circulaires et des instructions pour le peuple.

Les prêtres non-assermentés, que leurs partisans nommaient les bons prêtres, se réunissaient dans des lieux secrets, dans des chambres, y prêchaient, y célébraient la messe, y confessaient, y rassemblaient les personnes connues par leur ignorance, leur faiblesse d'esprit et par conséquent par leur crédulité. Là ils posaient en principe que tous les sacremens administrés par les prêtres soumis à la

Filles-de-Sainte-Marie, de Sainte- Aure, des Dames-dela-Providence, des Eudistes, de l'Institution de l'EnfantJésus et des Théatins.

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