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corruption font triompher le crime, les dangers que courent la fortune, la réputation et la vie des hommes de probité. Quand le crime gouverne, la vertu est en péril.

Ils étaient innocens : le peuple insurgé contre eux dans les journées du 2 juin, n'était point les citoyens de Paris; ce n'était point par mécontentement que ce soulèvement s'effectua, mais parce qu'il était organisé et soldé. Les chefs du soulèvement, le comité révolutionnaire de l'Evêché, les dominateurs de la commune et de la Convention payans et payés, instigateurs et instigués, recevaient des mains étrangères des instructions et des finances. Tout ici était un monstrueux tissu de corruption et d'imposture.

Voici ce qu'on lit dans l'ouvrage d'un écrivain dont personne ne contestera la bonne foi:

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« Un illustre émigré, fort lié avec M. Pitt, écri

vait, en juin 1793, de Londres à Munster, à » une princesse émigrée : L'insurrection de mai >> était CONCERTÉE A LONDRES: avec quelques chefs de » plus elle eût réussi; IL FALLAIT NE RIEN LAISSER >> FAIRE DE SOLIDE A CES GENS-LA. Je tiens ce texte » d'un émigré qui a vu, touché et lu cette lettre, » insérée, m'a-t-on dit, dans le Journal d'écono>> mie publique de M. Roederer'. »

Constitutions de la Nation française, par M. le comte Lanjuinais, pair de France, etc., tome Ier, page 44.

En rapprochant cette phrase des extraits de la lettre d'un

Voilà les véritables auteurs des crimes que, par ignorance ou perfidie, on ne cesse d'attribuer à la révolution : la mémoire de ceux qui commandaient, payaient et exécutaient ces crimes, doit seule en porter l'infamie.

Les directeurs des troubles et leurs agens en France ne se bornèrent pas à produire des révoltes dans Paris, ne se bornèrent pas à dénaturer et avilir le gouvernement dont cette ville était le siége; dans plusieurs autres lieux et en même temps, ils allumèrent, ils attisèrent les feux de la guerre civile.

Les armées des insurgés de la Vendée et autres départemens voisins, secourues par l'Angleterre, renforcées par des bataillons d'émigrés débarqués sur les côtes de la Bretagne, firent des progrès rapides, eurent des succès extraordinaires. Le 9 juin elles s'emparèrent de Saumur, et peu de jours après des villes de la Flèche et d'Angers.

L'armée du Nord, forcée de lever son camp de Famars, s'était repliée sur Sezanne et avait abandonné à leurs propres forces les places de Valenciennes, de Lille, du Quesnoy et de Maubeuge.

A Lyon, la guerre civile était permanente : le département et la municipalité, fortifiés de leurs partisans respectifs, ne cessaient d'être aux prises. A cette

agent de l'Angleterre, extraits que j'ai donnés, page 352 de ce volume, on jugera quels étaient les projets de la politique anglaise.

époque, la fureur des deux partis redoubla, ils s'attaquèrent avez un nouvel acharnement, surtout dans la journée du 29 mai.

Les partisans du département, attirés sur la place des Terreaux, y furent foudroyés par la mitraille de huit pièces de canon qui firent tomber plus de trois cents hommes. Cependant cet échec redoubla le courage de ceux qui l'éprouvèrent; ils firent le siége de la maison commune, et, après une attaque qui dura, sans interruption, depuis cinq jusqu'à huit heures du soir, ils s'en emparèrent ainsi que du maire et de Challier. L'anarchie avait triomphé à Paris, elle parut succomber dans Lyon.

La lettre qui contient ces détails, prouve qu'il existait un plan concerté, dont l'objet consistait à causer, à la même époque, de grands désordres dans plusieurs lieux de la France. Cette lettre, datée de Lyon, du 31 mai, contient cette phrase: « On nous annonça hier qu'un courrier apportait » pour nouvelles qu'il en était arrivé autant à » Paris. Ce qui nous le fait croire, c'est qu'on a » saisi entre les mains d'un de ces malheureux, >> une correspondance qui annonçait que, le 30, le » même événement devait avoir lieu dans les grandes villes '. >>

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Mais le parti du département, qui combattait contre celui de la municipalité, agissait sous les

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Thermomètre du jour, no 522, page 547.

couleurs de la modération d'après la direction d'une faction étrangère. Nos ennemis cachés, ennemis de tous les partis, n'aspiraient qu'à mettre les patriotes aux prises contre les patriotes, à les exciter à s'entredétruire, afin d'en épuiser la ville de Lyon et la France 1.

D'autres mouvemens coïncidèrent avec ceux de Lyon et de Paris. Vers les derniers jours de mai, un nommé Marc-Antoine Charrier, avocat, exmembre de l'Assemblée constituante, demeurant à Mende, parvint avec des instructions et de l'argent, venus du dehors, à soulever environ deux mille paysans du département de la Lozère, et, avec cette force, à s'emparer des villes de Marvejols et de Mende. Cette levée de bouclier, fut, dans la séance du 1er juin, dénoncée à la Convention qui prit des mesures pour en arrêter les progrès. Les départemens voisins, envoyèrent des forces contre les insurgés. Charrier obtint quelques avantages sur elles; mais bientôt il succomba sous le nombre de ses ennemis; il fut, le 4 juin, pris avec son aide-de-camp Laporte, et conduit dans les prisons de Rodez. Le 7 juin, il promit de déclarer

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«

Biroteau, mon collègue....., me dit, peu de jours avant » sa mort, qu'étant allé à Lyon, ainsi que Chasset, dans la persuasion que cette ville n'armait que pour la liberté, ils

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» d'autres vues, et qu'en conséquence, ils s'étaient tous » deux empressés d'en sortir.» (Mémoires de Meillan, pag. 73, 74. (Collect. B. F.)

ses complices et adhérens, et de faire des révéla→ tions importantes, si on lui accordait sa grâce. La Convention envoya des commissaires pour recevoir ces déclarations; mais il refusa de les faire lorsqu'il apprit que sa demande en grâce était rejetée. Toutefois, inquiet sur le sort de sa femme et de ses enfans, il prit la résolution de transmettre par écrit quelques aveux; voici ceux qui ont été publiés : « M. le duc de Bourbon devait venir >> commander en chef dans les provinces méri>> dionales, et amener avec lui assez d'officiers généraux pour se mettre à la tête de chaque parti qui se présenterait. J'ignore si aucun de ces principaux agens sont en France; mais je >> pense qu'il doit y avoir quelqu'un; au surplus » il m'avait dit qu'à l'époque de mon soulève» ment, le principal chef ou un de ses pre>> miers agens devait arriver dans une ville fran» çaise. »

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Ensuite, il déclara verbalement que la correspondance des émigrés ne passait plus à Lyon depuis un mois avant son arrestation, qu'actuellement `elle venait par l'Auvergne, du côté de Riom;

Que le secrétaire du ci-devant prince lui avait assuré qu'il avait été employé par ledit prince et autres émigrés, deux cents millions, pour faire déclarer par la France la guerre à l'Allemagne; que les ennemis armés contre la république comptaient beaucoup sur des secours en argent qui leur viendraient du côté de Bordeaux. Il ajoute les noms de

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