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tre leur gré qu'on y avait inséré des expressions impérieuses et outrageantes; loin de vouloir dissoudre la Convention comme on a paru le craindre, loin de la menacer, nous la défendrons, disentils, et lui ferons un rempart de nos corps. Nous demandons une nouvelle lecture de cette pétition afin de pouvoir avouer les phrases qui sont conformes à notre intention, et désavouer celles qui lui sont contraires.

C'est par ces moyens frauduleux que les conspirateurs, pour fortifier leurs complots, dénaturaient les sentimens des Parisiens.

Si l'on excepte les mouvemens des 6,7 et 8 mai, mouvemens sans conséquence, occasionés par le recrutement des jeunes gens, la plus grande partie de ce mois fut assez calme; cependant les conspirateurs ourdissaient alors de nouvelles trames.

Danton, Robespierre, Pache, etc., tenaient à Charenton des conciliabules secrets, et y arrêtèrent le plan d'une attaqué contre la majorité de la Convention. On y discuta, dit-on, la proposition de relever le trône des Bourbons et d'y placer le fils de Louis XVI; mais il paraît qu'elle n'eut pas de suite. Là se trouvait un homme aspirant au pouvoir suprême et peu disposé à s'en dessaisir lorsqu'il l'aurait obtenu. Les conjurés mirent dans leurs secrets quelques militaires supérieurs et les chargèrent de l'exécution'.

Le député Cambon, dans la séance du 12 vendémiaire,

Une réunion d'autres conspirateurs, composée de Desfieux, Proly, Péreyra, Dubuisson, des deux frères Frey, de Gusman, etc., etc., presque tous étrangers et tous agens des puissances ennemies, avaient résolu de tuer brusquement et sans distinction tous les membres de la Convention; mais cette réunion n'avait pas assez de prépondérance politique pour obtenir des succès.

L'autre réunion, composée d'hommes connus, de fonctionnaires publics, de députés, plus exercés, plus habiles, devait exercer plus d'empire sur les esprits.

Voici quel fut le commencement d'exécution du plan résolu à Charenton.

le

Le 13 mai, la commune de Paris arrêta que, 16 de ce mois, à dix heures du matin, il serait tenu, dans la salle de l'Évêché, une assemblée composée des quarante-huit présidens des sections et de quarante-huit commissaires, choisis par les assemblées générales des sections, parmi les membres composant les comités révolutionnaires. L'objet patent de cette réunion consistait dans le dépôt et la discussion des listes de suspects et de listes d'habitans, qui, dans chaque section, jouissaient de la plus grande fortune.

res

De cette assemblée de présidens, de commissairévolutionnaires, sortit un petit nombre

an III (4 octobre 1795) dévoila le secret de ces conciliabules.

d'hommes dévoués aux conspirateurs, auxquels se joignit aussi le noyau d'agens de l'étranger dont je viens de parler; ils formèrent ensemble le comité central d'insurrection. Ce comité, entièrement composé d'étrangers ou de Français diffamés, qui tenait ses séances à l'Évêché, correspondait avec tous les comités révolutionnaires des sections de Paris, les inspirait, les dirigeait.

Il se forma aussi, en même temps, une autre réunion qui tenait ses séances à la Mairie, et que présidait le maire de Paris, le fameux Pache.

Ces deux réunions, quoique animées par des motifs et des intérêts différens, s'accordaient pour opérer un changement dans l'Assemblée conventionnelle; mais l'une voulait faire disparaître un certain nombre de députés qui la gênaient, et s'emparer du gouvernement; l'autre voulait entièrement détruire le gouvernement, afin de livrer la France aux ennemis. Les projets de ces deux factions sont révélés par leurs actes, et leur secret fut dévoilé par les événemens qui suivirent.

La faction de l'évêché, ou le comité central d'insurrection, envoya dans la plupart des départemens des émissaires chargés d'y annoncer que la Convention était dissoute, et que ses membres avaient péri. Cette annonce prouve les espérances et les voeux de cette faction. Dans les sociétés ou les · sections de Paris, ses émissaires faisaient des propositions tendant au même but. Voici, d'après les renseignemens recueillis par la commission des

douze', quelques traits qui caractérisent les projets du comité central de l'Évêché.

Dans le comité révolutionnaire de la section du Temple, et dans la soirée du 19 mai, un des émissaires du comité central proposa, « comme mesure >> de salut public, de faire enlever, dans une nuit qui >> serait indiquée et à la même heure, trente-deux » membres de la Convention, et tous les citoyens » suspects des sections, dont la liste serait remise » par les comités révolutionnaires; qu'ils seraient >> tous conduits aux Carmes près le Luxembourg, » et que là on les ferait disparaître du globe;.... » qu'on ferait passer tous ces individus pour émigrés, et que, pour accréditer ce bruit, on avait . » une très-grande quantité de pièces contre lesdits >> membres...., qui justifieront que la crainte d'être » découverts les avait fait émigrer. »

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Sept à huit membres de ce comité parlèrent dans ce sens; un citoyen qui prenait des notes, ainsi qu'un autre qui se récria contre l'illégalité de ce projet, furent chassés de ce comité comme suspects.

Dans la séance de la mairie, tenue le 20 mai, les mêmes propositions furent faites. Quelques membres les combattirent; mais un d'eux se leva et dit : Donnez-moi un pouvoir, et, armé de mon poi

La commission des douze fut, vers le 14 mai, établie pour rechercher les complots tramés contre la sûreté et la liberté de la Convention nationale.

T. II.

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gnard, je servirai de bourreau. Des membres indignés invitèrent le maire à ordonner à cet homme de se retirer. Plusieurs autres dirent qu'ils n'eutendaient prendre aucune part à la proposition de la veille qui leur paraissait horrible; enfin le maire déclara que si l'on traitait encore ces matières il lèverait la séance. En effet, il fut arrêté qu'on regarderait la proposition de la veille comme non

avenue.

On voit ici la différence qui se trouvait entre les deux systèmes d'attaque; suivant l'un, sans autres formes, on devait frapper à coups de poignards; suivant l'autre, on devait, avec des formes, frapper à coups de guillotine.

Des émissaires du comité central d'insurrection mal accueillis dans l'assemblée de la mairie, se portèrent au club des Cordeliers. Là ils proposérent des mesures plus violentes encore. Les uns demandaient une réunion de sans-culottes dans une place de Paris, pour de-là porter une adresse à la Convention, avec injonction de ne point désemparer sans avoir obtenu l'objet de leur demande.

Le fameux Varlet, un des émissaires, se présenta avec un arrêté en quinze articles, dans lesquels il demandait l'enlèvement des députés de la plaine (la majorité), celui des autres députés des Assemblées constituante et législative, l'enlèvement des nobles, des prêtres, des robins, etc., et leur extermination ; la suppression entière des ministres, le licenciement

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